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L'autophagie est constitutivement active dans la cellule et l'activité autophagique dépend de différents stimuli de stress tels que la privation d’éléments nutritifs comme les acides aminés ou les facteurs de croissance, le stress consécutif aux organites endommagés, à une infection, une hypoxie ou une contrainte mécanique. Ces signaux sont intégrés et régulés par différentes voies de signalisation cellulaires.

i. Régulation de l’autophagie via la voie de signalisation mTOR

La voie mTOR est la principale voie inhibitrice de l’autophagie et aussi la voie la plus étudiée (Figure 21). mTOR contrôle plusieurs voies de signalisation qui sont sensibles à la présence des acides aminés, d’ATP, des facteurs de croissance, et le niveau d‘espèces réactives de l'oxygène (ROS) et régule négativement l'autophagie (Singh and Cuervo 2011).

Il existe deux complexes de mTOR, le complexe mTORC1 sensible à la rapamycin et le complexe mTORC2 insensible à la rapamycin. mTORC1 est le principal régulateur de l'autophagie et comprend les protéines mTOR, Raptor (regulated associated protein mTOR), PRAS40 (proline-rich Akt substrate of 40kDa), GL (G protein –subunit-like protein) et PRAS40 (proline-rich Akt substrate of 40 kDa) (Meijer, Lorin et al. 2014).

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mTOR est régulé en amont par différentes voies de signalisation comme les acides aminés, la protéine AMPK, les facteurs de croissances et l’insuline.

En présence de nutriments, mTORC1 est responsable de la phosphorylation d’ULK1 et de sa séquestration, ce qui inhibe l’autophagie. L'activation de mTORC1 par des acides aminés fait intervenir les petites GTPases de la famille Rag (Ras-related GTPases) qui interagissent directement et spécifiquement avec ce complexe (Meijer and Codogno 2011). La protéine AMPK (AMP-activated kinase) est un régulateur positif de l’autophagie agissant à différents niveaux. Elle est sensible aux changements de rapport AMP/ATP dans la cellule. (Kahn, Alquier et al. 2005; Shaw 2009). En cas de carence, une diminution de la production d'ATP active l’AMPK, ce qui entraine l’activation d’ULK1, l’inhibition de mTOR par phosphorylation (Kim, Kundu et al. 2011) et l’activation de TSC2 qui inhibe mTORC1 (Hardie 2004), ce qui provoque l’induction de l’autophagie.

Figure 21 : Régulation de l’autophagie par la voie mTOR.

Lors de la stimulation du récepteur de l’insuline par des facteurs de croissance, la voie de la PI3K de classe I est activée. Cette étape déclenche le recrutement de cette dernière à la membrane plasmique et entraîne la phosphorylation de PDK1 puis d’Akt, conduisant à la séparation du complexe TSC1/TSC2. Dans ce cadre, Rheb se libère de son interaction avec TSC2 et se fixe à mTORC1, induisant ainsi son activation. L’activation de mTORC1 a pour effet d’inhiber ULK1 et l’autophagie. Au contraire, l’activation de l’AMPK entraîne la phosphorylation de TSC2 et a pour conséquence une inhibition de mTORC1 et finalement une activation d’ULK1 et de l’autophagie (Ravikumar, Sarkar et al. 2010).

Les facteurs de croissance et l’insuline agissent par l’intermédiaire de la voie de signalisation de la PI3K de classe I. Leur fixation à des récepteurs à la surface cellulaire entraîne la

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phosphorylation de PDK1 et active Akt. Ce dernier va ensuite induire la séparation du complexe TSC1/TSC2, ce qui inhibe l’autophagie (Ravikumar, Sarkar et al. 2010). Les voies suppresseur de tumeur PTEN (phosphatase and TENsin homolog deleted on chromosome ten) inhibent la PI3K de classe I et stimulent l’autophagie.

La rapamycin est une molécule très utilisée comme activateur de l’autophagie, car elle inhibe l’activité kinase de mTORC1. Cette inhibition est médiée par la diminution de la phosphorylation de ses substrats p70S6K et 4EBP1, ce qui libère ULK1, qui va ensuite phosphoryler FIP200 dans le complexe ULK1-Atg13-FIP200 (voir plus haut) (Jung, Jun et al. 2009).

ii. Le complexe Beclin 1/PI3K de classe III

Le complexe Beclin 1/PI3K de classe III est impliqué dans la régulation positive de l’autophagie, et il est nécessaire pour la formation du phagophore, sa nucléation et son élongation. La protéine Beclin 1 joue le rôle de plateforme, recrutant des protéines activatrices ou inhibitrices de l’autophagie dans différents complexes qui agissent au niveau de la biosynthèse et de la maturation des autophagosomes (Figure 22).

