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Le probl` eme quadratique et le transport quantile entre des mesures concentr´ees sur des graphes

Ici, nous traitons deX = Rd, M = Marg(µ, ⌫) et c = c2 : (x, y) ‘! Îy - xÎ2 o`u la norme est euclidienne. Dans cette situation le lemme d’´echange (corollaire 1.2.4) s’applique et s’adapte ais´ement, donnant l’´enonc´e suivant dont la d´emonstration est aussi simple que celle du corollaire

1.2.6.

Corollaire 1.3.1 (Lemme d’´echange). Soit ⇡ un plan de transport optimal sur Rd et c = c2. Alors il existe un bor´elien S v´erifiant ⇡(S) = 1, tel que tout couple de routes (x, y) et (xÕ, yÕ) pris dans S v´erifie

ÈxÕ- x, yÕ- yÍ > 0. (1.5) Par ailleurs, tout S tel que ⇡(S) = 1 et Spt(⇡)µ ¯S convient.

x xÕ y yÕ u Gf Gg Ru

Figure 1.2 – Transport entre deux graphes lipschitziens.

Nous allons maintenant appliquer ce r´esultat au transport optimal entre deux mesures concen-tr´ees sur des graphes lipschitziens. Cela m`enera au th´eor`eme1.3.2, un analogue de notre th´eor`eme mod`ele1.2.13.

Th´eor`eme 1.3.2 ([Jui11, voir Lemma 1.6]). Soit d > 2 un entier et µ et ⌫ des mesures de P2(Rd) concentr´ees, respectivement, sur Gfet Ggles graphes des fonctions lipschitziennes f, g : Ru ! (Ru) de constantes optimales < 1, o`u u est un vecteur unitaire. Soit ⇡ œ Marg(µ, ⌫). Alors, les ´enonc´es suivants sont ´equivalents

— ⇡ est un transport optimal pour le coˆut quadratique c2.

— ⇡ est concentr´ee sur un ensemble S de routes de transport v´erifiant ÈxÕ- x, yÕ - yÍ > 0 pour tout (x, y)œ S et (xÕ, yÕ)œ S.

— ⇡ s’exprime sous la forme ⇡ = (f¢ g)# o`u est le couplage quantile entre proju#µ et proju#⌫sur l’axeRu © R.

En particulier nous avons l’existence et l’unicit´e (le transport quantile, f et g sont bien d´efinis) d’un tel transport ⇡.

La d´emonstration suivante suit le plan logique annonc´e en page21.

D´emonstration. Remarques pr´ealables : dans le cadre des hypoth`eses on dispose de u, un vecteur unitaire deRdet de Gfµ Rdle graphe d´efini par Gf= {˜f(x) = (x, f(x))œ Ru ◊ (Ru) : xœ Ru} ou f :Ru © R ! (Ru) est une application kf-lipschitzienne avec kf < 1. Le mˆeme u est pris pour Ggavec g lipschitzienne de constante kg< 1et ˜g:= (Id, g). Alors, la projection orthogonale proju:Rd! Ru induit une bijection, d’inverse ˜f := (Id, f), entre Gfet Ru d’une part, et, entre les mesures concentr´ees sur GfetRu d’autre part.

Consid´erons maintenant les mesures µ, ⌫ œ P(Rd) concentr´ees l’une sur Gf, l’autre sur Gg. Alors, de nouveau, comme proju¢ proju constitue une bijection mesurable entre Gf◊ Gget (Ru)2, elle induit aussi une bijection entre Marg(µ, ⌫) et Marg(proju

#µ,proju

#⌫). Finalement, dˆu au choix de prendre des constantes de Lipschitz < 1, le signe deȘf(xÕ)- ˜f(x), ˜g(yÕ)- ˜g(y)Í, c’est-`a-dire > 0 ou = 0 ou < 0, est le mˆeme que celui deÈxÕ-x, yÕ-yÍ. Soit ⇡úœ Margú(µ, ⌫) un transport optimal pour le coˆut quadratique. En vertu du corollaire1.3.1, son support v´erifie (1.5). Ainsi S= (proju¢ proju)(Spt(⇡))µ (Ru)2est un ensemble de mesure 1 pour ⇡u:= (proju

¢ proju)#⇡ et on a bien ÈyÕ- y, xÕ- xÍ > 0 pour tout couple de routes (x, y), (xÕ, yÕ) dans S. La mesure ⇡u est donc la mesure quantile Q(proju

#µ,proju

#⌫), ce qui finit de caract´eriser ⇡ú puisque c’est alors (˜f¢ ˜g)#Q.

