• Aucun résultat trouvé

II. Caractérisations physico-chimiques des graines utilisées et propriétés

II.4 Fractionnement aqueux de graines

II.4.1 Procédé de fractionnement des graines de lin entières

Le mucilage de lin peut être extrait à partir des : - graines entières (O’Mullane and Hayter, 1993) - graines concassées (O’Mullane and Hayter, 1993) - coques seules (O’Mullane and Hayter, 1993) - du tourteau (Gros et al., 2003)

Cependant, la plupart des travaux privilégient l’extraction du mucilage depuis la graine entière.

Dans la littérature, plusieurs procédés d’extraction sont décrits. Parmi eux, l’extraction sous agitation batch est la plus courante. Les procédés suivants sont également cités:

- l’extraction en continu (Zhang et al., 2009)

- l’extraction sous décharges électriques (Gros et al., 2003) - l’extraction par micro-ondes (Geetha et al., 2009)

Certains procédés, en particulier ceux qui impliquent des enzymes et des tampons, ou des extractions par explosion à la vapeur, engendrent une dégradation des polysaccharides (Gros et al., 2003; Wanasundara and Shahidi, 1997; Wu et al., 2010). Le procédé d’extrusion bi-vis dégrade également les mucilages. Ces dégradations sont liées à des changements physico-chimiques complexes, liées à des altérations structurales, et des réactions de Maillard.

Ces procédés d’extraction de mucilages sont fréquemment réalisés en amont de procédés d’extraction des protéines ou de l’huile. La présence de mucilages lors de ces procédés peut en effet diminuer les rendements d’extraction (Gros et al., 2003).

Il est possible de cultiver du lin sur la base de teneurs en mucilage variables, sans impact sur la teneur en huile. Dans ce cas-là, le solvant d’extraction employé est l’eau. La macération aqueuse ne présente pas de conditions dénaturantes d’extraction des mucilages, mais le potentiel total d’extraction n’est pas atteint dans ces conditions-là. Il est à noter que l’extraction en milieu acide favorise la solubilité des pectines pariétales,

118

tandis que l’extraction en milieu basique favorise la solubilité des protéines et des hémicelluloses pariétales (Macquet, 2007) ;

L’optimisation de l’extraction du mucilage de la graine de lin par l’eau est liée aux critères suivants :

- le ratio liquide/solide (Gros et al., 2003; Zhang et al., 2009) - la température (Fedeniuk and Biliaderis, 1994)

- la durée (Fedeniuk and Biliaderis, 1994)

- le traitement post-extraction (Fedeniuk and Biliaderis, 1994)

L’augmentation de la température et de la durée d’extraction tendent à augmenter la quantité de co-produits extraits (protéines, lipides, …)

Une fois les mucilages extraits, la séparation liquide solide (entre les graines et l’extrait mucilagineux) peut être effectuée :

- par filtration sur laine de quartz

- sur maille métallique (Wanasundara and Shahidi, 1997) - sur filtres (Warr et al., 2003)

- par centrifugation (Gros et al., 2003)

Les polysaccharides peuvent également être précipités à l’éthanol (Kadivar, 2001).

Une fois extraits, divers procédés peuvent être appliqués sur les mucilages afin de les purifier :

- par précipitation alcoolique (Cui et al., 1994, 1996; Fedeniuk and Biliaderis, 1994; O’Mullane and Hayter, 1993; Savoire et al., 2008; Warrand et al., 2005)

- par dialyse (Fedeniuk and Biliaderis, 1994; O’Mullane and Hayter, 1993; Warrand et al., 2005)

- par ultrafiltration (O’Mullane and Hayter, 1993)

- par chromatographie échangeuse d’ions (Cui et al., 1994; Warrand et al., 2005) - -par purification sur argile : ce dernier procédé est destiné à déprotéiniser les

mucilages (Fedeniuk and Biliaderis, 1994)

Le produit fini peut également être concentré au rotavapor (Cui et al., 1994; Fedeniuk and Biliaderis, 1994), et/ou séché dans un four ventilé, un lyophilisateur ou un atomiseur (Cui et al., 1996; Fedeniuk and Biliaderis, 1994; O’Mullane and Hayter, 1993; Warr et al., 2003).

