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La phosphorylation oxydative est un processus impliquant la chaîne respiratoire qui est composée de quatre complexes protéiques dont trois pompes à protons (complexe I, III, IV) et

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de l’ATP synthase qui constitue une quatrième pompe à protons, responsable de la synthèse d’ATP sous dépendance du ΔΨm. La phosphorylation oxydative est donc permise par le couplage entre la CTE et l’ATP synthase via laforce protomotrice (Δp).

La phosphorylation oxydative est régulée à deux niveaux :

 le taux de synthèse d’ATP, donc le taux de respiration

 la régulation de l’efficacité de la synthèse d’ATP (Kadenbach, (2003)).

Le taux de synthèse d’ATP est contrôlé par un mécanisme de rétrocontrôle dénommé le contrôle respiratoire. L’efficacité de la phosphorylation oxydative est définie par la production d’ATP en fonction du nombre d’atomes d’oxygène consommé (autrement dit le taux de respiration). C’est le ratio ATP/O (ou P/O). Ce paramètre et par conséquent l’efficacité de la phosphorylation oxydative est impactée par des composants qui diminuent le gradient de protons (découplage extrinsèque : voir paragraphe dédié page 73) ou par une baisse de l’efficacité du pompage des protons (découplage intrinsèque : voir paragraphe dédié page 74) (Kadenbach, (2003)).

1. Le contrôle respiratoire

Le contrôle respiratoire qui permet de contrôler la synthèse d’ATP peut s’effectuer selon plusieurs mécanismes. Historiquement, le contrôle respiratoire a été décrit par les travaux de

Lardy et Wellman, (1952) et de Chance et Williams, (1955) sur mitochondries isolées. Ces travaux ont démontré que l’ajout d’ADP stimule la respiration mitochondriale suite à la conversion de l’ADP en ATP par l’ATP synthase. L’activité de l’ATP synthase étant augmentée, le Δp diminue ce qui, en conséquence, stimule l’activité du pompage de protons des trois complexes de la chaîne respiratoire et par conséquent la respiration mitochondriale (Nicholls et Ferguson, (2002)). Il s’agit du premier phénomène de contrôle respiratoire décrit.

Chance et Williams, (1955) définissent ainsi différents états respiratoires à partir de mitochondries isolées couplées, dont l’état 3 et l’état 4.

 L’état 3 correspond à un état respiratoire stimulé par de fortes concentrations en ADP en présence d’un ou plusieurs substrats à des niveaux d’oxygènes saturés.

 L’état 4 correspond à un état respiratoire qui survient après l’état 3 quand la totalité de l’ADP a été transformée en ATP par l’ATP synthase.

Il est ainsi possible de déterminer l’index de contrôle respiratoire (RCI) qui est défini comme le rapport entre l’état 3 et l’état 4.

D’autre part, les niveaux de substrats respiratoires régulent la chaîne respiratoire mitochondriale. Le NADH + H+ et le FADH2 cèdent leurs protons et électrons à la chaîne

73 respiratoire. Leur synthèse est donc essentielle pour le processus de respiration mitochondriale. Dans des conditions expérimentales sur mitochondries isolées, l’ajout de glutamate, malate et de succinate participe à la synthèse de ces cofacteurs via le cycle de Krebs. Cela contribue à stimuler la respiration mitochondriale et donc la consommation d’oxygène.

D’autres mécanismes de contrôle respiratoire peuvent également intervenir tels que la régulation allostérique de la cytochrome c oxydase (complexe IV) par l’ATP (qui un phénomène indépendant du Δp), mais aussi la régulation par les hormones thyroïdiennes ou la phosphorylation du complexe I (Scacco et al., (2000), Bender et Kadenbach, (2000), Goglia et al., (1999), Arnold et Kadenbach, (1997)).

