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CHAPITRE 1. Introduction

1.6 Les mécanismes assurant la stabilité du génome du plastide

1.6.1 Les mécanismes de prévention et de réparation des dommages oxydatifs

1.6.1.2 La détoxification des ROS au chloroplaste

Même si les voies de signalisation rétrograde limitent la production de ROS par le processus de photosynthèse, les modifications du transcriptome nucléaire nécessitent généralement un délai de plusieurs heures avant d’être complétées. De plus, cette adaptation de l’expression génique nucléaire ne suffit parfois pas à enrayer le stress oxydatif chloroplastique. Il est donc essentiel que des mécanismes assurent la détoxification des ROS dans le chloroplaste. Alors que dans ce compartiment les caroténoïdes constituent la principale défense contre l’oxygène singulet en dissipant l’excès énergétique sous forme de chaleur [revu dans 122], une complexe machinerie enzymatique détoxifie le superoxyde et le peroxyde d’hydrogène [revu dans 78,123]. Une machinerie spécifique est dédiée à la détoxification de ces types de ROS afin d’éviter la formation de radicaux hydroxyles (•OH) hautement réactifs et menaçant l’ensemble des composants cellulaires, dont l’ADN [124]. Le cycle d’Haber-Weiss et la réaction de Fenton peuvent en effet transformer le superoxyde et le peroxyde d’hydrogène

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en radicaux hydroxyles par le biais d’une catalyse chimique par le fer [125]. Aucune machinerie enzymatique ne permet la détoxification de ce type de ROS.

Deux principales étapes assurent la détoxification du superoxyde et sa conversion en molécules d’eau : 1) la transformation de deux molécules de superoxyde en peroxyde d’hydrogène par les enzymes de la famille des superoxydes dismutases et 2) la réduction du peroxyde d’hydrogène en eau par une enzyme de type peroxydase. Sept superoxyde

dismutases (SODs) sont encodées dans le génome d’Arabidopsis, dont trois sont

dépendantes du fer (FSD1, FSD2 et FSD3), trois autres dépendent du cuivre/zinc (CSD1, CSD2 et CSD3) et une est dépendante du manganèse (MSD1) [revu dans 126]. Parmi celles-ci, FSD2, FSD3 et CSD2 sont localisées au chloroplaste [127-129], et participent à la tolérance du stress oxydatif lié à la photosynthèse. En effet, chez Arabidopsis, chacune des mutations fsd2, fsd3 et csd2 cause un développement anormal des chloroplastes en plus d’être associée à un retard de croissance et à une coloration pâle des feuilles [127,130]. Une croissance à faible intensité lumineuse rétablie cependant partiellement la croissance des tissus, démontrant l’importance de ces enzymes pour l’équilibre rédox du chloroplaste. Par ailleurs, CSD2 est principalement retrouvée du côté stromal des thylakoïdes et, conséquemment, à proximité de l’ADNpt et des sites de production de ROS par la PET [129]. De manière similaire à CSD2, FSD3 est localisée spécifiquement aux nucléoïdes [127]. Quant à FSD2, celle-ci est retrouvée plus dispersée dans le stroma du chloroplaste [127]. FSD2 et FSD3 interagissent toutefois physiquement, suggérant que FSD3 est capable de recruter FSD2 aux nucléoïdes [127]. Étonnamment, une étude récente a démontré que FSD2 et FSD3 sont des composantes essentielles du complexe transcriptionnel de la PEP [131], appuyant la thèse de l’importance des superoxydes dismutases pour la stabilité de l’ADNpt et son expression.