Figure 22 : Différents complexes Beclin 1-Vps34 et leurs fonctions (Funderburk, Wang et al. 2010). Le complexe Beclin 1-Vps34-Vps15-Atg14L permet de générer le PI3P par phosphorylation du phosphatidylinositol (PI). La production de PI3P est induite dans l’omégasome qui sert de plateforme pour l’élongation du phagophore et la biogenèse de l’autophagosome (Shibutani and Yoshimori 2014). PI3P est nécessaire pour le recrutement d’autres protéines comme DFCP1 et WIPI1/2. Atg14L, ou Barkor (Beclin 1 interacting autophagy related key regulator), est essentiel

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pour les étapes précoces de la formation des autophagosomes (Itakura and Mizushima 2010; Matsunaga, Morita et al. 2010).

La protéine UVRAG, qui se lie au domaine CCD de Beclin 1 et à BIF 1 (Liang, Feng et al. 2006), régule positivement l’activité de Vps34 dans les endosomes et les lysosomes (Itakura and Mizushima 2009). Le complexe contenant UVRAG-Beclin 1-Vps34 a un rôle dans la maturation autophagosomale (Matsunaga, Saitoh et al. 2009; Zhong, Wang et al. 2009). La protéine RUBICON régule négativement l’autophagie (Zhong, Wang et al. 2009). Elle entre en compétition avec la protéine Atg14L pour interagir avec Beclin 1. La protéine NRBF2 (nuclear

receptor binding factor 2), l'homologue mammifère d’Atg38, relie l'interaction entre Vps34 Vps15

et Beclin-1-Atg14 (Cao, Wang et al. 2014; Lu, He et al. 2014).

De nombreuses autres protéines régulent l’autophagie en se liant à Beclin 1 (Figure 23). Par exemple, la protéine anti-apoptotique Bcl-2 régule négativement l’autophagie. Elle se lie directement au domaine BH3 de Beclin 1, entrainant son inactivation (Pattingre, Tassa et al. 2005). Suite à une carence nutritive, la kinase JNK1 (c-Jun N-terminal protein kinase 1) est activée et elle phosphoryle Bcl-2, conduisant à sa dissociation de Beclin 1 et à l’induction de l’autophagie (Wei, Pattingre et al. 2008; Mizushima, Yoshimori et al. 2011).

D’autres protéines, comme VMP-1 (Vacuole Membrane Protein 1), se lient à Beclin 1 afin de réguler positivement l’autophagie (Ropolo, Grasso et al. 2007). La protéine AMBRA1 est également un régulateur positif du complexe Beclin 1/PI3K de classe III (Fimia, Stoykova et al. 2007). Suite à l’induction de l’autophagie, AMBRA1 est phosphorylée par ULK1, ce qui conduit à la libération du complexe Beclin1 Vps34-Vps15-AMBRA1 du moteur dynéine dans les microtubules au RE où les autophagosomes sont formées (Cianfanelli, De Zio et al. 2015). Il a été montré qu’AMBRA1 régule la stabilité et l'activité kinase d’ULK1. En plus de la régulation négative de mTOR sur ULK1 par phosphorylation directe, AMBRA1 peut également inhiber indirectement la stabilité et l'activité d’ULK1. mTOR est capable ainsi d’inhibe spécifiquement la phosphorylation d’AMBRA1, ce qui peut être levé lors de l’induction de l’autophagie (Nazio, Strappazzon et al. 2013).

