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Premier chapitre :

La problématique et le cadre théorique 1.1. Les domaines d’études

1.1.1. La linguistique et la didactique des langues

La linguistique et la didactique des langues sont considérées comme deux sous- ensembles de la vaste discipline des sciences du langage (Cuq, J.-P., 1996 :38). Ces deux sciences distinctes mais complémentaires se trouvent imbriquées dans notre étude. Se qualifiant d’abord en tant que recherche linguistique, cette étude porte essentiellement sur les interactions entre trois langues distinctes : nous étudions comment l’acquisition et l’emploi d’une langue (ou plus spécifiquement, la construction de deux notions aspecto- temporelles de cette langue) se font sous l’influence des connaissances déjà acquises de deux autres langues. Les langues en question ne seront pas pour autant envisagées dans cette étude «en elles-mêmes et pour elles-mêmes».1 En revanche, elles seront examinées dans leur rapport avec l’enseignement/apprentissage du français langue étrangère (FLE). En d’autres termes, alors que nous étudierons d’une part les aspects systématiques, historiques et didactiques des langues dans une perspective comparative, d’autre part, nous observerons les actants des cours de FLE dans le but de découvrir leurs implications cognitives, psychologiques et sociologiques dans le processus d’acquisition. Ainsi, on voit que cette étude se situe autant dans le domaine linguistique que dans celui de la didactique des langues.2 En effet, le terrain d’observation et l’objectif final de cette recherche sont intimement liés avec cette dernière discipline. Si, comme le dit Coste, D.,3 «la réflexion sur les questions sur l’enseignement/apprentissage des langues» évoque «la discipline didactique»,cette étude est étroitement liée à cette discipline. Dans Pédagogie : dictionnaire des concepts-clé de Raynal, F. & Rieunier, A.,4 la conception moderne de la didactique est présentée comme suit : « La didactique étudie les interactions qui peuvent s’établir dans une situation d’enseignement/apprentissage entre un savoir identifié, un maître dispensateur de ce savoir et un élève récepteur de ce savoir. Elle ne se contente plus de traiter la matière à enseigner selon des schèmes préétablis, elle pose comme condition nécessaire la réflexion épistémologique du maître sur la nature des savoirs qu’il aura à enseigner, et la prise en compte des représentations de l’apprenant par rapport à ce savoir (épistémologie de l’élève). » Indépendamment du fait qu’elle n’évoque pas spécifiquement le cas de la didactique des langues, cette définition nous semble bien englober toute situation de didactique des langues. Elle nous permet de voir la didactique, à l’opposé de la linguistique, comme une science plus empirique que théorique.

La didactique des langues qu’on appelait traditionnellement ‘la linguistique appliquée’ a apparemment longtemps précédé la conception même de la linguistique générale (Bouton, C. :1979 :92). Selon L’évolution de l’enseignement des langues: 5000 ans d’histoire de Germain, C. (2001&1993 :1),5 la didactique des langues secondes/

1 Nous refusons d’adopter une telle approche strictement linguistique dans la réalisation de cette étude. 2 Cela prouve, comme le dit Chiss, J.-L. (2007:4), à quel point les recherches sur l’acquisition des langues

étrangères et la didactique des langues, qui étaient « longtemps séparées par des différences d’objectifs et de fondements épistémologiques » s’intéressent aujourd’hui aux «sources interrogations communes. » Voir également Bronckart, J.-P. & Chiss, J.-L. (2002:303-6) pour l’émergence et la raison d’être de la discipline ‘didactique des langues’.

