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CHAPITRE 4 RÉSULTATS ET DISCUSSION

4.4 Résumé des constats et des hypothèses

L’analyse et l’observation des données recueillies ont permis d’émettre plusieurs hypothèses ou constats tout au long des discussions précédentes. Pour pouvoir comparer différentes caractéristiques, le différentiel des performances a été utilisé. Le différentiel des performances un indicateur permettant d’évaluer la performance globale de l’entreprise (allant de -100 % à 100 %) et ce, peu importe le nombre d’indicateurs que l’entreprise a soumis. Cet indicateur émet l’hypothèse que les indicateurs non soumis par l’entreprise se comportent de la même façon que ceux ayant été évalués. Cette façon de faire permet de passer outre les problématiques de non-réponse de certains indicateurs pour certaines entreprises. Cet indicateur nous a permis d’établir les hypothèses suivantes ainsi qu’un bon nombre d’observations plus pointues pour des indicateurs de performance plus ciblés :

Nous avons constaté que six des vingt-deux pratiques étudiées sont caractéristiques des entreprises avancées en Lean. De plus, huit autres pratiques respectent le critère de Cohen (1992) et pourraient possiblement jouer un rôle important dans la caractérisation des entreprises avancées en Lean.

Pareillement aux pratiques étudiées, deux outils, l’agenda standard et le 5S se démarquent significativement et sont caractéristiques des entreprises avancées en Lean. De plus, deux autres pratiques respectent le critère de Cohen (1992) et pourraient possiblement jouer un rôle important dans la caractérisation des entreprises avancées en Lean.

À priori aucune relation ne semble exister entre la performance globale de l’entreprise et l’intégration des pratiques proposées par la démarche MEQ et ce, peut importe la manière de le calculer. Malgré tout, ceci ne signifie pas qu’aucun impact n’est présent sur certains aspects plus ciblés de la performance de l’entreprise.

Les entreprises ayant misé sur un taux important d’employés dédiés au Lean ou à l’amélioration auraient des frais d’exploitation significativement moins élevés (de 87 % à 66 % en frais d’exploitation en passant de 0 % à 0,5 % d’employés dédiés). En fait 41 % de la baisse des frais d’exploitation d’une entreprise peut-être expliquée par l’augmentation du nombre d’employés dédiés (significatif | α ≤ 0,05). La synergie d’amélioration semble optimale lorsque les entreprises dédient au moins 1 % de leur main d’œuvre à l’amélioration. Malheureusement, il s’agit d’une situation plutôt rare (10 % des entreprises seulement).

Les entreprises ayant misé sur une formation plus longue et complète (jusqu’à 40 heures) de leurs employés dédiés au Lean ou à l’amélioration voient leurs frais de matières premières ou de sous-traitance prendre plus d’importance par rapport à leur frais d’exploitation. Ceci se traduit par un meilleur contrôle des processus internes à l’entreprise. En fait 25 % de ce resserrement des frais d’exploitation des processus internes d’une entreprise peut être expliqué par une formation plus longue et complète des employés dédiés (significatif | α ≤ 0,1). Cette formation plus complète leur permet

une meilleure compréhension de : leur environnement, des outils à leur disposition et une meilleure capacité de détection des opportunités d’amélioration à fort impact.

Les entreprises ayant mieux intégré les divers outils Lean voient leurs frais associés aux rejets, réparations et garanties diminuer significativement (de 7,8 % à 3,5 % en coûts de non-qualité en passant de 0 % à 50 % des outils Lean). En fait 33 % de la diminution des frais associés à la non-qualité est expliquée par la présence et la maîtrise d’outils Lean au sein de l’entreprise (significatif | α ≤ 0,1).

Les entreprises ayant mieux intégré les divers outils Lean voient leurs frais associés aux retards de livraison diminuer significativement (de 14,3 % à 5,9 % de livraisons retardées en passant de 0 % à 50 % des outils Lean). En fait 33 % de la diminution des frais associés à la non-qualité est expliquée par la présence et la maîtrise d’outils Lean au sein de l’entreprise (significatif | α ≤ 0,1).