Notons finalement qu’il existe e↵ectivement un transport optimal ⇡ú : le th´eor`eme de Pro-khorov assure que Margú(µ, ⌫) est non vide.

Les mesures « r´eguli`eres » pour lesquelles le th´eor`eme de Brenier s’applique

Contrairement `a ce que nous avons vu pour le coˆut de transport c2, et ce que nous ver-rons encore pour d’autres probl`emes en dimension 1, dans les dimensions sup´erieures l’ensemble Margú(µ, ⌫) des transports optimaux n’est pas r´eduit `a un unique ´el´ement. Le th´eor`eme de Brenier est un r´esultat fondamental qui pr´ecise une condition suffisante sur µ pour que cela se produise avec, de plus, un transport d´eterministe comme solution. L’hypoth`ese en est que µ doit ˆetre absolument continue. Le sous-espace des mesures absolument continues pr´esente par la suite l’avantage d’ˆetre stable par interpolation de type d´eplacement, ce qui sera important vis-`a-vis du th´eor`eme1.3.11, le r´esultat principal de cette section.

On trouve toutefois des versions plus ´elabor´ees du th´eor`eme de Brenier. Elles s’appuient sur des hypoth`eses plus faibles, par exemple impliquant les« petits ensembles » (voir [Vil03, Theorem 2.12], [San15, Theorem 1.22] et l’exemple1.3.7 ii). Tout ces th´eor`emes sont commun´ement et `a raison appel´es th´eor`eme (d’existence et d’unicit´e) de Brenier [Bre87,Bre91]. On pourra toutefois utilement consulter [MG13,§1.3] au sujet de r´esultats proches d´emontr´es `a la mˆeme ´epoque par d’autres auteurs. Une mesure µ de P2(Rd) est r´eguli`ere (pour le th´eor`eme de Brenier) si elle v´erifie les conclusions classiquement attribu´ees dans (la plupart des versions de) ce th´eor`eme aux mesures absolument continues. La notion a ´et´e introduite par Gigli dans [Gig11, Definition 2.3] en commen¸cant par une d´efinition ´equivalente, celle suivant la proposition1.3.6.

1.3. LE TRANSPORT ENTRE GRAPHES 29

D´efinition 1.3.3 (Mesure r´eguli`ere). Une mesure d´eblai µ œ P2(Rd) est dite r´eguli`ere, ou r´eguli`ere pour le th´eor`eme de Brenier si pour tout remblai ⌫ œ P2(Rd) les plans de transport optimaux ⇡ œ Margú(µ, ⌫) s’´ecrivent sous la forme ⇡ = (Id, T )#µ o`u T est une application mesurable deRd dans lui-mˆeme.

Une cons´equence imm´ediate est l’unicit´e de T et donc de ⇡. Rappelons en e↵et que si T1 et T2sont des applications de transport amenant le minimum alors 1

2((Id, T1)#µ+ (Id, T2)#µ) est ´egalement un transport optimal. Puisque tout transport optimal est de la forme ⇡ = (Id, T )#µ, on en d´eduit T1= T2presque surement. Avec la th´eorie de la dualit´e on sait en r´ealit´e bien plus. On connait par exemple la « forme » de T, bas´ee sur les fonctions convexes (voir la proposition

1.3.6).

Il n’est pas essentiel d’´enoncer ici le th´eor`eme de Brenier sous sa forme la plus compl`ete. Nous nous contenterons donc d’une version courte.

Th´eor`eme 1.3.4 (Th´eor`eme de Brenier). Soit µ œ P2(Rd) une mesure absolument conti-nue. Alors pour toute mesure ⌫ œ P2(Rd) il existe un unique plan de transport optimal ⇡ œ Margú(µ, ⌫). Celui-ci s’´ecrit sous la forme ⇡ = (Id,Ò')#µ o`u ' : Uµ Rd! R est une fonc-tion convexe, U un ouvert convexe et Ò' : U µ Rd

‘! Rd est d´efinie presque surement pour µ.

En particulier, en des termes anachroniques, les mesures absolument continues de P2(Rd) sont r´eguli`eres pour le th´eor`eme de Brenier.

Comme pr´ealable `a la proposition1.3.6voyons que tous les transports du typeÒ' peuvent ˆetre consid´er´es lorsque µ est une mesure r´eguli`ere.

Proposition 1.3.5 ([Gig11]). Une mesure µœ P2(Rd) est r´eguli`ere si et seulement si pour toute application convexe ' : Uµ Rd! R o`u U est un ouvert convexe, le lieu de non-di↵´erentiabilit´e de ' est de mesure nulle pour µ.

