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Résumé de l’article Solinas et al, 2011, en préparation

II. Découverte de nouvelles familles de composés 1. Structures originales des composés MRT

2. Les composés MRT au sein des autres antagonistes de Smo

2.1. Au niveau de leur structure et de leurs sites de liaison sur Smo

Si les 3 séries chimiques que nous venons de caractériser comme antagonistes de Smo demeurent originales et ont pour cette raison, été brevetées par le CNRS, il est cependant intéressant de noter une ressemblance structurale avec l’un des premiers antagonistes de synthèse développé pour Smo, le composé SANT-2. La partie gauche de nos séries de molécules est en effet semblable à celle de SANT-2. Le groupe triméthoxy phényl est un élément majeur du pharmacophore puisque l’atome d’oxygène d’un des groupes méthoxy se superpose à l’un des 3 groupes accepteurs d’hydrogène du modèle et le phényl correspond à l’une des 3 régions hydrophobes. Grâce à des études de relations structure-activité, nous avons montré que si la conversion des groupements méthoxy en groupements éthoxy (comme sur le SANT-2) sur le phényl modifie peu les propriétés biologiques des molécules (composés 20, 21, 24 ; Tableau 4), la perte d’un groupement en position méta est, quant à elle, dramatique pour l’activité du composé (composés 19, 23, 26 ; Tableau 4). Cependant, les données actuelles ne nous permettent pas d’apporter d’autres conclusions sur l’identité précise des sites de liaison de SANT-2 et de nos molécules sur Smo.

Un certain nombre de travaux ont permis de suggérer l’existence de plusieurs sites de liaison des ligands sur Smo. Ainsi, l’utilisation des composés radiomarqués [3H]-SAG-1.3 et [3H]cyclopamine a montré que le composé SANT-1 ne déplace pas complètement la liaison du [3H]-SAG-1.3 contrairement à SANT-2, alors qu’ils sont tous deux capables d’inhiber complètement une réponse cellulaire induite par l’agoniste de Smo, SAG-1.3 (Rominger et

al., 2009). De plus, il avait été précédemment montré que les composés SANT1-4 sont tous

capables de bloquer la liaison du ligand BODIPY-cyclopamine sur le récepteur Smo murin, mais SANT-1 et SANT-3 n’inhibent pas complètement cette liaison suggérant que les 4 composés présentent des mécanismes d’action ou des sites de liaison différents sur le récepteur Smo (Chen et al., 2002b). Il serait particulièrement intéressant de caractériser de manière plus approfondie le site de fixation de MRT-83 sur le récepteur Smo humain et murin par exemple en utilisant les radioligands disponibles ou en développant un radioligand dérivé des séries chimiques que nous venons de caractériser.

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Tableau 4 : Etude de relation structure-activité de dérivés de MRT-10.

Les composés ont été testés à 1 3 µM, 2 10 µM ; means ± SEM ; n ≥ 3 pour toutes les expériences ; nd : non déterminé. Le surlignage vert correspond aux modifications de la position des groupements méthyl sur le phényl dans la partie gauche de la molécule (encadré rouge). Le surlignage jaune correspond au remplacement de groupement méthoxy par des groupements éthoxy sur ce même phényl (encadré rouge). Le MRT-10 correspond à R5=R6=R7= OMe. D’après ((Heretsch et al., 2010 ; Roudaut et al., 2011).

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2.2. Au niveau du mécanisme de régulation de Smo

Il est désormais bien établi que dans les cellules de vertébrés, la translocation du récepteur Smo au cil primaire n’est pas suffisante pour induire l’activation de la signalisation Hh mais constitue une étape du processus d’activation. Dans le modèle actuellement proposé

(Rohatgi et al., 2009), Smo existerait sous 3 formes : une forme cytoplasmique inactive

