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2. Le cancer colorectal

2.5. Rôle de la flore digestive dans l’initiation ou la promotion du cancer du côlon

2.5.1. Flore commensale et inflammation

Des souris knockout pour le gène Il-10, ou double knockout pour les Tgfβ-1 et Rag2, TCRβ et p53, ou Gpx1 et Gpx2, sont utilisées pour l’étude des maladies inflammatoires du côlon. Dans des conditions stériles, l’inflammation intestinale est bien inférieure à la normale, et les tumeurs colorectales n’apparaissent pas. Les mêmes souris associées à une flore normale développent des tumeurs [41].

Les souris Min sont également utilisées dans l’étude des cancers colorectaux. Elles possèdent une mutation du gène APC (comme les personnes atteintes de polyposes adénomatoses familiales). Chez elles, l’inflammation intestinale est réduite par rapport aux souris citées dans le paragraphe précédent. Toutefois, les souris Min axéniques développent moitié moins d’adénomes que les souris Min à flore normale, or la plupart des cancers colorectaux proviennent de la cancérisation d’adénomes. [41]

L’inflammation provoquée par la flore est variable suivant les espèces bactériennes. Par exemple Enterococcus faecalis entraîne une inflammation colique et la formation de tumeur chez des souris Il-10 knockout. D’un autre coté Lactobacillus spp. apparaît comme un agent protecteur vis-à-vis de l’inflammation et des tumeurs, chez ces mêmes souris. [41].

Poids des arguments Diminue le risque Augmente le risque

Convaincant Activité physique

Viande rouge Viande transform ée Boissons alcolisées (hom me) Surpoids

Graisse abdom inale Taille adulte

Probable

Alim ents riches en fibre Ail Lait Calcium

Boissons alcoolisées (fem m e)

Limité, suggestif

Légum es Fruits

Alim ents contenant des folates Alim ents contenant du sélénium

Poisson

Alim ents contenant de la vitam ine D Sélénium

Alim ents contenant du fer Fromage Alim ents contenant des graisses

anim ales Alim ents contenant du sucre

Limité, pas de conclusion

Graines de céréales et leurs sous produits, pomm e de terre, volaille, coquillages et autres fruits de m er, autres produits laitiers, composition en acide gras cholestérol, sucre (sucrose), café, thé, caféine, consom m ation totale

de glucides amidon, vitam ine A, rétinol, vitam ine C, vitamine E, m ultivitam ines, sources de calcium non laitières, m éthionine, béta-carotène,

2.5.2. Activités biologiques du butyrate

Comme nous l’avons vu précédemment le métabolisme des glucides amène entre autres, à la production d’acides gras à courtes chaînes (acétate, propionate et butyrate principalement). Dans l’étude des cancers colorectaux, les effets biologiques du butyrate sont notables. En effet, il a été montré, in vivo, que le nombre et la taille des tumeurs coliques étaient inversement corrélés avec la concentration en butyrate dans la lumière du côlon [42]. Ainsi de nombreuses études se sont intéressées au butyrate. Toutefois les conclusions tirées sont pour la plupart basées sur des modèles in vitro. Plusieurs études ont montré, qu’in vitro, le butyrate pouvait inhiber la croissance cellulaire en bloquant les cellules en phase G1 [43]. Il a également été montré que le butyrate favorisait la différenciation cellulaire en agissant sur l’expression de gène. On note par exemple une diminution de la transcription du gène c-myc, gène généralement corrélé avec la prolifération cellulaire et inversement corrélé avec la différenciation [44] et surexprimé dans 50 à 100 % des cancers colorectaux (contre 25% pour un côlon sain) [45]. Plus récemment des études ont montré une action du butyrate sur l’apoptose. GREEN et al (2001), ont montré, in vivo, que le taux d’apoptose des cellules tumorales du côlon, augmentait avec la concentration en butyrate, et ceux par action du butyrate sur l’expression et l’activité de protéines impliquées dans l’apoptose. [46]

2.5.3. Production de sulfure d’hydrogène H2S

L’ H2 produit par fermentation des oses et des polyosides peut être utilisé par la flore colique

pour la réduction du sulfate en H2S. Le caractère génotoxique de ce composé, aux

concentrations présentent dans l’intestin, a été prouvé in vitro [24]. BABIDGE et al [47], ont montré que le sulfure d’hydrogène diminuait l’effet barrière de la muqueuse colique, en limitant l’oxydation du butyrate. CHRISTL et al [48], ont montré que le sulfure d’hydrogène entraînait une prolifération cellulaire dans la partie supérieure des cryptes de Lieberkühn. Cependant cet effet est contré en présence de butyrate. Enfin DEPLANCKE et al [49] ont montré que le sulfure d’hydrogène baissait le potentiel d’oxydo-réduction intracellulaire, ce qui a pour conséquence d’arrêter la chaîne respiratoire mitochondriale et d’entraîner une réaction en chaîne amenant à la prolifération cellulaire ou à l’apoptose pour des doses d’H2S

élevées.

Il est à noter qu’il existe une compétition entre les bactéries méthanogènes et sulfato- réductrices. Environ 50% des Européens et des Américains, et 90% des Noirs Africains d’origine rurale excrètent principalement du méthane, et hébergent vraisemblablement peu de bactéries sulfo-réductrices [41].

2.5.4. Biotransformation des acides biliaires

IMRAY et al, ont montré que la concentration fécale en acides biliaires secondaires est plus élevée chez des sujets atteints de cancers colorectaux que sur des sujets sains [50]. Il a également été montré que les acides biliaires secondaires peuvent provoquer l’apoptose des colonocytes, et que de fortes concentrations en DCA (acide déoxycholique) ou LCA (acide lithocholique) pourraient exercer une pression de sélection favorable à l’émergence de cellules épithéliales mutantes résistantes à l’apoptose [51]. PAY et al [52], ont eux montré que les acides biliaires secondaires (essentiellement l’acide déoxycholique), était impliqué dans la croissance, l’invasion et la production de métastase. Cela passe par l’induction de l’activité tyrosine phosphorylase, entraînant une surexpression de β-caténine, molécule du cytosquelette. L’acide déoxycholique entraîne également l’inhibition de l’activité de la protéine p53 [53].

Remarque : Plusieurs études montrent un effet promoteur des acides biliaires primaires dans

le cancer du côlon. REDDY et al, ont montré un effet promoteur du sodium cholate et du sodium chenodeoxycholate, après induction aux N-methyl-N′-nitro-N-nitrosoguanidine chez des rats dépourvus de flore intestinale et chez des rats normaux [54].

2.5.5. Production d’espèces réactives de l’oxygène

Chez les espèces aérobies, l’oxygène est utilisé pour la production d’énergie par l’intermédiaire de chaînes de transport d’électrons telle que celles existant dans les mitochondries. Des métabolites de l’oxygène apparaissent alors. Dans l’organisme, on distingue essentiellement le superoxide, le peroxyde d’hydrogène, les radicaux hydroxyles et le peroxynitrite. Ces composés sont dits « espèces réactives de l’oxygène ». Ils sont à l’origine d’un stress oxydatif capable de générer des lésions oxydatives de la molécule d’ADN. Pour l’instant, aucune étude n’a pu prouver l’existence d’un lien entre le cancer du côlon et les espèces réactives de l’oxygène [41].