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3.3) Arc volcanique plio-quaternaire

59. Puyo (cônes basaltiques) 60 Chimborazo

61. Igualata 62. Laves de Mera 63. Calpi (cônes basaltiques) 64. Altar / Capac Urco 65. Licto (cônes basaltiques) 66. Sangay

3) Les Andes équatoriennes

Les variations compositionnelles pourraient ainsi refléter des différences de contamination custale, soit par la nature du contaminant, soit par l’intensité de la contamination. En effet, conséquemment aux épisodes d’accrétion de terranes qui se sont produits entre le Jurassique moyen et l’Eocène, les magmas équatoriens traversent des portions de croûte d’âge, de composition et d’épaisseur différents. Le soubassement des trois arcs est ainsi composé de terrains océaniques à l’ouest, de lithologies continentales matures à l’est et d’un vieux bouclier précambrien sous les volcans de l’arrière-arc. Les données gravimétriques indiquent que l’épaisseur crustale varie de 25-30 km sous les édifices du front volcanique à plus de 50 km sous les plus hauts stratovolcans de l’arc principal, et qu’elle subit un amincissement progressif vers le craton guyanais (Feininger et Seguin, 1983). Des données sismiques plus récentes révèlent que la croûte a une épaisseur de 40-50 km sous la partie ouest de l’Equateur et de 50-75 km sous la partie est (Prévot et al., 1996 ; Guillier et al., 2001). Néanmoins, Barragán et al. (1998) ont démontré que les compositions des laves équatoriennes ne pouvaient en aucun cas être reliées au type de soubassement sur lequel elles ont été émises. En effet, les données isotopiques soulignent une contamination crustale faible, dans tous les cas < 15%. D’autres études portant sur différents édifices de l’arc volcanique équatorien, e.g. l’Antisana (Bourdon et al., 2002b), le Cayambe (Samaniego et al., 2005) et les Illiniza (Hidalgo et al., 2007), aboutissent aux mêmes conclusions. En outre, Bryant et al. (2006), qui ont interprété les variations du rapport 143Nd/144Nd et des isotopes du Pb à travers

l’arc volcanique équatorien comme le résultat d’assimilation de croûte continentale mature spécialement dans l’arc principal, limitent la quantité de croûte assimilée à moins de 10%. Ces résultats sont en accord avec les travaux réalisés à partir des isotopes de l’oxygène, qui considèrent que la contamination crustale, bien que toujours faible (15-20%), est plus importante dans la Cordillère Real que dans la Cordillère Occidentale (Hammersley et DePaolo, 2002 ; Hidalgo, 2006).

Il semble donc que la composition des magmas équatoriens soit principalement contrôlée par les processus se produisant dans la zone de subduction :

- les transferts de matière de la plaque plongeante vers la péridotite mantellique ; - les réactions métasomatiques dans le coin de manteau ;

- les modalités de la fusion partielle (profondeur, taux de fusion, composition du résidu). Depuis les années 1980, plusieurs modèles de genèse ont été proposés, à partir des caractéristiques pétrographiques et géochimiques des laves, selon des transects perpendiculaires à l’arc volcanique équatorien :

• Modèle d’Hörmann et Pichler (1982)

Ces auteurs ont proposé que les magmas formés dans l’arc frontal et principal dérivent de la fusion partielle en conditions hydratées d’amphibolites à grenat, à des pressions d’environ 2 GPa (~70 km de profondeur), sans pour autant préciser les modalités de formation des amphibolites. Les variations géochimiques des laves entre les deux arcs peuvent ainsi être expliquées par des différences de la profondeur de formation des

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• Modèle de Monzier et al. (1997b)

Monzier et al. (1997b) ont comparé les échantillons issus de 12 volcans équatoriens, appartenant à l’arc frontal et principal, aux laves calco-alcalines des Nouvelles-Hébrides (Monzier et al., 1997a). La série magmatique de l’arc intra-océanique des Nouvelles- Hébrides dont les laves proviennent de la fusion partielle d’un manteau métasomatisé par des fluides est considérée comme une série d’arc « classiques » et constitue ainsi une bonne base de comparaison. Ces auteurs ont montré que les laves d’Equateur sont :

- fortement enrichies en Mg, Cr et Ni ; - enrichies en Al, Ca et Sr ;

- appauvries en Fe et K ;

- fortement appauvries en HREE et Y.

Les concentrations extrêmement faibles en HREE et Y, couplées à l’abondance des compositions andésitiques et dacitiques dans l’arc équatorien, sont des caractéristiques typiques des magmas adakitiques. Ces observations suggèrent la participation de tels magmas silicatés, lors de la genèse des laves de l’arc frontal et principal. Pour Monzier et al. (1997b), les liquides adakitiques proviendraient de la fusion partielle de matériaux basaltiques métamorphisés, à la base de la croûte continentale, sous l’action de remontées magmatiques basaltiques d’origine mantellique.

