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Comportement de substitution licite

A) Le défaut de la route

3. Comportement de substitution licite

La notion de comportement de substitution licite a fait son entrée dans la jurisprudence fédérale à la faveur des crues du Nozon82, qui ont noyé installations et cultures provoquant un dommage dont les lésés ont cherché à rendre l'Etat de Vaud responsable en tant que propriétaire d'ouvrage. Par l'exception fondée sur le comportement de substitution licite, la personne recherchée fait valoir que le dommage serait survenu même si elle avait agi confonnéxnent au droit83Le Tribunal fédéral a libéré l'Etat de Vaud de toute responsabilité en se fondant sur cette exception, dont il a reconnu que la portée était controversée en doctrine84. Il a cependant retenu qu'un ouvrage

79 Cass. civ. NE, RJN 1985 39, 42.

8

°

Cf. TF, 4C.45/2005 c. 4.2.3, 18 mai 2005, supra, N 43.

81 Ibid.

82 ATF 122 III 229, commenté (de manière critique) par GAUCH / SINNTGER.

83 STUDHALTER, p. 171 ss; KRAMER, p. 298 ss; BK- BREHM, CO 41 N 149i; WERRO, Traité, N 191; CR CO 1- WERRO, CO 41N36; REY, N 644 ss.

84 ATF 122 III 229 c. 5a.aa.

Journées du droit de la circulation routière 2006

initialement prévu pour résister à des crues d'un temps de retour de trente ans, puis entretenu dans un état tel qu'il ne soit pas affecté par des crues d'un temps de retour de dix ans au plus, aurait été considéré comme non défectueux. Or dans le cas présent, même un ouvrage exempt de défaut n'aurait pas empêché la survenance du dommage qui s'est effectivement produit. Dans ces circonstances, la responsabilité de l'Etat de Vaud n'est pas retenue, faute d'un lien de causalité naturelle.

Sans trancher les controverses citées, le Tribunal fédéral indique que l'exception vaut en tout cas lorsque le responsable recherché se voit repro-cher une omission. Le défaut d'entretien d'une route constitue précisément une omission. L'arrêt du Nozon fait état de deux anciennes décisions85 dans lesquelles pouvait se poser la question de savoir si, en cas de signalisation non défectueuse, donc de comportement de substitution licite, le dommage ne serait pas survenu de toute façon. L'argument relevait de la causalité naturelle et ne pouvait pas être revu dans le cadre d'un recours en réforme, mais le Tribunal fédéral avait laissé entendre qu'il aurait pu l'admettre.

Récemment, le Tribunal fédéral a expressément reconnu la notion dont il a vu l'assise légale à l'art. 56 al. l C086Tl relève que cette disposition énonce une évidence, en ce qu'elle permet au détenteur d'animaux d'apporter la preuve que sa diligence n'aurait pas empêché le dommage de se produire. En effet, la responsabilité du détenteur est subordonnée à la condition du rapport de causalité entre la violation du devoir de diligence et le dommage. Le Tribunal fédéral trouve à l'art. 56 al. 1 CO la codification du principe général selon lequel le responsable recherché peut se libérer de toute responsabilité s'il prouve qu'un comportement alternatif licite aurait provoqué le même dommage que celui résultant du comportement illicite effectivement adopté.

Il s'agit certes d'un problème de fait qui relève de la causalité naturelle - non revue par le Tribunal fédéral dans le cadre d'un recours en réforme - entre une omission de prendre les mesures nécessaires, celles consistant à entretenir la route de manière conforme, et le dommage subi par ! 'usager de la route. La difficulté en matière d'omission tient au caractère hypothétique de l'enchaînement causal. Une omission n'est relevante que si un

85 86

ATF 103 II 240 (responsabilité du propriétaire de la route admise); 108 Il 184 (responsabilité du propriéta.ire de la route niée).

ATF 131ID115 c. 3.1, p. 119 et réf. Décision confirmée dans l'affaire de l'avalanche (TF, 4C.45/2005, 18 mai 2005, c. 4.2.2 in fine): le Tribunal fédéral mentionne à nouveau, mais à titre superfétatoire puisqu'aucun défaut d'entretien n'a été admis, Je principe général selon lequel le responsable présumé n'encourt aucune responsabilité

«s'il prouve qu'un comportement alternatif licite aurait provoqué le même dommage que le comportement illicite effectivement adopté» (traduction libre).

