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Partie 2 Estimation du poids relatif de différents facteurs de risque établis de

2.3. e. Proportions de cas de cancer du sein en postménopause attribuables aux

attribuables aux facteurs de risque selon le statut RO et l’expression de la protéine HER2

Les estimations des proportions de cas de cancer du sein en postménopause attribuables à chaque facteur de risque et à leur combinaison selon le statut RO ou l’expression de la protéine HER2 des cancers sont présentées dans le tableau 50 (en annexe page 234) ; les estimations selon la combinaison de ces deux informations sont présentées dans le tableau 51 (en annexe page 235).

Un total de 80,2 % (20,3 % ; 96,4 %) des cancers du sein RO+ et 53,6 % (-91,6 % ; 99,2 %) des cancers du sein RO- en postménopause sont attribuables à la combinaison de l’ensemble des facteurs de risque inclus dans les analyses. Les proportions attribuables à un seul facteur de risque qui atteignent la significativité statistique pour les analyses portant sur l’ensemble des cancers du sein en postménopause sont également statistiquement significatives pour les cancers du sein RO+. Les proportions attribuables à une grande taille adulte (8,7 %) et à un âge à la ménopause tardif (12,8 %) deviennent statistiquement significatives pour les cancers en postménopause RO+. En ce qui concerne le cancer du sein RO-, seule la proportion de cas attribuables à la présence d’antécédents de maladie bénigne du sein atteint la significativité statistique (15,3 %).

En ce qui concerne la stratification selon le statut RO et l’expression de la protéine HER2, conjointement, les proportions de cas de cancers du sein en postménopause attribuables à l’ensemble des facteurs de risque considérés dans les analyses sont comprises entre 57,8 % pour les cancers RO-/HER2- et 87,1 % pour les cancers RO+/HER2-. Les résultats concernant les

cancers HER2- et RO+/HER2- sont similaires aux analyses principales, exceptions faites des proportions de cas attribuables à un âge à la puberté précoce, à la nulliparité ou un âge tardif à la première grossesse à terme et à la consommation élevée d’alcool, qui ne sont plus statistiquement significatives. En ce qui concerne les cancers HER2+, seule la proportion de cas attribuables à la présence d’antécédents de maladie bénigne du sein reste statistiquement significative (11,7 %). Enfin, nous pouvons observer des estimations statistiquement significatives concernant les proportions de cas attribuables à un niveau d’étude élevé pour les cancers HER2- (25,5 %) et pour les cancers RO+/HER2- (27,1 %) et à un âge à la ménopause tardif pour les cancers HER2+ (39,1 %).

2.4.

Discussion

Cet article permet d’ajouter des arguments à la littérature en faveur d’une proportion élevée de cas de cancer du sein évitables, que ce soit globalement ou selon le type de cancer du sein. À notre connaissance, il s’agit de la première étude estimant des fractions attribuables combinées associées aux cancers du sein en préménopause et en postménopause incluant un vaste nombre de facteurs de risque. Un total de 61 % de cas de cancer en préménopause diagnostiqués après 40 ans serait attribuable aux facteurs non-comportementaux et 40 % aux facteurs

comportementaux. A contrario, après la ménopause, l’impact des facteurs comportementaux est

plus élevé que celui des facteurs non-comportementaux (42 % contre 54 %, respectivement).

2.4.a. Confrontation à la littérature

À notre connaissance, il s’agit de la première étude estimant les proportions de cas attribuables aux facteurs anthropométriques autour de la puberté et au poids de naissance en différenciant les cancers du sein en préménopause et en postménopause. Une étude (261) a estimé les proportions de cas de cancer du sein attribuables à un IMC faible autour de la puberté à 15 % et au poids de naissance à 7 %. Les proportions de cas attribuables à la silhouette autour de la puberté dans notre étude sont en accord avec ces résultats en postménopause (cependant, en préménopause, la significativité statistique n’est pas atteinte). Une silhouette ronde autour de la puberté a été précédemment associée à une diminution du risque relatif de cancer du sein (60;262;263). Nos résultats concernant le poids de naissance sont en accord avec deux méta-analyses précédemment publiées concluant à une association positive, plus prononcée chez les femmes préménopausées que chez les femmes ménopausées (59;264).

En ce qui concerne les cancers du sein en préménopause, la proportion de cas attribuables à une puberté tardive, statistiquement significative, est en accord avec une estimation récemment publiée s’élevant à 22,2 % (132).

En ce qui concerne les cancers du sein en postménopause, la proportion de cas attribuables à l’utilisation de THM observée dans notre étude est comprise dans l’étendue des résultats publiés (entre 2,4 % à 19,4 %) (131-133;136;265-268). En effet, les résultats de notre étude suggèrent qu’une proportion statistiquement significative de cas de cancer du sein en postménopause serait attribuable à une récente utilisation de THM (14.5 % [9,2 % ; 19,6 %]), restreinte à l’utilisation d’un traitement œstro-progestatif (13,8 % [10,1 % ; 17,4 %], résultats non tabulés) (219). La proportion de cas attribuables à un IMC inférieur à 25 est comprise dans l’étendue des résultats précédemment publiés (entre 0,2 % à 24,8 %) (132-135;267-269), de même pour une consommation d’alcool élevée (entre -7,6 % à 9,1 %) (131-133;135;268), un âge à la ménopause tardif (entre 5,9 % à 14,5 %) (131-133;136) et un âge à la puberté précoce (entre 7,7 % à 18,8 %) (130-133). La proportion de cas attribuables à la présence d’antécédents familiaux de cancer du sein chez les parents au premier degré est plus faible que les estimations que l’on peut trouver dans la littérature (de 5,7 % à 15,7 %) (130-134;136) à cause d’une plus faible prévalence de l’exposition dans notre population d’analyse que dans les autres études publiées (jusqu’à 20,4 % dans la littérature contre 7,3 % dans notre population d’analyse) et de plus faibles risques relatifs (de 1,49 à 6,29 dans la littérature contre 1,37 et 1,50 chez les femmes préménopausées et ménopausées dans notre population d’analyse).

