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– Quelques expériences de partenariat dans le monde

de les analyser afin d’en tirer des enseignements utiles permettant de procéder à des comparaisons significatives avec l’expérience de partenariat vécue par le Tunisie.

Notre choix a porté sur deux grandes expériences : celle du Mexique avec l’accord de libre-échange nord-américain et celle du traité commercial euro-américain qui ont échoué lamentablement.

V – 1 - L’expérience du Mexique : l’accord de libre-échange devient un fardeau pour les mexicains

L’accord de libre-échange nord-américain entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique (ALENA) qui est entré en vigueur le premier janvier 1994, a promis d’assurer au Mexique un développement économique important. Les partisans de cet accord considèrent, en effet, que l’ouverture des échanges serait profitable aux pays membres de cet accord, conformément à la théorie des avantages comparatifs. Ils estiment que le Mexique va connaître une croissance soutenue, une baisse du chômage, une augmentation des salaires et une diminution des prix des produits alimentaires.

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Le président du Mexique n’a pas manqué de décrire l’ALENA, lors de sa signature, comme « une occasion unique de transformer le pays » et la « chance du Mexique d’entrer dans le premier monde » Ce que 28 confirme le New York Times qui prédit « l’accroissement des niveaux de vie dans toutes les régions du Mexique pour les peuples de toutes origines ethniques » . 29

Le bilan souvent présenté met en évidence les retombées positives de l’ALENA :

-­‐ Un accroissement des investissements directs étrangers ; -­‐ Un accroissement des emplois ;

-­‐ Une augmentation notable des exportations ; -­‐ Une croissance économique indiscutable ;

Certes, la croissance a augmenté. Cependant, elle n’a pas profité à tous les mexicains. Globalement, la réalité va démentir toutes les prévisions et décevoir tous les espoirs et ce pour différentes raisons :

1 – Un bilan social désastreux :

S’il est certain qu’une frange de la population du Mexique a pu tirer d’énormes bénéfices de l’ALENA, il n’en reste pas moins que la majorité des mexicains ont souffert énormément des retombées négatives de cet accord.

 Cité in Jean-Michel Lacroix, « Les tribulations du marché unique

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nord-américain », Le Monde diplomatique, mars 1993.

 http://risal.collectifs.net/spip.php?article1525

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La croissance économique du Mexique n’a pas profité à la majorité des mexicains dans la mesure où les inégalités sociales et régionales, la pauvreté et l’exclusion se sont aggravées.

-­‐ L’ALENA a été un véritable désastre pour les paysans mexicains qui n’ont pu faire face à la concurrence que leur livre une agriculture américaine très compétitive. En effet, deux millions et demi de producteurs de maïs, occupant 57 % de la superficie agricole, ont vu leur marché envahi par du maïs américain dont le prix est inférieur à celui du mais mexicain, et ce grâce aux fortes subventions dont bénéficie l’agriculture aux Etats-Unis. De ce fait, les importations du maïs par le Mexique ont plus que triplé depuis la création de l’ALENA ., juin-juillet 30 2004). C’est ce que confirme Cruz Lopez Aguilar, le président de la puissante Confédération Nationale des Paysans, qui souligne que : « 5 millions d’emplois agricoles ont été perdus et 2 millions d’hectares sont en jachère » depuis la mise en place de l'ALENA . ». Ce qui n’a pas manqué d’aggraver le chômage 31 au Mexique.