3Cf. Coste, D. : Séminaire (le 23-04-2004) 4

Cité par Wokush, S. : cf. Cours (2003) 5

étrangères de Sumer, (l’actuelle Bagdad, en Irak) date d’il y a 50 siècles. Pourtant, cette discipline n’est pas même de nos jours perçue comme étant une discipline complètement autonome. Elle est encore désignée comme « un des champs d'investigation et d'application de la linguistique ».1 Ce point de vue peut être justifié à un certain degré par les liens étroits que la didactique des langues entretient avec la linguistique (notamment, avec la linguistique acquisitionnelle). Par ailleurs, lorsqu’on prend en considération l’apport non négligeable de la linguistique au domaine de la didactique, cette idée de sous-discipline semble se justifier : la linguistique fournit la didactique des langues en multiples théories (grammaticales, d’acquisition et d’apprentissage), descriptions (de la langue, de l’interaction en classe, des conditions sociolinguistiques) méthodes (d’enseignement), ainsi de suite (cf. idem). Pourtant, il ne faut pas oublier que la didactique des langues, à son tour, contribue considérablement au domaine de la linguistique. En tant que ‘champ d’investigation et d’application’ cette discipline pourvoit des données qui servent à vérifier la validité de nombreuses théories linguistiques. À notre sens, la linguistique et la didactique des langues sont deux disciplines qui s’enrichissent mutuellement. Il faut les concevoir dans une relation de complémentarité plutôt que dans celle d’un ordre hiérarchique.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que la linguistique ne constitue qu’un des domaines où la didactique des langues puise ses ressources. Cette dernière intègre également les concepts de nombreuses autres disciplines, notamment des sous- disciplines de la psychologie (la psychologie de l’apprentissage, la psychologie du développement, la psychologie de la personne, etc.). Selon Wokush, S. (Cours : 2003), la didactique des langues est double dans son origine : de par son objet, elle fait partie des sciences du langage (d’où sa parenté avec la linguistique), et de par son aspect pédagogique, elle fait partie des sciences de l’éducation. En ce sens, elle est née de la fusion de deux vastes disciplines dont une (c’est à dire, la science du langage) constituerait également la discipline-mère de la linguistique. L’organigramme2 ci- dessous illustre les origines et les sous-disciplines de la didactique des langues :

[Figure 3] : Les origines et les sous-disciplines de la didactique des langues Sciences de l’éducation Sciences du langage

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Didactique des langues Linguistique --- ---

Did.des langues maternelles (L1) Did.des langues secondes (L2) Did.des langues étrangères (L3)

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Did.du Did.de Did.du Etc. Did. Did. Did. Etc. Did. Did. Did. Etc.

français l’anglais singhalais fr. ang. sing. fr. ang. sing. L1 L1 L1 L2 L2 L2 L3 L3 L3

1 Cf. Cours de Gajo, L. (http://www.unil.ch/ing/page12069.html)

2 Nous devons l’idée de cet organigramme à Cuq, J.-P. (1996 :38). Pourtant, nous le présentons ici sous

une forme plus développée grâce à d’autres références (notamment, Wokush, S. : cours : 2003) et à nos propres réflexions sur la matière.

Selon l’organigramme, la discipline de la didactique des langues peut être initialement divisée en trois branches majeures selon les divers statuts qu’on attribue à son objet d’étude. À savoir, la didactique des langues maternelles (L1), la didactique des langues secondes 1 (L2) et la didactique des langues étrangères (L3). Chacune de ces trois disciplines didactiques se divise ensuite en fonction de la langue en question : la didactique du français, de l’anglais, du singhalais, du chinois, etc. Par conséquent, les champs d’étude qu’on obtient à la fin sont doublement désignés (par ex : ‘français+L1’, ‘anglais+L2’, etc.). Mis ensemble, ces derniers couvrent toutes les situations d’enseignement/apprentissage des langues.

Selon la division initiale en didactique des L1, L2 et L3, le français appris en tant que L1 en France, au Québec ou au Sri Lanka (c’est-à-dire, par les enfants français vivant là-bas) est étudié comme un ensemble, sous la discipline de la didactique du français langue maternelle (FLM) alors que le français appris comme langue étrangère partout dans le monde, y compris en France et dans les autres pays francophones, fait l’objet d’étude de la didactique du français langue étrangère (FLE).

Pourtant, malgré le fait qu’elle se divise en L1, L2 ou L3, les divers contextes d’enseignement/apprentissage d’une langue commune (par ex : le français LM, le français LS, le français LE) peuvent rencontrer des obstacles langagiers communs. De même, toute langue enseignée comme langue étrangère connaît d’une manière générale les problèmes sociaux et psychologiques similaires que les didactiques des langues maternelles et des langues secondes ignorent. Par ailleurs, la didactique des langues maternelles connaît des problèmes méconnus de la didactique des langues secondes et étrangères, et vice versa. Ainsi, malgré leur ségrégation, ces dernières sous-disciplines constituent un réseau de liens complexes qui ne les laissent pas être étudiées comme des entités isolées.

