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CHAPITRE 1. Introduction

1.5 La réplication de l’ADN du plastide

1.5.1 La machinerie de réplication

Tel que vu à la section 1.3.2, le génome du plastide est présent en de très nombreuses copies dans les cellules végétales et représente près de 25% de la masse totale de l’ADN dans une cellule d’Arabidopsis [61]. Une machinerie de réplication de l’ADN est donc dédiée au plastide et permet de maintenir de hauts niveaux d’ADNpt durant la croissance des tissus [33]. L’existence d’une machinerie de réplication de l’ADNpt a d’ailleurs été démontrée, il y a maintenant plus de 30 ans, par purification d’une activité de polymérisation de l’ADN à partir d’extraits chloroplastiques d’épinards [62]. La caractérisation des propriétés biochimiques de cette activité de polymérisation d’ADN suggérait qu’une ADN polymérase distincte des ADN polymérases nucléaires était responsable de la réplication de l’ADN du plastide [62]. Il a depuis été démontré que deux ADN polymérases hautement similaires à l’ADN polymérase I

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des cyanobactéries sont encodées dans le génome nucléaire et ciblées, suite à leur expression, dans les plastides du riz [63,64], d’Arabidopsis [64,65] et du tabac [66]. Il a aussi été remarqué que l’expression d’une seule de ces deux ADN polymérases, POLIB, est augmentée chez Arabidopsis suite à une exposition au peroxyde d’hydrogène, suggérant un rôle plus spécifique dans la réparation de l’ADN pour cette polymérase [64].

Chez Arabidopsis, une caractérisation in vivo de mutants des gènes POLIA et de POLIB a établi la participation de chacune de ces polymérases dans la réplication de l’ADN des organites [43]. En effet, les mutations polIa et polIb provoquent une diminution des niveaux d’ADN mitochondrial et chloroplastique. Le rôle essentiel, mais redondant, de POLIA et POLIB dans la réplication de l’ADN des organites a de plus été démontré par la létalité associée à la combinaison des mutations homozygotes de ces deux gènes [43]. Outre la redondance de ces deux polymérases dans le processus de réplication, cette étude a aussi confirmé la spécialisation de POLIB dans la réparation de l’ADN de la mitochondrie et du plastide [43] (voir section 1.6.3.4).

Comparativement à ces deux ADN polymérases, les autres acteurs participant à la réplication de l’ADN du plastide demeurent très peu caractérisés. Néanmoins, des études ont démontré qu’il est possible d’isoler, par purification biochimique, des activités d’ADN primase, d’ADN hélicase et d’ADN gyrase à partir d’extraits de chloroplastes de pois [67-69]. Deux homologues de l’hélicase bactérienne RecQ ont d’ailleurs été identifiés dans les chloroplastes du riz [70]. D’autre part, le génome d’Arabidopsis encode des homologues de chacune des sous-unités A et B des ADN gyrases procaryotes [45]. Celles-ci sont ciblées à la fois au plastide et à la mitochondrie et, de manière similaire à leurs homologues bactériens, catalysent la relaxation des surenroulements positifs de l’ADN causés par la réplication [45,71].

1.5.2 Les mécanismes de réplication

Puisque le génome du plastide est retrouvé sous forme d’un mélange de molécules circulaires, linéaires et branchées, plusieurs mécanismes participent donc à sa réplication [revu dans 72]. Trois principaux mécanismes ont été proposés jusqu’ici : le modèle de la

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boucle D double (Double D-Loop), le modèle du cercle roulant (Rolling circle) et le modèle de réplication dépendant de la recombinaison. Tout comme la proportion de chacune des formes génomiques citées plus tôt, la contribution de chacun de ces mécanismes à la réplication de l’ADNpt reste un sujet de controverse. Toutefois, alors que les modèles de la boucle D double et du cercle roulant ne sont compatibles qu’avec des molécules génomiques de forme circulaire, le modèle de réplication dépendant de la recombinaison nécessite quant à lui une molécule d’ADN linéaire en plus d’une seconde molécule, circulaire ou linéaire [revu dans 72].

Le modèle de la boucle D double, ou boucle de déplacement, s’amorcerait par l’initiation de la synthèse d’ADN à l’emplacement de certaines séquences spécifiques du génome, nommées origines de réplication. Même si plusieurs contradictions existent quant à l’emplacement des origines de réplication du plastide, il semble néanmoins probable que deux origines d’orientation opposée soient localisées au sein de chacun des IRs [revu dans 72]. L’initiation de la synthèse d’ADN sur ces deux origines de réplication produirait deux boucles D d’orientation convergente, dans lesquelles un court segment d’ADN nouvellement synthétisé maintiendrait séparés les deux brins d’ADN matrices (Fig. 5A). De telles structures ont d’ailleurs été observées par microscopie électronique dans l’ADN chloroplastique du pois et du maïs [73]. Suite à l’élongation de ces deux brins d’ADN nouvellement synthétisés, la rencontre des deux boucles D générerait une bulle de réplication bidirectionnelle. Alors que chacune des boucles D dépasserait les origines de réplication, une synthèse discontinue d’ADN s’amorcerait sur les brins opposés. La rencontre des deux fourches de réplication, à près de 180 degrés des origines de réplication, compléterait finalement la réplication de la molécule génomique circulaire.

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Figure 5. Représentation schématique des modèles de la boucle D double et du cercle roulant. (A) Modèle de la boucle D double. (B) Modèle du cercle roulant.

Les traits noirs représentent les brins matrices. Les traits rouges et bleus représentent, respectivement, les brins nouvellement synthétisés continus et discontinus. Les flèches représentent la direction de la synthèse d’ADN. Cette figure est adaptée de [74].

Quant au modèle du cercle roulant, il est habituellement suggéré que celui-ci s’initierait au site de terminaison de la réplication par le mécanisme de la boucle D double. [72,75]. Selon ce modèle, suite à l’achèvement d’une ronde de réplication par boucle D double, l’extrémité 3’ nouvellement synthétisée déplacerait sa propre extrémité 5’ afin de poursuivre son élongation. Une synthèse discontinue d’ADN s’initierait alors sur le brin déplacé (Fig. 5B). Toujours selon ce modèle, puisque l’élongation du brin continu peut effectuer plusieurs tours de la molécule génomique circulaire, ce type de réplication pourrait mener à la formation de concatémères tête-à-queue du génome.

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Tel que mentionné précédemment, de nombreuses contradictions existent quant aux positions exactes des origines de réplication du plastide et quant à leur contribution réelle dans le processus de réplication. Chez le tabac, l’inactivation de trois des quatre origines de réplication du génome du plastide n’affecte que très peu sa capacité à se répliquer [76]. De plus, chez l’algue verte C. reinhardtii, l’inhibition de la réplication du plastide par la novobiocine, un inhibiteur des gyrases, déclenche un type de réplication dépendant de la recombinaison [77]. Un mécanisme alternatif de réplication de l’ADNpt dépendant de la recombinaison a d’ailleurs été récemment proposé [35,72]. Selon ce modèle, l’extrémité 3’ d’une molécule linéaire d’ADN envahirait un duplex d’ADN homologue et mènerait à l’établissement d’une fourche de réplication (voir section 1.6.3.3). Cet envahissement d’un duplex d’ADN matrice par une molécule linéaire expliquerait les nombreuses molécules branchées composant l’ADNpt des nucléoïdes [35].

1.6 Les mécanismes assurant la stabilité du génome du