C. CHAPPUIS/J. BECK.ER, Responsabilité de l'Etat comportement conforme eût empêché la survenance du dommage87. Suffit-il alors à la collectivité publique de prouver que l'automobiliste circulait à une vitesse excessive avant l'accident pour que le juge se convainque que la victime n'aurait pas ralenti même si les travaux avaient été correctement signalés ou si un panneau de limitation de vitesse, de danger de dérapage ou autre avait été placé au bord de la route ?

La responsabilité de l'Etat pour les défauts du réseau routier est, en l'état déjà, admise avec retenue88 - c'est là un euphémisme. Elle risque bien de devenir lettre morte, si la notion de comportement de substitution licite est poussée trop loin.

m.

Questions particulières

A) Le privilège de l'Etat

Alors même que la responsabilité du propriétaire d'ouvrage est la plus sévère des responsabilités causales89, il est communément admis que les exigences de sécurité sont moins sévères en matière de routes que pour tout autre ouv-rage90. En effet, un « réseau routier ne peut pas être surveillé d'aussi près qu'un immeuble »91

La question du caractère raisonnable des dépenses et, surtout, du rapport avec les moyens financiers publics à disposition joue à cet égard un rôle capital.

De plus, c'est avant tout à l'automobiliste - ne manque-t-on jamais de le rappeler92 - d'adapter sa conduite aux conditions de la route, en particulier lorsque celle-ci est rendue glissante par la neige ou le verglas. On retrouve ici les deux limites formalisées dans l'arrêt du canal de la tissanderie93

Exemples: la construction d'une galerie de protection sur la route Tascb-Zerrnatt ne pouvait être imposée à la collectivité publique vu les frais94

; pour le même motif, on ne peut imposer à l'Etat le devoir

87 BK - BREHM, CO 41 N 108; WERRO, Traité, N 19 l; CR CO I - WERRO, CO 41 N 36;

REY, N 592 SS.

88 Cf. infra, Ill.A.

89 TF, 4C.386/2004, 2 mars 2005, c. 2.3. KELLER, p. 191; WERRO, Traité, N 565; REY, N 1023; 0FTINGER/STARK, Il,§ 19 N JO SS.

90 ATF 130 Ill 736 c. 1.4. BK- BREHM, CO 58 N 175; WERRO, Traité, N 635; WERRO,

91

Circulation routière, p. 10; BasK - SCHNYDER, CO 58 N 23; REY, N 1085; GAUCH, DC 1991, p. 50.

ATF 102 Il 343 c. lb.

92 Par ex., ATF 129 Ill 65 c. 1.3, SJ 2003 I 161.

93 Cf. supra, N 37.

94 TF, 4C.45/2005, 18 mai 2005, c. 3.2.

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général de séparer les routes des cours d'eau95 ou de supprimer immédiatement de l'ensemble du réseau routier toute trace de glace ou de neige96.

Le contraste avec les devoirs imposés aux autres propriétaires d'ouvrages est saisissant.

S'agissant d'un trottoir gelé, le Tribunal fédéral a refusé d'entendre l'argument du propriétaire selon lequel «la neige et la glace sont fréquentes à la montagne en hiver »97; il a fait preuve de la même sévérité s'agissant d'un trottoir verglacé à la sortie d'un magasin98 Ajoutons que, dans les deux cas, les victimes étaient des piétons99 et les propriétaires des entités privées.

Par ailleurs, dans un arrêt de 2005100, le Tribunal fédéral admet la responsabilité du propriétaire d'un ascenseur qui s'écrase au fond de la cage d'ascenseur. La juridiction cantonale avait nié toute responsabilité du fait que l'ascenseur correspondait aux nonnes de sécurité et était entretenu de manière appropriée sur la base d'un contrat d'entretien complet. Quoi que l'expertise judiciaire eût révélé que le défaut était connu, mais ne pouvait être techniquement supprimé, les juges admettent que le respect de la diligence requise ne suffit pas à exonérer le propriétaire de l'ascenseur. Ils considèrent en outre que l'on pouvait attendre du propriétaire qu'il mette en place une protection efficace contre un tel événement. La possibilité que les frais soient disproportionnés est balayée sans examen, au motif que le défendeur ne s'en est pas prévalu et qu'à première vue ces frais n'apparaissaient pas excessifs.

