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La PNL ou Programmation Neurolinguistique est un ensemble de modèles et de techniques de développement personnel centré sur la communication conçu par John Grinder et Richard Bandler aux Etats-Unis dans les années 1970. Pour élaborer l’ensemble de ces techniques les auteurs se sont inspirés de psychothérapeutes célèbres dont Milton Erickson, Virginia Satir et Fritz Perls. Parmi les techniques les plus connues de la PNL ont peux citer : l’ancrage, le méta-modèle, le recadrage, la double dissociation (Bandler & Grinder, 1982).

Toutes ces techniques et modèles implicites enseignés par la PNL n’ont jamais été subi à l’expérience scientifique. En effet les auteurs n’ont jamais établi leur discipline comme une science mais comme un programme destiné à mieux comprendre la communication humaine au sens large du terme. De ce fait, ces techniques sont encore aujourd’hui utilisées par de nombreux professionnels qui travaillent dans le domaine de la santé, du management, de l’éducation, de la vente, etc.

Un article scientifique (Wiseman, Watt, ten Brinke, Porter, Couper, & Rankin, 2012) s’est récemment intéressé au modèle des mouvements oculaires non visuels en programmation neurolinguistique (Figure 1) dans le cadre de la psychologie du mensonge et n’a trouvé aucun résultat significatif. Cependant, les auteurs pour cette étude se sont basés sur des interprétations émises à posteriori par une minorité de praticiens en PNL à partir de ce modèle. En effet, ni les auteurs fondateurs de la programmation neurolinguistique ni ses principaux auteurs n’ont postulé qu’un mouvement oculaire « construit » (en haut à droite) correspondait de façon univoque à un mensonge. Les auteurs du présent article

« scientifique » ayant basés leurs hypothèses sur des vidéos amateurs postées sur YouTube se réclamant de la PNL (ce qui n’est pas le cas).

A l’heure actuelle un certain nombre de personnes désignent la PNL comme une pseudoscience, en particulier des membres de la communauté scientifique, cependant aucune recherche rigoureuse et scientifique n’a à notre connaissance invalidé une seule de ces techniques. Un des postulats de la PNL est que nos accès oculaires (mouvements oculaires non visuels) reflètent notre façon de penser, autrement dit la direction des mouvements de nos yeux nous aiderait inconsciemment à retrouver des représentations mentales déjà existantes ou à en créer de nouvelles.

12 Ce postulat retient tout particulièrement notre attention, il est notamment utilisé par des praticiens en PNL dans la thérapie et le développement personnel pour ce qu’on appelle en PNL la calibration et la synchronisation. Il permettrait de connaitre les processus internes nous renseignant sur la manière dont notre interlocuteur se représente un événement, le registre sensoriel dont il a recours. Des ouvrages récemment publiés présentent de nouvelles formes de méthodes d’apprentissage destinés aux enseignants entièrement basée sur ce postulat (Dilts & Epstein, 1995; Thiry, 2006; Thiry & Lellouche, 2007).

Hypothèses

Ayant un intérêt pour la PNL et pour les nouvelles méthodes d’apprentissage, il nous parait urgent de soumettre ce postulat à l’épreuve scientifique afin de pouvoir le confirmer ou l’infirmer comme cela est fait actuellement avec d’autres techniques controversées comme l’EMDR.

Si on part du postulat que spontanément les mouvements oculaires non visuels amènent nos yeux dans des directions spécifiques et déterminées pour faciliter la recherche en mémoire, peut-on imaginer que le fait de devoir effectuer le rappel ou l’encodage dans une position spécifique de notre champ visuel va améliorer les performances mnésiques ?

Notre étude s’est donc intéressée à la directionnalité des saccades oculaires non-visuelles avec comme hypothèse que le facteur déterminant n’est ni la latéralisation (droite vs gauche) ni l’élévation (haut vs bas) mais la position (interaction entre latéralisation et élévation). Nous postulons que la direction de nos mouvements oculaires est importante selon le type de mémoire sollicité et que le fait de regarder dans une direction particulière peut ainsi favoriser ou entraver le rappel.

Nous avons effectué cinq études pour investiguer cet effet de la position en se basant sur un protocole de matrice visuo-spatial. Le déroulement de ces cinq études était similaire, la première partie était toujours destinée à déterminer l’empan visuo-spatial des sujets, la présentation des matrices se faisait au centre de l’écran. Lors de la deuxième partie nous avons fait varier la position des matrices et comparé le pourcentage de bonnes réponses.

13 La tâche sollicitant une mémoire visuo-spatiale, on s’attend à observer un effet de la position de la matrice dans le champ visuel du sujet comme le postule la PNL. On s’attend plus précisément à observer un effet facilitateur sur le rappel (pourcentage de bonnes réponses) lorsque la matrice est présentée en haut à gauche et un effet délétère si la matrice est présentée en bas à droite (Etude 1).

