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III Les Fluides Supercritiques

6. Propriétés physiques et analyses des énantiomères

6.1.Généralités

Les énantiomères ne différent l’un de l’autre que par la disposition dans l’espace des atomes, soit autour d’un centre stéréogène soit de part et d’autre d’un axe ou d’un plan de chiralité. Ceci signifie que les distances et donc les interactions entre les atomes non liés sont identiques Cette similitude, leurs confère des propriétés physiques équivalentes, c’est-à-dire qu’ils ont la même température de fusion, température d’ébullition, densité, solubilité, même pKa…. Lors de leur analyse, les 2 énantiomères donneront les mêmes spectres RMN, UV ou infrarouge.

6.2.Le pouvoir rotatoire

La seule propriété physique permettant de distinguer 2 énantiomères est la propriété de faire tourner le plan de polarisation d’une onde polarisée rectiligne qui les traversent. On dit que ces molécules possèdent un pouvoir rotatoire. Deux énantiomères possèdent la propriété de faire tourner le plan de polarisation de la lumière d’un angle égal en valeur absolue mais dans des directions opposées. Si le composé fait tourner la lumière vers la gauche il sera lévogyre et s’il fait tourner la lumière vers la droite il sera dextrogyre.

6.3.Le polarimètre

L’instrument qui permet de mesurer les rotations optiques est le polarimètre. Le principe en est le suivant (figure-I.25) : une lumière monochromatique est émise en créant simultanément un champ électromagnétique et un champ électrique perpendiculaire à la direction de propagation et en vibrant dans toutes les directions. Grâce à un polariseur qui a la propriété de ne laisser passer que la composante des ondes vibrant selon un plan déterminé, la lumière est polarisée. La lumière traverse ensuite une cellule contenant l’échantillon en solution dans un solvant et en fonction de la capacité du composé à faire tourner la lumière, un angle α correspondant à la rotation du plan de polarisation de rotation sera enregistré par

50 l’analyseur.

Figure-I 25: schéma d'un polarimètre

Le pouvoir rotatoire est déduit de l’angle de déviation α par la loi de Biot (eq.3)

[�]� =

�� (eq.3)

L’unité du pouvoir rotatoire est ° dm-1g-1 cm3

α: angle de rotation du plan de polarisation de la lumière en degré L : longueur de la cellule contenant l’échantillon en dm

C : concentration de la solution traversée par la lumière en g/cm3

λ : longueur d’onde à laquelle a été réalisée la mesure T : température à laquelle a été réalisée la mesure

6.4.Pureté optique

La mesure du pouvoir rotatoire d’un échantillon peut dans certains cas permettre de déterminer la pureté optique. Grâce au pouvoir rotatoire obtenu pour un échantillon et si le pouvoir rotatoire d’un des 2 énantiomères purs est connu, il est possible de déterminer la pureté optique d’un mélange composé des 2 énantiomères (eq.4).

�� = [�]é�ℎ [�]�é�

(eq.4)

po : pureté optique

[α]éch : pouvoir rotatoire de l’échantillon à analyser [a]réf : pouvoir rotatoire de l’énantiomère pur

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Le polarimètre peut être utilisé, comme décrit ci-dessus, en préparant un échantillon et en le plaçant dans une cellule de mesure mais il peut également être connecté à un système chromatographique en aval d’une colonne chirale. Contrairement aux autres détecteurs tels que le détecteur UV, le spectromètre de masse ou le DEDL qui donneront des pics positifs de même surface pour les 2 énantiomères d’un mélange racémique pour une quantité de soluté donnée, un polarimètre a la particularité de différencier les énantiomères en générant un pic positif pour l’un des énantiomères et un pic négatif pour l’autre énantiomère. La connexion en ligne d’un détecteur chiroptique avec un système de chromatographie permet simultanément de séparer les énantiomères, de savoir quel énantiomère est élué en premier et enfin de connaitre le pourcentage de chacun dans le mélange. Il existe un deuxième type de détecteur chiroptique : le détecteur à dichroïsme circulaire.