1.1.2. L’enseignement/apprentissage des langues étrangères

À notre sens pourtant, chacun de ces derniers sous-ensembles doit être traité à son tour, particulièrement, dans l’enseignement/apprentissage des langues étrangères, comme étant constitué de deux sous-catégories distinctes : ‘endolingue’ et ‘exolingue’.2 1.1.2.1. Les milieux endolingues et les milieux exolingues

En règle générale, un apprenant acquiert sa langue maternelle dans un milieu où cette langue est parlée. Ainsi, on peut dire qu’il acquiert sa L1 en situation endolingue. Par contre, quand un apprenant d’une langue étrangère tente d’apprendre cette langue chez lui, à savoir dans un milieu où cette langue cible n’est pas parlée, il se trouve dans un milieu exolingue d’apprentissage. D’habitude, les apprenants des L2 se trouvent dans un contexte intermédiaire. Au contraire des apprenants de L1, les apprenants de L2 ne peuvent pas acquérir leur langue cible à la maison. Pourtant, au niveau social, ils y ont un accès relativement facile. Que leur langue cible constitue une langue locale ou externe, elle n’est pas une langue vraiment ‘étrangère’ à leur communauté. On pourrait

1 Cuq, J.-P. (1996 : 38) pour sa part considère la didactique des langues secondes comme un sous-

ensemble de la didactique des langues étrangères. Mais vu sa spécificité, nous préférons la considérer comme une discipline autonome.

2 « Est exolingue celui qui utilise une langue étrangère à la communauté dans laquelle il vit. »

(Dictionnaire de linguistique, 2001 :190). Interprété à la lumière de cette définition, endolingue serait ‘celui qui utilise une langue non étrangère à la communauté dans laquelle il vit’.

dire que les apprenants de L2 se situent ainsi dans un milieu ‘plus ou moins endolingue’ d’apprentissage/acquisition de cette langue. Or, il est clair qu’un milieu endolingue est plus propice qu’un milieu exolingue à l’acquisition/apprentissage d’une langue. Toutefois, l’acquisition/apprentissage des L1, L2 et L3 n’ont pas toujours lieu dans les milieux que nous leur avons assignés ci-dessus. Aujourd’hui, un nombre important des langues du monde, indépendamment de leur statut (L1, L2 ou L3), peuvent être apprises ou acquises dans des contextes aussi bien endolingues qu’exolingues.

Bien plus que pour les didactiques des L1 et L2, la distinction entre le milieu endolingue et le milieu exolingue est en rapport avec la didactique des langues étrangères. Par rapport aux apprenants de L1 et de L2, le nombre de personnes qui apprennent et ou acquièrent des langues étrangères dans des milieux exolingues est réellement très élevé. Vu cela et la disparité considérable existante entre les situations endolingues et exolingues d’enseignement/apprentissage, il est imprudent d’aborder les langues étrangères comme étant un ensemble homogène. La citation ci-dessous montre comment le manque de précision à cet égard peut être source de confusion.

1« (En effet), en français langue étrangère, on admet généralement que les situations de classe relèvent plutôt, mais pas exclusivement il est vrai, de l’enseignement/apprentissage que de l’acquisition » (Cuq, J.-P., 1996 : 65).

Ici, lorsqu’il parle du ‘français langue étrangère’, Cuq nous semble se référer implicitement au FLE appris en situation exolingue ; du moins, il fait clairement allusion à un contexte d’apprentissage du FLE où l’accès à la langue cible serait limité à l’enseignement dispensé en cours. Or, l’apprentissage/acquisition du FLE en milieu endolingue ne correspond pas du tout à cette image. À savoir, un apprenant de FLE en situation endolingue (par ex : en France, en Suisse Romande, etc.) n’acquiert pas le français uniquement à l’aide de l’enseignement qu’il reçoit en classe. Il peut aussi l’acquérir d’une façon ‘naturelle’ en dehors de la classe, plus ou moins de la même manière qu’un enfant français le ferait. Si on insiste toutefois sur le fait que l’apprenant de FLE ne fait qu’apprendre (et non acquérir) le français en cours, ce serait aussi affirmer que le petit français n’acquiert pas sa L1 dans son cours de FLM. Si ce n’est pas ce que l’auteur insinue ici, il se réfère manifestement à un milieu ‘exolingue’ d’apprentissage sans pour autant le dire précisément. Mais, ce manque de précision de sa part entraîne une ambiguïté au sens de son texte.

