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III. Pharmacologie de la voie Hedgehog

2. Pharmacologie des autres composantes de la voie Hh

2.2. Cibles pharmacologiques en aval de Smo

Le développement de composés capables de réguler l’activité de protéines situées en aval de Smo dans la cascade de signalisation Hh pourrait être une alternative aux antagonistes de Smo dans le cas de tumeurs liées à des mutations des composantes de la voie en aval de Smo ou encore à des mutations de Smo résistantes aux antagonistes disponibles (Figures 12).

2.2.1. L’adénylate cyclase

D’origine végétale, la forskoline est un puissant activateur de l’adénylate cyclase qui induit une augmentation des taux d’AMPc capables d’activer la PKA, l’un des régulateurs négatif de la signalisation Hh (Fan et al., 1995; Hynes et al., 1995; Lipinski et al., 2006;

Noveen et al., 1996); Figure 17). Etant donné le rôle majeur de l’adénylate cyclase dans de

très nombreux processus physiologiques, l’utilisation in vivo de la forskoline en tant qu’inhibiteur spécifique de la signalisation Shh ne peut être envisagée. Cependant, cette

83 molécule reste utile dans la compréhension des mécanismes régulant la signalisation Hh in

vitro. Une étude récente vient d’ailleurs de rapporter que la forskoline est capable de bloquer

la prolifération de cellules issues de RMS humains in vitro et empêche aussi le développement de xénogreffes de RMS humains in vivo (Yamanaka et al., 2011); Figure 17).

2.2.2. Les facteurs de transcription Gli

Comme pour les inhibiteurs de Smo, de petites molécules de synthèse antagonistes des facteurs de transcription Gli ont été identifiées par HTS de banques de molécules (Figure 17).

GANT58 et GANT61 présentent une CI50 d’environ 5 µM sur le test cellulaire mettant en jeu l’activation du rapporteur Gli-luciférase (Lauth et al., 2007). Ils agiraient au niveau nucléaire où ils inhiberaient les fonctions transcriptionnelles des Gli. GANT61 interfère notamment dans la liaison de Gli1 à l’ADN. Son administration sous-cutanée (25 mg/kg/jour pendant 18 jours) dans un modèle murin de xénogreffes de cancer de la prostate induit une régression significative du volume tumoral accompagnée d’une diminution de la transcription du gène cible Ptc. GANT61 réduit également la croissance de lignées de cellules humaines de RMS par inhibition de la prolifération cellulaire et induction de l’apoptose (Kawabata et al., 2011;

Tostar et al., 2010). Cependant, à l’heure actuelle, ces composés n’ont pas encore été testés en

clinique.

Par ailleurs, 4 petites molécules (HPI1-4) ont été récemment identifiées par HTS ciblant les molécules agissant en aval de Smo (Figure 17). L’activité de ces composés reste faible puisque HPI1, le plus puissant, présente une CI50 de 1,5 µM. Ces composés n’inhibent pas la liaison de la BC et l’utilisation de constructions FLAG-Gli1 ou FLAG-Gli2 a permis de montrer qu’ils modulent la régulation, la stabilité, la localisation et la fonction des facteurs de transcription Gli. Cependant, leur mode d’action spécifique diffère. Ainsi, HPI1 régule les formes longues et activatrices de Gli1 et Gli2 suggérant qu’il agit indépendamment du cil primaire. En revanche, les HPI2 et HPI3 bloquent la conversion de la forme longue de Gli2 en sa forme activatrice. Enfin, HPI4 interfère avec la ciliogenèse et inhibe donc indirectement l’activation des facteurs de transcription Gli normalement exprimés dans cette structure

(Hyman et al., 2009). Si les multiples modes d’action décrits pour ces 4 composés sont

intéressants pour la compréhension de la signalisation, leur utilisation en clinique n’est pas pour le moment envisagée.

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Figure 17 : Structures et affinités des principaux antagonistes de la voie Hedgehog dont la cible n’est pas le récepteur Smoothened.

(A) Structure et affinité de la Robotnikinin, un antagoniste de synthèse du ligand Sonic Hedgehog. (B) Structures et affinités des principales molécules présentant une activité antagoniste sur les facteurs de transcription Gli (GANT58, 61 et HPI1-3) ou inhibant la formation du cil primaire (HPI-4). D’après (Heretsch et al., 2010; Peukert and Miller-Moslin, 2010).

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2.2.3. Cibles non identifiées

De nombreuses molécules naturelles ont été récemment identifiées comme des composés capables d’inhiber l’activité du facteur de transcription Gli1 ; pour revue (Mas &

Ruiz i Altaba, 2010). Les physalines sont les plus actives, en particulier, la physaline F qui

bloque l’activité de Gli1 avec une affinité de 0,66 µM (Figure 17(Hosoya et al., 2008; Rifai

et al., 2011). Cependant, le test permettant de mesurer l’activité des composés sur l’activation

transcriptionnelle de Gli n’est pas suffisant pour déterminer précisement le mode d’action de ces composés. Les physalines sont également cytotoxiques pour le développement de lignées de cellules cancéreuses du pancréas PANC1 qui surexpriment les acteurs de la voie Hh.

Les dérivés de l’arsenic induisent, au cours du développement embryonnaire, des anomalies comparables à celles générées par une signalisation Hh déficitaire (Machado et al.,

1999). Cette révélation a suscité la recherche d’un potentiel rôle régulateur de ces composés

sur la voie Hh (Kim et al., 2010b). De manière intéressante, les dérivés de l’arsenic (arsenic

trioxyde (ATO), arsénite sodium et oxyde phénylarsine) sont capables d’inhiber l’activité

des facteurs de transcription Gli sur le test utilisant le rapporteur Gli-luciférase avec une CI50

de 0,7 µM et notamment l’accumulation du facteur de transcription Gli2 dans le cil primaire. En accord avec ce résultat, ces composés bloquent l’activation de la voie induite par la forme constitutivement active du récepteur Smo ou par l’invalidation du régulateur négatif Sufu. De plus, ATO inhibe le développement de MB dans un modèle murin d’allogreffes dérivées d’animaux Ptc

+/-p53-/- (Kim et al., 2010b). Ces résultats ont été confirmés, dans une seconde

étude qui propose l’existence d’une interaction directe entre ATO et le facteur de transcription Gli1 et montre qu’ATO abolit à la fois le développement de cellules issues de sarcomes humains dans un modèle de xénogreffes ainsi que celui de MB dans un modèle murin

(Beauchamp et al., 2011). Si le mécanisme d’action des dérivés de l’arsenic sur la voie Hh

mérite d’être clarifié, ils n’en demeurent pas moins une alternative à considérer pour le traitement des cancers Hh-dépendants ne répondant pas aux antagonistes de Smo. De plus, ATO a déjà été utilisé dans le traitement de leucémies promyélocytaires aigües (à ce jour, il a été inclus dans 92 études cliniques terminées ou encore en cours (http://clinicaltrials.gov/ct2/results?term=As2O3; (Soignet et al., 2001); pour revue, (Emadi

and Gore, 2010).

La diversité des effets engendrés par ces petites molécules est intéressante puisqu’elle permet d’accroitre le nombre de cibles thérapeutiques potentielles dans le traitement de

86 tumeurs Hh-dépendantes. Cependant, Smo demeure la cible privilégiée des molécules développées à l’heure actuelle comme le sont un grand nombre des protéines appartenant à la superfamille des récepteurs à 7 domaines TM.

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