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La période de croissance et de développement entre la naissance et le sevrage est cruciale pour la survie à long terme de l'organisme (Reeds et coll., 2000). Chez la plupart des mammifères, cette période d'allaitement en début de vie est associée à un taux de croissance rapide (Attaix et coll., 1988). Lors de cette période, le dépôt protéique est très élevé et est soutenu par une grande efficacité à transformer les protéines ingérées en protéines corporelles. Ceci est accompagné d'une différence marquée des taux individuels de croissance des différents tissus et d'une série de processus de maturation (Reeds et coll., 2000). Entre autres, on peut noter une croissance très rapide des intestins en raison

du passage d'une alimentation parentérale à intestinale et un développement également très rapide des muscles, sans doute afin de minimiser la période de vulnérabilité des nouveau-nés.

Toutefois, le taux élevé de rétention protéique diminue rapidement au cours des premiers mois de vie chez le rat (Goldspink et Kelly, 1984), le porc (Reeds et coll., 1980; Wray- Cahen et coll., 1997; Bergeron et coll., 2007), le mouton (Attaix et coll., 1988; Harris et coll., 1992) et l'humain (Denne et coll., 1991; 1994; 1995). Le fait que la vitesse de synthèse diminue plus rapidement que la vitesse de dégradation expliquerait cette baisse de dépôt protéique (figure 1.5). En effet, ce graphique réalisé à partir de données provenant de bovins suggère que l'animal adulte doit synthétiser deux à trois fois plus de protéine que le jeune animal pour déposer une quantité semblable de protéine dans la carcasse (Grizard et coll., 1988).

De tous les tissus, ce sont les muscles squelettiques qui produisent les gains de masse protéique les plus rapides au cours des premiers stades de vie (Young, 1974). Cette accretion des protéines musculaires plus rapide que les autres tissus résulte en une augmentation de la proportion des muscles squelettiques des espèces en général, passant d'environ 30 % des protéines corporelles chez le nouveau-né à environ 50 % chez l'adulte (Davis et coll., 2003). Toutefois, des études effectuées chez le mouton (Bryant et Smith, 1982; Pell et Bates, 1987; Lobley et coll., 1990), le rat (Lewis et coll., 1984; Davis et coll., 1991; Mays et coll., 1991) et le porc (Davis et coll., 1996) montrent que la capacité de l'organisme à déposer de la protéine musculaire est réduite grandement avec la maturité des animaux, ce qui inévitablement affecte leurs performances. Ce point est d'intérêt pour les sciences animales dans l'optique d'une optimisation de la production. Les modifications qu'engendre la progression de la maturité sur la composition corporelle laissent croire que certains mécanismes métaboliques doivent intervenir pour permettre ces changements.

1.1.4.1. Déclin de la sensibilité musculaire à l'insuline avec l'âge et la maturité

La capacité des muscles squelettiques à utiliser les acides aminés pour la construction ou le maintien des protéines diminue graduellement avec l'âge et ceci est dû, en partie, à un déclin de la sensibilité des muscles à l'insuline. Une étude effectuée chez des porcelets

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Figure 1.5. Synthèse et dégradation des protéines en fonction de la croissance chez les bovins.

La surface hachurée représente les protéines retenues. Source : adaptée de Grizard et coll., 1988.

âgés de 7 et 26 jours et utilisant la technique du verrouillage hyperinsulinémique- euglycémique-euaminoacidémique montre que le taux de perfusion d'acides aminés nécessaire pour conserver la concentration plasmatique de lysine au niveau de base est plus élevé chez les jeunes porcelets (Wray-Cahen et coll., 1997). Toujours à l'aide de porcelets âgés de 7 et 26 jours, d'autres chercheurs ont remarqué que le taux d'utilisation des acides aminés chez les jeunes porcelets suite à une perfusion d'insuline était presque doublé, comparativement aux plus âgés (Davis et coll., 2002). Une autre étude a montré que l'abondance des récepteurs de l'insuline dans les muscles squelettiques de porcelets de 7 jours d'âge était le double de celle retrouvée dans les muscles de porcelets de 26 jours d'âge, tandis que l'abondance d'IRS-1 était semblable pour les deux groupes

