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Chapitre II : Prévention et réduction intégrées de la pollution

II.1 La production plus propre

II.1.1

Généralités

Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement définit la production plus propre « comme l’application continue d’une stratégie préventive intégrée à tous les procédés, produits, et services dans une perspective de progrès dans le domaine de l’économie, de la vie sociale, de la santé, de la sécurité et de l’environnement. » [PNUE, 2006]. Cette définition, très large, englobe tous les aspects du développement durable.

La production plus propre consiste en la prévention des pollutions, la réduction de la production de déchets et la réduction des risques. Elle permet de traiter les problèmes environnementaux à la source au lieu de mettre en place des mesures curatives, réduisant ainsi le coût des actions de dépollution. Elle passe par la mise en œuvre de technologies propres ainsi que par la recherche d’une amélioration continue.

Contrairement aux technologies de fin de chaîne, la mise en place de technologies propres, dont certaines peuvent représenter des investissements importants, permet généralement un retour sur investissement, grâce aux économies de matières premières, d’énergie et à la baisse des coûts de traitement des déchets. A défaut d’un retour sur investissement rapide, les technologies propres permettent de répondre à la réglementation, d’améliorer l’image de l’entreprise et de répondre aux demandes des donneurs d’ordre.

Il existe huit stratégies de production plus propre [PNUE, 2009] :

• Les bonnes pratiques : elles impliquent des mesures opérationnelles qui peuvent être prises pour minimiser les rejets et les déchets produits.

• Un meilleur contrôle des procédés : amélioration du contrôle des procédés afin d’améliorer leur efficacité.

• Le remplacement d’intrants : substitution de matières premières par des matières premières moins polluantes, moins dangereuses, moins génératrices d’impact, par des matériaux recyclés, renouvelables ou ayant une durée d’utilisation plus longue dans les processus de fabrication. (Exemple : remplacement du chrome VI par du chrome III, moins polluant).

• La modification des procédés : modification du matériel de fabrication et des systèmes d’alimentation existants pour améliorer le rendement des procédés. Par exemple, une modification de la structure des rinçages telle que le remplacement de rinçages courants par des rinçages cascades ou des aspersions.

• La valorisation sur place : réutilisation des flux dans le même procédé ou dans un autre procédé. Il existe une grande variété de procédés parmi lesquels nous pouvons citer : - Les techniques électrochimiques telles que l’électrolyse ou l’électrofloculation

(l’électricité permet d’oxyder ou de réduire les espèces dissoutes dans le but de régénérer un flux ou d’en extraire les métaux valorisables)

- Les techniques membranaires, telles que les ultra, micro et nano-filtration et l’osmose inverse

- Les techniques électro-membranaires telles que l’électrodialyse, l’électro-électro-dialyse, l’électrolyse à membrane bipolaire

- Les résines échangeuses d’ions qui permettent d’échanger les ions polluants d’un effluent contre d’autres ions non polluants

• La valorisation des sous-produits : certains sous-produits peuvent être vendus comme matière première.

• Le changement de technologie : remplacement de la technologie par une autre technologie répondant mieux aux critères de la production plus propre (moins énergivore, moins productrice de déchets, moins génératrice de risques pour les hommes et l’environnement…) par exemple utilisation d’un dépôt physique en phase vapeur pour réaliser le revêtement d’une pièce à la place d’un dépôt par voie aqueuse.

• La modification du produit : modification des caractéristiques du produit pour minimiser son impact sur l’environnement pendant son cycle de vie. Cette stratégie est peu usitée dans ce secteur : les concepteurs, par conséquent les clients des ateliers de traitement de surface, sont les acteurs principaux dans la modification du produit [DAOUD, 2009]. Cependant les nécessités du revêtement de surface devraient être prises en compte lors de la conception des produits [DELVAUX, 1994].

L’utilisation de procédés plus propres présente de nombreux avantages pour les entreprises. D’une part, ceux-ci apportent une amélioration de la situation environnementale de l’entreprise, ce qui facilite le dialogue avec les institutions, le public et apporte un avantage compétitif. D’autre part, ils réduisent, généralement, à long terme, les coûts de production [CARPP, 2002]. La mise en œuvre de ces procédés peut aboutir à un rejet zéro : les effluents aqueux sont alors supprimés [ARIST, 2004]. Cependant la mise en place de ces procédés est freinée par plusieurs obstacles comme le manque de sensibilisation et d’information, les coûts d’investissement souvent importants et un temps de retour sur investissement long, ou encore le risque lié à un changement de procédé pour la production elle-même [RAYMOND, 2009].