• Modèle de Barragán et al. (1998)

En considérant trois volcans, situés respectivement dans l’arc frontal (Atacazo), l’arc principal (Antisana) et l’arrière-arc (Sumaco), Barragán et al. (1998) ont mis en évidence une corrélation systématique entre les compositions des laves et la profondeur de la zone de Bénioff. Ainsi, les rapports LILE/HFSE diminuent avec l’éloignement de la fosse, en accord avec la diminution de la quantité de fluides aqueux libérés par la déshydratation de la plaque plongeante. En revanche, les teneurs absolues en éléments incompatibles, ainsi que le rapport La/Yb, augmentent de l’arc frontal vers l’arrière-arc, suggérant une diminution du degré de fusion partielle. Par conséquent, les différences de composition entre les trois arcs volcaniques semblent être contrôlées par deux paramètres : 1) la quantité de fluides issus de la croûte subductée et 2) le degré de fusion partielle, qui sont tous deux directement liés à la profondeur de la zone de Bénioff. En effet, lorsque la déshydratation de la plaque plongeante se produit à faible profondeur, elle relâche beaucoup de fluides qui vont induire de forts degrés de fusion partielle dans le coin de manteau sus-jacent. Selon le modèle de Barragán et al. (1998), les magmas du front volcanique sont générés par 15% de fusion partielle d’une source mantellique enrichie par 1,1% d’apport de la plaque subductée. Les magmas de l’arc principal sont formés par 3% de fusion partielle induite par 0,06% de fluides libérés par la croûte subductée. Quant aux magmas de l’arrière-arc,

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• Modèle de Bourdon et al. (2003a)

Bourdon et al. (2003) ont également travaillé sur trois édifices formant un transect perpendiculaire à travers l’arc volcanique équatorien : le Pichincha (arc frontal), l’Antisana (arc principal) et le Sumaco (arrière-arc). Ces auteurs ont non seulement repris la conclusion de Barragán et al. (1998), selon laquelle la quantité de fluides impliqués dans la genèse des magmas diminue lorsqu’on s’éloigne de la fosse, mais également l’hypothèse de Monzier et al. (1997b), qui évoque la participation de liquides adakitiques. En plus de l’augmentation des teneurs en K, LILE, LREE et HFSE, ils ont remarqué un affaiblissement des caractéristiques adakitiques, de l’arc frontal vers l’arrière-arc, et ont proposé un modèle en trois étapes :

1) Contrairement à Monzier et al. (1997b), ils proposent que les liquides adakitiques soient issus de la fusion partielle de la croûte océanique subductée au niveau de l’avant-arc. Durant leur remontée vers la surface, ces magmas acides :

(a) interagissent avec le coin de manteau et provoquent la cristallisation de pargasite, de phlogopite et de grenat métasomatiques. En contrepartie, les liquides adakitiques s’enrichissent en Mg, Cr et Ni et sont ensuite émis sous forme d’HSA (High-Silica Adakite, cf. § 2.2.3.2) ;

(b) sont entièrement consommés dans les réactions métasomatiques avec la péridotite mantellique, dont la fusion subséquente produit des LSA (Low-Silica Adakite, cf. § 2.2.3.2).

Ces deux processus sont exclusivement limités aux volcans frontaux.

2) Emmené par la convection mantellique, le manteau métasomatisé subit un épisode de fusion partielle sous l’arc principal, déclenché par la déstabilisation de la pargasite mantellique, et produit des laves calco-alcalines à signature adakitique plus ou moins marquée.

3) Finalement, lorsque ce manteau atteint la profondeur adéquate, la déstabilisation de la phlogopite permet un ultime épisode de fusion partielle sous les volcans de l’arrière-arc et génère des basaltes riches en Nb.

En s’inspirant du modèle de Gutscher et al. (1999a, 2000a) et des données sismiques de Guillier et al. (2001), Bourdon et al. (2003a) proposent que la diminution de l’angle de la plaque subductée sous la marge équatorienne, induite par la récente subduction (< 5 Ma) de la ride de Carnegie, permet le réchauffement progressif de la croûte océanique et sa fusion partielle depuis environ 1,5 Ma. Ainsi, la production de liquides adakitiques sous l’arc frontal a modifié la genèse des magmas dans tout l’arc volcanique, permettant le passage d’un magmatisme calco-alcalin typique, induit par des fluides libérés par la déshydratation de la plaque plongeante, à un magmatisme aux caractéristiques adakitiques, impliquant des liquides silicatés issus de la fusion partielle de la croûte subductée.

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En plus des études concernant l’ensemble de l’arc volcanique équatorien, d’autres travaux détaillés ont été réalisés sur des volcans individuels. Par exemple, Kilian et al. (1995) proposent un modèle de mélange entre des magmas issus de la fusion du manteau hydraté et des liquides formés par fusion partielle de la croûte inférieure, pour expliquer les caractéristiques géochimiques des produits du Complexe Volcanique Chimborazo. Pour le volcan Sangay, Monzier et al. (1999b) ont mis au point un modèle dans lequel les magmas seraient d’abord issus de la fusion du manteau, préalablement enrichi par des fluides libérés lors de la déshydratation de la plaque plongeante. Ces magmas seraient ensuite stockés en base de croûte où des processus d’ACF (ACF = Assimilation et Cristallisation Fractionnée) modifieraient leur composition. Le Chimborazo et le Sangay faisant partie de la zone volcanique de Riobamba, à l’extrémité sud de la NVZ, les processus détaillés ci-dessus sont donc difficilement applicables au reste de l’arc équatorien.