-­‐

-­‐ La pauvreté s’est répandue de manière remarquable : le nombre de pauvres est passé de 12 millions en 1994 à 50 millions en 2008 dont 20 millions sont en situation d’extrême pauvreté . 32

-­‐ Depuis la mise en application de l’ALENA, le Mexique est passé d’une situation d’autosuffisance alimentaire à une

Economie & Humanisme 30

http://www.alterinter.org/spip.php?article1577 31

http://www.alterinter.org/spip.php?article1577 32

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nouvelle situation de dépendance vis-à-vis des exportations américaines à raison de 40 % de ses besoins alimentaires . 33 -­‐

-­‐ D’une manière générale, la dépendance du Mexique à l’égard des Etats-Unis est totale : 74 % des importations mexicaines proviennent des Etats-Unis et 89 % de ses exportations sont destinées à ce pays . 34

-­‐ Les mexicains n’ont pas cessé de connaître une dégradation de leur pouvoir d’achat sous l’effet de la hausse des prix. Le salaire minimum, qui permettait en 1994 l’achat de 38,2 kilos de tortilla, ne permettait en 2008 que l’acquisition de 5,7 kilos . 35 -­‐

-­‐ L’exode rural des campagnes vers les villes s’est amplifié de telle sorte que 80 % des mexicains vivent dans les zones urbaines en 2010 . 36

-­‐ Avec l’ALENA, le Mexique, pour développer son économie, a cherché à privilégier les investisseurs américains au détriment des conditions de travail de sa population. C’est ce qui explique l’accroissement du nombre des usines d’assemblage mexicaines de 2 000 à 3 700 en six ans . Mais, c’est aussi ce 37

http://www.cetri.be/spip.php?article634.

33

http://www.rfi.fr/actufr/articles/032/article_16410.asp 34

http://www.cetri.be/spip.php?article567 35

Mexico 2010, Centre d’études stratégiques nationales (CEEN), Mexico, 2000, p.

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60).

http://www.ieim.uqam.ca/IMG/pdf/Chro_Mex1.pdf 37

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qui réside derrière l’importante dégradation des conditions de travail en l’absence de tout contrôle des lois sociales et du travail.

-­‐ Sur le plan écologique, le Mexique n’a plus de capacité pour assurer une régulation de son économie au profit d’un développement durable. Les ressources naturelles sont épuisées, l’environnement s’est dégradé, notamment par l’émission de produits contaminants dans les grandes villes, le mauvais traitement des déchets dangereux et l’importation de produits transgéniques.

-­‐ Il faut ajouter que les domaines de la santé, l’éducation, la sécurité alimentaire, la culture… sont soumis aux lois du marché. C’est ainsi que conformément aux droits de propriété intellectuelle mentionnés dans l’ALENA, il est interdit au Mexique de produire des médicaments génériques sans les redevances dues à la marque commerciale. Ce qui ne fait qu’augmenter les prix de ces médicaments.

Tout ce tableau sombre a résulté d’une utilisation multiforme de politiques de dumping qui a été aussi largement exploitées par la Tunisie, mais avec des résultats relativement moins prononcés.

2 – Une agriculture totalement dévastée :

L’agriculture mexicaine est fortement concurrencée par l’agriculture américaine. Si aux Etats-Unis, il y a 1,6 tracteurs pour chaque agriculteur américain, il n’y a, en revanche, qu’un seul tracteur pour 200 mexicains. Le revenu annuel pour un agriculteur américain est de 20 000 dollars, alors que ce revenu ne dépasse pas les 700 dollars

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pour l’agriculteur mexicain . Les rendements à l’hectare aux Etats-38 Unis sont nettement supérieurs à ceux du Mexique et les productions américaines sont assurées à des coûts très faibles par rapport aux coûts mexicains, sans oublier les subventions accordées à l’agriculture américaine.

L’ouverture du marché mexicain aux produits en provenance d’une agriculture industrielle américaine très compétitive a exposé les agriculteurs mexicains à une forte concurrence dont les conséquences ont été néfastes. La balance agricole du Mexique est passée d’un excédent de 581 millions de dollars en 1994 à un déficit de 2 148 millions de dollars en 2000 . Même les mesures de 39 protection, qui ont été prévues, n’ont jamais été appliquées, ce qui a facilité l’invasion du marché mexicain par les produits américains. De ce fait, les importations mexicaines ont explosé passant de 2,6 millions de tonnes en 1994 à 7,5 millions de tonnes en 2007 . Il s’est 40 ensuivi une destruction progressive du secteur agricole mexicain et une perte de compétitivité des produits agricoles mexicains face au géant américain, ce qui n’a fait que renforcer la domination américaine sur l’économie du Mexique.

