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Noël & Vilatte (1999) définissent les rituels comme formant « un système qui ordonne et hiérarchise la pratique du groupe. Il impose ce qu’il faut faire ou ne pas faire, autorise des actes et des dires. Il assure la régulation des relations internes du groupe et renforce ainsi sa cohésion » (p.104). Ainsi, les rituels constituent une sorte de code d’éthique explicite qui, s’il est maintenu avec constance dès le début, deviendra rapidement implicite pour tous. C’est en ce sens que les activités routinières établies au début de l’année scolaire s’apparentent de près aux règles de vie au sein d’un groupe et semblent constituer un mécanisme important pour maintenir l’ordre dans une classe et prévenir l’indiscipline. Le rôle social des rituels et leur intention fondamentale est assurément de faciliter les relations, tant entre pairs qu’avec l’environnement, en les structurant.

Il est communément admis que les rituels permettent de conserver le rythme de travail durant les aléas de la vie de classe. Aussi, une gestion efficace de la classe est souvent associée à l’établissement de rituels variés qui deviennent permanents (Everston & Weade, 1989, cités par Nault,

classe, notamment parce qu’ils permettent aux élèves de savoir ce qu’ils ont à faire, à quel moment et de quelle manière. C’est notamment en ce sens que les rituels constituent un outil important pour maintenir l’ordre et le rythme dans une classe, offrant « une infrastructure qui définit le fonctionnement général d’un enseignant avec un groupe d’élèves dans un cadre spatio-temporel donné » (Frank-Villemin, L. & Peccoud, C., 2002, p.52) et constituant par là-même « un espace sécurisant avec des repères identifiables » (Métra, 2010, p.39).

Plus précisément, Métra (2010) explique que « le fait qu’un rituel se reproduise régulièrement rassure » (p.99) et évite les surprises. Il a un effet structurant qui fait de lui un outil spécialement adapté aux élèves qui ont de la peine à trouver leurs repères. De plus, le fait de disposer de rituels spécifiques suggère à l’élève qu’il appartient à une classe organisée et personnalisée. De par leur caractère répétitif découle une compréhension progressive. Parce qu’ils ont effectivement ce côté concret qui permet à l’élève de découvrir les normes, les règles, sans passer par la parole, mais plutôt par les actes, il peut alors par leur biais émerger une prise de conscience des règles. En ce sens, cet outil de socialisation est plus facile à mettre en place et à utiliser auprès des élèves que les règlements étant donné que les règles instituées sont plus abstraites. A l’instar de la loi, les rituels font partie d’un processus de socialisation qui permet à l’individu « de s’intégrer dans un groupe en assimilant les codes propres à ce milieu » (Noël & Vilatte, 1999, p.92-93). Dans ce sens, l’intention fondamentale du rituel est de structurer les relations du sujet avec ses pairs ainsi qu’avec son environnement, tant physique qu’humain.

Or, les moments répétés, un tant soit peu ritualisés, de la classe sont nombreux. Ils règlent la vie collective en imposant une organisation de l’espace et du temps, en désignant les places de chacun et en systématisant les gestes et paroles des individus évoluant dans un même milieu. Ainsi ils garantissent la sécurité de chacun et définissent les frontières de son action (Meirieu, 1987, p.96).

Dans le cadre de la classe, les rituels font de ce fait partie d’un processus qui aide à fixer les valeurs communes, à délimiter ce qui est permis de ce qui ne l’est pas et aide à prévenir les déviances (Noël

& Vilatte, 1999, p.92-93).

Métra (2010) précise que « les rituels ne sont pas des coquilles vides, ce sont des actes symboliques qui ont une fonction instituante » dans la mesure où ils ne sont pas de vaines répétitions» (p.61).

