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Quoiqu'elles puissent faire partie d'un plan de réorganisation bien plus important à long terme, elles seront souvent prises par l'administration

dans le cadre de ses compétences de développement du

«

cercle des opérations

» 325,

Certes, on pourrait dire que tout comme pour les modi-fications de

fait

du but, l'administration répond de la violation de la loi qu'elle commet en ne prenant pas les mesures nécessaires pour adapter les statuts à la réalité

326,

Mais l'intérêt de l'actionnaire à être informé de l'orientation nouvelle de sa société n'est guère satisfait par cette responsabilité qui, sauf peut-être pour des actions cotées en bourses, est d'une portée très limitée

327,

A l'obligation de principe de modifier les statuts en cas d'élargissement ou de rétrécissement du

«

cercle des opérations

»

de la société ne correspond aucune sanction qui en fasse un moyen d'assurer l'information préalable des actionnaires sur les intentions d'un nouveau titulaire du contrôle. Il y aurait toutefois dans la procédure prévue à l'art. 649 CO un moyen pour l'ensemble des ac-tionnaires de débattre et de se prononcer (même si c'est à titre purement consultatif pour la minorité) sur l'avenir de la société

328,

4.

Augmentation du capital social.

On a vu que la cession de contrôle par souscription en bloc d'une augmentation de capital s'effectue en deux étapes : une convention entre les anciens titulaires du contrôle et le futur actionnaire dominant, puis

324 Siegwart, op. cit., ad art. 626, N 41, p. 214.

325 Ibid., ad art. 648, N 4, p. 24.

326 Ibid., N 7, p. 24 : l'importance de cette sanction est surtout justifiée pour cet auteur par la protection des tiers ; li s'agit avant tout de rectifier l'inscription au registre du commerce.

327 On peut se demander si l'actionnaire ne peut en cas de diminution de la valeur marchande de ses actions à la suite de la nouvelle orientation de l'activité sociale, réclamer comme dommage directe à l'administration, la différence entre le prix au moment de la vente et celui qu'il aurait obtenu si, informé en temps utile par une procédure régulière de modification des statuts, il avait pu vendre alors. En pratique, seules les actions cotées se prêtent à une telle appréciation ; encore faudrait-il tenir compte des effets de la modification statutaire sur les cours.

328 Kummer (in : Berner Tage für die juristische Praxis 1972, p. 130) voit en outre dans l'aggravation des conditions posées à la prise de décisions de l'as-semblée générale par les art. 648 et 649 CO un moyen de renforcer sérieusement la position des minorités.

DROIT DES SOCIÉTÉS 147 une augmentation du capital selon la procédure ordinaire s29, Cette seconde étape est indispensable et,

à

la différence des autres décisions sociales qui viennent d'être examinées, elle permet une information préa-lable et une participation de l'actionnaire individuel

à

la décision elle-même, bien que l'ancien titulaire du contrôle puisse, dans ce cas éga-lement, décider seul du transfert et bénéficier de la prime de contrôle,

à

l'exclusion de ses co-actionnaires. S'il s'agit d'une cession qui ne fait que consacrer ou renforcer la position d'un créancier important on aura, plutôt qu'une prime, des avantages accordés

à

l'administration (garantie de maintien en place, « golden handshake », « avancement » dans l'en-treprise de l'acquéreur, etc.).

Le fait que la décision de l'assemblée générale soit une étape indis-pensable de la prise de contrôle oblige la majorité

à

justifier, dans une certaine mesure, le transfert qu'elle impose. Faute de quoi, une action en annulation pourra être intentée sur la base de l'art. 706 CO qui remettrait en question toute l'opération.

Ainsi ne pourra-t-elle pas prévoir des conditions de souscription qui défavorisent la minorité de façon inadmissible. S'agissant de réser-ver une augmentation de capital

à

un seul actionnaire, on n'admettra la restriction du droit préférentiel de souscription que s'il est dans l'intérêt de l'ensemble des actionnaires et de la poursuite du but social, que cet actionnaire acquière la majorité 3ao. Le renforcement d'une position de contrôle ou la modification du rapport des forces dans la société n'est, en revanche, pas un motif légitime 331. Si l'augmentation est réservée

à

un tiers, il faudra examiner si la majorité n'est pas si liée avec ce tiers qu'elle en retire un avantage personnel sous le couvert d'un « sacrifice commun », si elle ne retire pas de la cession des avantages particuliers