Afin d’éviter la diffusion du peroxyde d’hydrogène dans le stroma du chloroplaste et sa transformation en radical hydroxyle, les superoxydes dismutases sont retrouvées à proximité de la machinerie convertissant le peroxyde d’hydrogène en eau [revu dans 126]. Trois types de peroxydases permettent cette conversion dans le chloroplaste : les peroxydases à ascorbate (APX), les peroxydases à glutathion (GPX) ainsi que les peroxyrédoxines (PRX). Les

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APXs et GPXs utilisent l’ascorbate (AsA) et le glutathion (GSH), respectivement, comme donneur d’électrons lors de la réduction du peroxyde d’hydrogène en eau [126,132] (Fig. 7). Suite à cette catalyse, l’ascorbate se retrouve sous forme oxydée, nommée monodihydro- ascorbate (MDA) et le glutathion sous forme de disulfure de glutathion (GSSG). De manière à régénérer les pools d’AsA et de GSH, les enzymes MDA réductase (MDAR) et glutathion réductase (GR) utilisent le NAD(P)H pour réduire le MDA et le GSSG. Des isoformes de chacune de ces enzymes sont d’ailleurs retrouvées dans le chloroplaste [133-140]. De plus, deux isoformes de l’APX chloroplastique sont retrouvées chez la plupart des plantes, une APX étant liée à la membrane des thylakoïdes (tAPX) et l’autre étant stromale et soluble (sAPX) [133,141]. Bien que ces deux APXs soient nécessaires à la détoxification efficace du peroxyde d’hydrogène [142], la perte de tAPX semble avoir un impact plus important que celle de sAPX chez Arabidopsis [134]. Cette observation démontre probablement l’importance du couplage entre les SODs et les APXs à l’endroit de la membrane des thylakoïdes.

Figure 7. Les mécanismes et enzymes participant à la détoxification des ROS dans le chloroplaste. Les caroténoïdes constituent la principale défense contre

l’oxygène singulet en dissipant l’excès énergétique sous forme de chaleur. Des enzymes de la famille des superoxydes dismutases (SODs) transforment le superoxyde en peroxyde d’hydrogène. Le peroxyde d’hydrogène est ensuite transformé en eau par le biais des peroxydases à ascorbate (APX), des peroxydases à glutathion (GPX) et des peroxyrédoxines (PRX). Les pools d’ascorbate (AsA) et de glutathion (GSH) sont régénérés par les enzymes MDA réductase (MDAR) et glutathion réductase (GR) qui utilisent le NAD(P)H comme

b6-f PSI PSII tAPX PRXréd. sAPX MDAR GPX GR 3O 2 électron O2- Superoxyde 1O 2 Oxygène Singulet Énergie Caroténoïdes 3O 2 + O2- + 2H+ H2O2 H2O 2 GSH GSSG NAD(P)H NAD(P)+ AsA MDA NAD(P)H NAD(P)+ Stroma Thylakoïdes H2O2 H2O PRX ox. NTRC NAD(P)H NAD(P)+ AsA MDA SOD O2 +

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pouvoir réducteur. Les PRXs oxydées sont réduites par la thiorédoxine réductase stromale (NTRC) qui utilise aussi le NAD(P)H comme pouvoir réducteur. 3O

2 :

dioxygène; 1O

2: oxygène singulet; O2- : superoxyde; H2O2 : peroxyde

d’hydrogène; sAPX : peroxydase à ascorbate stromale soluble; tAPX : peroxydase à ascorbate liée à la membrane des thylakoïdes; MDA : monodihydro ascorbate; GSSG : disulfure de glutathion.

Plusieurs familles de PRXs sont retrouvées dans le chloroplaste attachées à la membrane des thylakoïdes [143-145]. Parmi celles-ci, les PRXs à deux cystéines sont les plus étudiées. Les deux cystéines retrouvées au sein de la séquence de ces PRXs réduisent le peroxyde d’hydrogène en eau et, suite à cette catalyse, se retrouvent oxydées par la formation d’un pont disulfure. Le NAD(P)H sert également de pouvoir réducteur pour régénérer le capacité détoxifiante des PRXs. Pour ce faire, la thiorédoxine réductase stromale (NTRC) catalyse la réduction des PRXs par le biais de son domaine thiorédoxine et du NAD(P)H [146-148] (Fig. 7). Il a récemment été démontré que les PRXs chloroplastiques travaillent de concert avec les autres types de peroxydases pour combattre le stress oxydatif. En effet, les mutations de tAPX et des deux PRXs chloroplastiques à deux cystéines ont un effet synergique sur la sensibilité aux hautes intensités lumineuses chez Arabidopsis [149].