Certaines protéines virales sont aussi capables de réguler négativement l’autophagie en se liant à Beclin 1, comme les homologues viraux de Bcl-2. En effet, les vBcl-2 des -herpesvirus se lient, avec une affinité plus forte que le Bcl-2 cellulaire, à Beclin 1 au niveau du domaine BH3 (Liang, E et al. 2008; Sinha, Colbert et al. 2008). D’autres protéines virales interagissent avec Beclin 1 afin d’inhiber l’autophagie, soit à l’étape de la formation des autophagosomes ou à

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l'étape de maturation (Levine, Liu et al. 2015). La protéine virale ICP34.5 d’HSV-1 se lie également à Beclin 1 pour inhiber l’autophagie mais en dehors du domaine BH3 (Orvedahl, Alexander et al. 2007). Dans les cellules dendritiques ICP34.5 ne bloque pas l'induction de l'autophagie mais plutôt la maturation des autophagosomes (Gobeil and Leib 2012). La protéine Nef du VIH-1 interagit également avec Beclin 1 et bloque la maturation des autophagosomes (Kyei, Dinkins et al. 2009). Cette fonction de Nef rentre dans le contexte de la prévention de la dégradation des composants du VIH dans les autolysosomes. La protéine M2 du virus de la grippe bloque aussi la maturation des autophagosomes par interaction avec Beclin 1, ce qui permet la survie des cellules infectées sans avoir une influence sur la réplication virale (Gannage, Dormann et al. 2009). D’autres protéines virales sont capables d’interagir avec Beclin 1 pour réguler positivement l’autophagie comme l’oncoprotéine E1B19K de l’adénovirus. En effet, elle interagit avec le domaine BH3 de Beclin 1 et déplace Bcl-2 du complexe Beclin 1 (Piya, White et al. 2011).

Figure 23 : Différents partenaires de Beclin 1.

Les protéines en bleu sont des activateurs (VMP1, AMBRA1, UVRAG, Bif-1, Atg14, NRBF2 et la protéine virale E1B19K), et les inhibiteurs sont en rouge (les protéines cellulaires Bcl-xL et Bcl-2, Rubicon et les protéines virales ICP34.5, vBcl-2, M2 et Nef). (B) Adapté de (Levine, Liu et al. 2015).

En plus de son rôle dans l'autophagie, Beclin 1 et ses partenaires du complexe core participent également à un processus appelé «phagocytose associée au LC3», qui implique la maturation de phagosomes contenant des agents pathogènes intracellulaires ou des cellules apoptotiques (Green and Levine 2014).

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iii. Régulation de l’autophagie par des voies de signalisation indépendantes de mTOR et du complexe PI3K de classe III

 Les voies des kinases eIF2α

Les kinases eIF2α sont des protéines phosphorylant le facteur eucaryote d’initiation de la traduction eIF2α sur la sérine 51, ce qui a pour conséquences l’inhibition de la traduction protéique.

Chez les mammifères, il existe quatre kinases d’eIF2α : PERK qui est activée par le stress du RE et l’hypoxie, HRI (Heme-Regulated Inhibitor) activée par une déplétion en hème, PKR activée par les ARN double brin, et GCN2 (General Control Non-derepressible-2) activée par les ARN de transfert (ARNt) non chargés en acides aminés. La phosphorylation d’eIF2α, semble jouer un rôle majeur dans la régulation positive de l’autophagie, puisque les cellules possédant une protéine eIF2α mutée non phosphorylable, n’induisent pas d’autophagie en réponse à une carence (Talloczy, Jiang et al. 2002). Le mécanisme impliqué n’est pas très bien connu (Kroemer, Marino et al. 2010). Il semble que la phosphorylation d’eIF2α soit impliquée dans la traduction sélective de certains gènes de l’autophagie comme LC3 et Atg5 (Kroemer, Marino et al. 2010; Rouschop, van den Beucken et al. 2010). La phosphorylation d’eIF2 entraine aussi une traduction préférentielle d’ATF4, un régulateur transcriptionnel important. En réponse au stress du RE et à la carence en acides aminés, la stimulation de PERK ou de GCN2 active la voie eIF2α/ATF4, ce qui stimule la transcription des gènes de l'autophagie impliqués dans la formation, l'élongation et la fonction de l’autophagosome (B'Chir, Maurin et al. 2013).

L’activation de PKR par des facteurs viraux fait de la voie PKR/eIF2α une voie potentielle de stimulation de l’autophagie par les virus.

