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Quels peuvent-être les conséquences lorsqu’on censure la réflexivité

2. Cadre de Référence

2.5 Quels peuvent-être les conséquences lorsqu’on censure la réflexivité

« L’accès au savoir, quand il ne comprend pas une historisation de sa place et ne donne pas espace aux questions éthiques de son usage, peut aboutir à une emprise qui s’avère aussi nocive que l’ignorance. » (Kominck, 2000)

2.5.1 Banalisation de l’humain dans le contexte du soin

« La banalisation de l’humain, c’est l’oubli, au sein des pratiques du quotidien, de l’humanité même de l’humain, de sa singularité, de sa sensibilité » (Hesbeen, Dupuis, &

Gueibe, 2011, p. 19). Ce que l’auteur veut nous dire par cette définition qui selon lui représente la banalisation de l’humain dans un contexte de soin, c’est qu’il est nécessaire d’apporter une attention particulière à la personne que nous prenons en soin. Comme nous l’avons vu précédemment le soin est une attention particulière porter à une personne, une prise en considération de sa singularité et ainsi permettre à la personne de se sentir Homme. Il est donc primordial de ne pas oublier cette notion dans nos pratiques au quotidien afin de leurs donner du sens afin éviter tout risque de maltraitance envers le soignée. Afin de ne pas banaliser

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l’humain dans le système de soin il demeure important d’adopter des principes éthiques permettant de se remettre en question et d’être soucieux du bien-être de la personne prise en soin. Cette philosophie doit être appliqué dans nos pratiques au quotidien avec le souci de respecter et de prendre en considération l’aspect singulier de l’autre. Pour W. Hesbeen, la réflexion éthique apparait comme indispensable et doit guider nos pratiques au quotidien « Elle apparaît comme une condition indispensable pour qu’au sein des équipes se pensent ce qui contribue au bien des hommes et des femmes malades et tout ce qui pourrait conduire à les banaliser » (Hesbeen, Dupuis, & Gueibe, 2011, p. 27).

D’après Michel Dupuis célèbre philosophe et président du comité consultatif de bioéthique de Belgique, « que le mal s’introduise dans le travail quotidien sans vraiment le perturber, voilà un premier trait de la banalisation de l’humain même dans le soin » (Hesbeen, Dupuis, & Gueibe, 2011, p. 33). L’auteur fait référence aux travaux de Hannah Arendt concernent la banalisation du mal11, qui pour lui est un trait de la banalisation de l’humain. Pour résumer si on ne s’interroge pas sur sa pratique, que l’on ne remarque plus la douleur provoquée à l’autre par un soin. Si cette situation ne conduit pas une démarche réflexive dans le but de faire autrement de prendre en compte l’autre et sa douleur, nous banalisons le mal et de ce fait l’humain en souffrance.

L’objectification fait également partie d’un des traits de la banalisation, en effet si l’on instrumentalise l’autre qu’on le considère alors comme objet de soin nous traitons la personne comme une « chose ». M. Dupuis parle de cette objectification de la personne et en fait un des points clefs de la banalisation de l’humain.

Il aborde un autre aspect de la banalisation qu’il nomme la « mêmeté » c’est une façon réductrice de considérer que chaque être est pareil et se ressemble. C’est une manière qui occulte totalement la singularité de chaque être humain et qui de ce fait conduit à le banaliser.

Pour l’auteur « l’humain banaliser change de nature ; d’une certaine façon, il disparaît, il est englouti parmi les choses, il devient en quelque sorte invisible, inaudible, insaisissable.

Devenue ordinaire, c’est-à-dire inséré sans difficulté dans la trame du quotidien » (Hesbeen, Dupuis, & Gueibe, 2011, p. 39).

On constate d’après ces différents auteurs que la banalisation de l’humain dans un contexte de soin va à l’encontre d’une démarche bienveillante. On remarque également que

11 H. Arendt, Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, Paris, Gallimard, coll. « quarto », 2002

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cette banalisation peut s’installer lorsque que la réflexivité n’intervient pas dans nos pratiques, lorsqu’on ne prend pas du recul sur une situation et que l’on ne considère pas la personne pris en soin comme singulière. Afin de ne pas instrumentaliser l’homme ou la femme en face de nous il advient de donner du sens à sa pratique, d’effectuer au quotidien un travail de considération de l’autre comme être libre et respectable.

2.5.2 Souffrance au travail, notion d’habitude et d’actes automatisés

En effet la réflexivité permet de donner du sens à ce que l’on fait, à se sentir épanoui et satisfait des soins prodiguer au malade chaque jour. Par conséquence, si le soignant ne réfléchis plus ce qu’il fait, dispense tous les soins de la même façon et considère tous les patients comme similaire. Il devient difficile de donner du sens à sa pratique, le soignant ne se sent plus en accords avec ses principes et ses valeurs. Cela entraine une certaine chronicité des actes, une banalisation des soins et de l’humain aboutissant pour le professionnel de santé à un mal être au travail. De plus le soignant n’étant plus en accords avec lui-même, il se créer une forme de discordance en ce qui désire faire et ce qu’il fait. Il se forme alors une sorte de conflit psychique contradictoire entre les valeurs du soignant et son agir entrainant une souffrance professionnelle. « La souffrance éthique, est responsable de la majorité des situations de burn-out, cet état d’épuisement professionnel, psychique et émotionnel, qui provoque très souvent anxiété, dépression, troubles psychologiques, comportements violents, décompensations ou effondrements » (Gineste & Pellissier, 2007). Les deux auteurs expliquent également dans leur ouvrage « La souffrance éthique », que les soignants pour se protéger en arriveraient à banaliser le soin, la souffrance et l’humain. C’est pour eux un mécanisme de défense à cette souffrance.