II.4.1.2 Extraction aqueuse des graines de lin entières

Le procédé employé est détaillé dans la partie expérimentale, paragraphe P.E.2.1.

La première étape consiste en une mise en contact des graines et de l’eau, avec un ratio liquide/solide de 20, puis en une séparation liquide/solide, destinée à récupérer la phase aqueuse enrichie en mucilages.

119

Tableau 39 : Bilan massique de la première étape de production de mucilages Entrées brutes (kg) Entrées sèches (kg) Sorties brutes (kg) Sorties sèches (kg) Graines 11,0 10,1 25,0 8,5 Liquide 200,0 0 179,0 1,1 % de perte / / 3,3 5,1

L’extrait liquide obtenu présente une teneur en matière sèche de l’ordre de 0,61%. Les 179 kg de liquide récupérés à l’issue de l’extraction liquide/solide sont concentrés sous vide par un facteur 7. 24,1kg d’extrait aqueux/mucilagineux est récupéré. Cependant, cette dernière fraction mucilagineuse présente une teneur en pied importante, de l’ordre de 1%, pour une teneur en matière sèche exprimée de l’ordre de 4%. La fraction mucilagineuse contiendrait donc environ 25% d’ « intrants » qu’il faut éliminer.

Les mucilages concentrés sont donc filtrés sur toile avec un dispositif de filtration sous vide de type Büchner afin d’en éliminer le pied.

La fraction mucilagineuse concentrée présente une teneur en matières sèches de 3,89%. Une fois filtrée, elle présente une teneur en matières sèches de 3,81%.

Cette fraction concentrée et filtrée est finalement lyophilisée, la masse de mucilages récupérée est de 834 g ce qui correspond à un rendement de 8,2%.

Les mucilages sont finalement broyés au broyeur Fritsch avec une grille de porosité 2 mm. Les différentes étapes du fractionnement sont schématisées et résumées ci-après sur la figure 45.

120 Figure 45 : Fractionnement aqueux des graines de Lin

Le rendement d’extraction en mucilages secs est de l’ordre de 7,6% par rapport à la matière sèche de la graine. Ce résultat est cohérent avec les données retrouvées dans la littérature (Fedeniuk and Biliaderis, 1994; Warrand et al., 2005; Zhang et al., 2009).

II.4.1.3 Caractérisation des fractions mucilagineuses

D’après la littérature, les mucilages sont caractérisés de la manière suivante (Zhang et al., 2009) :

- la teneur en protéines est déterminée par le dosage Kjeldahl de l’azote total - la teneur en sucres totaux (DuBois et al., 1951; Wanasundara and Shahidi, 1997) - la composition en monosaccharides par CPG-DIF

121

- la teneur en polysaccharides acides (acides uroniques) (Blumenkrantz and Asboe-Hansen, 1973; van den Hoogen et al., 1998)

- la teneur en polysaccharides neutres (Monsigny et al., 1988)

La teneur en pentose (Wanasundara and Shahidi, 1997) est aussi un bon moyen de caractériser les propriétés du mucilage, l’arabinose et le xylose constituant la majeure partie des polysaccharides neutres, eux-mêmes représentant jusqu’à 75% du mucilage (Warrand et al., 2005).

La complexité chimique des mucilages limite l’utilisation de la viscosité cinématique pour l’évaluation de la teneur en mucilage, mais elle peut être mesurée lors des étapes d’optimisation et/ou du suivi des extractions.

Le MIV (mucilage indicator value) peut alors être calculé à partir de la formule suivante :

𝑀𝐼𝑉 = 𝑉𝑖𝑠𝑐𝑜𝑠𝑖𝑡é 𝑐𝑖𝑛é𝑚𝑎𝑡𝑖𝑞𝑢𝑒 𝑑𝑒 𝑙

𝑒𝑥𝑡𝑟𝑎𝑖𝑡(𝑐𝑆𝑡) × 𝑣𝑜𝑙𝑢𝑚𝑒 𝑑𝑒𝑎𝑢(𝑚𝐿)