Cependant, à part son manque de précision à l’égard de la distinction endolingue/exolingue, la citation ci-dessus nous semble manquer de clarté également vis-à-vis d’autres points de réflexion. D’après elle, le FLE dans une ‘situation de classe’, relèverait plutôt de l’enseignement/apprentissage que de l’acquisition. Mais, il est ici peu évident que le manque d’acquisition est à attribuer à l’enseignement/ apprentissage du FLE ou à ‘la situation de classe’ en général. Pour nous, l’auteur semble mal diriger sa critique en attribuant au ‘français langue étrangère’ une caractéristique qui relèverait non du FLE mais plutôt de toute ‘situation de classe’ : de tout enseignement formel de langues. En effet, il va sans dire que toute classe de langue fonctionne en général selon les mêmes principes de base. Le fait qu’on y enseigne le FLE et non pas le FLM ou le FLS 2 n’y change rien. Comme nous l’avons dit plus haut, l’enfant français apprenant

1 Nous avons choisi de citer cet extrait de texte non seulement parce qu’il sert à démontrer l’importance de

la distinction endolingue/exolingue pour le FLE, mais aussi parce qu’il permet de discuter beaucoup d’autres questions relevant du domaine de la didactique des langues étrangères.

son FLM dans une classe en France est autant assujetti à un processus d’enseignement/apprentissage de cette langue qu’un adulte alloglotte apprenant le FLE en France ou au Sri Lanka. Ainsi, c’est la situation de la classe 1 et non pas le statut du français (FLM ou FLE) qui entraverait (ou encouragerait) l’acquisition de cette langue.

Cependant, cette méfiance associée à l’enseignement/apprentissage des langues dites ‘étrangères’ peut se manifester davantage lorsqu’on évoque l’apprentissage des langues étrangères en milieux exolingues. Autrefois, le terme ‘langue étrangère’ n’évoquait en général que des milieux exolingues où l’apprentissage était entièrement dépendant des cours : d’où la représentation des situations d’enseignement/ apprentissage du FLE (ou de toute autre langue étrangère) comme des milieux non contributoires à l’acquisition. Mais, comme nous l’avons déjà remarqué, de nos jours, beaucoup d’étrangers apprennent et acquièrent le FLE sur le territoire même de la France ou de pays francophones (aussi bien en cours de langue que dans le milieu naturel). Plus que le statut en tant que tel (L1, L2, L3), c’est le milieu d’apprentissage (endolingue, exolingue) d’une langue donnée qui détermine aujourd’hui la forme de son enseignement, apprentissage et acquisition. Il est donc impératif de prendre cette dimension en considération lorsqu’on parle de l’enseignement/apprentissage des langues étrangères.

1.1.2.1.1. L’enseignement/apprentissage et l’acquisition

L’extrait de texte cité à la page précédente relance aussi le vieux débat sur l’écart présumé entre l’enseignement/apprentissage et l’acquisition. Ce débat nous est pertinent en ce que l’acquisition d’une langue étrangère dépend considérablement de son enseignement/apprentissage. Dans un milieu exolingue, en effet, l’enseignement/ apprentissage constitue le moyen principal d’accès à la langue cible. Cependant, selon l’origine de la polémique, il semble que la classe de langue, qui fonctionne sur la base de l’enseignement/apprentissage, entraverait (du moins, à un certain degré) l’acquisition d’une langue cible par ses apprenants. Ainsi, des linguistes comme Krashen, S. (1981 & 1995) qui considèrent l’enseignement/apprentissage formel comme étant sans effet, voire nocif pour l’acquisition d’une langue donnée, promeuvent son acquisition ‘naturelle’, en dehors de la salle de classe. Pour notre part, nous croyons que la situation naturelle en soi ne garantit pas l’acquisition. D’ailleurs, comme le dit Vasseur, M.T. « il ne suffit pas qu’il y ait dialogue pour qu’il y ait acquisition » (1994 :19). Que ce soit dans une situation naturelle ou que ce soit dans une salle de classe, tant que ‘l’apprenant’ ne prend pas conscience de ‘son apprentissage’, ni la situation naturelle, ni l’enseignement formel ne peuvent l’aider à acquérir la langue cible. L’acquisition en ce sens peut être interprétée comme étant un acte plutôt conscient, voire volontaire.

- L’acquisition, l’intention et la compétence communicative prélinguistique

En parlant de l’acquisition du langage chez l’enfant, Bruner, J.S.2 (1998) constate qu’« Il est nécessaire de développer préalablement une intention communicative, ainsi qu’une compétence communicative prélinguistique, pour finalement aboutir au

1 À travers les mots, ‘situation de la classe’, nous évoquons tous les critères qui s’associent à un cadre

d’enseignement/apprentissage formel de langue : sa situation endolingue/exolingue, l’institut auquel il appartient, la méthode de langue qu’on y utilise, l’enseignant, les programmes, les apprenants, le niveau, la langue d’enseignement, les conditions d’enseignement/apprentissage, ainsi de suite.