On peut donc maintenant consid´erer des applications de transport de la forme Ò' : U µ Rd‘! Rdavec ' convexe car elles sont bien d´efinies pour les mesures r´eguli`eres.

Proposition 1.3.6 (Voir [Gig11,§2], Th´eor`eme de Brenier pour une mesure r´eguli`ere). Si µ est r´eguli`ere, pour toute mesure ⌫œ P2(Rd), il existe (pour le coˆut quadratique) un unique plan de transport ⇡œ Margú(µ, ⌫). Celui-ci s’exprime sous la forme ⇡ = (Id,Ò')#µo`u ' : Uµ Rd! R est une fonction convexe et U un ouvert convexe.

Partant de la proposition 1.3.5 on sait exactement caract´eriser les mesures r´eguli`eres (voir [GM96,Gig12] et [Zaj79]). Cette caract´erisation est l’´enonc´e de th´eorie g´eom´etrique de la mesure que voici : une mesure µ est r´eguli`ere si et seulement si ⇡(G) = 0 est v´erifi´ee pour tout ensemble G qui s’´ecrit sous la forme d’un graphe G = {(x, f - g(x)) œ (Ru)◊ Ru : x œ (Ru)}, o`u f et g sont des fonctions convexes. Le travail de Zaj´ıˇcek [Zaj79] indique en e↵et que le lieu de non-di↵´erentiabilit´e de ' : Uµ Rd ! R est recouvert par une r´eunion d´enombrable finGn de tels ensembles (pour des vecteurs (un)n variables).

Donnons maintenant des exemples de mesures r´eguli`eres. Nous donnerons `a chaque fois une caract´erisation duale en sp´ecifiant les ensembles F auxquels les mesures de la classe en question doivent a↵ecter la valeur z´ero.

Exemple 1.3.7 ([Jui11, Exemples 1.9 and 1.10]). i Les mesures absolument continues. Elles sont r´eguli`eres en vertu du th´eor`eme de Rademacher. Ici nous consid´erons comme en-sembles d’annulation les enen-sembles F dont la mesure (de LebesgueLdou, de fa¸con ´equiva-lente, Hausdor↵Hd) est z´ero.

ii Les mesures ne donnant pas de masse aux petits ensembles, ceux de dimension de Haus-dor↵ 6 d - 1. Ici nous consid´erons donc comme ensembles d’annulation les F tels que Hd-1+"(F) = 0 pour tout " > 0. Un exemple de telle mesure est la mesure ‘uniforme’ sur un ensemble de dimension de Hausdor↵ comprise strictement entre k - 1 et k (et de mesure

finie). On peut par exemple prendre surR2le produit de deux ensembles triadiques de Can-tor, ou, plus pr´ecis´ement la mesure de Hausdor↵ H2log(2)/ log(3)restreinte `a cet ensemble. En e↵et 2 log(2)/ log(3) > 1.

iii Les mesures k-1-purement non-rectifiables au sens de la th´eorie g´eom´etrique de la mesure. Ici F est de type F1 = f(Rd-1) o`u f : Rd-1 ! Rd est lipschitzienne, ou de type F2 `a savoir v´erifiant Hk-1(F2) = 0. Un exemple sur R2 est la mesure uniforme sur l’ensemble de Cantor 4 coins, dont la construction est analogue `a celle de l’ensemble du pr´ec´edent exemple avec, dans la construction, un rapport 1/4 au lieu de 1/3 (voir [Mat95,Paj02] au sujet de l’ensemble de Cantor 4 coins).

iv Les mesures k - 1-purement non rectifiables pour la r´egularit´e C2. Ici, F est de type F1= f(Rd-1) o`u f : Rd-1 ! Rd est de classe C2(Rd-1,Rd) ou de type F2, `a savoir v´erifie Hd-1(F2) = 0. Le fait que ces mesures sont r´eguli`eres provient d’un r´esultat d’Alberti [Alb94], que nous utilisons dans [Jui11, Proposition 1.8].

C’est dans la classe ivque nous puiserons notre exemple du th´eor`eme1.3.11. La raison, qui prendra du sens `a la remarque 1.3.12, en est que les applications lipschitziennes n’envoient pas les ensembles du type f(Rk-1) o`u f est de classeC2sur des ensemblesC2-rectifiable. C’est-`a-dire que f(Rk-1) peut n’ˆetre recouvrable par aucun ensemble (finfn(Rk-1)fi N o`u Hk-1(N)) = 0 et les fn sont de classeC2.