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3.1 Description de la cohorte COSMO

3.1.2 Questionnaires utilisés pour la présente analyse

D’abord, il apparaît important de spécifier que l’information auto-rapportée par les consommateurs de substances psychoactives, incluant les individus sans domicile fixe, est généralement fiable. Ce constat provient d’un bon nombre d’études rapportant une validité des réponses aux questionnaires dans cette population autant au niveau de l’histoire de consommation que des symptômes psychiatriques incluant les comportements antisociaux lorsqu’ils sont effectués dans un environnement exempt de contraintes, par exemple légales.178-180 Ensuite, également d’une très grande importance, il est à noter que les agents de

recherches impliqués dans le recueil des données tout au cours des entrevues réalisées dans le cadre de la cohorte COSMO possédaient déjà une longue expérience de recherche au sein de populations faisant usage de drogues et qu’ils ont reçus les formations nécessaires à l’administration des questionnaires spécifiques dont il sera question au courant des prochaines sections.

3.1.2.1 Caractéristiques socio-démographiques

Les caractéristiques socio-démographiques de base ont été questionnées lors de l’entretien initial, soit la date de naissance, le sexe, le pays de naissance et le statut marital. La formulation des questions sur les autres caractéristiques se base sur la littérature auprès des usagers de drogues en général et plus particulièrement sur les travaux réalisés dans cette population à Montréal par les chercheuses principales de l’étude COSMO.168,181-184

Le statut résidentiel était adressé par une question à multiples réponses possibles. En effet, les participants devaient indiquer chacun des endroits où ils ont habité, c’est-à-dire vécu et dormi, durant les trois derniers mois, parmi les 14 choix qui leur étaient proposés. Plusieurs choix de lieux temporaires ou instables étaient présentés en plus de différents lieux faisant état des conséquences de la consommation de cocaïne (thérapie, prison, établissement psychiatrique, etc.). De plus, les participants avaient aussi l’opportunité d’indiquer un autre type de lieu d’hébergement si l’endroit où ils avaient habité ne figurait pas parmi ces choix (voir la question 21 du questionnaire T-1 présenté à l’annexe 1). Les sources de revenus étaient déterminées de façon similaire en offrant 17 choix aux participants, incluant plusieurs choix d’activités marginales ou criminelles telles que le travail du sexe ou la vente de drogue (voir la question 24 du questionnaire T-1 à l’annexe 1). Les participants devaient d’abord indiquer toutes leurs sources de revenus dans les trois derniers mois, puis devaient préciser leur source de revenus principale dans la même période. Enfin, en réfléchissant à l’ensemble des sources de revenus décrites et avec l’aide de l’interviewer pour relier les différentes réponses sur les revenus et les dépenses, les participants déterminaient le montant total de leurs revenus dans les trois derniers mois, puis dans le dernier mois. Le niveau d’instruction fut obtenu en questionnant le niveau d’étude amorcé pour au moins quelques années (sans définir précisément) ou complété. Pour ce qui est du secondaire, un niveau d’étude était

considéré comme complété si les cours de français, d’anglais et de mathématiques avaient été réussis.

3.1.2.2 Caractéristiques de consommation

Afin de bien cerner la période de temps à laquelle chaque question posée se réfère, les interviewers ont utilisé la technique du life history calendar, aussi appelée event history calendar. Cette technique demande aux interviewers d’identifier avec les participants des évènements marquants qui se sont déroulés à l’intérieur de la période couverte par l’ensemble des questions administrées durant l’entrevue. Au fur et à mesure du questionnaire, ces évènements serviront à situer les participants dans le temps et valider qu’ils comprennent bien la période à laquelle la question se réfère. Cette technique a été utilisée dans plusieurs domaines, dont celui de la toxicomanie, et est particulièrement utile pour se rappeler d’évènements anciens ou, comme dans le cas actuel, d’évènements répétitifs ou parfois moins marquants, même si la période à l’étude est courte. Elle permet de diminuer les biais de rappel et d’augmenter la cohérence des réponses prises dans leur ensemble en diminuant les erreurs temporelles (moment, durée) ainsi que les omissions.185-188 Une multitude de questions sur la consommation de drogues ont été posées à chacun des participants lors de l’entrevue initiale (voir section D du questionnaire T-1 à l’annexe 1). Ces questions visaient à bien décrire la consommation des drogues en termes de types de drogues, de modes d’utilisation et, lorsqu’indiqué, sous quelles formes la drogue a été utilisée (par exemple, comme discuté au chapitre 1, l’injection de cocaïne sous forme de poudre et sous forme de crack a été rapportée), de fréquence de consommation, de comportement à risque d’ITSS lors de la consommation et des conséquences de la consommation, telles que des surdoses ou encore des traitements en dépendance. La plupart des questions plus précises s’adressaient à la période couvrant le dernier mois, alors que certaines questions concernaient les trois derniers mois et enfin quelques questions couvraient toute la vie (par exemple « Dans votre vie, vous êtes-vous déjà injecté des drogues? »). Alors que l’usage de la cocaïne était questionné plus en profondeur, l’usage des autres psychostimulants, l’héroïne et des autres opioïdes, des anxiolytiques, du cannabis, des hallucinogènes et de l’alcool était également identifié. Enfin, le pattern de consommation de consommation sous forme d’épisodes de binge de cocaïne a également été

questionné. À cet effet, la présence d’au moins un épisode de binge de cocaïne à vie et dans le dernier mois a été explorée.

