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1.4. Interaction drogue/membrane : Approche par HR-MAS

1.4.1. Résultats de l’étude

La Figure 40 présente un spectre 1H-RMN de MLVs obtenu par HR-MAS ; en accord avec la méthode, à condition de contrôler la vitesse de rotation et la température d’acquisition, des résonances bien résolues sont clairement identifiables sur un tel spectre et permettent leur attribution aux différents groupements des phospholipides (Figure 40) par des méthodes classiques de RMN à haute résolution. Du fait de l’existence d’une transition de phase (297K pour la DMPC), le contrôle de température revêt une grande importance. L’enregistrement de spectres d’un même échantillon à différentes températures a permis de mettre directement en évidence la transition de phase lamellaire gel-fluide, en mesurant la largeur de raie à mi-hauteur, variant de 80 à 10Hz lors du passage à la température de transition. Parallèlement, les différences de largeur de raie observées entre groupements révèlent une différence de mobilité locale donc de fluidité locale, en accord avec les résultats obtenus dans la littérature sur des modèles uni-lamellaires de phospholipides (SUV). Ces deux paramètres sont donc utilisables pour apprécier les modifications membranaires locales, induites par exemple par des

effecteurs pharmacologiques, et d’effectuer la comparaison des résultats obtenus avec ceux provenant des études plus classiques présentées précédemment.

Figure 40 : A) Représentation de la molécule de DMPC, B) Spectre RMN-1H HR-MAS (400 MHz) de

MLV (50 mM) dans le D2O, avec une rotation de 4 kHz à 300 K.

Méthode classique. Comme présenté plus haut dans le texte, l’étude de la transition de phase repose en particulier sur la mesure de l’anisotropie de déplacement chimique (CSA : Chemical Shift Anisotropy) en RMN-31P, par des méthodes d’acquisition de RMN du solide statique (méthodes double quanta, cross polarization magic angle spinning, écho de Hahn…), délai de recyclage long entre scans, accumulations longues…). Le noyau phosphore-31 a un déplacement chimique qui dépend de son orientation par rapport au champ magnétique (Figure 41). Dans ces conditions, le CSA (mesure de la largeur du signal) est représentatif de

la fluidité de la partie superficielle de la membrane. La courbe représente la dépendance en température du CSA de la DMPC seule, ou en présence de 3a, 3b, 3c. Classiquement, une rupture de pente dans la valeur du CSA est associée à un saut de fluidité relié à la transition gel-phase fluide. La même courbe construite sur des échantillons contenant les molécules 3b et 3c ne montre aucune modification. A l’opposé, la présence de 3a induit un abaissement de cette température de 2 K sans que la fluidité globale ne soit modifiée en dehors de la zone de transition. Ces résultats sont en accord avec les expériences RPE -5NS.

Figure 41 : A) Courbe des valeurs du CSA en fonction de la température de la DMPC pure (○), et en

présence de 3a (□), 3b (◊), 3c (●), B) Spectre 31P-RMN (bas) de MLV DMPC (50 mM) à la température de

transition (296 K) (haut) et en présence de 3a (rapport drogue lipides 1/5 W/W), C) Courbe des valeurs de

la mesure de la largeur à mi-hauteur de DMPC pure (○), et en présence de 3a (□), 3b (◊), 3c (●), D)

HR-MAS. La courbe présentée sur la Figure 41 porte les largeurs à mi-hauteur des résonances méthyliques de la choline CH3 (δ=3.23ppm, voir la Figure 40) en fonction de la température mesurées sur un échantillon de DMPC pure ou en présence de 3a, 3b, 3c. Les trois courbes correspondant au témoin et à 3a, 3b, similaires, confirment que les molécules 3b et 3c n’affectent ni la température de transition de phase (297 K) ni la fluidité membranaire globale. Au contraire, l’allure générale de la courbe et les largeurs de raie mesurées en présence de 3a montrent une diminution de 2 K de la transition de phase sans qu’une modification globale de fluidité en dehors de la zone de transition ne soit observée. Ces résultats sont en plein accord avec ceux observés par les méthodes classiques.

