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Prols verticaux de vitesse et de concentration solides . 46

1.5 Le charriage d'un point de vue granulaire

1.5.1 Prols verticaux de vitesse et de concentration solides . 46

Jain et al. (2002, 2004) ont mesuré les prols de vitesse instantannés dans une couche mince de roulement d'un tambour tournant avec des billes sèches et des billes immergées dans l'eau et d'autres liquides. Quelles que soient la taille des billes, la densité et la viscosité du uide, le prol de vitesse moyen a la même forme convexe vers le haut avec un prol linéaire dans la partie supérieure et une décroissance exponentielle vers zéro dans la partie inférieure. Des écoulements à surface libre de mélanges granulaire-liquide ont également été étudiés expérimentalement pour modéliser des laves torren-tielles granulaires [Armanini et al. (2005) ; Fraccarollo et al. (2007) ; Larcher et al. (2007)]. Les expériences, appelées par les auteurs des écoulements sur-saturés (présence d'une surface libre liquide), sont similaires aux écoulements de charriage intense. Les prols de vitesse des particules révèlent la même forme convexe que les prols obtenus en granulaire sec avec la partie linéaire et la décroissance exponentielle. La décroissance exponentielle de la charge de fond sous un écoulement unidirectionnel avec un matériau naturel a été mesurée par Fraccarollo & Rosatti (2009). Plus recemment, Frey & Church (2011) ont obtenu un prol de vitesse calculé avec la méthode PIV (Particle

1.5. LE CHARRIAGE D'UN POINT DE VUE GRANULAIRE 47 Image Velocimetry) pour une expérience avec une charge de fond monodis-perse de gravier naturel à l'aide du dispositif expérimental de Recking et al. (2008a,b). Ce prol de vitesse a également la même forme que les écoule-ments en granulaire sec.

Les parties supérieures (linéaire et logarithmique) sont similaires aux me-sures de charriage intense ("sheet ow") décrites dans Sumer et al. (1996). Les vitesses d'un mélange uide/granulaire ont été mesurées à l'intérieur du lit (de 10 diamètres de profondeur). Dans la partie supérieure et au dessus de la couche de charriage, les prols de vitesse suivent la loi logarithmique classique des uides. La partie basse suit une loi de puissance en trois-quart. Dans des expériences similaires, la partie inférieure du prol de vitesse est linéaire [Pugh & Wilson (1999)]. Des écoulements de charriage intense ont également été étudiés sous des conditions oscillantes [Asano (1995)]. La partie inférieure des prols de vitesse de certaines particules montre une décrois-sance vers zéro ajustée par une loi de puisdécrois-sance 1.5, ce qui est qualitativement similaire à la décroissance de la vitesse observée dans les prols de granulaire sec. Le charriage a aussi été étudié à l'échelle de la particule sous écoulements laminaires et des prols similaires ont été obtenus [Mouilleron et al. (2009)]. Richard et al. (2008) et Métayer et al. (2009) ont étudié expérimenta-lement des écouexpérimenta-lements granulaires connés entre des parois parallèles ver-ticales. Nous détaillons leur analyse que nous tenterons d'appliquer à nos propres prols. En combinant deux méthodes expérimentales (le suivi de par-ticule et la densitométrie γ), ils ont obtenu les prols de vitesse (Fig. 1.5.1) et de concentration (Fig. 1.5.1) pour diérents débits d'écoulements, et donc diérentes pentes de la surface libre. Sur les prols de vitesse, on observe une décroissance exponentielle dans le lit quasi-statique. Dans la région en écoulement, les prols de vitesse dans le sens de l'écoulement sont quasiment linéaires excepté près de la surface libre pour des angles importants. Le taux de cisaillement est donc constant et indépendant de l'angle d'inclinaison. Les prols de concentration en fonction de la direction y perpendiculaire à la surface libre révèlent une région quasi-statique surmontée d'une couche en écoulement où la concentration diminue fortement à mesure que l'on ap-proche de la surface libre. Les prols de concentration peuvent être ajustés par une fonction exponentielle de la forme :

ν(y) = ν0

2[1 + tanh(y/lv)] =

ν0

Fig. 1.1 Prols de vitesse dans le sens de l'écoulementVx pour diérents angles d'inclinaison de la surface libre ; insert : mêmes courbes où l'axe horizontal est adimensionné par la hauteur de la couche en écoulement h et l'axe vertical par la vitesse caractéristiqueVx/(hpg/d) [Métayer et al. (2009)].