320 Ci-dessus, p. 86-87.

330 ATF 95 Il 162, cons. 9a ; voir ég. ATF 93 Il 406/7 ; Patry, L'égalité des actionnaires dans la société anonyme, Sem. judiciaire 1963, p. 100; Stockmann, Zum Problem der Gleichbehandlung der Aktioniire, Lebendiges Aktienrecht (f estgabe Bürgi), Zurich 1971, p. 398 ; Vischer /Rapp, Zur Neugestaltung des schweizerischen Aktienrechts, Berne 1968, p. 187. On admet que l'actionnaire qui fait un important apport en nature peut légitimement bénéficier seul de l'augmentation de capital lorsque cette apport est nécessaire au développement de la société (ATF 91 Il 304, cons. 7) ; de même pour un tiers qui fait un tel apport (Steiner, Das Recht zum Bezug neuer Aktien, SAS 16 (1943), p. 31) ou, par un investisement nouveau ou une conversion de ses créances, permet un assainissement de la société.

331 Vischer/Rapp, op. cit., p. 187-8; ATP 91 Il 298.

148 DROIT SUISSE

qui compensent la perte d'influence qu'elle subit et la renonciation au droit préférentiel 332,

Ces principes sont toutefois appliqués en Suisse de façon restrictive lorsqu'ils s'agit d'augmentations de capital ordinaires. On ne peut donc les considérer comme de puissantes protections en cas de cession de contrôle. Il est néanmoins possible, compte tenu de l'importance de cette opération, que la jurisprudence se montre, dans ce dernier cas, plus sévère dans l'examen des motifs qui justifient l'inégalité de traite-ment et de ceux qui ont déterminé la majorité à céder le contrôle.

La prise de contrôle par souscription d'actions, tout comme !'O.P.A., requiert la participation de l'ensemble des actionnaires ; mais à la dif-férence de cette dernière, elle n'entraîne pas la sortie des actionnaires favorables au changement de contrôle. De même que pour !'O.P.A., leur information doit donc être complète et, du fait que les actionnaires vont rester dans la société, elle est encore plus indispensable qu'en cas d'O.P.A. a3a,

On retrouve ici le problème de l'information, déjà mentionné à propos des modifications du but et de l'objet social, et que l'on va retrouver en examinant la possibilité d'atteintes au droit acquis au dividende.

Dans l'augmentation de capital, il joue toutefois un rôle particulier, car l'information y intervient avant l'exécution de la cession et peut per-mettre à l'actionnaire minoritaire d'empêcher une cession dangereuse pour les intérêts sociaux.

B.

CESSION DE CONTRÔLE ET DROITS ACQUIS DES ACTIONNAIRES.

Les actionnaires bénéficient de certains droits acquis dont ils ne peuvent être privés sans leur consentement ou qui, du moins, même dans la forme « relativisée » que revêtent certains d'entre eux, ne peuvent être

332 Le fait que la majorité renonce comme la minorité à son droit préférentiel de souscription devrait permettre d'exclure le grief de violation du principe de l'égalité qui justifierait une action en annulation ; mais la majorité peut béné-ficier d'avantages qui ne font pas l'objet d'une décision sociale et dont la minorité ne bénéficie pas. Il peut alors y avoir tout de même inégalité de traite-ment: voir Siegwart, op. cit., ad art. 652, N 11, p. 398 ; ainsi que l'examen par le Tribunal fédéral des avantages retirés par la Confédération et le canton de Berne de l'acquisition d'actifs proposée dans l'affaire de la société BLS, et les principes posés à cette occasion (ATF 95 Il 157, 167, cons. 12).

333 Voir l'importance attribuée à cette question par les réglementations sur l'o.p.a., ci-dessus, p. 58 et ss.

DROIT DES SOCIÉTÉS 149

supprimes que dans l'intérêt social

3 34.

La cession de contrôle, qui ne porte aucune atteinte directe aux droits fondamentaux du sociétariat tels que le droit de vote, est l'occasion d'une atteinte de fait à l'exercice de certains de ces droits, aussi profonde, parfois, que celles que leur porte directement l'assemblée générale dans certains décisions. Deux droits acquis sont particulièrement exposés en cas de cession de con-trôle : le droit à une part de bénéfice et celui à l'information.

1.

Droit de l'actionnaire à une part de bénéfice.

Dans toute société, ou du moins dans celles de nature commerciale,