2Cité par Bonvin, D. & Schneider, B. : Cf. séminaire « Du prélinguistique à la communication linguistique » (le 02-05-2003)

langage. » À notre avis, ces conditions préalables sont également nécessaires pour l’acquisition des langues secondes ou étrangères chez les apprenants adultes. L’intention communicative constitue en effet le déclencheur indispensable de l’interaction, qui, à son tour et selon Chomsky, déclenche le dispositif inné de l’acquisition des langues (LAD) chez les apprenants. L’approche co-constructiviste de l’interaction sert d’ailleurs, selon les interactionnistes, à structurer la langue visée.1 Dans le cas de l’apprentissage des langues maternelles, secondes voire étrangères en situation endolingue, les apprenants disposent clairement d’une intention communicative : à savoir, ils éprouvent le besoin de communiquer dans leur langue cible. En outre, au fur et à mesure qu’ils avancent dans leur parcours d’apprentissage, ces apprenants trouvent de plus en plus d’occasions de pratiquer cette langue.

En revanche, cette intention communicative ainsi que l’opportunité de communiquer dans la langue cible font gravement défaut à certains contextes exolingues d’apprentissage de langues. En effet, lorsqu’on prend en considération les cinq C de l’enseignement communicatif de Haas, M. (2000),2 on se rend compte de la difficulté d’adapter une approche communicative pure et dure à de tels contextes exolingues. Haas met en évidence cinq critères qu’elle considère comme essentiels pour un enseignement communicatif : « (1) Communication, (2) Culture, (3) Connexion avec d’autres disciplines, (4) Contact avec la langue en utilisation dans des communautés en dehors de la classe et (5) Comparaison avec les langues d’origines des apprenants ». Si on prend en compte un contexte exolingue d’enseignement du FLE comme celui au Sri Lanka, seul le dernier de ces cinq critères y reste (bien que non exploité) directement accessible. En outre, alors que les langues étrangères y sont considérées comme des disciplines à part (3), le contact avec la langue en utilisation en dehors de la classe (4) est rare, voire quasi inexistant. En ce qui concerne la communication (1) et la culture (2) associées à la langue cible française, les apprenants n’y accèdent qu’indirectement, à savoir, à l’aide des enseignants et à travers les documents dits ‘authentiques’ étudiés en classe. Ainsi, démunis des critères indispensables pour le bon déroulement de l’approche communicative d’enseignement/ apprentissage des langues, on voit à quel point certains contextes exolingues 3 d’apprentissage s’y prêtent mal.

[Figure 4]

Or, indépendamment de la méthodologie suivie, certaines conditions peuvent être considérées en général comme obligatoires pour l’apprentissage/acquisition des langues.

1 Berthoud, A.-C. (Cours d’Acquisition de la compétence communicative en L1 & L2 : le 14-03-2003) 2 Citée par Wokush, S. Cf. Cours de didactique (le 29-04-2003).

3 Vu les 5 critères de l’enseignement communicatif de Haas, ce dernier nous semble adaptable uniquement

aux contextes endolingues d’enseignement/apprentissage de langue. Exposure

To a rich but comprehensible input of real spoken & written language in use Use Of the language to do things (i.e. exchange meanings) Motivation To listen & read the language & to speak & write it (i.e. to process & use the exposure)

Instruction In language (i.e. chances to focus on form) Essential Desirable

Dans son schéma (reproduit, ci-dessus), Willis, J. (1996)1 évoque trois conditions essentielles (l’ouverture optimale à la langue parlée et écrite, l’emploi de la langue cible dans le but de communiquer, la motivation à traiter les informations recueillies) et une condition non obligatoire mais souhaitable (l’instruction : l’opportunité de se focaliser sur la forme) pour l’apprentissage/acquisition des langues. D’une façon paradoxale, l’apprenant en milieu exolingue dispose de la condition non obligatoire (l’instruction) mais, est partiellement dépourvu des conditions tenues pour essentielles. En d’autres mots, même s’il est motivé, l’apprenant exolingue ne peut guère s’exposer directement à sa langue cible dans son emploi naturel et, n’a pas non plus l’occasion de l’utiliser pour communiquer avec les autres.

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