 Le stress du réticulum endoplasmique (RE) et l'autophagie

Un stress du RE fait généralement suite à une accumulation de protéines mal repliées. La cellule déclenche alors une réponse adaptative, la réponse UPR (Unfolded Protein Response) qui a pour finalité d’augmenter la capacité de repliement du RE. De nombreux travaux montrent qu’il existe un lien entre l’activation de l’UPR et l'autophagie (Deegan, Saveljeva et al. 2013; Senft and Ronai 2015). L'utilisation des inducteurs pharmacologiques du stress du RE comme la tunicamycine et la thapsigargine induisent la formation d'autophagosomes (Criollo, Vicencio et al. 2007; Gozuacik, Bialik et al. 2008). Le stress du RE peut contribuer à la stimulation de l’autophagie via l’activation de JNK, XBP-1, CHOP et ATF4. La voie IRE1α/JNK est la première à avoir été impliquée dans l'induction de l'autophagie par le stress du RE (Ogata, Hino et al. 2006; Haberzettl and Hill 2013). L'autophagie peut également être induite par la voie

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PERK/eIF2α/ATF4. Le facteur de transcription ATF4 active l’autophagie d’une part en augmentant l’expression d’Atg12 ce qui permet la conversion de LC3 (Kouroku, Fujita et al. 2007) et d’autre part en activant directement la transcription de LC3 (Rzymski, Milani et al. 2010).

 Les espèces réactives de l’oxygène (ROS)

Des travaux mettent en évidence l’induction de l’autophagie par les ROS lors de la carence en nutriments. Cependant, à ce jour, il est encore difficile de savoir quelles espèces entraînent précisément ce processus car les ROS stimulent l’autophagie par différentes voies de signalisation. Certains proposent que l’anion superoxyde O2- soit impliqué dans l'autophagie induite par la carence en glucose, en glutamine, ou la privation de sérum (Chen, McMillan-Ward et al. 2008). D'autres éléments indiquent, que le peroxyde d’hydrogène H2O2 est la molécule

produite immédiatement après la carence et qu’il oxyde Atg4, une enzyme impliquée dans la maturation de LC3 (Poillet-Perez, Despouy et al. 2015). L’augmentation des ROS va stimuler l’autophagie, et plus particulièrement la mitophagie, comme un mécanisme de survie en favorisant la lipidation de LC3 via l’oxydation d’Atg4 ou en augmentant la transcription de Beclin 1. Les ROS peuvent aussi réguler l’autophagie en activant des facteurs de transcription comme NF-κB, conduisant à l’expression de certains gènes de l’autophagie, comme Beclin 1 ou SQSTM1.

iv. Régulation de l’autophagie par des voies de signalisation impliquant des facteurs de transcription

 La protéine STAT3 (signal tranducer and activator of transcription 3)

STAT3 est un facteur de transcription impliqué dans l’inflammation, l’oncogenèse et l’immunodépression. STAT3 peut être localisé dans le noyau mais c’est sa fraction cytoplasmique qui régule l’autophagie. Il se lie à PKR, formant un complexe qui empêche PKR de phosphoryler son substrat. En présence d’inhibiteur de STAT3, le complexe va se dissocier, et l’autophagie va être activée, de façon dépendante d’eIF2α. L’utilisation des activateurs de PKR ou l’ajout d’acides gras peut aussi entrainer la dissociation du complexe (Shen, Niso- Santano et al. 2012).

 Les protéines p53

La protéine p53 est un suppresseur de tumeur dont le gène est fréquemment muté dans les cancers. Cette protéine est impliquée dans plusieurs processus cellulaires importants comme l’apoptose et le métabolisme. La protéine p53 régule l’autophagie dans les deux directions en

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fonction de sa localisation cellulaire. Dans le noyau, p53 permettrait, par son rôle de facteur de transcription, l’expression de gènes impliqués dans l’autophagie alors que p53 cytoplasmique serait un puissant inhibiteur de cette voie (Levine and Abrams 2008). p53 régulerait aussi l’autophagie indirectement en agissant sur la transcription d’un gène codant une protéine lysosomale : DRAM (Damage-Related 79Autophagy Modulator) (Criollo, Dessen et al. 2009; Lorin, Pierron et al. 2010). La kinase mTOR agirait en tant que régulateur négatif de p73 (une protéine proche de p53) alors que p53 peut agir en amont de cette kinase en activant l’AMPK (Rosenbluth and Pietenpol 2009). Il a été montré récemment que lors de la privation de sérum, p53 régule positivement l’autophagie afin de bloquer la sénescence cellulaire induite par le stress (Sui, Fang et al. 2015).

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