Localisation de la drogue. La résolution obtenue par HR-MAS sur ces échantillons permet d’identifier formellement les résonances de 3a en présence de MLV, alors que cette molécule est complètement insoluble dans l’eau (pour un ratio lipides / drogue = 5 / 1 M/M). Les déplacements chimiques et les largeurs de raie des résonances des phospholipides n’étant pas modifiés en présence de 3a, l’existence d’une altération de la structure membranaire (effet détergent) est très improbable. De même, la similitude en déplacement chimique et en largeur de raie des résonances de 3a en présence de MLV et en solution chloroformique est en accord avec un environnement hydrophobe où 3a serait solubilisée. Cet environnement n’est présent que dans la phase membranaire, et il raisonnable de considérer que 3a est solubilisée dans la membrane. On note toutefois un élargissement de résonances de 3a de l’ordre de 1-2 Hz : cette observation suggère l’existence d’interactions de la molécule avec la membrane.

Dans ces conditions « apparemment » proches de celles du milieu liquide, la recherche de proximités spatiales entre la molécule et les groupements des phospholipides peut être entreprise en enregistrant des spectres de corrélation dipolaires (NOESY) qui mettent en évidence des proximités allant jusqu’à 6Å (localisation de la drogue). Cette localisation n’a pas été possible dans le cas présent du fait du faible temps de séjour de la drogue en membrane, ne permettant pas la mise en jeu de l’effet Overhauser.

Ici, des arguments indirects ont été obtenus en utilisant la méthode classique en RMN-2

de déterminer sa position dans la membrane. Dans ces conditions, la mise en évidence de diminution d’écarts quadrupolaires pour les doublets de la choline permet d’estimer la présence de 3a au niveau de la région superficielle de la membrane (la région dite « Plateau ») dans la couche externe de la membrane. La HR-MAS montre dans ce cas une possible limite technique pour la localisation et les conséquences dynamiques de la présence de 3a dans une membrane.

Cependant, la modification des conditions (Figure 42) d’enregistrement comme le choix de séquences adaptées permettent le plus souvent de s’affranchir de cette limitation. Une façon aisée est de varier la température du système. En effet, la largeur de raie des résonances aromatiques varie avec la température sur une gamme comprise entre 288 K (10.12 Hz, 2H, Pyr-3,5) et 304 K (26.84 Hz, 2H, Pyr-3,5). Ce changement est lié à la transition de phase lamellaire gel-fluide des MLVs. Plus qu’un changement isolé de fluidité, l’existence de variations de déplacement chimique pour 3a permet d’envisager l’existence de deux entités distinctes par leur environnement et leur mobilité. L’utilisation de séquences HR-MAS avec filtre de diffusion (Figure 43) ou d’écho de spin CPMG qui pondère le signal en fonction du T2 (Figure 43) permet respectivement d’isoler les composantes du spectre. Il est raisonnable de considérer que 3a est présent dans deux zones de la membrane en phase lamellaire fluide, avec des contraintes plus ou moins importantes.

Figure 42 : : Spectre 1H-RMN HR-MAS (9.4T, de 6,0 – 9,0 ppm), de la DMPC (50 mM dans D2O) en

présence de 3a (0.5 mM dans D2O) à différentes températures A) à 288 K, B) à 291 K, C) à 296 K, D) à 298

Figure 43 : Spectre 1H-RMN HR-MAS (9.4T, de 6,0 – 9,7 ppm), de la DMPC (50 mM dans D2O) en

présence de 3a (0.5 mM dans D2O), A) spectre RMN de diffusion, B) spectre 1H-RMN HR-MAS CPMG,

C) spectre 1H-RMN HR-MAS.

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