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L ’ ACOUSTIQUE NON - LINEAIRE ( TECHNIQUE )

3.1 Aperçus des techniques

3.1.2 Résonance non-linéaire (NRUS, NRS et impact)

La technique de spectroscopie par résonance ultrasonore non-linéaire [en anglais « nonlinear resonant ultrasound spectroscopy » (NRUS)] fait partie des méthodes NEWS vues précédemment. C’est une extension de la technique de spectroscopie par résonance ultrasonore (RUS) (Visscher et al., 1991; Migliori et al., 1993), dédiée à l’évaluation du tenseur élastique d’un matériau à partir des propriétés de ses résonances. En NRUS, une seule résonance est généralement étudiée. Si le matériau contient des inhomogénéités souples telles que des microfissures ou des dislocations, la fréquence de résonance du matériau décroit lorsque l’amplitude d’excitation augmente. Le matériau s’assouplit (son module élastique décroit). Si le matériau est de type non-linéaire hystérétique quadratique, la dépendance en amplitude de la variation relative du décalage fréquentiel est linéaire en fonction de l’amplitude, le coefficient de proportionnalité est αf. Comme la technique NRUS est basée sur la résonance du matériau, le facteur de perte du matériau qui est inversement proportionnel au facteur de qualité Q (Q = δf/f avec δf égale à la largeur à mi-hauteur du pic de résonance) peut être déterminé. Il est ainsi possible d’extraire la non-linéarité dissipative d’origine élastique à partir de la variation de Q-1 lorsque le niveau de déformation augmente. Cette relation est linéaire pour un matériau non-linéaire non classique. Le coefficient de proportionnalité est αQ. Les paramètres αf et αQ sont de même nature que le paramètre α présenté dans le paragraphe

CHAPITRE 3.LE CONTROLE NON-DESTRUCTIF PAR LACOUSTIQUE NON-LINEAIRE

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précédent. Par contre la technique NRUS permet de distinguer la contribution de la partie imaginaire (dissipation) de la partie réelle (élastique). Un aperçu exhaustif des modèles, des équations et des mécanismes à l’origine de la non-linéarité non classique est présenté au chapitre 2.

Expérimentalement, Il existe plusieurs façons d’exciter les résonances et mesurer les paramètres non-linéaires. La méthode la plus courante consiste à sonder les matériaux par un balayage fréquentiel autour d’une de leur fréquence de résonance (en général le 1er mode de barreau (Nazarov, 2001; Nazarov et al., 2007; Pasqualini et al., 2007) ou le 1er mode de flexion (Van den Abeele et al., 2001b)), en augmentant progressivement le niveau de déformation (typiquement entre 10-6 et 10-4). L’excitation est généralement réalisée à l’aide d’un élément piezo-électrique parfaitement bien collé à l’une des extrémités de l’échantillon. Parfois l’échantillon est excité sans contact, à l’aide d’un haut-parleur (Van den Abeele et al., 2000a; Van den Abeele et al., 2001a). Il est aussi possible d’exciter les modes de résonance en tapant sur le matériau à l’aide d’un marteau (Chen et al., 2010). Cette technique a l’avantage de nécessiter un appareillage plus simple et de ne faire aucun à priori sur le type de modes excités, idéal pour des structures de géométrie complexe, par contre il est impossible de remonter à la valeur intrinsèque de la non-linéarité α. Pour finir, une méthode appelée spectroscopie par réverbération non linéaire [en anglais « nonlinear reverberation spectroscopy » (NRS)] consiste à exciter le matériau à sa fréquence de résonance (Van den Abeele and De Visscher, 2000; Van den Abeele et al., 2009b). Lorsque le régime stationnaire est atteint, l’excitation forcée est coupée. Le matériau retourne alors progressivement à son état d’équilibre initial. Au cours de la relaxation, l’amplitude de vibration du matériau décroit ce qui va provoquer une augmentation de sa fréquence de résonance et une diminution de son atténuation. Cette technique est séduisante car plus rapide que les méthodes de résonance classiques (une seule acquisition est nécessaire) mais n’est opérationnelle que pour des matériaux peu atténuants. En effet, elle nécessite une réduction progressive de l’amplitude afin d’avoir suffisamment de cycles (environ une dizaine) pour pouvoir approximer le signal par un sinus à décroissance exponentielle. Cette technique est difficilement envisageable dans des matériaux aussi atténuants que l’os (Q ≈ 30-50 (Lakes, 2009)).

Pour conclure, les techniques basées sur la résonance ont plusieurs avantages comparés aux méthodes basées sur la génération d’harmonique. Tout d’abord, puisqu’on est sur une résonance du système, il suffit d’injecter peu d’énergie pour produire de fortes déformations. Ensuite, elles ont l’avantage de donner accès directement aux deux

non-S. Haupert – Juin 2012 95 linéarités (élastique et dissipative) non-classiques du matériau lorsque la non-linéarité cubique δ est négligeable (ce qui est presque toujours le cas en pratique). Les mesures ne sont pas perturbées par les non-linéarités de l’électronique, ni par la non-linéarité atomique (la contribution non-linéaire quadratique β n’est pas présente en résonance et la non-linéarité cubique δ est souvent négligeable) qui limitent la sensibilité ultime des techniques de modulation de fréquence (Zaitsev et al., 2011). Le choix de la fréquence est uniquement dicté par la résonance à étudier. Les résultats sont en principe indépendants de la fréquence en l’absence de conditionnement ou de relaxation (voir paragraphe 2.3.3), mais peuvent par contre dépendre du mode de résonance (ordre (mode 1, 2…) et du type de résonance (compression, flexion, torsion…)) ce qui peut aussi s’avérer être un avantage lorsqu’on souhaite caractériser l’endommagement (voir paragraphe 3.1.4 : localisation de l’endommagement). La non-linéarité mesurée en résonance ne dépend pas de la bande passante comme c’est le cas pour les techniques basées sur la génération d’harmoniques (simples ou mélangées) (voir Fig.2). Le principal inconvénient de la méthode de résonance est la résonance elle-même. Il faut que celle-ci soit bien identifiée et séparée des autres résonances (pas de recouvrement), ce qui nécessite des géométries d’échantillon bien contrôlées.

Figure 2 : Ratio (= coefficient de non-linéarité) entre l’amplitude de la seconde harmonique et l’amplitude fondamentale sur une bande passante comprise entre 180 et 200kHz. En trait plein : échantillon d’aluminium endommagé ; en pointillé : échantillon d’aluminium intact. On remarque que le coefficient de non-linéarité de l’aluminium varie ±40dB suivant la fréquence alors qu’il devrait être constant. La variation du coefficient de non-linéarité est principalement due à la variation de la bande passante du système. Extrait de (Duffour et al., 2006)

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