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Rôle de LMX1B dans le développement

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CHAPITRE III : POLARISATION DORSO-VENTRALE DU MEMBRE

III. Modèle d’étude : le Syndrome Nail-Patella

III.3 La protéine LMX1B

III.3.1 Rôle de LMX1B dans le développement

L’étude de la fonction de LMX1B au cours du développement a été facilitée par l’utilisation du modèle murin knock-out homozygote. Ces souris présentent un phénotype

sévère avec décès au premier jour de vie. Contrairement à ce qui est observé chez l’homme, les souris hétérozygotes ont un phénotype normal (Chen et al., 1998a).

III.3.1.1 Développement squelettique

LMX1B est exprimé dans le mésenchyme dorsal du bourgeon de membre chez les

vertébrés et joue un rôle crucial dans l’établissement de l’axe dorso-ventral (Figure 32). Son expression est induite par WNT7A qui est sécrété par l’ectoderme dorsal du bourgeon de membre (Riddle et al., 1995; Vogel et al., 1995). Une fois l’axe dorso-ventral établi, LMX1B active l’expression de nombreux gènes à action dorsalisante et inhibe l’expression des gènes à action ventralisante, devenant le principal orchestrateur du développement des structures dorsales telles que les ongles, les follicules pileux et les muscles extenseurs (Chen et al., 1998a). Les effecteurs d’aval de la polarisation dorso-ventrale sont encore mal connus. Des études en puces d’expression des bourgeons de membres isolés d’embryons murins knock-out pour Lmx1b ont permis d’identifier plusieurs centaines de candidats potentiels, présentant une expression différentielle chez les embryons sauvages (Feenstra et al., 2012; Krawchuk and Kania, 2008).

Chez la souris, Lmx1b est exprimé à partir du stade E8.5 dans la plaque mésodermique latérale (Cygan et al., 1997). Cette expression est restreinte au mésenchyme dorsal du bourgeon de membre, puis aux régions dorsales des articulations ainsi qu’aux tendons et ligaments, jusqu’au stade E18.5 où elle n’est plus détectée (Dreyer et al., 2000). Aucune expression n’est mise en évidence durant le développement musculaire (Dreyer et al., 2004; Schweizer et al., 2004).

Figure 32 : Expression de Lmx1b dans le bourgeon de membre supérieur.

Stade 13.5 de développement chez la souris.

A : Coloration à l’hématoxyline-éosine d’une section embryonnaire montrant une répartition homogène du mésoderme dans l’axe dorso-ventral (D/V) du bourgeon de membre.

B : Hybridation in situ montrant la restriction de l’expression de Lmx1b au niveau du mésoderme dorsal (en rouge). D’après Dreyer et al., 2004.

Les anomalies des membres observées chez la souris KO pour Lmx1b sont plus sévères que le phénotype humain, avec une absence d’ongle et de rotule (Chen et al., 1998a).

De plus, on note au niveau des membres un phénotype « double-ventral », le dos de la patte étant une reproduction en miroir de ses structures ventrales (Figure 33). Les anomalies proximales sont plus difficiles à caractériser : absence de la partie distale de l’ulna, hypoplasie de la scapula et anomalies des clavicules. Ces anomalies reflètent les territoires d’expression de Lmx1b au niveau du mésenchyme dorsal du bourgeon de membre et sont compatibles avec un défaut de polarisation dorso-ventrale (Chen et al., 1998a; Chen et al., 1998b; Cygan et al., 1997; Dreyer et al., 2000).

Figure 33 : Perte de la polarisation dorso- ventrale des membres chez la souris KO LMX1B.

Photographies de l’extrémité du membre supérieur au stade de développement E16.5. C- E : souris sauvage ; F-G : souris KO LMX1B. C,F : vue dorsale ; D,G : vue ventrale ; E,H : vue latérale. Mise en évidence d’une absence de structures dorsales (follicules pileux) et de la présence de structures ventrales (coussinets, fp foot pad) chez la souris KO. D’après Chen et al., 1998a.