3 – Une industrie mexicaine disloquée :

L’industrie mexicaine est dominée par les usines d’assemblage de composants industriels en provenance des Etats-Unis. Dès que les

http://www.cetri.be/spip.php?article195 38

http://www.cetri.be/spip.php?article195 39

http://www.un.org/wcm/content/site/chronicle/cache/bypass/lang/fr/home/archive/

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issues2008/pid/21609?print=1

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produits sont montés, ils sont réexportés vers les Etats-Unis sans permettre aucune rentrée financière pour le Mexique, d’autant plus que ces industries n’utilisent que rarement des composants locaux.

Ainsi, les exportations mexicaines, qui ont triplé en dix ans, ne sont pas l’œuvre des entreprises mexicaines et le commerce extérieur signifie pour le Mexique des sorties de devises, comme on l’a souligné dans le cas tunisien pour les exportations réalisées sous le régime offshore.

Les grandes entreprises exportatrices sont étrangères, tandis que l’industrie manufacturière mexicaine (hors sous-traitance) avait une composante nationale de l’ordre de 91 % en 1983 évaluée à 37 % en 1996.

Par ailleurs, une bonne partie des entreprises mexicaines a été contrainte à la disparition : en dix ans, plus de 28 000 PME mexicaines ont été fermées . 41

La présence de cette sous-traitance américaine s’explique principalement par les bas salaires et l’absence de contrôle des conditions de travail. En effet, le salaire de l’ouvrier mexicain est six à huit fois inférieur à celui de l’ouvrier américain. L’avantage économique pour les entreprises américaines opérant au Mexique est incontestable. Celles-ci, en effet, bénéficient de l’exonération des taxes, de la garantie du libre rapatriement de leurs capitaux et de leurs bénéfices et de la proximité géographique qui rend dérisoires les coûts de transport.

Pour le Mexique, il a pu bénéficier d’un accroissement de l’emploi qui a été neutralisé par la perte d’emplois entraînée par l’ALENA, responsable d’une hausse du chômage et d’une accentuation de la pauvreté.

http://www.cetri.be/spip.php?article195.

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L’accord de libre-échange a détruit l’agriculture du Mexique et a réduit son industrie à la sous-traitance. Il n’a, en aucun cas, entraîné une relance de l’économie mexicaine. P. Cliche a bien résumé la situation en écrivant que : « Au Mexique, c’est précisément le 1er janvier 1994, date d’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), symbole par excellence de la globalisation ultralibérale, qu’a débuté le soulèvement zapatiste, motivé justement en partie par la menace de privatisation des terres publiques (ejidos) à la suite d’une modification de la constitution pour que le pays s’adapte aux conditions de l’ALÉNA » . 42

V – 2 - Le TAFTA, l’échec annoncé du traité commercial euro-américain :

Le TAFTA, appelé également TTIP, est le traité euro-américain visant la libéralisation du commerce et des investissements. Il continue de susciter des tensions entre partisans et adversaires.

Les partisans comptent parmi les gouvernements des pays européens les plus ouverts aux échanges commerciaux avec les Etats-Unis, à savoir l'Espagne, l'Italie, la Grande-Bretagne, la Suède, la Finlande, le Portugal, l'Irlande, la République Tchèque, le Danemark et les trois pays baltes.

Mais, c’est surtout auprès de la société civile européenne que l’on trouve les adversaires les plus acharnés du TAFTA, mais aussi du traité euro-canadien, le CETA qui a été signé en octobre 2016.