2. Régulation de l’efficacité de la phosphorylation oxydative

a. Découplage extrinsèque

Le découplage extrinsèque s’effectue suite à l’action de composants ou mécanismes qui augmentent la perméabilité des membranes mitochondriales aux cations et aux anions et participent par conséquent à la diminution de la force protomotrice. Dans ce cas, une partie des protons pompés par les complexes retournent vers la matrice mitochondriale sans passer par l’ATP synthase. En réponse, l’activité de la chaîne respiratoire augmente afin de conserver le gradient de protons et ainsi compenser leur fuite. Cette dernière peut être due à la composition de la membrane interne mitochondriale (il s’agit principalement de lipides membranaires) qui joue un rôle dans une fuite naturelle des protons (Brand et al., (1994)). Ce type de fuite est qualifié de fuite basale. La fuite de protons peut également être induite (fuite induite) par les protéines découplantes (UCP) (Azzone et al., (1985), Nedergaard et Cannon, (1992)) qui comportent différentes isoformes. Ces dernières ont la capacité de transporter les protons mais leur mode d’action est encore mal défini. La fuite de protons peut également être induite par le transporteur ADP/ATP (Brand et al., (2005)).

Enfin, le découplage extrinsèque implique également l’action d’agents découplants artificiels. Historiquement le 2,4 dinitrophénol (DNP) fait partie des premiers agents artificiels découplants utilisés (Loomis et Lipmann, (1948)). Le carbonyl cyanide 3-chlorophenylhydrazone (CCCP) compte parmi les agents découplants artificiels les plus utilisés de nos jours. Cette molécule est un agent lipidique faiblement acide. La forme ionisée possède une charge négative délocalisée lui permettant de se diffuser dans un milieu non polaire tel que les membranes mitochondriales. En passant par l’espace inter-membranaire, le CCCP capte un proton, traverse la membrane interne puis « relargue » ce proton dans la

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matrice. Ainsi, cette molécule induit une dissipation du gradient de protons et par conséquent la chute du potentiel membranaire mitochondrial (ΔΨm) (voir paragraphe dédié page 74). Il en résulte une augmentation de la respiration et donc de la consommation d’oxygène. Ainsi, la respiration maximale est atteinte après ajout du CCCP. De par son action, le CCCP est qualifié de protonophore (Terada, (1990)) (voir Figure 18 page 70).

b. Découplage intrinsèque

Le découplage intrinsèque contribue à la baisse de l’efficacité du pompage des protons et implique les acteurs responsables de ce pompage de protons. Le découplage intrinsèque est qualifié de phénomène de « patinage ». Le découplage intrinsèque n’implique pas la force protomotrice (Pietrobon et al., (1983)).

Le découplage intrinsèque résulte d’une variation des relations stœchiométriques qui s’effectue aux niveaux du complexe IV et de l’ATP synthase (Kadenbach, (2003)) :

 Au niveau du complexe IV, le découplage intrinsèque diminue la stœchiométrie H+/e-. Le pompage de protons est ainsi réduit pour un nombre équivalent d’électrons circulant.

 Au niveau de l’ATP synthase, le découplage intrinsèque augmente la stœchiométrie H+/ATP. La quantité d’ATP synthétisée par l’ATP synthase diminue pour un nombre équivalent de protons circulant. Ce mécanisme a été démontré in vitro (Rigoulet et al., (1998)).

Les différents mécanismes évoqués ci-dessus permettent à la mitochondrie de moduler sa production d’ATP et donc de s’adapter aux besoins énergétiques de la cellule. Les mécanismes de la réponse mitochondriale aux variations de demandes énergétiques dans les cellules eucaryotes ont été décrits par Devin et Rigoulet, (2007). Trois mécanismes d’ajustement de la réponse mitochondriale sont décrits par ces auteurs : un mécanisme d’adaptation à court terme et deux mécanismes d’adaptation à long terme.

Les mécanismes d’adaptation à long terme impliquent une modulation du contenu enzymatique mitochondrial et/ou la régulation cinétique par phosphorylation de certaines sous-unités des complexes de la chaîne respiratoire. Ceci aboutit à une modification de l’activité de ces complexes.