En général, les stratégies de production plus propre ne permettent pas d’arriver à un zéro rejet polluant : en effet, cette approche « zéro rejet » s’avère particulièrement coûteuse et entraîne d’autres nuisances environnementales telles qu’une importante consommation d’énergie [MATE, 1998 ; EROL, 2006]. Il est donc indispensable de compléter le système de traitement par des traitements de fin de chaîne dits traitements de dépollution.

 Les procédés propres peuvent apporter des avantages compétitifs importants mais leur

utilisation peut s’avérer délicate et les investissements nécessaires sont généralement conséquents.

Afin de ne pas surcharger ce mémoire, nous n’aborderons en détail que deux des huit stratégies de production plus propre qui concernent plus particulièrement notre étude : les bonnes pratiques environnementales et le meilleur contrôle des procédés.

II.1.2

Les bonnes pratiques et le meilleur contrôle des

procédés

La mise en œuvre de bonnes pratiques environnementales constitue un premier pas vers la mise en œuvre de stratégies de production plus propre [BREF, 2006]. Elles visent la réduction des déchets par l’amélioration du management opérationnel et une bonne maîtrise des procédures de travail.

Les bonnes pratiques, ainsi que le meilleur contrôle des procédés, ont pour buts principaux :

• la réduction de la consommation en eau,

• la maîtrise des flux polluants générés,

• la maîtrise et la diminution de l’utilisation de matières premières.

La sensibilisation, la formation et l’adhésion du personnel de l’entreprise permettent déjà d’améliorer les pratiques environnementales.

Le tableau 5 donne des exemples de bonnes pratiques qui peuvent être mises en œuvre dans le cadre d’une stratégie de production plus propre.

Tableau 5.Exemples de bonnes pratiques et de meilleur contrôle des procédés [CRITTENDEN, 1995 ; CARPP, 2002, MATE, 1998 ; KHYATI, 2004 ; BREF, 2006]

Domaine Objectifs Exemple d’applications

Eau Connaissance et contrôle de la consommation en eau

Mise en place de compteur d’eau, débitmètre Réduction de la consommation en

eau

Installation de vannes à fermeture automatique, Optimisation des rinçages

Lavage à haute pression

Réutilisation de l’eau contaminée pour des tâches moins nobles

Entraînement Diminution de l’entraînement par récupération des égouttures

Réceptacles entre les cuves avec pente orientée vers le bain de traitement

Addition d’agents mouillants Choix des supports

Maximisation du temps d’égouttage

Matières premières Optimisation de l’utilisation des matières premières et produits

Choisir les concentrations les plus basses possible Contrôle régulier des bains

Contrôle des déversements par des alarmes de niveau

Réalisation des vidanges en fonction de critères de concentrations

Energie Réduction des consommations

énergétiques

Isolation des cuves chauffées

Couverture des bains chauds hors fonctionnement Utilisation de sphères couvrantes si possible Contrôle de la température de fonctionnement des bains

Déchets Diminution des déchets produits Réduction des déchets d’emballage par du transport en vrac, l’utilisation d’emballages réutilisables

Tri des déchets

Diminution autant que possible des fréquences de vidange

Réduction des entraînements

Stockage des matières dangereuses

Diminution des risques liés au stockage de matières dangereuses

Disposer de zones séparées et appropriées de stockage.

Définition de procédures opérationnelles de stockage

Disposer de matériaux absorbants

Général Contrôle des procédés Définition de procédures opérationnelles, Maintenance des installations

Sensibilisation, formation et adhésion du personnel

Actions de sensibilisation, formation du personnel

Le Centre Technique des Industries Mécaniques (CETIM) et le Syndicat national des entreprises d'Applications de revêtements et de Traitements de Surfaces (SATS) (devenu l’Union des Industries de Traitements de Surfaces) estiment que la mise en œuvre de bonnes pratiques en faveur de l’environnement permet de réduire de plus de 10% les coûts de fonctionnement [SATS, 1999].

La mise en place de bonnes pratiques environnementales dans un atelier de traitement de surface permet non seulement d’améliorer les performances environnementales mais

également la qualité de la production et la sécurité des travailleurs. Le coût d’investissement nécessaire est relativement faible et le retour sur investissement généralement rapide [CARPP, 2002]. Ces bonnes pratiques peuvent être traduites par la mise en œuvre d’un système de management environnemental de type ISO 14001 ou EMAS (Eco-Management and Audit Scheme).

 Les bonnes pratiques et le contrôle des procédés constituent une première étape vers

la production plus propre. L’investissement nécessaire est limité et, par conséquent, ne constitue pas en général un frein.

La mise en œuvre de stratégies de production plus propre permet de réduire à la source la génération de polluants. Cependant il est rare, voire impossible d’atteindre un zéro rejet liquide polluant. De ce fait, les techniques curatives de dépollution sont indispensables.

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