(Smo1) et des formes localisées dans le cil primaire alternativement inactives (Smo2) ou actives (Smo3 ; Figure 19). Ce modèle s’inspire des études ayant démontré que l’activation de la plupart des RCPG n’est pas une simple étape de conversion d’un état inactif à un état actif, mais plutôt un processus nécessitant plusieurs étapes intermédiaires ayant chacune des effets distincts sur les protéines en aval de la signalisation ; pour revue, (Kenakin, 2003). L’utilisation de molécules agonistes et antagonistes se révèle donc utile pour stabiliser les états intermédiaires des RCPG et ainsi disséquer le mécanisme d’action du récepteur. Les antagonistes de Smo, cyclopamine, SANT-1 et SANT-2 ont permis de démontrer l’existence des 3 états du récepteur. Des expériences d’immunofluorescence sur la lignée de cellules murines NIH3T3 exprimant le récepteur Smo de manière endogène ont montré que les antagonistes SANT-1 et SANT-2 bloquent la translocation du récepteur dans le cil induite par la présence du ligand Shh. En revanche, la cyclopamine n’inhibe pas cette translocation bien qu’elle bloque la signalisation Hh dans ces mêmes cellules. De manière encore plus surprenante, lorsque les cellules sont traitées avec la cyclopamine seule, le récepteur Smo se trouve transloqué dans le cil primaire. Ainsi, les inhibiteurs SANT-1, SANT-2 et MRT-83 semblent bloquer le récepteur dans son état Smo1 inactif dans le cytoplasme alors que la cyclopamine bloque le récepteur Smo dans son état Smo2 inactif dans le cil primaire (Figure

19).

Ce modèle a permis de suggérer l’existence de deux catégories d’antagonistes de Smo, les composés ayant une activité proche de la cyclopamine qui empêchent l’étape d’activation du récepteur et les composés ayant une activité proche des composés SANT-1/2 qui bloquent la translocation du récepteur au cil primaire et auxquels se rattache MRT-83. Une étude complémentaire indique que le mécanisme d’activation du récepteur Smo au cil primaire semble très complexe. En effet, l’utilisation d’outils pharmacologiques variés a montré que Smo peut adopter plusieurs conformations qui autorisent son adressage dans le cil primaire, mais seule une partie de ces conformations sont capables d’activer la cascade de signalisation Hh. L’activation de la sous-unité Gαs ou de la PKA engendre l’accumulation du récepteur à la

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Figure 19 : Modèle d’activation du récepteur Smoothened chez les vertébrés.

L’activation complète du récepteur requiert deux étapes. Tout d’abord, Smo1 doit être transloqué au cil primaire (Smo2) puis être activé (Smo3). Ce dernier état est celui permettant au récepteur d’activer la signalisation en aval conduisant à l’activation des facteurs de transcription Gli. Les flèches noires représentent des étapes individuelles. Le transport au cil primaire du récepteur (Smo1Smo2) est contrôlé par les étapes d’entrée et de sortie du récepteur dans l’organelle, désignées ici par R1 et R2; l’étape d’activation (Smo2Smo3) est contrôlée par R3 dont la nature biochimique n’est pas encore connue aujourd’hui, mais qui pourrait correspondre à une modification post-traductionnelle, une interaction protéique ou un changement conformationnel du récepteur (Zhao et al., 2007); la sortie de Smo3 du cil primaire est contrôlée par R4. Les sites d’actions proposés pour les différents régulateurs de la signalisation Hedgehog sont indiqués par les flèches grises. D’après (Rohatgi et al., 2009).

153 base du cil. Cette localisation peut être bloquée par le composé SANT-1, mais pas par la cyclopamine suggérant que SANT-1 agirait sur la forme cytoplasmique du récepteur pour le séquestrer ou empêcher son interaction avec une ß-arrestine nécessaire à l’adressage du récepteur dans l’axonème ciliaire (Wilson et al., 2009a). L’application de MRT-83 sur des cellules exprimant de manière endogène les récepteurs Smo murins (lignée C3H10T1/2) ou humains (lignées NT2) a permis de montrer la disparition complète de l’expression de la protéine dans le cil primaire suggérant une fois encore que MRT-83 agirait sur la même forme de Smo que SANT-1. L’utilisation des composés MRT et en particulier de MRT-83, semble donc être particulièrement appropriée à l’étude fine des mécanismes d’adressage et d’activation du récepteur Smo dans les cellules.