Régressions linéaires multiples

Les analyses de corrélations montrent des liens positifs et significatifs entre les affects négatifs et certaines stratégies de régulation émotionnelle non-adaptatives, ainsi qu’entre les affects négatifs et certaines dimensions de l’impulsivité. Par contre, aucun lien n’est mis en évidence entre les Indices du Switch, les neuf stratégies de régulation émotionnelle et les quatre dimensions de l’impulsivité. Dès lors, pour aller plus loin dans l’investigation d’un lien éventuel entre les différentes variables, nous nous sommes demandé si l’Indice du Switch pouvait avoir un effet modérateur sur le lien entre, d’une part, les affects négatifs et la régulation émotionnelle et, d’autre part, les affects négatifs et l’impulsivité. En termes généraux, un modérateur est une variable qualitative ou quantitative qui affecte la direction et/ou la force du lien entre une variable indépendante et une variable dépendante (Baron &

Kenny, 1986). Dans notre cas, la variable modératrice que nous souhaitons tester est une variable quantitative (Indice du Switch), la variable indépendante représente les affects négatifs et la variable dépendante représente une stratégie de régulation émotionnelle ou une dimension de l’impulsivité. Nous supposons que le lien entre la variable indépendante et la variable dépendante sera affecté de façon linéaire en fonction des Indices du Switch. Afin de tester cette hypothèse de linéarité, nous allons effectuer des régressions linéaires multiples à sept prédicteurs, avec, comme variables dépendantes, les quatre dimensions de l’impulsivité et les neuf stratégies de régulation émotionnelle. Parmi les sept prédicteurs, se trouvent les interactions entre les affects négatifs et les Indices du Switch. Un effet modérateur est mis en évidence si l’effet d’interaction est significatif, alors que les effets des variables indépendantes et modératrices sont contrôlés (Barron & Kenny, 1986).

Les sept prédicteurs sont : le sexe, la mémoire de travail (score au test de séquence Lettres – Chiffres), les affects négatifs, l’Indice du Switch interne, l’Indice du Switch externe et les deux interactions « Indice du Switch interne x Affects négatifs » et « Indices du Switch externe x Affects négatifs ». Ils ont tous été préalablement centrés. Centrer une variable consiste à lui soustraire sa moyenne. Cette opération est essentielle si l’on souhaite que les effets principaux aient une interprétation intéressante en présence d’une interaction (Howell, 1996).

Sur les treize régressions linéaires multiples effectuées, trois régressions montrent des résultats significatifs avec les prédicteurs utilisés et plus particulièrement avec les interactions

« Indice du Switch x Affects négatifs ». Premièrement, le modèle de régression concernant l’utilisation de stratégies non-adaptatives met en évidence que les affects négatifs (b = .58, p < .05), l’ Indice de Switch interne (b = -.22, p < .05), et le produit « Indice du

Switch externe x Affects négatifs » (b = .32, p < .05), sont des prédicteurs significatifs (Tableau 3).

Tableau 3

Résumé du modèle de régression multiple pour les variables prédictrices de l’utilisation de stratégies de régulation émotionnelle non-adaptatives (N = 74)

B Std. Err. of

Deuxièmement, la tendance à ruminer semble être prédite de façon significative par le sexe (b = -.29, p < .05), les affects négatifs (b = 0.4, p < .05), l’Indice du Switch Externe (b = .30, p < .05), l’indice du Switch interne (b = -.25, p < .05), et l’interaction «Indice du Switch externe x Affects négatifs » (b = .31, p < .05) (Tableau 4 et Figure 5).

Tableau 4

Résumé du modèle de régression multiple pour les variables prédictrices de l’utilisation de la

« Rumination » (N = 74)

Figure 5. Graphique de l’effet d’interaction « Indice du Switch externe x Affects négatifs » en fonction de la variable dépendante « Rumination ».

a +1ET Switch Ext. représente les participants ayant des difficultés à passer d’une phase interne à une phase externe (TRs supérieurs à un écart-type de la moyenne totale des

« Indices du Switch externe », M_{IndSW_ext} = 639.87, ET_{IndSW_ext} = 375.74).

b -1ET Switch Ext. représente les participants ayant le plus de facilité à passer d’une phase interne à une phase externe (TRs inférieurs à un écart-type de la moyenne totale des

« Indices du Switch externe »).

Finalement, la tendance au « Blâme de soi » semble être prédite significativement par les affects négatifs (b = .52, p < .05), l’Indice du Switche interne (b = -.26, p < .05) et l’interaction « Affects négatifs x Indice du Switch externe » (b = .3, p < .05 ) (Tableau 5 et Figure 6). Aucun prédicteur des régressions multiples effectuées ne permet de prédire de façon significative la tendance au blâme d’autrui ou un score d’une des dimensions de l’échelle d’impulsivité.

+1ET Switch Ext ^a

-1ET Switch Ext ^b

-6 -4 -2 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24

Affects negatifs 2

4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 32

Rumination

Tableau 5

Résumé du modèle de régression multiple pour les variables prédictrices de l’utilisation du

« Blâme de soi » (N = 74)

Figure 6. Graphique de l’effet d’interaction « Indice du Switch externe x Affects négatifs » en fonction de la variable dépendante « Blâme de soi ».

a +1ET Switch Ext. représente les participants ayant des difficultés à passer d’une phase interne à une phase externe (TRs supérieurs à un écart-type de la moyenne totale des

« Indices du Switch externe », M_{IndSW_ext} = 639.87, ET_{IndSW_ext} = 375.74).

b -1ET Switch Ext. représente les participants ayant le plus de facilité à passer d’une phase interne à une phase externe (TRs inférieurs à un écart-type de la moyenne totale des

4. Discussion

Les objectifs de cette étude étaient de deux sorte, premièrement nous souhaitions confirmer les effets expérimentaux de la troisième tâche de Gilbert et al. (2005) et deuxièmement nous souhaitions découvrir s’il pouvait y avoir un lien entre la capacité de coordination interne-externe, l’impulsivité et la régulation émotionnelle. Ce deuxième objectif était motivé par le besoin de parvenir à une compréhension plus fine des mécanismes psychologiques sous-tendant la régulation émotionnelle et l’impulsivité.

Dans les parties à venir, nous allons discuter, au regard des analyses statistiques, l’accomplissement de ces deux objectifs.