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Identification et quantification du BC

2.1.2.4. Rôle des NAPL dans la sorption des COH

De nombreux travaux menés dans les années 90 ont mis en évidence l’importance des phases liquides non aqueuses (NAPL) dans le transport des HAP (Först et al., 1990 ; Först et al., 1993) et dans le transport des PCB (Sun et Boyd, 1991). Les fractions huileuses (hydrocarbures totaux) montrent de grandes capacités de sorption, similaires, voire supérieures, en ce qui concerne les HAP et les PCB, à celles observées pour le BC (Jonker et al., 2003 ; Cornelissen et al., 2005a et b ; McNamara et al., 2005 ; Jonker et Barendregt, 2006). Ainsi, ces matrices carbonées peuvent servir de réservoirs de sorption supplémentaires et non négligeables pour les COH (Jonker et al., 2003).

Sur ce thème, les recherches ont débuté sur des sols historiquement ou artificiellement contaminés. Ces études ont montré que le coefficient de partage des COH dans des hydrocarbures récents est comparable aux coefficients de partage avec l’octanol (Jonker et al., 2003). Par ailleurs, la présence d’hydrocarbures récents (« fresh oil ») augmenterait la solubilité des COH dans l’eau par effet de co-solvatation (Walter et al., 2000).

En revanche, des phases d’hydrocarbures vieillies (« weathered oil ») que l’on rencontre au niveau de sites historiquement contaminés, se comporteraient comme une phase de sorption additionnelle, réduisant la concentration en COH dans les eaux interstitielles et par la même, leur (bio)disponibilité et donc leur biodégradabilité (Sun et Bloyd, 1991 ; Ghosh et al., 2000a et b). La différence de comportement entre des hydrocarbures récents et maturés (vieillis) est liée au fait que les composés les moins récalcitrants ont été dégradés et/ou lixiviés et qu’il ne reste que la partie la plus résistante à la dégradation. Cette fraction, insoluble, est nommée UCM « Unresolved Complex Mixture » ou massif de composés non résolus , qui fait référence à la technique d’analyse utilisée (chromatographie phase gazeuse) (Frysinger et al., 2003). Les hydrocarbures résiduels peuvent être caractérisés comme très résistants à la dégradation et se présentant sous la forme de complexes, composés de milliers de molécules avec une prédominance de composés à hauts poids moléculaires tels que : des alcanes ramifiés, cycloalcanes, HAP, napthéno aromatiques et présentant un fort caractère hydrophobe (Frysinger et al., 2003). Selon Trindade et al (2005), les hydrocarbures vieillis sont principalement composés de chaînes carbonées supérieures à C25 qui ne peuvent être dégradées par les microorganismes endogènes. Egalement, il a été suggéré que les hydrocarbures agissaient à la fois ;

- comme un « plastifiant » qui est un agent de gonflement naturel, permettant d’augmenter les sites de sorption pour les COH (Zemanek et al., 1997) ;

57 - mais également comme « compétiteur » pour l’occupation potentielle des sites de sorption des

COH (Cornelissen et al., 1999).

Très peu d’études ont ciblé le comportement de sorption des COH lié à la présence d’hydrocarbures dans les sédiments. Trois études principales font référence (Jonker et al., 2003 ; McNamara et al., 2005 ; Jonker et Barendregt, 2006). L’influence des hydrocarbures sur la sorption des COH est principalement liée à la concentration et à l’état de vieillissement des hydrocarbures (Jonker et

al.,2003 ; McNamara et al., 2005). Le type d’hydrocarbure ne semblerait pas affecter les valeurs de

Koil (coefficient de partage entre les hydrocarbures et l’eau). Des études réalisées par Jonker et al. (2003) et Jonker et Barendregt (2006) ont utilisé des hydrocarbures de composition et de viscosité différentes sans montrer de différence réellement significative. En d’autres termes, la nature de la fraction d’hydrocarbure (FH) ne semble pas influencer la sorption des COH. Ceci implique que (i) la sorption des COH sur la FH ne serait pas contrôlée par les propriétés physico-chimiques de celle-ci ou bien (ii) que les propriétés physico-chimiques des hydrocarbures ne diffèrent pas suffisamment pour affecter leur comportement de sorption (Jonker et Barendregt, 2006). Que ce soit sur des FH récentes ou vieillies, la sorption des congénères de PCB reste proportionnelle à leur caractère hydrophobe. En revanche, cette tendance ne se vérifie pas pour les HAP. En effet, sur des FH vieillies, la sorption des HAP semble être indépendante du caractère hydrophobe des composés, présentant une valeur unitaire du log Koil de 7 +/- 0,24 (Jonker et al., 2003).

