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CHAPITRE 1 INTRODUCTION

1.2 Problématique et objectifs

Les agences de transport de grande taille comme la STM sont confrontées à de nombreuses problématiques liées à la grande hétérogénéité des individus transportés. En effet, l’achalandage des réseaux de transport en commun varie constamment en fonction de paramètres exogènes comme la météo, les événements, les congés ou les arrêts imprévus du service, qui influent sur les comportements individuels de mobilité, mais aussi en fonction de la variabilité (ou, par opposition, la régularité) intrinsèque de ces comportements. L’impact de cette deuxième cause de variabilité dans l’utilisation du transport en commun est souvent moins connu, car plus difficile à mesurer. Pourtant, différents types de variabilités individuelles sont observés dans l’utilisation du système: des variations dans la fréquence d’utilisation ou le choix modal (métro versus autobus) des usagers, ainsi que des variations temporelles et spatiales en termes de jours d’utilisation, de plage horaire ou de lieu d’embarquements choisis par les usagers pour se déplacer. De plus, ces variations peuvent être appréciées selon deux angles différents. Il existe des variations entre les usagers (variabilité interpersonnelle) et des variations au sein du comportement d’un même usager (variabilité intrapersonnelle). La variabilité interpersonnelle est expliquée par la diversité des individus, qui ont chacun leurs propres habitudes de déplacements, alors que la variabilité intrapersonnelle est due à l’adaptation et à l’évolution de l’être humain, qui modifie son comportement de mobilité dans le temps en fonction de ses contraintes quotidiennes ou des évènements qui surviennent au cours de sa vie.

Or, ces variations individuelles rendent difficile l’ajustement de l’offre à la demande, ce qui peut induire des coûts d’opération supplémentaires et une affectation non optimale des véhicules sur le réseau. Pour permettre une meilleure adéquation offre-demande, une prévision plus précise de la demande est nécessaire, ce qui permettrait idéalement ensuite de faire des micro-ajustements du service voire de développer des systèmes d’information personnalisée en temps réel. Cependant, malgré l’existence connue de variations dans l’utilisation des réseaux, de nombreux modèles supposent encore un usage moyen et constant du transport en commun avec un taux de mobilité fixe sur toute l’année. Cette limitation est principalement due à un manque de données longitudinales et individualisées permettant de détecter des variations dans les comportements de mobilité.

En effet, les données des enquêtes Origine-Destination (enquêtes téléphoniques de mobilité qui recensent les déplacements d’environ 4 à 5% des Montréalais) ne suffisent pas. Celles-ci n’étant collectées que tous les cinq ans, elles ne permettent pas de suivre l’évolution de la demande de manière ininterrompue. De plus, elles ne rapportent les comportements de mobilité que d’une portion infime de la population. Les données de cartes à puce, recueillies à chaque validation tarifaire de l’usager, permettent cependant de pallier ce manque de continuité et de représentativité (dans le cas particulier du transport en commun).

D’une part, la disponibilité de données de carte à puce permet une analyse longitudinale du comportement des usagers du transport en commun. En effet, ces données fournissent des séries de validations tarifaires successives qui permettent de suivre chronologiquement les usagers. Selon le taux de pénétration de la carte à puce parmi les usagers et la durée de la période de collecte, de gros volumes de données peuvent être exploités. Ces données sont de nature temporelle, la date et l’heure de chaque validation étant enregistrées, mais aussi de nature spatiale puisque des informations sont disponibles sur le lieu de la validation. La précision des mesures temporelles est à la seconde près et les embarquements et/ou débarquements peuvent être géospatialisés avec les coordonnées de chaque arrêt ou station. La quantité et la qualité des données de cartes à puce permettent ainsi d’analyser temporellement et spatialement la variabilité d’utilisation du réseau de transport en commun à travers une longue période.

D’autre part, cette variabilité peut être caractérisée à la fois aux niveaux agrégé et désagrégé : les déplacements peuvent être suivis pour l’ensemble de la clientèle desservie, mais aussi à l’échelle individuelle de l’usager, car il est désormais possible de lier les données de ses déplacements à un numéro unique de carte. Si l’étude de la mobilité collective permet de déceler des phénomènes cycliques et saisonniers de la demande, l’étude des comportements individuels permet quant à elle de différencier différents types d’usagers, par exemple en distinguant les usagers réguliers des usagers occasionnels. Ainsi, au-delà de donner une simple tendance globale, une analyse individualisée permet d’expliquer les fluctuations de la demande à une granularité plus fine. De plus, elle permet de mieux connaître tous les usagers du réseau (et non seulement les plus dominants) afin de pouvoir ensuite mieux adapter le service aux besoins spécifiques de chacun. Cette recherche s’inscrit donc dans un cadre général visant à mieux comprendre les comportements individuels de mobilité. Plus particulièrement, ce projet a pour objectif principal d’analyser et de

mesurer la variabilité d’utilisation du transport en commun à l’échelle individuelle (donc totalement désagrégée) à l’aide d’un an de données de cartes à puce couvrant les réseaux de bus et de métro de la STM. Des objectifs plus spécifiques ont été formulés comme suit :

- Sélectionner des techniques avancées permettant de traiter et de valoriser des données massives (données de cartes à puce)

- Qualifier et quantifier différents types de variations dans l’utilisation du transport en commun à l’aide d’outils de visualisation et d’indicateurs

- Développer des prototypes d’analyse dans lesquels seront distinguées la variabilité interpersonnelle et la variabilité intrapersonnelle

- Créer une typologie d'usagers et caractériser chaque groupe obtenu

- Examiner la relation entre l'usage du système de transport collectif et sa tarification

Par ailleurs, les grands défis méthodologiques, analytiques et opérationnels auxquels prend part ce projet sont les suivants :

- Évaluer le potentiel des données de cartes à puce à expliquer et prédire le comportement des usagers du transport en commun

- Contribuer à l'amélioration des modèles de prévision de la demande, à un meilleur ajustement de l'offre, et à la mise en place d'une tarification intégrée et personnalisée