(Suryawan et coll., 2001). Enfin, une dernière étude a montré que l'activité et la quantité d'Akt dans les muscles squelettiques sont plus faibles d'environ 82 % et 54 % respectivement chez des porcelets âgés de 26 jours que ceux âgés de 7 jours (Kimball et coll., 2002). Quant au contenu en mTOR de ces mêmes muscles, il était 25 % plus faible chez les porcelets plus âgés. Ces observations indiquent que la stimulation de l'utilisation corporelle des acides aminés par l'insuline s'atténue avec l'âge chez le porcelet. Puisque la baisse des acides aminés libres du sang provoquée par une injection intraveineuse d'insuline est moindre chez l'adulte que pendant la période de croissance chez la brebis (Prior et Christensen, 1978) et chez le mouton (Grizard et coll., 1987), il s'opère aussi une diminution de la réponse des tissus à l'insuline au cours du développement chez ces ruminants. Il est alors logique de penser qu'il peut en être de même chez les bovins, mais aucune étude n'a encore mesuré précisément ce paramètre en utilisant cette approche. En revanche, deux études montrent qu'à un âge plus avancé que la période néonatale, la croissance des bovins affecte la capacité de l'insuline à stimuler le métabolisme du glucose (Eisemann et Huntington, 1994; Eisemann et coll., 1997).

Eisemann et coll. (1997) ont effectué des verrouillages hyperinsulinémique-euglycémique chez sept jeunes bouvillons pesant 275 kg chacun et sept autres plus âgés ayant un poids vif de 490 kg chacun et ont montré que la moitié de l'utilisation maximale totale de glucose (perfusion + production endogène) est atteinte à une concentration en insuline de 125 et 418 uU-mL"1 chez les bouvillons de 275 et 490 kg respectivement. Les conclusions sont similaires en excluant la contribution hépatique (113 vs 237 uU-mL"1) ou en isolant spécifiquement les muscles des quartiers arrière (243 vs 488 uU-mL"1). Ces résultats indiquent que le métabolisme du glucose dans le muscle chez les bouvillons est plus

sensible à l'insuline que celui des boeufs plus âgés. Ceci suggère indirectement que la sensibilité du métabolisme protéique à l'insuline dans le muscle pourrait aussi diminuer avec l'âge des bovins.

1.1.4.2. Implication de l'IGF-1 dans la progression de l'âge et la maturité

La concentration plasmatique de base en IGF-1 varie également avec la croissance chez le bovin et de façon analogue à l'insuline. Selon une étude chez la vache Holstein (Abribat et coll., 1990), cette concentration débute à 102,0 ±11,3 ng-mL"1 24 h après la naissance et diminue à 50,2 ng-mL"1 le mois suivant. Elle remonte ensuite à 137,0 ng-mL'1 et reste stable jusqu'au dixième mois. Cette remontée de la quantité d'IGF-1 a été aussi observée chez des veaux mâles Holstein Frisons (Breier et coll., 1988) et est concomitante avec l'apparition des récepteurs de l'hormone de croissance dans le foie (Breier et Gluckman, 1991). Dans une autre étude chez des jeunes mâles Holstein Frison et Piémontais, l'âge a aussi eu un effet considérable faisant augmenter la concentration en IGF-1 plasmatique de 180 ng-mL"1 chez des veaux âgés de 7 mois à 437 ng-mL"1 chez des veaux de 14 mois (Pagano et coll., 2001). L'insuline et l'IGF-1 se ressemblant chimiquement, ils peuvent exercer leur action anabolisante par l'activation d'un même récepteur hybride. Ces hormones évoluent de façon analogue et dépendante du stade de développement (Abribat et coll., 1990). Il est depuis longtemps documenté que la sécrétion de l'hormone de croissance diminue avec l'âge chez plusieurs espèces, incluant le bovin (Tucker et coll., 1974).

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