Plus récemment, d’autres complexes volcaniques ont été étudiés, principalement dans l’arc frontal (Bourdon et al., 2002a ; Hidalgo, 2002, 2006 ; Andrade, 2003 ; Chemin, 2004 ; Hidalgo et al., 2007) et l’arc principal (Samaniego, 1997 ; Robin et al., 1997, soumis ; Bourdon et al., 2002b ; Samaniego et al., 2002, 2005). La plupart de ces études montrent qu’au sein d’un même édifice, l’affinité géochimique des laves a changé au cours du temps, passant d’un volcanisme calco-alcalin classique à un volcanisme présentant des caractéristiques adakitiques. Les conclusions apportées par ces travaux appuient le modèle pétrogénétique de Bourdon et al. (2003a). Elles considèrent la fusion partielle de la plaque subductée comme le mécanisme qui génère les adakites. Elles évoquent également la métasomatose subséquente du coin de manteau, par ces liquides silicatés, dans le but d’expliquer les variations géochimiques des magmas à travers l’arc équatorien. Pour tous ces auteurs, la présence de la ride de Carnegie modifie les conditions thermiques de la zone de subduction équatorienne et permet la fusion partielle de la croûte océanique subductée.

3.3.2.2) Problématique du travail de thèse dans le contexte de l’arc volcanique

équatorien

Durant les 10 dernières années, de nombreux travaux ont été réalisés sur l’ensemble de l’arc volcanique équatorien ou sur des édifices individuels. Ces études antérieures se sont focalisées sur :

• des volcans de l’arc frontal : Pichincha (Bourdon et al., 2002a), Pululahua (Andrade, 2003), Illiniza (Hidalgo, 2002 ; Hidalgo et al., 2007), Atacazo (Hidalgo, 2006), Almas Santas (Chemin, 2004) ;

• des volcans de l’arc principal : Antisana (Bourdon et al., 2002b), Cayambe (Samaniego et al., 2002, 2005), Mojanda-Fuya Fuya (Samaniego, 1997 ; Robin et al., 1997, sous

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L’arrière-arc a donc été très peu étudié, principalement à cause de son accessibilité difficile. Seul le stratovolcan Sumaco, situé dans la partie nord (cf. Fig. 3.10), a été échantillonné (Colony et Sinclair, 1928 ; Barragán et al., 1998 ; Bourdon et al., 2003a) et ses données ont été intégrées dans deux études globales portant sur l’arc volcanique équatorien (Barragán et al., 1998 ; Bourdon et al., 2003a). Barragán et al. (1998) et Bourdon et al. (soumis) ont en outre quantifié les mécanismes de métasomatose et de fusion partielle propres à ce volcan.

Une étude plus détaillée de la genèse des magmas dans l’arrière-arc se révèle donc nécessaire, afin de contraindre les processus actifs dans la zone de subduction sous cette partie de l’arc volcanique, mais également pour améliorer le modèle global de genèse des magmas équatoriens. Il convient notamment de déterminer dans quelle mesure se produisent les transferts de la croûte océanique vers le coin de manteau. Ce travail de thèse s’est par conséquent intéressé à trois formations volcaniques arrière-arc (cf. Fig. 3.10) :

- le stratovolcan Pan de Azúcar - les cônes de scories de Puyo - les laves de Mera

A l’heure actuelle, la participation de liquides adakitiques lors de la genèse des magmas équatoriens est très bien documentée et plus du tout remise en cause. Seul le mode de genèse de ces liquides silicatés est encore débattu par certains auteurs, à savoir 1) la fusion partielle de la croûte océanique subductée, 2) la fusion de basaltes sous-plaqués en base de croûte et/ou 3) le fractionnement précoce de grenat et d’amphibole lors du refroidissement des magmas basaltiques (cf. § 2.1.4), l’hypothèse 1 étant toutefois fortement favorisée. Les réactions métasomatiques, provoquées par l’interaction des liquides adakitiques avec le coin de manteau, ont été décrites de manière détaillée à l’aide de xénolites mantelliques ramenés à la surface dans différentes zones de subduction (§ 2.2.2) et de travaux expérimentaux (§ 2.2.3.2). Des études récentes, qui s’intéressent au Bore et à ses isotopes (e.g. δ11B), ont montré que les fluides issus de la déshydratation de la

plaque plongeante participent également à l’enrichissement du coin de manteau équatorien, du moins pour les édifices de l’arc frontal (Bourdon et al., soumis ; LeVoyer, 2006).

Dans le contexte de l’arc volcanique équatorien, l’objectif de ce travail de thèse est de contraindre et de quantifier les processus qui contrôlent non seulement la genèse, mais également l’évolution, des magmas de l’arrière-arc. Il s’agit plus particulièrement de déterminer dans quelle mesure l’influence de la croûte océanique subductée se ressent encore dans cette partie de l’arc volcanique, éloignée de la fosse de subduction.

4 L’ARRIERE-ARC VOLCANIQUE