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CHAPITRE I. REVUE DE LITTÉRATURE

5. Utilisation des antimicrobiens chez la volaille et développement des résistances chez les

5.2 Résistance antimicrobienne chez les E coli aviaires

5.2.5 Rôle des plasmides dans la virulence et la résistance antimicrobienne des APEC

Les plasmides sont des éléments génétiques, constitués d’ADN bicaténaire extrachromosomique, circulaire, dotés d’une autonomie de réplication. Ces éléments génétiques qui peuvent être échangés entre des bactéries de même espèce ou d’espèces différentes augmentent considérablement la diversité génétique et permettent aux bactéries de s’adapter à un nouvel environnement. Lorsqu’une bactérie les acquiert, elle les transmet de façon stable aux générations suivantes. Guillot (12) leur reconnaît quatre propriétés essentielles que sont i) leur petite taille (de 1 à 400 kb), ii) leur réplication autonome assurant la répartition égale des copies dans les cellules-filles, iii) la possibilité de leur transfert entre bactéries de la même espèce ou d’espèces différentes et iv) leur incompatibilité permettant leur classification en groupes d’incompatibilité. Le concept d’incompatibilité de ces plasmides est basé sur le fait que deux plasmides de même groupe sont incompatibles dans une même cellule. Autrement dit, lorsqu’on transfère un plasmide de groupe d’incompatibilité inconnu à une bactérie possédant un plasmide de groupe connu et qu’à la prochaine génération le plasmide résident est éliminé, le plasmide entrant se voit attribuer le groupe du plasmide éliminé (259). L’incompatibilité des plasmides est ainsi liée aux gènes inc et se traduit par l’incapacité ou non pour deux plasmides de coexister dans une même cellule selon qu’ils portent ou non les mêmes gènes inc. Il existe trois modalités de transfert d’ADN (Figure 5) (260): i) la transformation, ii) la transduction et iii) le transfert conjugatif.

61 Figure 5. Modalités de transfert horizontal de gènes. Avec permission (260).

- La transformation : elle implique la lyse cellulaire et la libération de l’ADN dans le milieu extérieur qui peut être récupéré et intégré dans le chromosome ou le plasmide d’une cellule vivante;

- La transduction : elle implique un bactériophage qui, en infectant une bactérie, lui transfère son matériel génétique qui peut s’intégrer dans le chromosome bactérien; - La conjugaison : elle fait intervenir les pili sexuels des deux bactéries permettant un

échange de matériel génétique.

b) Rôle des plasmides dans la virulence et la résistance antimicrobienne

La presque totalité des résistances antimicrobiennes sont codées par des gènes plasmidiques (12). Pour certains de ces plasmides, on note en leur sein, la coexistence de gènes de virulence

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et des gènes de résistance antimicrobienne. Le plasmide de résistance antimicrobienne le plus connu est le plasmide R qui code pour la résistance à plusieurs familles d’antibiotiques à la fois (12, 261). pCVM29188_146 (porteur des gènes d’antibiorésistance strAB et tetRA) et pCVM29188_101 (porteur des gènes d’antibiorésistance blaCMY-2 et sugE) sont deux plasmides isolés d’une souche de Salmonella Kentucky. Ils sont génétiquement proches des plasmides d’APEC pAPEC1, pAPEC-O1-ColBM et pAPEC-O2-ColV et possèdent à la fois un îlot de pathogénicité (où sont portés les gènes de virulence) et un autre porteur de gènes de résistance antimicrobienne (262). En outre, par conjugaison, des phénotypes de résistance ont été transférés avec succès d’une S. Kentucky à une souche de E. coli sensible. Le plasmide pAPECO103-ColBM est également un exemple de plasmide porteur à la fois, d’un îlot de pathogénicité et d’un autre îlot codant pour des gènes de résistance antimicrobienne (263). Un fragment de 30 kb du plasmide pTJ100 a fait l’objet d’un séquençage (264). Cette analyse a révélé qu’il contient une mosaïque de gènes de virulence, des séquences d’insertions et des gènes codant pour la résistance aux métaux lourds (silP), aux tétracyclines (tetA), aux aminoglycosides (aadA4 et aadB), au chloramphénicol (catB), aux composés d’ammonium quaternaire (qacEΔ1), aux sulfonamides (sulI) et aux béta-lactamines (bla). Aussi, il y aurait une potentielle corrélation entre la virulence des souches de E. coli et leur potentiel de résistance antimicrobienne puisque l’îlot de pathogénicité des plasmides ColV est un moyen de sélection des souches hautement virulentes par l’utilisation des antimicrobiens (263). Un autre plasmide de 76635 kb portant quatre gènes de résistance antimicrobienne rmtB, foA3,

