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Chapitre I - Etat de l’art: Toitures végétalisées, services écosystémiques et Technosol

Partie 1: Toiture végétalisée et services écosystémiques

III. Services de régulation

III.1. Rétention des eaux de pluies

- La végétalisation d’un toit peut se traduire par un décalage et ou un étalement dans le temps des

flux d’eau s’écoulant après une précipitation du toit dans le réseau pluvial. Il s’agit d’un service

rendu par la toiture végétalisée puisqu’il permet de limiter l’engorgement des réseaux d’eau

pluviale en cas de fortes précipitations. Ce décalage temporel dépend de (i) l’humidité du

substrat à un instant t, (ii) sa conductivité hydraulique, (iii) sa capacité de rétention en eau, (iv)

son couvert végétal, (v) des éléments techniques pouvant jouer sur l’écoulement de l’eau et (vi)

la fréquence et l’intensité des évènements pluvieux

- Toute l’eau arrivant sur une toiture végétalisée ne s’écoule pas dans le réseau pluvial puisqu’une

partie est évaporée ou évapo-transpirée après avoir été retenue par le substrat ou les végétaux.

Il s’agit là encore d’un service rendu puisque cela se traduit par des volumes d’eau pluviale à

évacuer et à traiter qui sont moindres. On exprime alors la proportion entre la quantité d’eau de

pluie entrante sur le système et la quantité d’eau drainée.

Les trois études existantes sur ce service pour des toits potagers (Elstein et al. 2008; Aloisio et al. 2016 ;

Whittinghill et al. 2015) portent principalement sur le deuxième aspect. Elstein et al. (2008) montrent

qu’un terreau cultivé peut retenir jusqu’à 69,2% de certains événements de pluies, le relevé n’étant pas

fait en continu. Aloisio et al. (2016), ne donnent pas de ratio d’eau retenue vis-à-vis du volume entrant,

mais mettent en avant un effet du type d’espèce planté croisé avec celui du substrat. Les végétaux, via

leur feuillage, ou via leurs besoins en eau et évapotranspiration augmentent de manière plus ou moins

importante la quantité d’eau retenue. L’étude montre ainsi que des plantes de type herbacée réduisent 3

fois plus la quantité d’eau retenue qu’une plante grasse en comparaison à un témoin sans plante.

Whittinghill et al. (2015) étudient quant à eux l’impact de trois types de végétalisation extensive (sédum,

prairie et productif ; voir Tableau 4). La prairie présente la proportion d’eau de pluie retenue la plus

élevée (entre 98,2 et 92,4%). Cette proportion étant décroissante pour l’ensemble des traitements avec

l’intensité des épisodes de pluie. Ainsi, le toit productif retient respectivement 87,7% des événements <

2mm, 85,6% des évènements entre 2 et 10 mm et seulement 58,9% des évènements > 10 mm aboutissant

à une performance équivalente à la toiture sedum. Les différences observées peuvent, selon les auteurs

être expliquées par le niveau de biomasse produite (la biomasse sur la prairie étant supérieure).

Néanmoins, les auteurs ne rapportent pas l’impact de l’irrigation sur la capacité de rétention. En effet,

en maintenant un niveau d’humidité plus élevé dans les substrats, l’irrigation peut réduire sa capacité de

rétention en eau notamment durant l’été (Schroll et al. 2011), l’irrigation pouvant par ailleurs avoir un

effet de compaction sur les substrats (Caron et al. 2015). A cet égard, il semble essentiel, dans le cas de

toiture productive, de distinguer la consommation en eau (irrigation + eau de pluie) de la proportion des

précipitations qui est retenue. Enfin, aucune des études ne regarde l’impact des composantes du substrat

sur la fonction de rétention.

Au niveau des toitures végétalisées non productives, de nombreuses études ont été effectuées sur cette

question (Getter et al. 2007; Beattie and Jarrett 2009; Czemiel Berndtsson 2010; Beck et al. 2011;

Graceson et al. 2013; Beecham and Razzaghmanesh 2015; Dusza et al. 2017). Dans une revue sur le

sujet comparant des toits extensifs et intensifs, Mentens et al. (2006) montrent des plages de valeurs

entre 65 et 85% d’eau retenue pour des toitures intensives contre 27 à 87% dans le cas de toitures

extensives. Ces larges gammes de valeurs, peuvent s’expliquer (i) par les différences de climat entre

études situées à travers le globe, (ii) les définitions différentes qui peuvent être prises au niveau des

