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CHAPITRE 1. Introduction

1.6 Les mécanismes assurant la stabilité du génome du plastide

1.6.3 Les mécanismes de réparation des brisures double-brin de l’ADN

1.6.3.1 La réparation des DSBs : les mécanismes de recombinaison homologue

Les mécanismes réparant les DSBs générés lors de la fracture de l’hélice d’ADN peuvent être divisés en deux principales catégories : les mécanismes de recombinaison homologue et les mécanismes de religation des deux extrémités du bris. À la différence des mécanismes de religation, les mécanismes de recombinaison homologue re-synthétisent la séquence nucléotidique manquante en utilisant un second duplex d’ADN homologue comme matrice. Ces mécanismes de recombinaison homologue sont ainsi qualifiés de « conservateurs », ceux-ci restituant habituellement la séquence d’ADN d’origine. Néanmoins, l’utilisation d’un

duplex homologue comme matrice peut mener à un phénomène nommé « perte

d’hétérozygotie », une partie de la séquence d’ADN de la molécule endommagée pouvant être convertie en la séquence du duplex homologue.

Les mécanismes de recombinaison homologue sont initiés par la dégradation des brins 5’ de chacune des extrémités du bris. Cette dégradation, également appelée résection, génère des extrémités 3’ libres simple-brin très recombinogéniques permettant la synthèse d’ADN. Ces extrémités 3’ simple-brin sont ensuite recouvertes par des protéines de liaison à l’ADNss (SSB, Single-strand DNA-binding protein, chez les procaryotes; RPA, Replication protein A, chez les eucaryotes) qui confèrent une structure linéaire à l’ADNss et préviennent son

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appariement non-spécifique. Les protéines de liaison à l’ADNss sont subséquemment remplacées par des recombinases (RecA chez les procaryotes; RAD51 chez les eucaryotes) assurant l’invasion d’un duplex d’ADN homologue par la ou les extrémités 3’ du bris. Une fois le duplex homologue envahi et une boucle D formée, une ADN polymérase synthétise les séquences nucléotidiques manquantes. Enfin, la séparation des duplex, ou la résolution des jonctions de Holliday, restitue deux duplex d’ADN intacts [revu dans 187].

Figure 10. La réparation d’un DSB par recombinaison homologue. Suite à la

résection des extrémités 5’, l’invasion d’un duplex d’ADN homologue (lignes rouges) permet l’établissement d’une boucle D. La réparation du DSB peut ensuite être complétée par le mécanisme de SDSA (Synthesis-Dependent Strand

Annealing) ou de DSBR (Double-Strand Break Repair). Le mécanisme de SSA

(Single-Strand Annealing) permet également la réparation d’un DSB. Les lignes violettes représentent des séquences répétées d’au moins 30 nucléotides. Les pointillés représentent des sections d’ADN nouvellement synthétisées. Cette figure est adaptée de[74].

Trois principaux mécanismes de recombinaison homologue ont la capacité de réparer les DSBs : le SDSA (Synthesis-Dependent Strand Annealing), le DSBR (Double-Strand Break Repair)

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et le SSA (Single-Strand Annealing). Le SDSA se caractérise par l’envahissement d’un duplex d’ADN homologue par une seule des extrémités 3’ du DSB, puis par la synthèse de la séquence d’ADN chevauchant le site du bris (Fig. 10). La dissociation de ce complexe et le ré- appariement du brin nouvellement synthétisé à la seconde extrémité du bris permet finalement le remplissage des régions d’ADNss et la complétion de la réparation. Tout comme le SDSA, le DSBR débute par l’envahissement d’un duplex d’ADN homologue par une des extrémités 3’ du DSB. Toutefois, à la différence du SDSA, une synthèse d’ADN est également initiée à partir de la seconde extrémité 3’ du DSB, celle-ci utilisant comme matrice le brin déplacé du duplex homologue (Fig. 10). Puisque le mécanisme de DSBR mène à la formation de deux jonctions de Holliday, la restitution de deux duplex d’ADN intacts dépend de la résolution de chacune de ces jonctions. Selon l’orientation de ces résolutions, le mécanisme de DSBR peut résulter en la formation d’un transfert réciproque d’ADN (crossover), dans lequel les séquences chromosomiques en aval du bris sont interchangées. Quant au processus de SSA, celui-ci nécessite, suite à la résection des brins, l’appariement des deux extrémités 3’ libres simple-brin par le biais de séquences homologues d’au moins 30 nucléotides (Fig. 10) [188]. Le DSB est ensuite réparé par le clivage des sections d’ADN non-appariées et par la religation des brins. Cependant, même si le SSA est généralement classé parmi les mécanismes de recombinaison homologue, ce processus ne peut être considéré comme un mécanisme de réparation des DSBs conservant la séquence initiale de l’ADN. En effet, la fusion de ces deux séquences répétées génère habituellement des délétions de part et d’autre du DSB [revu dans 188].

La réparation des DSBs par recombinaison homologue constitue sans aucun doute le mécanisme de réparation de l’ADN le plus étudié dans le chloroplaste. En effet, les premières évidences ayant suggéré l’existence de recombinaison homologue dans le chloroplaste ont été obtenues il y maintenant plus de 30 ans. Il avait été conclu que des événements de recombinaison entre les deux IRs étaient à l’origine des deux isomères génomiques composant l’ADNpt [34] (voir section 1.3.2). Des événements de recombinaison entre les IRs ont aussi été observés chez l’algue verte Chlamydomonas reinhardtii [189]. Chez cette algue,

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le gène encodant l’ADN ribosomal 23S est localisé au sein des IRs et contient un intron du groupe I. Cet intron contient, à son tour, un cadre ouvert de lecture encodant l’endonucléase I-CreI. Cette endonucléase clive de manière très spécifique une séquence nucléotidique de 22 paires de bases située à la jonction exon-exon du gène 23S (c’est-à-dire une copie du gène 23S ne possédant pas l’intron du groupe I). Ainsi, il a été observé que des ADNc du gène 23S intègrent de manière systématique l’intron du groupe I lorsque transformés dans le chloroplaste de Chlamydomonas [189]. Il en a donc été conclu que suite au clivage de l’ADNc par I-CreI, le DSB généré est réparé en utilisant comme matrice une copie génomique du gène 23S [190]. De tels résultats démontrent donc l’existence du processus de recombinaison homologue dans le chloroplaste. Les trois principaux mécanismes de recombinaison homologue (DSBR, SDSA et SSA) réparent d’ailleurs les DSBs dans les plastides de Chlamydomonas [191].