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Une fois les observations acquises, tout un processus de traitement et d’analyse est nécessaire avant de pouvoir en tirer des informations d’intérêt astrophysique. Selon l’ins-trument utilisé, une seule antenne ou un réseau d’antennes, les étapes pourront être dif-férentes. Les deux paragraphes qui suivent décrivent la réduction des données de ma-nière spécifique aux observations que j’ai conduites pendant ma thèse. Je ne parlerai par exemple pas du traitement qu’implique une mosaïque d’images, qui concerne des sources très étendues telles les galaxies. Les disques circumstellaires ayant une taille an-gulaire de quelques dizaines de secondes d’arc tout au plus, le champ de vue des antennes est suffisant pour capter toute leur émission.

42 1.3. RÉDUCTION DES DONNÉES ET ANALYSE

1.3.1 Observations spectrales avec une antenne unique

Avec une seule antenne, il est difficile de résoudre les disques circumstellaires qui nous intéressent (cf table1.2). En revanche, les antennes peuvent être équipées de très bon récepteurs hétérodynes, avec un grand pouvoir de résolution spectrale. En effet, les instruments de mesure imposent une discrétisation de la fréquence ; c’est la largeur de ces canaux de fréquence qui est appelée résolution spectrale. La résolution spectrale peut être exprimée en termes de fréquence∆ν, de longueur d’onde ∆λ, ou de vitesse (∆v ),

grâce à la relation suivante :

∆v = c∆ν

ν = c

∆λ

λ (1.29)

Les récepteurs installés sur les antennes permettent actuellement d’obtenir une réso-lution de quelques dizaines à quelques centaines de m.s−1, ce qui suffit amplement pour résoudre les raies de CO émises dans les disques circumstellaires, d’une largeur typique de quelques km.s−1(un canal de 60 kHz correspond par exemple à 50 m.s−1s ).

Les observations peuvent également être exprimées en termes de densité spectrale de puissance, Sν, ou bien de température de brillance TB. La température de brillance d’une source correspond à la température qu’aurait un corps noir dont la densité spec-trale d’énergie serait Sν. Les deux quantités sont reliées par l’approximation de Rayleigh-Jeans (1.6).

La puissance du rayonnement reçue lors des observations est enregistrée en fonction de la fréquence/vitesse, et s’exprime sous forme d’une température, T?

a, qui ne corres-pond pas à la température de brillance réelle de la source à cause du chemin parcouru par le signal à travers l’atmosphère, l’antenne et les récepteurs. Ta?est toutefois corrigée de l’absorption atmosphérique. Cette température est soit convertie directement en den-sité de flux grâce à un facteur correctif Jy/K propre à chaque antenne, soit en une autre température, Tmb, captée par le lobe principal (“main beam”) et qui s’exprime en fonction de l’efficacité vers l’avant,ηe f f et l’efficacité du lobe primaireηmb:

Tmb= ηeff ηmb

TA?. (1.30)

Au cours des observations, des objets brillants autres que la source scientifique sont observés pour étalonner les instruments. Ce sont le plus souvent des planètes ou des qua-sars brillants. Leur flux étant connu ou modélisable, il sert de référence pour déterminer le flux de la source d’intérêt. Ils sont également utilisés pour ajuster le pointage du téles-cope. En parallèle, la température du système est mesurée afin d’estimer le bruit (1.12). Grâce à ces mesures, les spectres peuvent donc être étalonnées, généralement automati-quement juste après l’acquisition des données.

Le logiciel CLASS du programme GILDAS3permet ensuite de traiter les spectres ob-tenus. Une des premières étapes consiste à corriger les données pour que leur ligne de base soit uniformément à zéro. Il arrive souvent que ce ne soit pas le cas, mais un ajuste-ment polynomial suffit à y remédier. Il peut égaleajuste-ment être utile de réduire la résolution

CHAPITRE 1. OBSERVATION DES DISQUES : MÉTHODES ET INSTRUMENTS 43

FIGURE1.15 – Représentation du flux des visibilités du plan u v en fonction de la ligne de base (en unités de longueur d’onde) de l’observation du continuum à 1,4 mm autour du système GG Tau. Les courbes montrent l’ajustement d’un modèle d’anneau (trait discontinu) et d’un modèle an-neau+disque (trait continu) [Guilloteau et al.,1999].

des données, afin de réduire l’effet du bruit aléatoire. Ce bruit est d’ailleurs une caracté-ristique essentielle d’un spectre, puisqu’il quantifie la qualité des observations. Mesuré grâce à l’écart-type des données,σ, il définit un critère pour la détection d’un signal : si

l’intensité du signal est supérieure à 3σ, la probabilité que le signal ne soit pas du bruit

est supérieure à 99,73%.