6.5.Le détecteur à dichroïsme circulaire

Pour le détecteur à dichroïsme circulaire (figure-I.27), la discrimination est basée sur la différence d’absorption de la lumière polarisée droite et gauche par un énantiomère. Un composé optiquement actif n’absorbe pas de la même façon la lumière polarisée droite et gauche. Le principe est donc de polariser une lumière incidente (lampe Xe-Hg) et de la moduler alternativement en lumière polarisée circulairement gauche-droite à une fréquence de 50kHz grâce à un quartz. Ces ondes lumineuses vont ensuite traverser l’échantillon qui va plus ou moins les absorber. Le signal fourni est la différence d’absorbance entre les deux lumières polarisées. Les molécules analysées doivent donc posséder des chromophores pour que le rayon polarisé entre en résonance avec les doubles liaisons et absorbe une partie du rayon lumineux. Ce détecteur permet d’enregistrer simultanément les signaux de dichroïsme et UV ce qui permet de calculer le facteur d’anisotropie g (rapport des deux). Ce facteur est proportionnel à l’excès énantiomérique et est indépendant de la concentration. Ce facteur g permet notamment de calculer des excès énantiomériques en chromatographie achirale et donc sans séparation des énantiomères [85].

Figure-I 26: principe optique du dichroïsme circulaire : A= différence d’absorbance entre la lumière polarisée gauche et droite (extrait du mémoire de thèse de Marie Lecoeur-Lorin 2008 université Orléans-ICOA)

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Les 2 types de détecteurs chiraux ont été évalués et comparés par L. Kott et al. [86]. Le détecteur CD (dichroïsme circulaire) est souvent considéré comme plus sensible que le polarimètre, à condition que la molécule contienne des groupements chromophores.

6.6.Pureté énantiomérique

Quel que soit le détecteur utilisé, chiroptique ou pas, il est possible grâce à une analyse par chromatographie de déterminer la pureté énantiomérique d’un mélange. Celle-ci correspond au pourcentage de l’énantiomère majoritaire dans un mélange d’énantiomère. Elle est déterminée par l’équation 5

������� � =

(�+ �) ∗100

(eq.5)

pe énantio R : pureté énantiomérique de l’énantiomère R CR : concentration de l’énantiomère R dans le mélange CS : concentration de l’énantiomère S dans le mélange Excès énantiomérique

Généralement l’excès énantiomérique noté ee est utilisé à la place à la pureté énantiomérique (eq.6)

��é������ � = − �+ �∗ 100

(6)

Il existe d’autres méthodes pour caractériser des énantiomères, mais elle repose sur la formation de diastéréoisomères, soit simplement par complexation soit par liaisons covalentes.

Parmi ces techniques on peut citer la spectroscopie RMN. Le réactif de Mosher [87] est couramment utilisé pour former des diastéréoisomères labiles qui seront ainsi identifiables par RMN. Une autre méthode a été décrite récemment, utilisant un acide boronique, le (R)-1,1 -2-binaphtol et l’amine à doser [88]. Des complexes de lanthanides chiraux (sels d’ammonium d’europium ou néodymes) peuvent également être utilisés. De nouvelles méthodes mettant en jeu des cristaux liquides ont été développées [89].

L’autre manière de différencier des énantiomères et de connaitre l’excès énantiomérique d’un mélange est d’utiliser une méthode séparative telle que la chromatographie ou l’électrophorèse capillaire. Comme c’est le cas en RMN, des diastéréosiomères sont formés soit en amont de l’analyse de manière

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covalente soit en ajoutant un agent chiral à la phase mobile afin de former les diastéréoisomères in situ. L’autre solution est d’utiliser des phases stationnaires chirales, la séparation se faisant par formation de diastéréoisomères labiles entre le sélecteur chiral situé sur la phase stationnaire et les énantiomères.