blaTEM-1 et blaCTX-M-24, codant respectivement pour la résistance aux aminoglycosides, à la fosfomycine, à l’ampicilline et au ceftriaxone a été identifié chez des souches APEC impliquées dans les colibacilloses du poulet (265). Ce fut la première fois qu’un plasmide de résistance aux aminoglycosides est porteur du gène foA3. Plus récemment, une région contenant les gènes blaCTX-M-65, fosA3 et rmtB a été découverte sur le plasmide d’incompatibilité incFII de la souche aviaire ST117 isolée d’un poulet (266). De manière générale, les plasmides des groupes d’incompatibilité sont connus pour leur richesse en déterminants génétiques de résistance antimicrobienne. Ils sont porteurs de la plupart des gènes codant pour les ESBLs/AmpC, particulièrement les plasmides I1, N, A/C and P/F, et I1-

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γ (267). De ce fait, leur typage constitue un excellent moyen pour faire leur suivi épidémiologique (268).

Chez les APEC, plusieurs grands plasmides sont impliqués dans la virulence. Par conséquent, leur acquisition ou leur perte par une souche peut profondément modifier la virulence de celle-ci. Wooley et al. (269) ont démontré que l’acquisition d’un plasmide de virulence de 56 kb par la souche avirulente de E. coli DH5α la rendait virulente. Grâce à l’acquisition de ce plasmide, le taux de létalité embryonnaire de la souche chez le poulet passait de 0% à 45%. De même, le rôle déterminant des plasmides pAPEC-1 (103 kb), pAPEC (90 kb) et pAPEC-3 (60 kb) dans la virulence des APEC a été établi par Mellata et al. (270). L’élimination de ces trois plasmides chez une souche virulente entraîne une réduction significative de sa virulence. Inversement, leur introduction dans le génome de la souche commensale K-12 la rendait très virulente puisque ces trois plasmides rassemblent au total 16 gènes de virulence. Certains plasmides des groupes d’incompatibilité ont également un réel rôle dans la virulence des E.

coli (263). Par ordre d’importance, il s’agit des plasmides IncFIB, IncI1, IncFIIA, incP,

incB/O, IncN et IncFIC (271).

Les plasmides IncA/C, IncFIB, IncFIC, IncI1, and IncHI2 sont plus fréquemment trouvés chez les APEC isolés des cas de cellulites tandis que ceux impliqués dans des cas de septicémie sont plutôt porteurs du plasmide incB/O. En plus de ces plasmides, ColV (272) et ColBM (263) comptent parmi les plasmides qui contribuent dans la virulence des APEC. ColV est un plasmide de 80 à 180 kb (273) et son séquençage complet chez la souche APEC O2 (plasmide pAPEC-O2-colV) (274) a mis en exergue une région de 93 kb où de nombreux gènes codant pour des facteurs de virulence sont localisés. De plus, ce séquençage a révélé la présence d’une région dédiée à la virulence qui peut être divisée en deux parties. La première est une partie dite ‘conservée’ qui s’étend, sur la carte, des gènes sitA à cvaB et dont les gènes ont été confirmés chez plus de 67% des isolats. La deuxième partie, comprise entre les gènes

cvaB et eitA, est qualifiée de variable parce que les gènes qui s’y trouvent sont moins

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5.2.6 Résistance aux antimicrobiens des E. coli aviaires et risque encouru par les

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