Il n'est nullement question ici d'examiner si le propriétaire était en mesure de remplir ses obligations sur les plans technique et financier101La lecture de cet arrêt laisse le sentiment désagréable que l'existence du défaut est, en réalité, déduite du seul fait que l'ascenseur ne s'est pas arrêté à l'étage demandé et s'est écrasé au fond de la cage d'ascenseur sans freinage de secours. L'existence d'un vice de construction paraît difficile à admettre, celle d'un vice d'entretien est niée.

95 A TF 130 IH 736 c. 2.1.

96 ATP 10211343; JdT 1985 1389; ATF 129 m 65, SJ 20031 161.

97 TF, 4C. l 50/2003, 1°' octobre 2003, c. 4.3.

98 ATF 118 Tl 36 c. 4, JdT 1993 I 307.

99 La sévérité à l'égard du propriétaire d'ouvrage est plus grande lorsque des piétons sont exposés à des surfaces gelées: BK - BREHM, CO 58 N 209, 226 ss; WERRO,

Circulation routière, p. 17.

100 TF, 4C.386/2004, 2 mars 2005.

101 Trib. dist. La Cb.-de-Fonds, NE, 27 juin 1996, RJW 1996 N. 47 c. 2a.

c. CHAPPUIS/J. BECKER, Responsabilité de l'Etat

Les dernières décisions mentionnées montrent une sévérité clairement plus grande à l'égard des propriétaires privés qu'à l'égard de l'Etat.

B) Une responsabilité pour violation d'un devoir de diligence?

La responsabilité fondée sur l'art. 58 CO est encourue du fait du défaut de l'ouvrage. Le propriétaire répond à raison de la défectuosité même, et non à raison de son comportement qui peut avoir produit cet état de choses. La cause du défaut n'importe peu et il est sans importance que le propriétaire ait pu, en faisant preuve de diligence, découvrir Je défaut et y remédier 102

La responsabilité du propriétaire d'ouvrage est présentée comme la plus sévère des responsabilités objectives puisqu'elle n'autorise pas la personne recherchée à se libérer en prouvant qu'elle a fait preuve de toute l'attention nécessaire, à l'instar des art. 55 al. 1 ou 56 al. 1 CO. Le critère est objectif et ne laisse aucune place à la prise en considération d'un quelconque reproche subjectif à l'encontre du responsable103

Et pourtant, la diligence est au centre des débats lorsqu'il s'agit de déterminer si l'ouvrage a été bien construit et entretenu. C'est pourquoi, F. WERR0104 qualifie la responsabilité fondée sur l'art. 58 CO de responsabilité pour violation d'un devoir de diligence.

li est vrai que la détermination du standard de sécurité à respecter en fonction du type d'ouvrage se fait de manière objective, par référence à des normes administratives (si elles existent) ou à des normes généralement reconnues dans un domaine particulier, comme les Directives SKUS105 en matière de pistes de ski. En l'absence de telles normes, il convient de déterminer quelle est l'attention requise en fonction des circonstances concrètes du cas d' espèce106

En vertu du privilège décrit plus baut107, l'étendue du devoir de sécurité

«s'apprécie en pratique selon les critères de la proportionnalité et du caractère raisonnable (ATF 129 UT 65 c. 1.1 p. 67; 126 III 113 c. 2b p. 116), ce qui combine la responsabilité objective avec un élément de faute au moins »108 Le fait que la diligence requise est limitée par les moyens

102 ATF 6911394 c. 3, JdT 19441241, rappelé in Trib. Cant. VS, RVJ 1977134, 138.

103 TF, 4C.386/2004, 2 mars 2005, c. 2.3; BK - BREHM, CO 58 N 55 ss; REY, N 1059;

0FTTNGER ! STARK, LI, § 19 N 71; BasK - SCHNYDER, CO 58 N 15; nuancé, WERRO, Traité, N 565 s.

l04 WERRO, Traité, N 563; dans le même sens, SCHWENZER, N 49.09; OFTTNGER /STARK, II,§ 19 N 1.