Lorsqu’ils sont porteurs de sens, de symbolique, les rituels engagent l’individu. En effet, celui-ci, lorsqu’il « entre » dans le rituel, ne se contente pas d’y participer mais il lui donne vie. En ce sens, le rituel, qui « fonctionne sur un rapport d’adhésion », se distingue clairement de la loi, qui pour sa part est imposée et relève de la contrainte, autrement dit de l’obligation. Ainsi que précise Meirieu (1987),

« ce qui caractérise, en effet, un rituel scolaire efficace est qu’il garantit, à la fois, la possibilité pour chacun de s’impliquer et de se rétracter, le fait d’avoir une place - qui ne doit pas être toute la place, et de trouver un refuge, quand il est menacé dans son indépendance ou son intégrité » (p.96). Et parce que « dans un rituel, le sujet n’est jamais seul, il est toujours accompagné et soutenu » (Noël &

Vilatte, 1999, p.95), l’adhésion de l’élève au rituel est aussi le résultat de la confiance qu’il peut éprouver en y participant.

En d’autres termes, il s’agit de mettre en place différents rituels, et ceci sur différents plans. Meirieu (Noël & Vilatte, 1999, p.106) en distingue trois. Il y a les rituels de codification des comportements - qui garantissent la sécurité physique et psychologique des sujets dans la classe. Ils ne sont pas introduits pour exclure toute spontanéité, mais plutôt afin de clarifier suffisamment les limites du possible pour que chacun se sente en sécurité et ne craigne pas, à chaque instant, le débordement de l’affection ou l’irruption de l’agressivité, l’idée étant que la règle garantisse chacun contre lui-même et contre les autres en imposant la distance requise (Meirieu, 1987, p.97).

Viennent ensuite les rituels de répartition du temps - qui rythment les activités individuelles et collectives. Ils permettent au sujet de s’intégrer à la vie scolaire par la régularité et la prévisibilité qu’ils supposent. Ils sont là pour que l’enfant trouve des repères et pour que ces temps prennent sens pour lui. Ces rituels évoluent au cours de l’année dans leur forme et leur présentation, et certains vont disparaître, au profit d’autres activités qui répondront mieux aux besoins des élèves.

Et enfin les rituels d’aménagement de l’espace - qui permettent à chacun de s’approprier un territoire de travail. Ainsi que Meirieu (1987) l’explique, « l’organisation de l’espace doit être telle que chacun dispose d’un territoire à investir, à s’approprier, où installer les objets qui lui sont chers et utiles, un territoire qu’il reconnaisse comme sien, d’où il puisse parler et où il puisse se replier » (Meirieu, 1987, p.96).

Il est important que les rituels soient instaurés dès les premières semaines d’enseignement. Nault (1998) se fait insistante quant à la compétence des enseignants à gérer leur classe et explique que

« les enseignants efficaces établissent un système de fonctionnement […] dès le début de l’année, et ce, dans les quatre premiers jours » (p.54). Cette auteure explique par ailleurs que l’enseignant doit passer un temps suffisamment important au début de l’année à rappeler aux élèves les rituels. Durant les toutes premières journées de classe, ces rituels font l’objet d’une description verbale précise et, si nécessaire, d’une démonstration. Il est à noter que la manière de les transmettre varie en fonction de l’âge des élèves ou des caractéristiques du groupe.

Synthèse

Ainsi que nous avons pu le voir tout au long de ce chapitre, l’enseignant a le pouvoir d’agir sur toutes sortes de situations données et la capacité de les modifier, selon l’attitude qu’il adopte et les choix qu’il opère. Parce qu’au début de sa scolarité, l’enfant ignore tout des règles qui régissent la vie d’école et plus spécifiquement la vie de classe, c’est à l’enseignant qu’il revient de les lui enseigner.

L’intention centrale derrière cette instruction est que l’enfant, devenu élève, parvienne à régulariser son comportement de sorte à être en relation de manière harmonieuse avec ses pairs ainsi qu’avec son environnement. L’autodiscipline que l’élève acquiert au cours de sa scolarité trouve sa source dans les valeurs de base. Or, ces valeurs de base s’acquièrent non seulement au contact de personnes les véhiculant, mais également au travers d’actions ritualisées, qui répondent elles-mêmes de ces valeurs. Ainsi, bien que l’enseignant les possède et les vive au jour le jour, il n’en est pas le seul détenteur, et par conséquent l’unique garant.

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