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Rôle du cil primaire dans la signalisation Hh et les tumeurs Hh-dépendantes

Résumé de l’article Solinas et al, 2011, en préparation

III. Intérêt et apport fonctionnel des nouveaux outils pharmacologiques

1. Rôle du cil primaire dans la signalisation Hh et les tumeurs Hh-dépendantes

MRT-83 va constituer un outil de choix pour améliorer notre compréhension de la régulation de Smo au niveau du cil primaire. Cette structure étant à la fois impliquée dans l’activation physiologique de la voie Hh et l’émergence de pathologies Hh-dépendantes, il est d’un intérêt majeur d’analyser la régulation du récepteur Smo au sein de cette organelle. A l’heure actuelle, un nombre important de questions persistent : existe-t-il une voie de signalisation Hh indépendante du cil chez les mammifères ? Comment se fait le transport de Smo au cil ? Par quel mécanisme Smo active-t-il les facteurs de transcription Gli dans cette structure ?

Dans des conditions physiologiques, il semble que les signaux Hh puissent se transmettre de façon dépendante ou indépendante du cil chez les mammifères. Ainsi, Sufu

154 contrôlerait le niveau d’expression des formes répressives des facteurs de transcription Gli de manière indépendante du cil primaire. A l’inverse, la transactivation des facteurs de transcription Gli en leurs formes activatrices nécessite la translocation de Smo dans le cil primaire (Chen et al., 2009). Par ailleurs, l’ablation du cil primaire dans les cellules souches GFAP+ du cerveau adulte induit une réduction de la prolifération cellulaire dans la ZSG de l’hippocampe adulte (Han et al., 2008), mais pas dans la ZSV (Amador-Arjona et al., 2011). Ce dernier résultat suggère que dans la ZSV, contrairement à la ZSG, la signalisation Shh exerce ses effets sur la niche neurogènique de manière indépendante du cil primaire.

Néanmoins, la compartimentation de la signalisation Hh au cil primaire demeure fondamentale et permet d’assurer la spécificité du signal. Le cil primaire pourrait constituer un compartiment enrichi en une molécule lipidique capable d’activer Smo ou dépourvu d’une molécule lipidique capable d’inhiber Smo, puisque l’organelle a été montrée être à l’origine de la compartimentation de certains lipides (Emmer et al., 2010). Plusieurs hypothèses ont été proposées pour le mécanisme de relocalisation de Smo au cil. Ainsi après sa synthèse, Smo pourrait être envoyé dans le cil depuis les vésicules issues de l’appareil de Golgi (pour revue,

Pazour & Bloodgood, 2008) ou bien après un adressage préalable à la membrane plasmique (Milenkovic et al., 2009). Par ailleurs, l’utilisation d’une construction Smo:GFP montre

qu’avant d’être exprimé dans le cil, Smo est contenu dans les stocks intracytoplasmiques de la cellule (Wang et al., 2009). Récemment, l’étude des mécanismes de régulation d’entrée et de sortie des protéines membranaires dans le cil primaire a révélé qu’un réseau NHERF1-ERM-actine (NHERF pour Na+/H+ exchanger 3 regulatory factor et ERM pour Ezrin-Radixin-Moesin qui sont des protéines de la famille des protéines de liaison à l’actine), exprimé sous la membrane plasmique est responsable de l’exclusion des protéines membranaires du domaine de la membrane ciliaire. Ce réseau aurait une activité complémentaire à celle de la barrière de diffusion septin 2 récemment proposée pour expliquer la régulation de l’entrée des protéines dans le cil primaire (Hu et al., 2010). L’utilisation d’une construction GFP-hSmo-NHERF1, avec une étiquette GFP sur l’extrémité N-terminale du récepteur et un domaine de liaison NHERF1-ERM en C-terminal montre que ce signal de rétention exprimé sur le récepteur Smo empêche le passage de la protéine vers la membrane cilaire et qu’il doit être clivé pour que le récepteur soit adressé au cil primaire (Francis et al., 2011). Cependant, la relocalisation du récepteur n’est pas régulée par un mécanisme unique. En effet, elle requiert également la machinerie IFT et en particulier IFT122 qui régule à la fois l’entrée et la sortie

155 des protéines Smo, Sufu et des facteurs de transcription Gli2 et 3 (Qin et al., 2011). Par ailleurs, de nombreuses études ont montré le rôle de différentes petites GTPases dans la formation et la fonction du cil primaire ; pour revue, (Li and Hu, 2011). En particulier, le transport ciliaire fait intervenir la sous-famille des Rab GTPases. Ainsi, Rab23 régulerait les entrées et sorties de Smo dans l’organelle, participant ainsi au recyclage du récepteur

(Boehlke et al., 2010).

Par ailleurs, la PKA initialement considérée comme un inhibiteur de la voie Hh, vient d’être plus récemment associée à des effets positifs sur la signalisation Hh. En effet, sa localisation qui vient d’être montrée à la base du cil primaire de manière Hh-dépendante, semble être requise pour des effets prolifératifs associés à la signalisation Hh (Barzi et al.,

2010). De plus, in vitro, l’activation de la PKA induit l’accumulation du récepteur Smo dans

le cil primaire (Wilson et al., 2009). Cependant, à l’heure actuelle, les données disponibles ne permettent pas de savoir s’il s’agit de la conformation active ou inactive du récepteur ; pour revue, (Milenkovic and Scott, 2010). Les composés MRT que nous venons de caractériser comme de puissants antagonistes du récepteur Smo capables de bloquer le récepteur dans sa conformation inactive pourraient, là encore, se révéler comme des outils efficaces pour ces études.

Des données particulièrement étonnantes ont récemment révélé la dualité des rôles du cil primaire sur le développement de deux types de tumeurs associées à la dérégulation de la signalisation Hh. En effet, si l’ablation génétique du cil primaire bloque la formation de MB lorsque la tumeur est liée à une mutation activatrice de Smo, elle favorise l’expansion des tumeurs dépendant d’une activation constitutive de Gli2 (Han et al., 2009). Ce rôle bivalent du cil primaire a également été décrit sur des BCC (Wong et al., 2009). MRT-83 inhibant la translocation de Smo au cil comme le font les composés SANT-1/2, semblerait être un outil tout à fait approprié dans le cas des tumeurs dépendant du cil primaire. Par ailleurs, la mutation M2 retrouvée sur des BCC (Xie et al., 1998), induit la translocation du récepteur au cil. In vitro, SANT-1, contrairement à la cyclopamine, est capable d’inhiber l’activité de la voie Hh médiée par la forme oncogénique de Smo, SmoM2 (Chen et al., 2002b; Taipale et

al., 2000). Cette mutation pourrait expliquer certaines résistances au traitement par la

cyclopamine de tumeurs Hh-dépendantes. MRT-83 présentant un mode d’action similaire à celui de SANT-1 et de surcroit, étant capable d’interagir avec le récepteur Smo humain, on

156 peut supposer que ce composé pourrait être efficace sur des tumeurs Hh-dépendantes telles que les BCC liés à la mutation SmoM2.