IOS ATF 130 Il 193 c. 2.3, SJ 20041517.

t06 ATF 131IIl115 c. 2.1.

107

Cf. supra, IIl.A

108 ATF 130 II1 193 c. 2.2 in fine, SJ 20041 517, 519.

Journées du droit de la circulation routière 2006

financiers publics a en tout cas pour effet de relativiser le caractère objectif de la responsabilité du propriétaire d'ouvrage.

Lorsque, en matière de salage et sablage de routes verglacées, on se réfère au fait que la formation de verglas était prévisible et évitable ou que les personnes en charge ont mal apprécié les circonstances109, le pas vers la faute est vite franchi. Un tel adoucissement de la responsabilité n'est toutefois pas de mise si le responsable recherché n'est pas une collectivité publique.

C) Le recours du propriétaire d'ouvrage (art. 58 al. 2 CO)

Le recours du propriétaire d'ouvrage contre les personnes responsables du défaut de l'ouvrage sera illustré par une affaire valaisanne. En août 1977, se sont produits plusieurs accidents de la circulation sur la route du Grand-Saint-Bemard. Un nouveau revêtement auquel avait été incorporé du Verglimit, un produit destiné à empêcher la formation de verglas, avait été posé sur les tronçons en cause un mois plus tôt. Ce produit peut avoir une influence sur l'adhérence dans les premiers temps qui suivent sa pose, cette influence ne se manifestant toutefois que dans des circonstances particulières. Plusieurs décisions du Tribunal fédéral ont été rendues dans cette affaire110 La responsabilité du Canton du Valais en tant que propriétaire d'ouvrage a ainsi été admise à 1 'égard des victimes des accidents rn. Le Canton du Valais a alors recouru contre le fournisseur du produit Verglimit et obtenu gain de cause, sous réserve d'une rédution de 50% pour faute concomitante112

A l'appui de sa demande, le Canton du Valais invoquait une violation du contrat conclu avec le fournisseur du produit Vergiimit. Les parties ayant convenu d'une vente du produit avec assistance du fournisseur avant, pendant et après la pose du produit, le Tribunal fédéral qualifie la relation de contrat mixte, relevant à la fois de la vente et du mandat113 Etant donné que le demandeur contestait la bonne exécution des prestations d'assistance, le Tribunal fédéral examine la responsabilité du fournisseur sur la base des règles du mandat. Il retient une triple violation du devoir de conseil et

109 ATF 129 III 65 c. 4-5 SJ 2003 I 161: le fait que« la sableuse n'était alors pas occupée en un autre lieu» (c. 5), de même que le critère du temps disponible pour intervenir (TF, JdT 1985 1 389) devraient être irrelevants.

110

ATF 116 Il 645: action récursoire de l'assureur responsabilité civile d'un détenteur contre le Canton du Valais et son assureur; TF, 4C.314/1992, 21 novembre 2000:

action récursoire du Canton du Valais contre le fournisseur du produit Verglimit; TF, 4C.314/1992, 11 décembre 2001, action du Canton du Valais contre son assureur responsabilité civile.

111 ATF 11611 645 c. 4-6.

112 TF, 4C.314/1992, 21 novembre 2000.

113 TF, 4C.314/1992, 21 novembre 2000, c. 6b.cc; GAUCH, N 134.

c. CHAPPUIS/J. BECKER, Responsabilité de l'Etat d'information incombant au fournisseur en tant que spécialiste11

4,

quant au choix du revêtement auquel Je Verglimit a été incorporé, aux mesures préconisées pour atténuer l'effet de glissement115 et à l'absence de mesure de l'adhérence initiale. La responsabilité contractuelle du fournisseur a dès lors été admise. Une faute concomitante a cependant été retenue à la charge du Canton du Valais116Comme il est notoire qu'un tel nouveau revêtement peut être glissant dans les premiers temps, il convenait de mettre en place une signalisation complémentaire au signal « chaussée glissante » (par ex., réduction de la vitesse maximale autorisée ou signalisation des virages).