Suite à l’Etude 1 nous nous sommes rendu compte que certains sujets sollicitaient exclusivement ou en parallèle une mémoire verbale pour effectuer la tâche. Si les sujets adoptent une stratégie n’impliquant pas leur mémoire visuo-spatiale, on ne s’attend plus à observer un effet facilitateur de la position (pourcentage de bonnes réponses plus élevé) lorsque la matrice est présentée en haut à gauche versus en bas à droite. On s’attend donc à observer un effet facilitateur de la position (haut-gauche) exclusivement pour les sujets utilisant une stratégie basée sur la mémoire visuo-spatiale (Etude 2).

Dans l’Etude 3, nous avons décidé d’intervertir les positions des matrices (haut-droite et bas-gauche), nous avons également rajouté une nouvelle variable dépendante : dialogue mental (le sujet se parle à lui-même lors de l’encodage du pattern) pour affiner nos résultats et mieux cerner la stratégie d’encodage du sujet lors de la tâche. Pour cette étude, on ne s’attend à aucun effet si le sujet a une stratégie visuelle (mémoire visuo-spatiale). En revanche, si le sujet utilise sa mémoire verbale (stratégie de comptage ou mixte ou si le sujet rapporte réaliser un dialogue mental), on s’attend à un effet facilitateur pour la condition où la matrice est présentée en bas à gauche. On s’attend donc pour cette étude à observer un effet facilitateur de la position (bas-gauche) uniquement pour les sujets ayant recours à leur mémoire verbale (stratégie comptage / mixte et/ou dialogue mental).

Jusqu’ici, nous avons investigué l’effet de la position d’une matrice dans le champ visuel du sujet, nous nous sommes donc intéressés à la position finale des yeux dans une direction spécifique pendant l’encodage et de son effet sur le rappel. Il pourrait donc nous être fait comme critique qu’au final les saccades oculaires non visuelles n’ont rien à voir avec l’effet observé, que cet effet pourrait être dû tout simplement au fait que le sujet parvient plus facilement à diriger son attention dans certaines parties de son champ visuel. Nous avons donc décidé d’aller plus loin et d’effectuer une 4e étude, nous avons présenté toutes les matrices au centre de l’écran (pour l’encodage et le rappel). Au moment où la matrice disparait de l’écran,

14 le sujet a pour consigne de fixer une matrice vierge qui apparait de façon aléatoire dans un des quatre coins de l’écran en essayant « d’imaginer » le pattern qu’il vient de voir sur cette matrice vierge. Trois secondes plus tard la matrice vierge de réponse s’affiche au centre de l’écran et le sujet peut répondre. De plus, dans cette étude nous avons non plus comparé le pourcentage de bonnes réponses pour deux positions mais pour les quatre positions (les quatre coins de l’écran). Nous avons également rajouté une variable : chemin mental (rappel des carrés noircis dans un ordre déterminé à l’avance) dans l’optique de faire un éventuel lien avec la proprioception, mémoire que l’on pourrait qualifier de « kinesthésique » (Figure 1.

Schéma des mouvements oculaires typiques en PNL de 80% des droitiers et 50% des gauchers. Au niveau des hypothèses, on s’attend exactement à reproduire les résultats des expériences précédentes. A savoir que lorsque le sujet utilise une mémoire visuo-spatiale (stratégie visuelle) le fait d’effectuer une saccade oculaire en haut à gauche pendant trois secondes puis de revenir au centre améliore le pourcentage de bonnes réponses comparées aux trois autres conditions. En revanche si le sujet utilise une mémoire verbale (stratégie comptage/ mixte et/ou dialogue mental), on s’attend à un taux de bonnes réponses supérieur lorsque le sujet effectue une saccade en bas à gauche. La nouvelle hypothèse que nous rajoutons pour cette expérience serait un meilleur pourcentage de bonnes réponses pour les sujets utilisant un chemin mental effectuant une saccade oculaire en bas à droite (mémoire

« kinesthésique »). Nous avons rajouté cette hypothèse pour investiguer un hypothétique lien entre kinesthésie et chemin mental.

Pour la 5e étude, nous avons essayé de trouver les limites de notre protocole expérimental. Jusqu’à maintenant toutes les matrices avaient un mode de présentation simultané (le pattern « entier » apparait en une fois), le sujet peut donc avoir recours à un encodage intrafigural en se basant sur la forme globale. Nous avons testé pour cette étude un mode de présentation séquentiel (les carrés noircis apparaissent un par un dans la matrice), le sujet ne peut donc plus avoir recours à un encodage intrafigural (forme globale) mais doit effectuer un encodage extrafigural (par parties) (Lecerf & De Ribaupierre, 2005). Notre hypothèse principale pour cette étude est que le mode de présentation séquentiel va rendre l’utilisation de la mémoire visuo-spatiale et verbale plus difficile mais va favoriser le recours à une mémoire « kinesthésique ». On ne s’attend donc plus à un effet facilitateur de la position en haut à gauche ni de la position en bas à gauche. On s’attend donc à ce que les

15 sujets qui rapportent faire un chemin mental, aient un meilleur pourcentage de bonnes réponses lorsque la matrice leur est présentée en bas à droite.

En nous basant sur la littérature, nous formulons également deux autres hypothèses généralisables à l’ensemble de nos études. Nous nous attendons à aucun effet de la latéralisation (gauche / droite) ni de l’élévation (bas / haut) des matrices visuo-spatiales.

Recherche I : Effet de la position dans le champ