Également, le niveau de sévérité de la dépendance à la cocaïne a été évalué à l’aide du Severity of Dependance Scale (SDS). Cette échelle comprend cinq questions reflétant les aspects psychologiques de la dépendance. Les questions font référence au dernier mois et concernent : la perte de contrôle de cette consommation, l’émotion envers l’idée de ne pas consommer, la préoccupation en lien avec cette consommation, le désir d’arrêter de consommer la cocaïne et l’évaluation du degré de difficulté à cesser la consommation de cocaïne et à demeurer abstinent. Plus le score est élevé, plus le degré de la dépendance est sévère. Cette échelle a été étudiée à plusieurs reprises auprès des usagers de cocaïne. Elle a démontré une bonne validité en lien avec le DSM-IV, sans se substituer à un outil diagnostic plus complet, en indiquant généralement un diagnostic de dépendance à la cocaïne (versus un diagnostic d’abus probable) pour un score plus grand ou égal à trois ou quatre, en plus de démontrer une bonne fidélité test-retest.189-192

3.1.2.3 Diagnostics psychiatriques

Les troubles affectifs et les troubles anxieux ont été évalués à l’aide de questions tirées de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes193 de Statistique Canada et adaptées du Composite International Diagnostic Interview (CIDI) de l’OMS.194 Cette version du CIDI valide la présence ou l’absence des diagnostics selon les critères du DSM-IV. Parmi les troubles affectifs, les diagnostics évalués par le CIDI ont été la dépression, la dysthymie et le trouble bipolaire alors que, pour les troubles anxieux, l’anxiété généralisée, la phobie simple et la phobie sociale ont été examinées.

Les troubles psychotiques et le trouble de la personnalité antisociale ont été évalués à l’aide de questions tirées de l’Enquête auprès de la clientèle des ressources pour personnes itinérantes de Montréal et de Québec de l’Institut de la statistique du Québec puisque ces diagnostics n’avaient pas été couverts dans l’enquête canadienne.195 Ces questions sont adaptées encore une fois du CIDI pour les troubles psychotiques (schizophrénie, trouble délirant), mais cette fois-ci du Diagnostic Interview Schedule (DIS), toujours pour le DSM-IV. Le DIS a été développé par le National Institute of Mental Health des États-Unis. Comme

pour le CIDI, les interviewers administrant le DIS doivent être formés spécifiquement pour le faire, mais ils n’ont besoin d’aucune expérience clinique pour conserver la validité et la fiabilité du test étant donné que les questionnaires sont complètement structurés. L’autre avantage du CIDI est qu’il donne à la fois une mesure du diagnostic psychiatrique à vie et au courant des 12 derniers mois.

Le CIDI est basé sur le DIS qui a lui-même été développé et testé au départ dans le cadre d’une large étude américaine basée dans différentes communautés, baptisée Epidemiologic Catchment Area qui visait à établir la prévalence et l’incidence des troubles psychiatriques aux États-Unis selon le DSM-III au début des années 1980. Ces questionnaires ont été mis à jour et ceux utilisés dans l’étude COSMO se basent directement sur le DSM-IV pour établir le diagnostic et donc sur une classification d’ensemble de symptômes généralement sans inférence étiologique, sauf en ce qui a trait aux troubles induits par une substance. Bien que dans ces questionnaires la distinction entre un trouble induit par une substance et un trouble primaire repose principalement sur la reconnaissance par le participant que l’ensemble de ces symptômes sont la résultante de la prise de la substance ou du sevrage associé à l’arrêt de la substance, quelques études nous indiquent que le CIDI et le DIS apparaissent valides dans la population toxicomane.178,196-198

Alors que la majorité des questionnaires CIDI pour les diagnostics de l’axe I ont été réalisé à l’entrevue initiale, certains ont dû être faits à la deuxième rencontre chez certains individus par manque de temps. Il était prévu que le questionnaire DIS pour le trouble de la personnalité antisociale soit administré à la deuxième rencontre, ce qui a été le cas la majorité du temps, bien que, pour des raisons d’organisation entre les interviewers et les participants, il ait été complété pour une minorité au premier rendez-vous ou aux entrevues trois et quatre.