Le NPO, niveau de performance des outils, est un bon estimateur de la performance globale de l’entreprise et est de loin supérieur à l’estimateur basé sur la présence des outils Lean (R2 = 0,62 > 0,31).

L’expérience antérieure et la nature de l’organisation ne peuvent pas influencer significativement la performance globale d’une entreprise. Cette hypothèse est fort intéressante pour les entreprises, car elle démontre que peu importe le point de départ d’une entreprise pour sa transition Lean, elle ne sera pas vouée à des performances moindres ou supérieures pour autant.

L’intégration de pratiques Lean va forcer (R2 = 0,36) l’intégration ou la découverte d’outils Lean. Ceci permettra éventuellement d’influer sur la performance globale de l’entreprise puisque les outils constituant le NPO seront éventuellement intégrés.

Sachant que le NPO est la caractéristique la plus importante pour améliorer la performance globale de l’entreprise il serait nécessaire de modifier l’offre de formation et de soutien aux entreprises pour leur permettre de faire progresser la présence et la maîtrise des outils ayant le plus d’impact.

Selon nos observations seulement 3,6 % des entreprises n’ont pas de besoins d’informations, de formations ou de soutien pour les outils constituant le NPO : 5S, AMDEC, agenda standard, logiciel ERP-MRP, les kanbans, les tableaux de bord,

l’autonomation, les formulaires A3 et l’optimisation des processus administratifs. Il s’agit donc d’une opportunité importante sur laquelle travailler pour améliorer significativement la performance des entreprises.

La productivité d’une entreprise et les ressources qu’elle accorde à la recherche et au développement ne semblent pas dépendre de l’intégration technique du Lean au sein de cette dernière. Il faudrait donc chercher des réponses davantage en fonction des facteurs culturels, de la nature des opérations ou des facteurs externes à l’entreprise pour expliquer la productivité et les ressources accordées à la R&D.

Bien que la gestion du Lean par la fonction de production ne soit pas une avenue très présente dans l’industrie (14,3 %), il semble qu’il serait à l’avantage des entreprises de revoir leur structure organisationnelle pour favoriser l’atteinte de performance globale significativement plus élevée (χ2 = 5,33 et p-value = 0,02). La gestion du Lean par la

production serait un premier pas avant une gestion par chaîne de valeur.

La communication d’un objectif tel que : l’amélioration des conditions de travail et de la productivité œuvre directement pour une prospérité mutuelle à long terme. Cette situation pourrait donc expliquer l’impact favorable sur les performances de l’entreprise, car il s’agit d’un objectif partagé par l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise. Il semble d’ailleurs être un candidat probable (χ2 = 3,27 et p-value = 0,07) de

caractéristique favorable à la culture de l’entreprise.

Lorsqu’une entreprise comprend mal le concept d’être Lean et se concentre sur seulement l’un des états Lean (SPP, SOP, structure organisationnelle ou respect mutuel) sa performance globale peut être pire que si elle n’intègre en rien les concepts du Lean. Il est donc primordial pour les entreprises de considérer le Lean comme un tout et de l’intégrer comme tel.

Les entreprises n’ayant pas intégré les concepts Lean ou seulement quelques-uns sont généralement désavantagés (médiane du différentiel des performances : -33 %). Par contre, les entreprises ayant intégré deux ou plus de ces caractéristiques, et pouvant donc se considérer Lean ont un avantage certain et offre des performances significativement plus élevées (médiane du différentiel des performances : 41 %).

Pour résumer, il ne sert à rien de rechercher la perfection dans l’un ou l’autre des différents axes du Lean. Pour atteindre son plein potentiel, une entreprise a davantage à gagner à intégrer de manière globale le Lean à ses opérations. Ceci ce traduit par l’intégration d’une majorité de pratiques ciblées, la maîtrise d’un nombre d’outils Lean limité, par l’établissement d’un climat de respect mutuel et finalement, par l’alignement de sa structure organisationnelle avec l’objectif de création de valeur.