De plus, la perte d’expression de Lmx1b est responsable d’une altération de la migration des axones moteurs de la corne latérale de la moelle épinière (Kania et al., 2000). Normalement, les axones se divisent à la base du membre pour former des contingents médial et latéral migrant au niveau des structures ventrales et dorsales respectivement. En l’absence de Lmx1b, la migration de ces axones est aléatoire. Comme Lmx1b n’est pas exprimé dans les colonnes motrices de la moelle épinière, ce phénotype est probablement dû à la perte de l’identité dorsale dans le bourgeon de membre résultant en l’expression aberrante des molécules de guidance dirigeant l’innervation des axones (Kania and Jessell, 2003; Kania et al., 2000).

En plus des anomalies squelettiques des membres, les souris KO pour Lmx1b présentent des anomalies du crâne avec une hypoplasie ou une absence d’os supraoccipital et interpariétal ainsi qu’une anomalie des sutures (Chen et al., 1998a). Lmx1b est exprimé dans le neuroépithélium sous-jacent et dans le mésenchyme contribuant à la formation de la voûte crânienne. En revanche, aucune anomalie du crâne n’a été décrite chez les patients NPS, ce

qui est concordant avec la faible expression relative de LMX1B dans cette structure. Les mécanismes moléculaires expliquant ces anomalies sont mal connus.

III.3.1.2 Développement du rein

L’expression de Lmx1b est détectée précocement au cours du développement rénal chez la souris, dès E13.5, au niveau des corps en s qui vont former les glomérules. Elle est ensuite détectable au niveau de l’épithélium du glomérule à partir de E14.5, et persiste durant la vie postnatale (Chen et al., 1998a; Morello et al., 2001).

Les souris KO pour Lmx1b décèdent quelques heures après la naissance en raison d’une néphropathie sévère, confirmant le rôle essentiel de ce gène dans le développement rénal. Le phénotype histologique rénal de ces souris est similaire aux anomalies décrites chez les patients NPS. On observe un épaississement de la membrane basale glomérulaire, une fusion des pieds des podocytes (Chen et al., 1998a; Morello et al., 2001). Des défauts dans la différenciation des podocytes sont également observés (Rohr et al., 2002). Des expériences de knock-ouk conditionnel ont montré que Lmx1b est nécessaire à la différenciation initiale et au maintien des podocytes (Burghardt et al., 2013; Suleiman et al., 2007).

L’absence de Lmx1b résulte en la dérégulation de l’expression de ses nombreuses cibles, jouant un rôle dans la formation de la barrière de filtration : les collagènes alpha 3(IV) et alpha4(IV), la podocine, Cd2ap et la néphrine (Miner et al., 2002; Morello et al., 2001; Rohr et al., 2002).

III.3.1.3 Développement de l’oeil

L’expression de Lmx1b au cours du développement de l’œil est détectée au niveau du mésenchyme périoculaire, à l’origine de la sclère et de la cornée, et également au niveau de la chambre antérieure. Les souris knock-out ne présentent pas d’anomalie de la sclère, en revanche une expression anormale du kératocane et une fibrillogenèse anormale du collagène sont décrites au niveau de la cornée (Pressman et al., 2000). De plus, ont note des anomalies de la chambre antérieure avec un iris et des corps ciliaires hypoplasiques (Pressman et al., 2000).

III.3.1.4 Développement du système nerveux central

Lmx1b est impliqué dans le développement et la fonction cérébrale. Son expression est

restreinte à l’isthme à partir de E9.0 (Guo et al., 2007). L’isthme est un centre organisateur du développement au niveau du tube neural, permettant la séparation du mésencéphale et du rhombencéphale. Lmx1B est essentiel à son induction (Adams et al., 2000; Guo et al., 2007; Matsunaga et al., 2002; O'Hara et al., 2005). Chez les souris KO, il n’y a pas d’expression des facteurs de transcription de l’isthme, causant une hypoplasie sévère du tectum et du cervelet (Guo et al., 2007). A l’inverse, l’expression ectopique de Lmx1b chez l’embryon de poulet est responsable d’une hypertrophie de ces structures (Adams et al., 2000; Matsunaga et al., 2002). De plus, Lmx1b est nécessaire au développement du système dopaminergique mésencéphalique (Asbreuk et al., 2002; Smidt et al., 2000), des neurones sérotoninergiques du rhombencéphale (Cheng et al., 2003; Ding et al., 2003). A l’âge adulte, les neurones exprimant Lmx1b sont localisés dans la région dorsale de la moelle épinière et participent à la signalisation de la douleur (Ding et al., 2004).

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