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Modélisation du transfert radiatif dans une couche d’aérosols à partir de méthodes Monte-Carlo

II.2. Propriétés photométriques de la surface

Pour modéliser la réflectance apparente de la surface de Mars vue à travers une couche d’aérosols, il faut connaître sa fonction photométrique. Cette fonction décrit la distribution angulaire du rayonnement diffusé par la surface de Mars : elle dépend des angles d’éclairement et d’observation. Une surface dite « de Lambert », ou lambertienne, est un cas limite de fonction de diffusion de surface fréquemment utilisé pour modéliser le comportement des surfaces réelles. Le flux réémis par une surface de Lambert ne dépend pas de l’angle d’éclairement de la surface : seul compte le flux incident par unité de surface, c'est-à-dire le flux incident divisé par le cosinus de l’angle d’incidence. L’intensité lumineuse diffusée par la surface est isotrope selon l’azimut et décroit avec l’angle d’émergence selon son cosinus : un angle solide d’observation constant mesure toujours la même intensité lumineuse, quelque soit l’émergence. Des surfaces naturelles proches de ce modèle limite sont observées en cas de mélange granulaire où la diffusion multiple domine. A l’opposé, une surface spéculaire est une surface se comportant comme un miroir : la fraction du rayonnement diffusée par la surface repart dans le plan incident avec un angle d’émergence unique égal à l’angle d’incidence et un azimut de 180°. Les fonctions photométriques des surfaces naturelles, plus complexes que ces deux cas limites, dépendent notamment de l’échelle spatiale à laquelle on les observe. Une surface rugueuse peut par exemple être constituée de faces spéculaires orientées aléatoirement : si le champ de vue de l’observateur est inférieur à la dimension d’une face, la surface apparaitra spéculaire alors que si le champ de vue de l’observateur englobe un nombre important de faces, la surface sera proche d’une surface de Lambert. Les ombres induites par la texture de la surface affectent également son comportement photométrique : la taille des ombres varie selon l’éclairement, et la proportion d’élément de surface à l’ombre dans le champ de vu dépend des angles d’observation. La réflectance d’une surface naturelle est généralement supérieure à celle attendue d’une loi de Lambert au voisinage de la direction antisolaire (effet d’opposition, [99]), et dans la direction spéculaire. Le comportement photométrique va également dépendre du rapport entre la longueur d’onde du rayonnement qui éclaire la surface et les dimensions caractéristiques des inhomogénéités de cette dernière.

Figure II-4 : Schéma extrait de [57] montrant la transition du cas spéculaire (gauche) au cas Lambertien (droite) lorsque la rugosité de surface augmente.

Nous utiliserons par la suite une loi de Lambert pour approcher le comportement réelle de la surface de Mars. Comme nous allons le voir, cette loi simple est une approximation au premier ordre des différentes surfaces de Mars lorsque l’on ne s’approche pas des angles

photométriques extrêmes (direction antisolaire, direction spéculaire). Cela sera le cas dans la suite de cette thèse, où nous allons utiliser principalement des observations où seul l’angle d’incidence solaire varie, l’instrument pointant la surface au nadir.

II.2.1. Mesures à la surface de Mars

Les mesures des propriétés photométriques de la surface de Mars réalisées à distance, depuis la Terre ou depuis un instrument en orbite, sont fortement affectées par la présence des aérosols et souffrent par conséquent d’incertitudes importantes [38]. Les différents modules qui se sont posés à la surface de Mars ont pu réaliser des observations photométriques des différentes textures de surface situées à proximité de leur site d’atterrissage. Ces mesures ne sont pas non plus exempt d’incertitudes : il faut notamment modéliser le fait que la surface de Mars est illuminée par une lumière diffuse, et non par des photons provenant d’un angle d’incidence unique [94]. Les résultats des ces études sont généralement exprimés par une courbe représentant la « BRDF » en fonction de l’angle de phase. Le terme « BRDF » signifie Bidirectional Reflectance Distribution Function et est équivalent au facteur de réflectance (à un facteur π près : BRDF =I

(

F

π

cos

( )

i

)

). Le facteur de réflectance dépend des trois angles photométriques (incidence, émergence, phase), mais est fréquemment représenté en fonction de l’angle de phase uniquement car c’est l’angle qui influe le plus sur les variations. Le facteur de réflectance d’une surface de Lambert est constant.