épaisseurs de substrat pour une toiture extensive ou intensive et (iii) le nombre d’événements mesurés

qui différent entre études. Dans une autre revue sur le sujet, Czemiel Berndtsson (2010) détaille les

facteurs d’influences de cette capacité de rétention et distingue, d’une part les caractéristiques du toit :

technique (i.e. nombre et type de couche, position dans le canyon urbain, pente) et biotique (i.e. nature

et profondeur de substrat et type et intensité de la végétation). Et d’autre part les conditions

climatiques (i.e. durée des périodes sèches, température moyenne, vent, intensité et durée des

éventements de pluies etc.). A l’échelle d’une ville comme Bruxelles, Mentens et al. (2006) montrent

qu’en développant à large échelle des toitures avec 10 cm de substrat, une réduction totale de 2,7% des

écoulements peut-être obtenue.

Facteurs d’influence

o Le substrat :

Le substrat est reconnu par de nombreux auteurs comme étant le premier facteur affectant la proportion

des précipitations qui est retenue via sa profondeur et sa nature (Dunnett et al. 2008 ; Castiglia Feitosa

and Wilkinson 2016). Plusieurs études, dont la méta-analyse de Mentens et al. (2006), montrent une

relation positive entre l’épaisseur de substrat et sa capacité de rétention en eau avec une généricité des

résultats néanmoins limitée à des climats tempérés. Ces résultats ont par ailleurs été confirmés au sein

de l’étude réalisée par Castiglia Feitosa et Wilkinson (2016), qui ont montré un relation linéaire entre

l’épaisseur d’un substrat et sa capacité de rétention.

L’humidité d’un substrat va directement impacter sa capacité à retenir des volumes plus ou moins

importants d’eau et à subvenir aux besoins des plantes. Cette caractéristique est directement liée à sa

réserve utile qui peut être définie comme la différence des quantités d’eaux retenues entre son point de

flétrissement et sa capacité au champ. Bengtsson (2005) montre ainsi, pour une toiture extensive en

sedum de 3 cm, que la différence entre capacité au champ (45% v/v) et point de flétrissement (15% v/v)

du substrat explique bien la réserve utile de 9 mm observée. La généricité de ces résultats portant sur

des toitures avec une épaisseur faible de substrat, sans irrigation peut toutefois être questionnée au

niveau des toitures productives.

La nature du substrat va également affecter sa capacité de rétention et sa conductivité hydraulique. Ainsi,

la taille des particules de sol et son espace poral, vont être des facteurs clés. L’utilisation de substrats

plus organiques dans le cas de toiture productive soulève par ailleurs des questions en lien avec des

phénomènes d’hystérèse et/ou d’hydrophobicité (Caron et al. 2015).

Jusqu’à récemment, l’impact du vieillissement d’une toiture sur ses performances hydrologiques n’avait

quasiment pas été étudié. Bouzouidja et al. (2016) ont analysé des toitures extensives à base de

pouzzolane de 7,5 à 9,5cm durant 4 ans. Ils y observent un lessivage des particules les plus fines le long

du profil conduisant à une évolution temporelle de la porosité, celle-ci se faisant en parallèle d’une

évolution des caractéristiques chimiques des substrats (diminution de la teneur en carbone organique et

augmentation de la teneur en azote). Cette évolution impacte directement la capacité de rétention du

substrat. Dans une autre étude, sur le vieillissement d’une toiture extensive à base de briques et billes

d’argiles expansées (épaisseur non précisée), De-Ville et al. (2017) observent eux aussi un affinage du

substrat au cours du temps ainsi qu’un effet des saisons. Celles-ci font ainsi varier la capacité de rétention

du substrat de 72% contre 7% au niveau du vieillissement sur 5 ans. Les auteurs ayant pris un échantillon

à 5 ans d’une toiture en place, en comparaison à un échantillon à T0 ne provenant pas de cette toiture,

l’extrapolation de ces résultats est discutable.

La végétation :

Bien qu’ayant un rôle moins primordial que le substrat, les végétaux vont influencer sa capacité de

rétention en particulier durant la saison d’été où le manque d’eau pourra être présent (Czemiel

Berndtsson 2010). Le type de plante a aussi un impact sur la capacité de rétention du substrat (Dusza et

al. 2017).

Enfin, d’autres facteurs tels que la pente, l’intensité des pluies et les saisons ont été étudiés.

L’augmentation de la pente d’un toit semble ainsi diminuer sa capacité de rétention (Getter et al. 2007),

tandis qu’une corrélation inverse entre l’intensité de la pluie et la rétention en eau est observée dans de

nombreuses études (Czemiel Berndtsson 2010).

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