où ν0 et lv sont des paramètres d'ajustement correspondant respectivement à la concentration dans la région quasi-statique et à la longueur caracté-ristique sur laquelle la concentration varie. La concentration dans la région quasi-statique est indépendante de l'angle d'inclinaison et égale à ν0 = 0.58, tandis que la longueur lv décroît linéairement avec la tangente de l'angle d'inclinaison. La région où le taux de cisaillement est constant s'étend sur un peu moins de deux fois la longueur caractéristique lv. Dans la couche supé-rieure de d'écoulement à des angles d'inclinaison importants, les particules ont des trajectoires balistiques avec de rares collisions. Plus profondément dans l'écoulement (i.e., lv < y < 3lv), la vitesse présente une décroissance exponentielle avec une longueur caractéristique lv.

1.5.2 Ségrégation par taille

Deux phénomènes de ségrégation apparaissent, tous deux liés au char-riage. Quand les particules les plus grosses ne bougent pas, on observe un phénomène de percolation spontanée ou inltration. Si on considère une

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Fig. 1.2 Prols de concentration ν à diérentes inclinaisons en fonction de la profondeur ; l'insert de droite montre comment ν/ν0 en fonction de y/lv se réduit à une courbe maîtresse ; insert de gauche : variations de l'échelle lv avec tanθ [Métayer et al. (2009)].

taine population de grains immobiles, les conditions pour que les petites par-ticules percolent, i.e. tombent par gravité, est un problème simple pour une population de sphères uniformes. Quand le rapport du diamètre des sphères les plus grandes sur les sphères les plus petites est supérieur à 6.46, la sphère la plus petite passe à travers le rétrécissement formé par les trois grandes sphères et peut tomber au fond de la pile de sédiments. Quand le rapport est égal à 4.45, la petite sphère s'inscrit dans les plus petites cavités du lit formé par quatre grandes sphères. Entre ces deux valeurs, les petites sphères ont une probabilité non nulle d'être piégées dans une cavité et séquestrées dans le lit. Quand la distribution des tailles de particules dans le lit n'est pas uniforme ou que leur forme n'est pas sphérique [Luchnikv et al. (1999)], le problème devient beaucoup plus compliqué.

Si le rapport de taille est plus proche de l'unité, les petites particules ne peuvent percoler qu'à travers un lit en mouvement, il s'agit alors d'un phé-nomène appelé "kinetic sieving", "dynamic sieving" ou "random uctuating sieving" [Middleton (1970) ; Savage & Lun (1988)]. Les études pionnières sur le phénomène de "kinetic sieving" ont été menées par Drahun & Bridgewater (1983) et Bridgewater (1994). La ségrégation de taille a été étudiée théo-riquement et expérimentalement dans un écoulement incliné à surface libre [Savage & Lun (1988)]. Le processus de "kinetic sieving" a clairement été mis en évidence. Comme les vitesses de percolation sont dirigées vers le bas pour toutes les tailles de particules, il y a en même temps un mécanisme de mi-gration indépendant de la taille qui transfère les particules entre les couches, produisant un écoulement vertical inverse, de façon à respecter un ux mas-sique vertical nul. Le résultat habituel est un ux vers le bas des particules les plus petites et un ux vers le haut des particules les plus grandes, d'où la ségrégation, comme observée dans les dépôts de rivières. La plupart des expé-riences ont été réalisées avec de petits rapports de taille, rarement au dessus de trois ; en dessous de ce rapport, les particules les plus denses et les plus petites ont tendance à migrer vers le fond, les particules les plus légères et les plus grandes vers la surface. Cependant, pour des rapports supérieurs à cinq, un modèle inverse apparaît [Thomas (2000) ; Felix & Thomas (2004)] : les grandes particules sont localisées à un niveau intermédiaire, évoluant conti-nuellement de la surface aux niveaux plus profonds en fonction du rapport de taille. Il semblerait qu'il y ait un équilibre entre l'eet géométrique ("kinetic sieving") et un eet de masse qui entraînerait les particules vers le bas. Le phénomène de percolation spontanée ou inltration a été bien investigué en milieu naturel (rivières à gravier) en lien avec la reproduction des

salmo-1.6. CONCLUSION 51