1.3.2 Observations interférométriques

Tout comme pour des observations avec une seule antenne, les premières étapes après les observations sont les étapes de calibration. Les antennes observent en plus de la source d’intérêt scientifique des sources brillantes et ponctuelles qui servent à étalonner le flux, l’amplitude, la phase et la bande passante de la source.

Les données contiennent les informations spectrale et spatiale de la source : à chaque point de la source correspond un spectre, et à chaque canal de fréquence correspond une carte à deux dimensions de brillance de la source. Ces informations sont stockées dans une table u v .

Une première façon d’analyser des données interférométriques consiste à déterminer la variation du flux en fonction de la longueur de ligne de base B . Si le flux mesuré est constant avec B , la source n’est pas résolue. Dans ce cas on récupère tout le flux de la source, mais on n’a aucune information sur sa géométrie. En revanche, si la largeur des franges d’interférence est plus petite que celle de la source (θS), le flux est diminué en fonction de la longueur de ligne de base comme sin(x )/x , avec x = 2πθS

B . L’ajustement du flux en fonction de B permet alors de déterminer la taille de la source. La source est complètement résolue si on observe au moins le premier zéro de la fonction cardinal (un exemple est donné sur la figure1.15).

Pour aller plus loin dans l’analyse, il est possible à partir de l’équation1.28de déduire la brillance de la source I(x , y ) par une méthode de déconvolution : on cherche à retirer le lobe sale de l’image. La déconvolution est une opération non-linéaire, et plusieurs solu-tions peuvent exister. Il existe une méthode, dite MEM (pour Maximum Entropy

Decon-44 1.3. RÉDUCTION DES DONNÉES ET ANALYSE volution), qui repose sur la détermination d’une image dont les visibilités sont ajustées pour correspondre au mieux aux visibilités réelles. Cependant les algorithmes les plus uti-lisés pour effectuer cette déconvolution reposent sur la méthode itérative CLEAN[ Hög-bom,1974]. Son principe consiste à considérer que l’image est un ensemble de sources ponctuelles i , chacune ayant une intensité Fi. Appelons F1 l’intensité du point le plus brillant de l’image sale lors de la première itération, situé aux coordonnées(x1, y1). La première étape consiste à retirer de l’image sale la convolution d’un point d’intensitéγF1

avec le lobe sale. On stocke en parallèle dans une nouvelle carte vierge un point d’inten-sitéγF1à la position(x1, y1) ; on appelle cette carte la carte des composantes “clean”. Si dans la nouvelle image sale il reste un point dont l’intensité F2est supérieure à un cer-tain seuil Fseuil, on recommence l’opération, autant de fois que nécessaire afin qu’il ne reste plus de point dans la carte d’intensité supérieure à Fseuil (ou jusqu’à atteindre un nombre d’itération prédéfini). La carte des composantes “clean” contient en fait l’infor-mation spatiale de tous les points de la carte sale qui ont été sélectionnés par le processus. Un choix adéquat deγ (en général de l’ordre de 0,1–0,2) et de Fseuil(de l’ordre de grandeur du bruit dans la carte) garantit l’élimination des artefacts liés à la technique d’interfé-rométrie. L’étape suivante consiste donc à convoluer la carte des composantes “clean” par un lobe “clean” ou synthétisé, choisi pour correspondre à la partie centrale du lobe sale. C’est en général une gaussienne à deux dimensions, dont les petit et grand axes in-diquent la résolution de l’observation. La carte des résidus est ensuite rajoutée afin de ne pas perdre de flux, et la somme constitue la carte “clean”, censée représenter au mieux l’image réelle de la source. Des exemples de résultats avant et après déconvolution seront donnés au chapitre3. Il existe des variantes de cette méthode, CLARK, MX ou MRC, qui peuvent améliorer les temps de calcul, mais toutes reposent sur le même principe.

Major e longinquo reverentia

- De loin, l’admiration est plus grande Tacite, Annales, 1, 47

Chapitre

2

De natura discum

Sommaire

2.1 Naissance des étoiles et évolution de la matière circumstellaire. . . 46