Les négociations, engagées depuis 2013, entre les Etats-Unis et l’UE sont à leur 14ème round et elles n’ont abouti à aucun accord sur les 27 chapitres du projet de traité. Le 28 août 2016, le ministre allemand

P. Cliche : « Quel modèle de développement pour l’Amérique Latine ? », Editions 42

Vie Economique, vol ; 1, n°3

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de l’économie n’a pas manqué de souligner: "Les négociations avec les Etats-Unis ont de facto échoué, parce que nous, les Européens, ne voulons pas nous plier aux exigences américaines". C’est ce que confirme, le 30 août 2016, le secrétaire d’Etat français au commerce extérieur qui a réclamé l’arrêt des négociations en affirmant que "Les Américains ne donnent rien ou alors des miettes [...], ce n'est pas comme ça qu'entre alliés on doit négocier". Et d’ajouter que "les relations ne sont pas à la hauteur entre l'Europe et les USA, il faut reprendre plus tard sur de bonnes bases. Il faut un coup d’arrêt clair et définitif à ces négociations pour repartir sur de bonnes bases» (site Radio RMC).

Il va de soi que la TAFTA représente un enjeu majeur, dans la mesure où 30 % du commerce mondial et 20 % des investissements directs étrangers seraient concernés par ce traité. Il constitue un véritable projet de société d’inspiration néolibérale. A cela s’ajoute le fait que le TAFTA prévoit de confier le règlement des conflits entre les Etats et les sociétés multinationales, non pas à la justice publique, mais à des instances arbitrales privées. Ainsi, tout Etat qui prend des mesures pour limiter la consommation de tabac ou pour faire face à la dégradation de l’environnement ou pour protéger les données personnelles peut être traduit devant ces instances arbitrales par les groupes industriels qui se sentiraient lésés.

Section VI - Pour une refonte des relations de la Tunisie avec l’Union Européenne

De prime abord, toute négociation avec l’UE nécessite, au préalable, une évaluation conséquente du bilan de l’accord d’association entre la Tunisie et l’UE, au niveau de ses répercussions tant positives que négatives.

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La Tunisie doit être en mesure de défendre ses intérêts en œuvrant en vue de conclure un « accord rectificatif » destiné à corriger la situation asymétrique et inéquitable caractérisant les relations entre la Tunisie et l’UE.

Ce qu’il faut dénoncer, c’est le caractère totalement déséquilibré et inéquitable des accords de partenariat qui sont conclus depuis l’indépendance et surtout depuis 1995 et qui continuent de prévaloir après la révolution, ce qui justifie la nécessité d’entamer de nouveau les négociations pour aboutir à un nouveau partenariat profitable pour les deux parties.

Dans ces négociations, la Tunisie officielle ne dispose d’aucune marge de manœuvre lui permettant de défendre ses intérêts et d’imposer un partenariat juste et équilibré. C’est la raison pour laquelle la société civile tunisienne, qui se caractérise par un engagement croissant en vue d’obtenir une refonte du partenariat avec l’UE, est appelée à continuer à exercer ses pressions dans le but de sensibiliser les décideurs européens et d’imposer une reformulation du cadre stratégique des négociations concernant les relations futures de la Tunisie avec l’UE.

Ce qu’il faut également souligner, c’est que la politique européenne vis-à-vis de la Tunisie n’a connu aucune évolution qualitative depuis 1995 et même après 2011. En effet, malgré les diverses assistances financières, il n’y a aucun changement dans la perception stratégique de l’UE à l’égard de la Tunisie. Les promesses faites par le G7 à Deauville en 2011 n’ont pas été tenues et les avoirs spoliés et placés à l’étranger sous l’ancien régime n’ont pas été restitués.