Quelques études ont quantifié l’influence conjointe de facteurs comportementaux et/ou non-comportementaux sur le risque de cancer du sein en préménopause (135;136), en postménopause (131;133-136) ou sans distinction sur le statut ménopausique (130;132;137;138). Parmi elles, très peu ont analysé l’impact conjoint de facteurs comportementaux uniquement (131;133;135) ou de facteurs non-comportementaux uniquement (131;133;136). Les études précédemment publiées ont estimé des proportions de cas de cancer du sein en préménopause attribuables à la combinaison de certains facteurs à hauteur de 42,8 %, en combinant une consommation élevée d’alcool et un faible niveau d’activité physique (135), et de 52,0 %, en combinant un faible niveau d’éducation, la nulliparité, un âge à la première grossesse à terme tardif et la présence d’antécédents familiaux de cancer du sein (136). Pour les cas de cancer du sein en postménopause, différentes combinaisons de facteurs de risque comportementaux ont été associées à une proportion de cas attribuables de 26,3 % (en combinant un faible niveau d’activité physique, l’utilisation de THM, un IMC élevé et une consommation élevée d’alcool) (133), 40,7 %

(en combinant un faible niveau d’activité physique, l’utilisation de THM, une consommation élevée d’alcool et un gain de poids depuis l’âge de 18 ans) (131) et de 12,4 % à 40,7 % en combinant deux facteurs parmi une consommation élevée d’alcool, un faible niveau d’activité physique et un IMC élevé (135). Dans notre étude, la proportion de cas attribuables à la combinaison des facteurs de risque comportementaux (42,3 %) est plus élevée que celles précédemment publiées. En ce qui concerne les facteurs de risque non-comportementaux, les différentes estimations précédemment publiées s’élèvent à 37,2 % (en combinant un âge tardif à la ménopause, la présence d’antécédents personnels de maladie bénigne du sein, un âge à la puberté précoce et la présence d’antécédents familiaux de cancer du sein chez les parents au premier degré) (133) et de 57,3 % (en ajoutant à ces facteurs un âge tardif à la première grossesse à terme et une haute taille adulte) (131). Dans notre étude, nous observons une proportion de cas attribuables aux facteurs de risque non-comportementaux de 51,7 %. Les différences trouvées pour les estimations des proportions de cas attribuables aux facteurs comportementaux et non-comportementaux pourraient s’expliquer par un plus grand nombre de facteurs de risque pris en considération dans nos analyses.

Nos résultats concernant la différenciation selon le type de cancer du sein sont en accord avec ceux de l’unique publication évaluant les proportions de cas attribuables différenciées selon le statut hormonal de la tumeur maligne (133). Dans cette étude, les proportions de cas attribuables à l’utilisation de THM, à un âge tardif à la ménopause et à un âge précoce à la puberté sont plus élevées pour les cancers RO+ que pour les cancers RO- (133). De plus, de précédentes études poolées ou méta-analyses ont conclu qu’un IMC élevé était associé à une diminution du risque de cancer du sein en préménopause RO+/RP+ en termes d’HR (270;271) et que la diminution de risque de cancer du sein en postménopause pour une augmentation de 5 points d’IMC était limitée aux cancers du sein en postménopause RO+/RP+ (271). Bien que non statistiquement significatif, une étude a observé qu’une puberté tardive serait associée à une diminution du risque de cancer du sein en préménopause RO- et à une augmentation du risque de cancer du sein en préménopause RO+ (272). Un âge tardif à la puberté a également été associé à une diminution de risque de cancer du sein RO+ (273-276). Un IMC élevé autour de la puberté a été associé à une diminution du risque de cancer en postménopause RO- (277), RO+/RP- (278) et RO+/RP+ (60). Enfin, l’utilisation de THM a été associée à une augmentation du risque de cancer en postménopause RO+/RP+ (274;279), RO+ (275;280) et HER2- (279;281).

2.4.b. Limites de l’étude

Les seuils choisis pour définir les niveaux d’exposition ont une influence sur l’estimation des fractions attribuables (260). Afin de limiter les biais, les catégorisations effectuées ont été

déterminées a priori en se référant aux résultats de la littérature et aux recommandations de santé

publique.

L’âge à la puberté et la silhouette à la puberté ont été rétrospectivement collectés auprès de femmes âgées de 40 à 65 ans, ce qui peut générer des erreurs de mesures. Cependant, une étude de validation indépendante a montré que l’information était fiable (les corrélations obtenues entre les véritables données et celles déclarées sont de 0,8 pour l’âge à la puberté et de 0,6 pour la silhouette à la puberté) (282). La nécessité de regrouper les cinq catégories les plus élevées de silhouettes à la puberté indique un manque de puissance statistique pour les femmes qui étaient les plus corpulentes à cette période. Il serait intéressant de réitérer les analyses concernant ce facteur dans une population présentant une plus grande variabilité de silhouettes à la puberté.

Comme toute étude de cohorte, E3N n’est pas représentative de la population générale française et est encline à un effet de « cohorte saine ». Cependant, estimer les fractions attribuables dans la population générale n’est pas faisable en raison d’un manque de données de prévalence en France.

Enfin, les résultats concernant le cancer du sein en préménopause devraient être interprétés avec précaution à cause du nombre limité de cas dans E3N, en raison de la sélection initiale de femmes de plus de 40 ans ; de même pour les résultats différenciant les cancers du sein en postménopause selon l’expression de la protéine HER2.