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L’objectif de la thèse était de traiter les données LLR dans le cadre d’une théorie alternative à la relativité générale. La théorie sélectionnée est le formalisme SME para-métrant toutes violations possibles à la symétrie de Lorentz dans tous les domaines de la Physique. Le choix de se tourner vers ce formalisme s’est fait d’une part compte tenu des motivations théoriques qui ont conduit à sa formulation, et d’autre part en considérant sa nature fondamentalement différente des formalismes standards avec lesquels il n’existe quasiment aucun recouvrement.

Afin de réduire les données LLR, nous avons créé une nouvelle éphéméride lunaire, ELPN implémentée dans le cadre du formalisme SME. Dans le Chap. 2, nous avons pré-senté le modèle dynamique de l’éphéméride ainsi que quelques unes des dérivées partielles intégrées depuis l’équation aux variations. Les équations régissant la dynamique orbitale des corps et la dynamique rotationnelle de la Lune ont été reprises principalement de Manche (2011) et de Folkner et al. (2014). Nous avons ainsi modélisé les interactions ponctuelles relativistes entre le Soleil, les planètes, la Lune et Pluton (pour les 70 asté-roïdes les plus massifs de la ceinture principale seules les interactions newtoniennes sont modélisées), les interactions dues à la non-sphéricité de la Terre, de la Lune et du Soleil, les effets de marées solides sur la Terre et la Lune puis les librations du manteau lunaire via l’introduction du noyau fluide de la Lune.

À partir des solutions intégrées numériquement, nous avons exposé dans le Chap. 3 l’approche suivie en thèse afin d’ajuster les données LLR dans le cadre de la relativité générale. En suivant cette méthodologie, nous avons construit une éphéméride lunaire totalement indépendante et découplée des éphémérides INPOP ou DE. Les conditions de cette dernière ont été reprises pour réaliser le premier ajustement aux données. Les prédictions de cette toute nouvelle éphéméride lunaire (que nous avons appelé ELPN_D1 dans le Chap. 3) ont été comparées à celles d’INPOP13c et de DE430. Ces comparaisons ont montrées qu’ELPN était alors plus proche de DE430 que d’INPOP13c, en raison principalement de l’inclusion dans la modélisation du noyau lunaire qui n’est pas modélisé dans INPOP13c. D’autres raisons peuvent être évoquées e.g., le fait qu’INPOP13c inclut un anneau d’astéroïdes qui n’est modélisé ni dans ELPN ni dans DE430, ou encore le

fait que les masses, positions et vitesses initiales des planètes dans ELPN soient reprises de DE430 sans être ajustées. Les r.m.s sur les résidus ont également été comparés afin de s’assurer de la validité de l’éphéméride implémentée. La comparaison a révélé que les résidus des observations LLR calculés avec ELPN sont totalement compétitifs avec ceux de DE430 et d’INPOP13c.

Étant donné les résidus compétitifs obtenus dans le cadre de la relativité générale, nous nous sommes intéressés à prolonger cette analyse de données dans le cadre du formalisme SME. Ce travail a fait l’objet du Chap. 4. Ainsi, dans un premier temps, nous avons exposé les corrections introduites dans le modèle dynamique ainsi que dans le modèle de traitement des observations LLR. Les corrections ainsi implémentées proviennent de deux facettes du SME, le minimal correspondant au secteur purement gravitationnel et le secteur matière. Nous avons ensuite déterminé par l’étude des dérivées partielles les combinaisons linéaires de coefficients SME auxquelles le LLR est sensible. Finalement après l’ajustement de ces combinaisons linéaires nous nous sommes intéressés à la détermination d’erreurs réalistes. Pour ce faire, nous avons dans un premier temps isolé les sources de systématiques négligées dans la modélisation et avons montré qu’elles pouvaient être reliées aux différents instruments utilisés au niveau des stations LLR, ainsi qu’aux cinq réflecteurs lunaires. Dans un deuxième temps, nous avons quantifié ces erreurs systématiques à l’aide de la méthode de ré-échantillonnage jackknife. Nous avons finalement distribué les erreurs finales en prenant en compte les biais systématiques liés aux stations LLR et rétroréflecteurs lunaires. Les contraintes ainsi dérivées ont été comparées aux meilleures estimations en vigueur. Il s’est avéré que conjointement à l’amélioration de la robustesse de la méthode utilisée, la détermination des erreurs est également plus contraignante et pose désormais des limites expérimentales de 10−9 à 10−12 sur les coefficients SME, représentant par ailleurs des améliorations jusqu’à 1600 fois plus contraignantes que les pseudo-contraintes dérivées par Battat et al. (2007). Ainsi, aucune violation à la relativité générale n’a été observée sur l’orbite lunaire à partir des données de télémétrie laser Lune.

Perspectives

Nous avons montré (cf. discussion en Sec. 4.5.1) que les coefficients SME sont corrélés avec certains paramètres apparaissant dans la description du mouvement de rotation de la Lune. Ces corrélations pourraient probablement être abaissées via une analyse simultanée des données LLR avec les données GRACE. L’abaissement des corrélations pourrait alors diminuer les erreurs formelles des coefficients SME. De la même manière on enregistre des corrélations avec le J2 terrestre qui pourraient elles aussi être diminuées via l’analyse simultanée des données LLR et SLR. Ces analyses couplées pourraient également permettre d’améliorer d’autres contraintes de physique fondamentale telle que l’effet Lense-Thirring qui s’avère lui aussi fortement corrélé au J2 terrestre (Ciufolini et al., 2016).

Concernant le secteur purement gravitationnel du SME, une future analyse des données LLR devrait être effectuée en considérant les perturbations de troisième corps. En effet, dans l’étude présentée ici seules la Terre et la Lune subissent les effets d’une violation à la symétrie de Lorentz et l’effet relatif est ainsi recherché dans l’oscillation de la distance Terre-Lune. Cependant, au niveau newtonien la perturbation solaire est la première en amplitude à générer une déviation au mouvement képlérien de l’ordre de 1% de la distance Terre-Lune (cf. Sec. B.3). On s’attend par conséquent, à ce que l’effet d’une violation à la symétrie de Lorentz introduit sur le système Terre-Lune par la présence solaire soit entre un et deux ordres de grandeurs plus faible que celui généré par la Terre et la Lune (cf. Eq. (4.7)). En considérant les 45 années d’observations, il est fortement probable que les

Conclusion 129

données LLR soient sensibles à cette hypothétique violation introduite par le Soleil. Si tel est le cas on s’attend à ce que les combinaisons linéaires des coefficients SME soient légèrement changées et les erreurs formelles améliorées.

Dans un futur proche, l’étude présentée ici sera étendue au secteur matière du SME. Comme nous l’avons montré au Chap. 4, la modélisation des violations au EEP est déjà introduite dans l’éphéméride lunaire et dans le programme de traitement des données LLR (cf. Eqs. (4.15) et (4.17)). Nous avons déjà réalisé cette étude dans le cadre d’une analyse postfit (Hees et al., 2015), ce qui n’est pas complétement satisfaisant. L’analyse globale permettra de fournir de vraies contraintes sur de possibles violations au EEP paramétrées dans le cadre du secteur matière du formalisme SME.

Le programme développé en thèse permettra d’analyser les données LLR non seulement pour les besoins de la physique fondamentale mais il pourra également servir à l’étude de la physique du système Terre-Lune.

Annexe A

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