L’UE a toujours cherché à préserver ses intérêts et son influence en essayant d’imposer à la Tunisie les mêmes choix économiques et sociaux d’avant la révolution. L’objectif final reste toujours le même : davantage d’intégration économique de la Tunisie dans le marché

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européen à travers l’extension d’un libre-échange injuste et asymétrique. L’UE n’accorde pas l’importance nécessaire aux capacités d’adaptation limitées de l’économie tunisienne. C’est ce que la société civile n’a pas manqué de dénoncer dans une déclaration publiée le 15 février 2016 et dans laquelle 19 organisations tunisiennes influentes (dont l’UGTT, le FTDES, la Ligue des Droits de l’Homme l’Association Tunisiennes des Femmes Démocrates) et des associations françaises (Attac notamment) ont mis en évidence les effets dévastateurs des accords de libre-échange imposés par l’UE à la Tunisie. La destruction progressive des secteurs productifs de l’économie tunisienne et l’endettement extérieur excessif et improductif de la Tunisie illustrent parfaitement le caractère ravageur de la libéralisation des échanges. L’ALECA, qui n’est qu’une consolidation de cette libéralisation, ne peut que susciter les inquiétudes de la société civile. Celles-ci apparaissent nettement à travers le dépouillement des journaux Echaab et Al Bayane respectivement porte-parole de l’UGTT et de l’UTICA. Si Echaab insiste sur les aspects relatifs à la question sociale en général (emploi, précarité du travail, réduction des divers acquis sociaux…), Al Bayane, de son côté, met l’accent sur la nécessité de la mise à niveau, sur la progressivité de la libéralisation, sur les incitations et les appuis financiers, sur la protection non tarifaire en Europe… De leur côté, les entretiens avec les principaux acteurs de la société civile ont montré un net clivage entre les gagnants (les grandes entreprises et celles de l’offshore et aussi celles de l’import-export…) et les perdants (les chômeurs, les précaires, les petites entreprises, les petits commerçants…) du partenariat.

Telles sont les raisons qui expliquent pourquoi la société civile des deux côtés de la Méditerranée milite pour une redéfinition des termes

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du partenariat avec l’UE selon une nouvelle approche tenant compte des intérêts de la Tunisie.

Cette redéfinition doit nécessairement passer par la dénonciation de la stratégie et des accords prévalant depuis l’indépendance et que l’UE a reconduits après la révolution. Ce sont des accords à caractère foncièrement commercial et qui ne tiennent pas compte du fait que l’économie tunisienne ne peut disposer d’un niveau élevé de compétitivité face aux économies de l’UE, que la Tunisie a des besoins spécifiques en matière de croissance et de développement économiques qu’il faut satisfaire en priorité et que les secteurs clés de l’économie, notamment l’agriculture et les services, doivent être protégés contre toute concurrence nuisible.

VI – 1 – Des leçons à tirer :

Contrairement aux pays de l’Europe centrale et orientale (PECO) qui se sont engagés, depuis la désagrégation du bloc soviétique du début des années 1990, dans un processus d’adhésion qui a fini par aboutir, la Tunisie est restée liée par un simple accord de partenariat.

Dans les PECO, le processus d’adhésion à l’UE s’est traduit par : -­‐ La rapidité et la crédibilité des réformes menées dans ces

pays ;

-­‐ Une synchronisation des réformes sur le plan économique, social et politique ayant débouché sur des changements considérables sur la plan structurel, institutionnel et comportemental ;

-­‐ Une assistance financière conséquente de la part de l’UE. En effet, les ressources allouées aux pays du sud méditerranéen sont de 5 euros par an et par habitant contre 15 à 20 euros pour les PECO ;

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-­‐ Une orientation massive des IDE vers les PECO : pour 1 euro d’IDE investi au Maghreb, il y a 5 à 10 euros qui sont investis dans les PECO.

Quant à la Tunisie, le partenariat avec l’UE l’a mise dans une situation où elle va perdre une partie des fondements de sa croissance et de son développement avec notamment :

-­‐ Un transfert continu, de la Tunisie vers l’UE, de ressources financières au titre du remboursement de la dette et du transfert de dividendes et de profits réalisés par les IDE;

-­‐ Une émigration touchant autant la main-d’œuvre non qualifiée que la main-d’œuvre qualifiée ;

-­‐ Un comportement de désarroi de la part des investisseurs privés tunisiens à cause de la nature déséquilibrée des relations entre la Tunisie et l’UE et des mutations accélérées dans le monde ;