Le Tribunal fédéral mentionne aussi la loi sur la responsabilité du fait des produits (LRFP), mais ne s'y arrête pas, puisque cette loi ne s'applique qu'aux produits mis en circulation après le Ier janvier 1994 (art. 13 LRFP), ce qui n'était pas le cas du Verglimit117L'idée mérite cependant qu'on l'explore comme fondement tant de l'action récursoire du propriétaire d'ouvrage que de la prétention de la victime d'un accident de la route.

L'utilisation du produit incriminé a causé décès et lésions corporelles, de même que des dommages à des véhicules automobiles (art. 1 lit. a et b LRFP). Toutefois, le Canton du Valais n'est pas directement victime de ces dommages corporels et matériels qui touchent des tiers. Il subit un dommage purement économique qui n'est pas couvert par la LRFP118 Par ailleurs, l'art. l lit. b LRFP limite la réparation au dommage matériel subi par un consommateur privé, ce que n'est pas un canton. Il paraît donc exclu que Je dommage subi par le Canton du Valais du fait de sa responsabilité à l'égard de tiers eût pu être couvert par laLRFP.

En revanche, dans des circonstances comparables, la victime d'un accident pourrait songer à s'en prendre au fournisseur du produit, qui risquerait de voir sa responsabilité engagée solidairement à côté de celle du propriétaire de la route (art. 51 CO). Le problème tiendrait probablement ici à la condition du défaut du produit au sens de l'art. 4 LRFP. Le produit Verglimit en tant que tel n'a pas été mis en cause, mais son incorporation à un revêtement trop peu dur, (mal) choisi par le fournisseur et le Canton. Ce choix peu adéquat de revêtement était proposé dans la brochure relative au produit119Or, selon l'art. 4 al. 1

114 Arrêt cité, c. 8c.

115 Le fournisseur du produit avait conseillé de renoncer au sablage de la chaussée, considérant que le lavage de celle-ci était suffisant (c. 8c.bb).

116 Arrêt cité, c. 8c.

117 Arrêt cité, c. 6b.cc in fine.

118 WERRO/BELSER, § 146 N 41etN118.

119 Arrêt cité, c. 8c.aa.

Journées du droit de la circulation routière 2006

lit. a LRFP, le défaut du produit peut résider dans sa présentation120li aurait donc été concevable que les victimes agissent directement en réparation de leur dommage contre le fournisseur du produit (si la LRFP leur avait été applicable).

Conclusion

La responsabilité de l'Etat pour les routes, en tant qu'elle est fondée sur l'art.

58 CO, soulève certaines difficultés.

En premier lieu, l'on peut se demander s'il est véritablement justifié de pro-téger plus mal le touriste japonais circulant sur la route de Tasch-Zermatt121 que le même touriste accidenté dans un ascenseur. Du côté des responsables, il paraîtrait inadmissible de permettre à un particulier d'échapper à sa respon-sabilité en se prévalant de son impécuniosité. Pourquoi l'Etat serait-il justifié à s'en prévaloir? Le devoir de diligence, caché sous la responsabilité du propriétaire d'ouvrage censée être sévère parce qu'objective, contribue en-core à adoucir la responsabilité incombant à l'Etat.

En second lieu, la limite entre le défaut de l'ouvrage et la responsabilité pro-pre du lésé (Selbstverantwortung) touche à la problématique de la faute concomitante. Il convient d'être particulièrement attentif à ne pas exclure d'emblée toute responsabilité au motif de l'absence de défaut. Le raisonne-ment doit procéder en deux étapes, celle de l'examen du défaut tout d'abord, puis celle d'une éventuelle réduction de l'indemnité pour faute concomitante.

Pour terminer, la prise en compte du risque inhérent au véhicule comme fac-teur général de réduction de l'indemnité est à proscrire. La destination d'une route est de permettre un trafic fluide et sûr des véhicules automobiles. Le risque inhérent à ceux-ci, qui participe à définir la destination de la route, ne saurait être opposé au conducteur.

120 REY, N 1191 s.; HESS, LRFP 4 N 41 et 63 SS.

121 Ce touriste est-il censé savoir que les ressources du Canton du Valais sont insuffisantes pour protéger la route contre les avalanches ?

c.

CHAPPUIS/J. BECKER, Responsabilité de l'Etat

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