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De l’emploi à l’activité : où porter le regard pour analyser le travail ? Enjeux et usages des analyses du travail

Anne-Lise Ulmann, maître de conférences en sociologie, Conservatoire national des arts et métiers

La sociologie a souvent utilisé la notion de travail soit pour rendre compte de la division sociale (réduisant le travailleur à sa force productive), soit pour spécifier la notion d’emploi (en ne considérant principalement que la qualification ou la tâche). Depuis plus de trente ans néanmoins ces manières de définir le travail font l’objet de questions et de tensions. Certains sociologues proposent même de renoncer à ce terme, trop empreint d’un contexte sociohistorique, par des mots plus à même d’éclairer « les phénomènes quotidiens, l’organisation sociale et les significations qui leur sont attribuées, d’une manière nouvelle » (L. Balbo). De notre point de vue ce débat sé-mantique sur le terme approprié (travail, activité, pratique...) vient recouvrir une autre question qui nous paraît plus fondamentale : celle de la place que tient l’analyste non seulement du point de vue de sa discipline mais aussi du point de vue du statut de son action. Quand à partir de ses analyses, il a le projet de « comprendre le travail pour le transformer » (ergonomie), d’accompagner des changements ou de former, (sociologie clinique, didactique profes-sionnelle, psychologie du travail...) voire de redonner aux personnes « leur pourvoir d’agir » (clinique de l’activité, psycho-dynamique du travail...), les questions en jeu ne sont pas seulement sémantiques mais plutôt théoriques et méthodologiques. Qu’en est-il du travail pour l’analyste : ce qu’il voit faire ? Ce qu’il ne peut voir ? Ce que les professionnels disent faire ? Ce que lui-même comprend de ce qui est fait ?... La diversité des demandes sociales supposant un passage par l’analyse du travail, questionne donc les outils d’investigation autant que la manière de les mobiliser pour « intervenir » dans ces milieux professionnels et contraignent bien souvent à penser l’action dans une perspective pluridisciplinaire. La difficulté tient alors à l’organisation du dialogue entre ces disciplines pour faire retrouver au travail « sa généralité dans ses manifestations plurielles » (Vatin, 2006). L’enjeu n’est donc pas seulement théorique et méthodologique il est aussi, de notre point de vue, politique.

Mots-clés : analyse du travail ; didactique professionnelle ; emploi ; méthode clinique ; travail.

Le lien travail et formation, un moyen pour apprendre. Selon quel référentiel ?

Paul Olry, professeur des universités, AgroSup Dijon, Unité propre « Développement professionnel et formation » Cet article propose une approche des référentiels à partir de la didactique professionnelle et de la place fondatrice que celle-ci accorde aux situations de travail. En formation professionnelle, ce qui est premier, ce sont les situations parce que ce sont celles-ci dont les professionnels et futurs professionnels ont ou auront à

« se débrouiller ». La nécessité d’identifier puis de caractériser les situations, notamment dans les exigences qu’elles imposent à l’activité, constitue une étape antérieure à l’analyse et à la description de l’activité, et plus antérieure encore à l’analyse et à la description des ressources utiles pour penser et agir en situation. Dans cette approche, les situations de travail constituent la part absente et méconnue des référentiels.

Mots-clés : référentiel ; situations ; travail ; activité ; didactique professionnelle.

L’entretien biographique et l’analyse du travail. Le temps peut-il être conté en temps compté ? Sophie Divay, maître de conférences en sociologie, université de Reims-Cérep, EA 4692 - Centre d’économie de la Sorbonne, CNRS, Axe Institutions

L’entretien biographique fait partie des techniques d’enquête utilisées en sciences sociales. La mise en œuvre de cette méthode qualitative de recueil de données suppose l’adoption d’une posture spécifique de l’inter-viewer et la construction d’une grille de lecture et d’analyse multidimensionnelle du matériau rassemblé. Les notions de temps et de temporalité, abordées de façon diachronique et synchronique, sont en l’occurrence centrales et à appliquer tant aux propriétés individuelles des interviewés qu’aux propriétés collectives de son monde social, notamment institutionnel. Le croisement de ces deux temps sociaux permet la compréhension de dynamiques interdépendantes propres aux faits ou aux événements considérés qui relèvent tout à la fois des stratégies des acteurs et des déterminismes de leurs actions et de leurs choix.

Mots-clés : entretien biographique ; analyse des situations de travail ; contextualisation ; historicisation ; soi-gnantes ; transmission du métier.

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Observer les entreprises « utopiques ». Un exercice d’assouplissement mental ?

Philippe Trouvé, professeur en sciences de gestion, directeur scientifique du Centre d’études et de recherches sur les qualifications

Pour qui s’intéresse aux transformations actuelles du travail et des organisations, l’examen des entreprises

« utopiques » concrètement réalisées et soutenables (c’est-à-dire celles qui, tout en adoptant délibérément et durablement des modes de fonctionnement aux antipodes de la doxa managériale actuellement dominante, n’en satisfont pas moins à la sacro-sainte performance économique), constitue non seulement un réservoir incomparable de pratiques alternatives d’organisation et du travail, mais également une source irrempla-çable d’inspiration et de réflexion méthodologique pour le chercheur. Car c’est leur fardeau et leur chance que d’avoir toujours, de par leur nature hétérodoxe, non seulement à se mettre à l’épreuve de la réalité, à se tester et à s’expérimenter, mais également à s’expliquer et à se justifier là où la doxa managériale dominante demeure bien souvent indifférente à la critique ou encline au déni de ses échecs. Passé l’épreuve de la réalité, un autre obstacle symétrique ne tarde pas à se présenter à elles : l’enthousiasme et la ferveur que suscitent les entreprises animées par l’esprit d’utopie éveillent légitimement le soupçon des chercheurs les plus sou-cieux d’objectivations scientifiques. Dès lors, comment les étudier et interroger notamment la place originale qu’elles font au travail ?

Mots-clés : entrepreneurs d’utopie ; travail en utopie ; post-managérialisme

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