Il est certain que la responsabilité de ces contrastes entre la Tunisie disposant d’un statut de partenaire, et les PECO, celui d’adhérents, incombe principalement et, une part importante, à l’UE en tant qu’architecte des relations internationales et des intégrations régionales. Même la tentative de mettre en application, en mars 2003, d’une nouvelle politique de voisinage ne pouvait, en aucun cas, aboutir à une adhésion de la Tunisie à l’UE qui, malgré l’affirmation de la nécessité de respecter les droits de l’homme et d’engager le dialogue avec la société civile, continue d’adopter une logique marchande dans le cadre de la coopération initiée avec la Tunisie.

Les simples rapports de bon voisinage doivent être rompus pour instaurer de nouvelles conditions pour un partenariat stratégique favorisant la mise en place d’un processus de Co-développement durable, solidaire et équitable.

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VI – 2 – Des ruptures à entreprendre :

La réalisation d’un partenariat stratégique nécessite de rompre avec l’ancienne logique et d’orienter les relations entre la Tunisie et l’UE dans une perspective stratégique contribuant à relever les défis qui se posent à la Tunisie. Il faut essentiellement:

-­‐ Rompre avec la logique marchande qui n’est intéressée que par l’ouverture, la libéralisation et la privatisation. Il n’est plus question de continuer à privilégier uniquement les échanges commerciaux au détriment du transfert de la technologie et du développement de la recherche scientifique et de l’innovation.

-­‐ Eviter de mettre en difficultés les petites et moyennes entreprises qui ne sont pas habituées à un environnement concurrentiel, alors que beaucoup d’entreprises européennes continuent de bénéficier de l’assistance de leurs gouvernements à travers la politique agricole commune (PAC) et les politiques industrielles déclarées ou larvées).

-­‐ Eviter une ouverture des marchés publics aux entreprises européennes, étant donné les inégalités en termes de tailles, de capacités et de compétitivité. On parle de centaines de milliers d’emplois qui sont menacés dans le bâtiment et certains services.

-­‐ Faire en sorte que les investissements directs étrangers ne soient pas intéressés uniquement par les faibles coûts salariaux de la main-d’œuvre dans des activités à faible valeur ajoutée.

-­‐ Agir en vue de réduire le déficit budgétaire et les déficits extérieurs pour pouvoir entreprendre les réformes structurelles nécessaires et ne pas réduire les transferts sociaux.

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-­‐ Rompre avec la logique périphérique d’intégration verticale en favorisant un renforcement de l’intégration horizontale entre les pays du Sud.

-­‐ Impliquer la société civile pour bousculer les inerties et mobiliser les ressources et les énergies.

-­‐ Orienter l’aide accordée par l’UE vers les besoins définis par la Tunisie et non par les bailleurs de fonds.

-­‐ Prendre les mesures nécessaires pour alléger l’endettement actuel de la Tunisie et reconvertir la dette en financements directs de grands projets permettant l’atténuation des inégalités régionales et sociales.

VI – 3 - Pour un traité de juste-échange

Aujourd’hui, la conjoncture économique, financière et sécuritaire, tant sur le plan local que régional et international, est particulièrement défavorable pour la Tunisie. Il est, par conséquent primordial de s’engager dans une nouvelle approche globale concernant les relations de la Tunisie avec l’UE. Celles-ci ne doivent pas se réduire à la simple dimension commerciale. En effet, il est important de souligner que le partenariat entre la Tunisie et l’UE ne peut être uniquement commercial et financier. Il représente des enjeux politiques et économiques considérables, du moment qu’il touche aux grands choix économiques et sociaux de la Tunisie et à ses intérêts supérieurs.

L’UE a toujours recouru à l’exercice de pressions pour obtenir une ouverture économique totale de la Tunisie et de ses marchés aux produits, aux investisseurs et aux exportateurs européens.

L’illusion véhiculée est que le libre-échange serait bénéfique pour l’économie tunisienne du fait que les produits tunisiens pourraient