𝑞𝑢𝑎𝑛𝑡𝑖𝑡é 𝑑𝑒 𝑔𝑟𝑎𝑖𝑛𝑒𝑠 (𝑔)

La mesure de la viscosité cinématique est évaluée selon la norme NF EN ISO 3104. La fraction mucilagineuse lyophilisée présente les caractéristiques suivantes :

Tableau 40 : Composition des extraits mucilagineux lyophilisés Teneur en matière sèche (%) Teneur en matières minérales (% M.S.) Teneur en lipides 1(% M.S.) Teneur en protéines2 (% M.S.) Teneur en sucres totaux3 (% M.S.) Mucilages lyophilisés obtenus lors de nos travaux 92,72 ± 0,04 15,44 ± 0,05 2,80 ± 0,04 26,94 ± 0,05 36,92 ± 0,29 Valeurs de la littérature (O’Mullane and Hayter, 1993; Rebolé et al., 2002) / 11,3 20 10 8,7 20 91,7 >98

1 la teneur en lipides des mucilages est déterminée par dosage colorimétrique (Reversat,

1976)

2 la teneur en protéines est déterminée par le dosage de l’azote total (Méthode Kjeldahl) 3 la teneur en sucres totaux est déterminée par la méthode au phénol sulfurique (DuBois

et al., 1956)

La teneur en matière minérale élevée (15,4% de la matière sèche) des mucilages n’est pas surprenante. Selon (O’Mullane and Hayter, 1993), elle peut atteindre jusqu’à 20% de la matière sèche. La teneur en protéines est conforme à celles retrouvées dans la littérature, tandis que le taux de lipides semble très faible. Cette dernière peut avoir été sous-estimée

122

par la méthode de dosage employée, la méthode de dosage colorimétrique des lipides étant une méthode peu conventionnelle. Il aurait peut être été pertinent d’employer une méthode analytique plus poussée, telle que la RMN, pour doser ces lipides.

De manière générale, les différences entre nos résultats et ceux observés dans la littérature peuvent être expliqués entre autres par le génotype de la graine, ses conditions de culture (humidité, ensoleillement, …), mais également par le mode d’extraction des mucilages.

Les caractérisations ne permettent pas de boucler la composition des mucilages. La méthode de dosage des sucres totaux au phénol sulfurique étant peu fiable, il est possible que la teneur en sucres totaux ait été sous-estimée. Elle pourrait donc en réalité atteindre 54,82% de la matière sèche des mucilages.

 Dosage qualitatif des sucres totaux

L’échantillon de mucilages a été soumis à une hydrolyse à l’acide chlorhydrique et analysé par HPIC. Les résultats obtenus sont les suivants :

Tableau 41 : Analyse des monosaccharides dans les mucilages (%) Sucres totaux

(%) Arabinose Rhamnose Galactose Glucose Xylose

34,23 4,71 ± 0,03 1,85 ±-0,47 7,69 ± 0,29 7,16±0,23 12,83 ±1,28 Au sein de ces sucres totaux, les répartitions sont les suivantes :

Tableau 42 : Répartition centésimale de la fraction sucres

Sucre simple % du total des sucres totaux

Arabinose 13,8

Rhamnose 5,4

Galactose 22,5

Glucose 20,9

Xylose 37,5

 Dosage des acides aminés

Figure 46 : Répartition massique des acides aminés dans les mucilages de lin

Asp 9% Thr 3% Ser 4% Glu 34% Gly 10% Ala 6% Val 3% Met 2% Ile 3% Leu 6% Tyr 1% Phe 3% His 2% Trp 0% Lys 6%0% Arg 7% Pro 2%

123

Si l’on compare ce diagramme avec celui obtenu sur les graines de lin, on constate une diminution de la concentration en glycine, en arginine et en aspartate, qui passent de 10% à respectivement 7 et 9%. La teneur en serine passe de 6 à 4%. En contrepartie, la teneur en acide glutamique passe de 23 à 34%, et la teneur en glycine de 7 à 10%.

Ces différences peuvent s’expliquer par une sélectivité des protéines co-extraites avec les mucilages. Cela laisse supposer que ce sont plutôt des protéines hydrosolubles, du type albumines.