En ce qui concerne l’habitude, selon JC kauffmann et paru dans le livre des Concepts en sciences infirmières 2ème édition en 2012, « c’est une action quotidienne considéré comme un confort psychologique du rétrécissement des choix, et libérant l’individus de l’infinité de micro-décisions qui lui rendraient la vie impossible ». On constate donc que les habitudes sont à l’opposé de la posture réflexive qui elle ne cherche pas un confort psychologique mais qui au contraire est sans cesse en conflit intrapsychique pour démêler les situations diverses. « Le personnel enserré dans un réseau étroit de priorités et de contradictions, impliqué dans des relations éprouvantes, mets en place des systèmes de défense diversifiés. La routine revêt, en ce sens, un aspect protecteur : la rigidification des attitudes, l’organisation des tâches « à la chaîne » permette de ne pas réfléchir ni de se poser de questions, de maîtriser l’angoisse liée à

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des risque d’interpellation trop intime » (Badey-Rodriguez, 2007). Ce positionnement du soignant dans le but de se protéger va à l’encontre des principes éthiques induit par une posture réflexive et peut même aboutir à de la maltraitance par la banalisation de certains actes et de l’humain. « C’est ainsi que l’on s’ennuie parfois du médecin de famille d’autrefois, celui qui est censé s’occuper de « toute la personne » et il arrive que l’on accuse les spécialistes d’aujourd’hui de traiter une maladie particulière en isolant du reste de l’expérience de vie du patient. De plus, à mesure que la pratique devient tacite et spontanée, le praticien peut rater d’importantes occasions de penser à ce qu’il fait » (Schön, 1994, p. 89). Le travail peut parfois devenir très répétitif pour le soignant, enchainant toilette sur toilette, repas sur repas, coucher sur coucher et s’apparenter à du travail à la chaîne. Pour ne pas tomber dans les dérives de cette

« robotisation du soin » imposé par des contraintes organisationnelles, on mesure l’importance d’une pratique qui se veut éthique émanant de la posture réflexive adoptée par le soignant. La pratique réflexive prend alors, tout son sens.

Pour conclure sur cette partie le soignant est au quotidien confronté à la maladie, la mort, la souffrance, engagé dans des relations éprouvantes. Pour se protéger lui mais également le patient, il doit s’efforcer chaque jour de ne pas tomber dans une « routine », une banalisation, une objectification, qui peuvent entrainer de la maltraitance et une souffrance professionnelle.

Pour cela la réflexivité au quotidien est primordiale afin de donner du sens à sa pratique et ainsi évité toute forme de « culpabilité du soignant ».

2.5.3 Atteinte de l’autonomie, de la dignité du soigné et le risque de déshumanisation

Afin de comprendre le terme de déshumanisation il advient dans un premier temps de définir ce qui fait que l’Homme, est Homme. Pour ce faire nous allons définir trois piliers qui le constitut, l’autonomie, la dignité et la verticalité.

D’après Nathalie Warchol infirmière et cadre de santé « L’autonomie peut se définir comme la capacité d’agir avec réflexion, en toute liberté de choix, mais elle peut être également simplement physique » (Warchol, 2012). Une personne conserve toute son autonomie lorsqu’elle conserve sa liberté dans la prise de décision, ses envies et ses capacités de réflexion.

De ce fait on prive toute personne de son autonomie dès lors ou nous décidons pour lui et ne prenons pas en compte ses choix. C’est une dérive qui peut parfois survenir dans la prise de décision concernant le patient, le soignant pense et choisie pour lui le privant de son autonomie.

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La dignité, d’après le livre des Concepts en sciences infirmières 2ème édition en 2012 qui site Georg wilhelm Friedrich Hegel philosophe du XIXéme siècle, se trouve dans le regard que l’autre pour sur moi « je ne suis pas humain si je ne suis pas reconnu comme tel par autrui.

Le secret de ma dignité se trouve dans le regard qu’autrui porte sur moi » (Formarier & Jovic, 2012). Selon le Larousse. Fr (2019) la dignité est « le respect que mérite quelqu’un ou quelque chose ». La dignité apparait donc comme une notion primordiale de respect et de considération envers l’être humain qui se présente à nous.

Concernant la verticalité c’est la capacité de l’homme à se tenir debout, capacité qui le différencie des animaux et qui par conséquent, fait de lui un « Humain ». Lorsque la personne est affaiblie dans un lit ou en fauteuil, il est alors diminué et perd cette verticalité qui le fait se sentir Homme.

Pour conclure, si l’Humain se caractérise par sa capacité à penser par lui-même, donc d’autonomie, du respect de sa dignité et par sa position verticale. Alors il convient d’admettre la possibilité qu’il existe de déshumaniser ce dernier. Dès lors qu’il se retrouve alité du fait de sa maladie, lorsque malgré lui le soignant porte atteinte au respect de sa dignité et qu’il ne prend pas en compte les choix du patient. Lorsqu’on retire à la personne malade ce qui fait de lui un Homme, son autonomie, sa dignité et sa verticalité alors on le déshumanise. Parfois c’est dérive survienne par la banalisation de la souffrance, du soin et de la personne soignée. Le professionnel de santé peut devenir malgré lui maltraitant pris par une sorte de « routine » oubliant la singularité de chaque personne qui rencontre. C’est pourquoi, il est indispensable d’adopter une posture réflexive afin de toujours prendre du recul sur sa pratique, permettant au soignant de se rendre compte de ses erreurs et les corriger. L’éthique est un ensemble de valeur qui fournit une ligne de conduite permettant au professionnel paramédical de faire la distinction entre le bien et le mal au quotidien.

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3. La méthode explorative :