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Répartition des espèces soufrées dans les différents groupes de chondrites. 61

3. Spéciation du soufre dans l’IOM par spectroscopie Xanes

3.2. Résultat de mesures, état redox du soufre dans les IOM

3.2.2. Répartition des espèces soufrées dans les différents groupes de chondrites. 61

d’occurrences marginales. Ces sels sont réputés être particulièrement solubles dans l’eau et le fait

qu’ils soient détectés dans les résidus d’attaque acide en milieu aqueux peut avoir deux explications.

L’une est que de fines particules se retrouvent mécaniquement mêlées à la matière organique

insoluble, protégée du contact avec l’eau par un enrobage étanche. L’autre est que les sulfures de

métal sont corrodés par l’acide utilisé pour l’extraction de la matière organique et qui génère des

sulfates néoformés. Enfin, il n’est pas possible d’exclure que la position de la raie blanche identifiée

pour les sulfates soit en réalité due à la présence de sulfates organiques, liés de façon covalente à un

atome de carbone. En effet, en accord avec les études indépendantes, le degré redox et la position de la

raie blanche sont indiscernables pour les sulfates organiques et inorganiques.

3.2.2. Répartition des espèces soufrées dans les différents groupes de

chondrites.

En suivant la classification en cinq catégories chimiques, on peut établir une composition

l’intérieur de chaque IOM directement déduite des contributions relatives des raies blanches, après

correction d’après la courbe de calibration. Rappelons :

Avec, : fraction de l’aire totale des fonctions gaussiennes associée à une contribution

de raie blanche d’un état redox ; : abondance relative des atomes dans l’état d’oxydation ;

: valeur de la courbe de calibration pour une énergie associée à la raie blanche d’un

composé d’état redox . L’incertitude avec un intervalle de confiance de 66% (1σ) est calculée en

tenant compte des incertitudes introduites par la calibration et à l’acquisition des spectres eux-mêmes.

Pour chaque contribution de raie blanche, l’incertitude (1σ) vaut la dispersion mesurée sur les 10

spectres de la moyenne. Le passage à l’abondance relative introduit une erreur due à l’incertitude sur

les coefficients de la droite de calibration. L’erreur introduite de cette manière dépend de la position

de la raie blanche considérée et vaut 0 pour le standard de calibration (gypse, à 2.4826 keV). Ainsi, on

peut voir que l’incertitude est plus importante pour les abondances relatives dérivées des contributions

de raie blanche à des positions éloignées de celle du standard de calibration, telles celles des sulfures.

Figure 3.2.2-1 : Histogrammes des abondances relatives des atomes des soufres

appartenant à des composés classés selon cinq catégories.

L’examen des spectres eux-mêmes et du résultat de l’estimation de l’importance relative de

chacune des cinq classes chimiques met en valeur une variabilité de la spéciation du soufre entre les

différents groupes de météorites. En particulier, les IOM extraits des chondrites CI contiennent des

fonctions organiques exceptionnellement oxydées, qui ne se retrouvent pas dans les IOM des

chondrites CM, Tagish Lake ou Renazzo. Cette différence remarquable ne peut pas être mise sur le

compte d’une altération d’origine terrestre due à la mauvaise conservation des échantillons pour la

raison que tous ont été stockés et manipulés selon le même protocole. Des sulfates sont détectés dans

les spectres des chondrites CI et de la chondrite Cold Bokkeveld ainsi que, dans une moindre mesure,

dans le spectre de la chondrite Murray. La contribution relative des sulfures est systématiquement plus

basse dans le cas des chondrites CI, que dans le cas des chondrites CM, y compris dans la chondrite

Cold Bokkeveld. Cette dernière météorite montre d’ailleurs à la fois des signatures de minéraux

oxydés et de minéraux réduits (sulfates et sulfures).

Une remarquable différence concerne l’abondance relative des hétérocycles, largement

supérieure dans les chondrites CI que dans les chondrites CM, à l’exception de Cold Bokkeveld. Cette

météorite se singularise une fois de plus par une signature spectrale des hétérocycles particulièrement

discernable par rapport à celle des autres CM. Dans ces dernières, la signature hétérocyclique apparait

comme un épaulement de la contribution principale attribuée aux groupements saturés.

Quelques variations semblent apparaitre au sein du groupe des chondrites CI. La chondrite

Alais se démarque légèrement d’Orgueil et d’Ivuna par une contribution hétérocyclique du même

ordre que celle des groupements saturés. Notons également que l’abondance relative en sulfures n’est

pas équivalente entre toutes les CI et qu’Ivuna en particulier semble montrer un déficit en sulfure par

rapport à Orgueil. Ce résultat est corroboré par une étude de combustion par palier menée par Burgess

et al. (1991), où la quantification du soufre relâché par les sulfures est trois fois moindre dans Ivuna

que dans Orgueil. La singularité d’Ivuna par rapport à Alais et Orgueil sur la question de l’abondance

relative de sulfures entre en contradiction avec leur classification sur une échelle d’intensité

d’altération aqueuse décrite par Endress and Bischoff (1996) et basée sur la composition des

carbonates. Cette échelle décrit Orgueil comme la météorite la plus intensément altérée suivie d’Ivuna

et d’Alais, en parfait accord avec la classification par Bullock et al. (2005) et basée directement sur

l’étude du métasomatisme dans les sulfures. Cette incohérence quant au déficit en sulfure dans Ivuna

peut être mise sur le compte d’un effet de petitesse de l’échantillon, laissant place à une erreur

statistique due à une rareté anormale des sulfures dans la section sondée par le rayon incident ou être

due à une réelle hétérogénéité dans l’assemblage minéralogique initial de cette météorite. Cette

particularité ne bénéficie pas d’une certitude de mesure suffisante pour remettre en cause les

classifications déjà établies. Rappelons que les extractions chimiques ont été conçues pour l’analyse de

la matière organique et ne constituent pas une méthode de concentration des grains de sulfures.

La Figure 3.2.2-2 représente

l’écart relatif à la moyenne du jeu de

données des quatre groupes de chondrites

pour chacune des neuf abondances

relatives calculées à partir des

contributions des raies blanches.

Figure 3.2.2-2 :

Répartition des abondances

relatives par rapport à la moyenne

du jeu de données.

Ce mode de représentation

permet de mettre en valeur les

différences intergroupes. On remarque

que la dispersion des données ou les

incertitudes dues à la quantification sont

négligeables devant la variabilité de

chaque groupe par rapport à la moyenne du jeu de données pour chaque degré redox.

On peut résumer l’essentiel des apports de la répartition des degrés redox du soufre en quatre

points :

 Les CI sont déficitaires en sulfures par rapport à la moyenne des chondrites étudiées.

 L’abondance en hétérocycles et en fonctions oxydées est supérieure à la moyenne

dans les CI.

 La chondrite Renazzo semble la plus réduite, en accord avec son altération aqueuse

modérée.

 Il n’existe pas de traces de gradient d’altération aqueuse à l’intérieur du groupe des

CM, qui présente une spéciation du soufre proche de la moyenne des chondrites.

3.3. Effet des processus post-accrétion et hétérogénéité du

précurseur organique.

La section suivante présente les interprétations possibles de la répartition des états redox du

soufre dans les différents groupes de chondrites. Les effets possiblement dus aux processus

post-accrétionnels ainsi que la possibilité d’une hétérogénéité sont discutées sur la base de comparaison

avec les connaissances actuelles de l’histoire de chaque chondrite et groupe de chondrites.

3.3.1. Effets des processus post-accrétionnels, cas des CI et de Cold