Quelques exemples de fonctions photométriques extraites des travaux de Johnson et al. ( [112], [113]) sont représentés sur la Figure II-5. Ces fonctions ont été déduites d’observations dans les longueurs d’onde visible et proche infrarouge (jusqu’à 1 µm) réalisées par les Mars Exploration Rovers. En dehors des angles de phase extrêmes (directions antisolaire – < 25° – et spéculaire – > 100 – 120°), les fonctions photométriques des surfaces martiennes ne s’écartent que faiblement du cas Lambertien (± 10%).

Figure II-5 : Fonctions photométriques de différents types de surface en fonction de l’angle de phase, observées par les Mars Exploration Rovers. Figures extraites de Johnson et al. (2006) ([112], [113]).

II.2.2. Expériences sur des analogues

Les mesures effectuées à la surface de Mars présentent plusieurs limitations : elles ne s’étendent pas au delà de λ = 1 µm et seuls certains angles photométriques sont échantillonnés. Antoine Pommerol a réalisé lorsqu’il était en thèse au laboratoire de planétologie de Grenoble des mesures de BRDF dans le domaine spectral d’OMEGA sur plusieurs analogues martiens [197], dont certains pour les besoins de notre étude. Les variations du facteur de réflectance avec l’angle d’incidence solaire extraites de ces mesures sont représentées sur la Figure II-6 pour trois analogues martiens typiques (sables basaltiques, analogues des régions couvertes de poussières... [186], [35]).

Figure II-6 : Mesures en laboratoire de la BRDF (normalisée) de trois analogues martiens, réalisées par A. Pommerol. Les mesures sont effectuées à l’aide du spectro-gonio-radiomètre du LPG avec une émergence nulle (visée nadir) et différents angles d’éclairement [23]. Carrés rouge (λ = 1 µm) : tuf volcanique (rayons des grains : entre 25 et 50 µm). Croix noires (λ = 1,3 µm) : même matériau, en partie recouvert de grains de même composition dont le rayon varie entre 140 µm et plus de 600 µm. Ces grains larges couvrent entre 30 et 35% de la surface, et sont partiellement enterrés. Ronds bleues : mélange de grains basaltiques dont le rayon est compris entre 140 µm et 600 µm. Chaque point est la moyenne de 20 mesures, les déviations standards sont indiquées pour donner une estimation des barres d’erreurs. Les lignes correspondent à l’ajustement d’un polynôme du 3ème degré.

Les variations du facteur de réflectance avec l’angle d’incidence solaire sont inférieures à ±4% entre 25° et 70°. Aucune variation significative de la fonction de phase avec la longueur d’onde n’est observée dans le domaine spectral d’OMEGA lorsque l’on considère des niveaux de réflectance similaires (continuum).

II.2.3. Propriétés des glaces

Les propriétés photométriques de plusieurs types de glaces et de neiges terrestres ont été étudiées par différents auteurs ( [157], [52], [245], [22]). Le comportement photométrique de la glace est également proche de celui d’un surface de Lambert sur une large gamme d’angles photométriques, en particulier lorsque seule l’incidence varie (voir Figure II-7, variations inférieures à ±6% entre 0° et 75°). Les variations selon l’émergence sont fréquemment du même ordre de grandeur entre 0 et 60° ( [52], figures 1 à 5).

Figure II-7 : Variations du facteur de réflectance selon l’incidence (émergence nulle) de différents types de neige. Mesures extraites de l’étude [52] réalisée d’après les mesures de Middleton & Mungall [157].

II.3. Modèle plan parallèle 1D pour les observations en