Effet du vieillissement sur la sorption des COH. L’influence du caractère hydrophobe des COH tend à diminuer avec le vieillissement de la FH. Ainsi Jonker et Barendregt (2006) présentent des valeurs de log Koil plus élevés pour des hydrocarbures vieillis. Dans l'ensemble, bien que beaucoup moins prononcés, les effets du vieillissement sur la sorption des PCB aux FH sédimentaires sembleraient être à peu près analogues à la situation observée pour les HAP, soit une augmentation nette de sorption pour les congénères moins hydrophobes et faible pour les congénères les plus hydrophobes (Jonker et Barendregt, 2006). Pour les HAP, le vieillissement entraînerait une forte augmentation des valeurs Koil, seulement pour les composés à faible poids moléculaire, provoquant une diminution considérable de la pente de la courbe log Koil-log Kow (Jonker et al., 2003). Les HAP avec des faibles poids moléculaires (3 et 4 cycles aromatiques) ont de très grandes affinités avec les hydrocarbures vieillis tandis que les hauts poids moléculaires (5 à 6 cycles aromatiques) vont avoir des affinités similaires à celles montrées avec la MO ou l’octanol (Jonker et al., 2003).

Ajout d’un autre domaine de sorption fonction de la concentration des hydrocarbures. A de faibles concentrations en hydrocarbures, la sorption des composés HAP et PCB est constante, mais au-dessus d'environ 1000 mg d’HCT.kg-1 de sédiments, la pente de la relation log Kd=f(log Coil) augmente

58 (Jonker et al., 2003 ; Jonker et Barendregt, 2006). Selon ces auteurs, au-dessus de ce seuil, les hydrocarbures commencent à former des phases séparées (gouttelettes, films). Ainsi au-dessus de cette concentration que l’on appelle CSPC « Critic Separate Phase Concentration », les hydrocarbures vont se comporter comme un sorbant additionnel qui joue un rôle important dans la sorption des composés hydrophobes. En dessous de cette concentration (CSPC), la FH s’adsorbe sur la matière organo-minérale du sédiment. Ainsi, les hydrocarbures présents dans la matrice entrent en compétition avec les sites de sorption des HAP et des PCB, ce qui pourrait expliquer des valeurs de Kd plus faibles pour les PCB lorsqu’on observe des concentrations en hydrocarbures de l’ordre de 300 mg.kg-1

(Jonker et Barendregt, 2006). Sun et Bloyd (1991) ont déduit une CSPC de 1000 mg d’hydrocarbures.kg-1 de sol tandis que De Jonge et al. (1997) atteins la CSPC pour 4000 mg d’hydrocarbures.kg-1 de sol. La valeur de la CSPC dépendrait de la teneur en matière organique, mais également de la nature de la matière organique (Sun et Bloyd, 1991). La phase additionnelle se forme lorsque tous les sites de la MO sont saturés par les hydrocarbures. Jonker et al (2003) proposent de fait de normaliser la CSPC en fonction de la teneur en carbone organique et de définir la CSPC de 10 à 30%. Ainsi, en dessous de la CSPC, la FH peut se sorber sur le matériel (sol, sédiment). En revanche, pour un taux d’hydrocarbures totaux supérieur à la CSPC, les hydrocarbures agiraient comme une nouvelle phase de sorption (Jonker et al., 2003). Cette valeur de CSPC a été déterminée à partir d’un faible nombre de données issues de trois publications et principalement acquises pour des sédiments dopés avec de faibles teneurs en MO (<1 %). De plus, la présence d’une phase de sorption additionnelle liée aux hydrocarbures serait fonction de la concentration des FH, mais également de la qualité et de la quantité de la MO (Sun et Bloyd, 1991). Les valeurs de CSPC pourraient ainsi varier d’un sédiment à l’autre.

Pour une même valeur de Kow, les PCB montrent une plus grande affinité pour la FH que les HAP. De plus, les PCB auraient une affinité plus grande pour la phase d’hydrocarbures que pour les différents types de matière carbonée condensée (charbon, suie, goudron de houille), mais inférieure à celle du charbon de bois (Jonker et Barendregt, 2006), qualifiant ainsi la FH comme supersorbant (Schaefer, 2001 ; Cornelissen et al., 2005b). McNamara et al. (2005) ont étudié quatre sédiments historiquement contaminés et ils supposent que la quantité de PCB associée aux hydrocarbures résiduels est 10 fois plus importante que la quantité de PCB liée à la matière organique condensée. Ce constat est également valable pour les HAP de nature non pyrogène (c'est-à-dire pétrogénique). Les Koil

correspondants sont supérieurs aux valeurs des KBC obtenues sur des phases pures. En revanche, les HAP pyrogènes seront probablement plus fortement liés aux produits de combustion (phase porteuse) de type suie et charbon de bois, en liaison avec leur processus de formation.

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