2.4 Choix du mod` ele ` a employer en fonction de la taille du paquet de
2.5.2 Prise en compte de l’asservissement de la distance pointe-surface
pointe-surface
Le cas expos´e pr´ec´edemment est un mod`ele bas´e sur l’hypoth`ese que la distance pointe-surface est maintenue `a une valeur constante durant le balayage de la sur- face par la pointe. Ce cas peut ˆetre rencontr´e en ”lift-mode” par exemple, lorsque la pointe reproduit `a grande distance le relief de la surface enregistr´e lors d’un pr´ec´edent balayage au contact ou `a faible distance de la surface.
On a ´evoqu´e au chapitre 1 un autre moyen de maintenir cette distance pointe-surface constante en modulant la tension appliqu´ee entre la pointe et la contre-´electrode. Le microscope `a force ´electrostatique permet de mesurer des variations d’amplitude de vibration d’un cantilever. Ces variations sont reli´ees aux forces exerc´ees sur la pointe situ´ee `a l’extremit´e du cantilever. Au chapitre 1 nous avons vu que l’amplitude Aωd
´
etait li´ee, en r´egime lin´eaire, `a ∂Fωd
∂z : en pratique on fixe l’amplitude Aωd `a l’aide de
la boucle d’asservissement, ce qui revient le plus souvent, comme on le verra, `a fixer la distance pointe-surface.
Cependant la forme de ∂Fωd
∂z peut varier en fonction du d´eplacement lat´eral de la
pointe au-dessus de l’´echantillon. Ainsi la figure 12 montre l’allure de ∂Fωd
∂z calcul´ee `a
partir du mod`ele d´ecrit au §2.5.1 pour deux positions de la pointe par rapport `a une charge ponctuelle d´epos´ee sur la couche isolante balay´ee. La tension de lecture est constante V = V0 = 1V . Lorsque la pointe passe au-dessus de la charge, la boucle
´
electrode. L’influence de celui-ci se traduirait par un d´ecalage de la tension de lecture necessaire pour annuler Qt
d’asservissement modifie la distance pointe-surface pour maintenir ∂Fωd
∂z constante,
et cela en l’absence de variation r´eelle du relief de la couche isolante. Il en d´ecoule que le relief apparent de la surface d´epend de l’´etat de charge de cette surface.
0 5 10 15 20 0 0.5 1 1.5 2
∂F /
∂z (u.a.)
∆z près de la surface ∆z loin de la surface 0Distance pointe-surface
(unité=R )
tFig. 12 – ∂F∂zωd en fonction de z pour deux positions de la pointe : a) pointe ´eloign´ee de la charge (pointill´es). b) pointe situ´ee au-dessus de la charge (trait plein). Les varia- tions des hauteurs apparentes pour deux valeurs diff´erentes de ∂F∂zωd sont repr´esent´ees par des fl`eches.
Nous avons vu au §2.5.1 que l’on peut minimiser l’intensit´e de l’interaction pointe- charge en fixant Qt = 0. C’est ce que l’on fait lorsqu’on veut d´eterminer le relief de la
surface. En mode ”tapping” non r´esonant9, la pointe balaye la surface `a une hauteur
moyenne du mˆeme ordre de grandeur que son amplitude d’oscillation et la r´eponse de la pointe n’est plus lin´eaire. On peut cependant rapprocher le comportement qualitatif de la relation entre Aωd et Fωd de celui calcul´e pour le r´egime lin´eaire. La
figure 13 (a) repr´esente la hauteur apparente d’une surface calcul´ee pour diff´erents points de fonctionnement de la boucle d’asservissement. La correspondance entre le point de fonctionnement et la distance pointe/surface est indiqu´ee sur la mˆeme figure. On constate que la charge influence d’autant plus la hauteur apparente que la pointe est initialement ´eloign´ee de la surface.
Ce comportement contre-intuitif, expliqu´e sch´ematiquement sur la figure 12, a ´et´e observ´e par Guillemot et al. ([39]) en observant des ˆılots de silicium charg´es comme le montre la figure 13 (b). Encore une fois, ceci fournit un crit`ere pour d´etecter la pr´esence d’´eventuelles charges sur une image topographique : les d´etails du relief ayant des charges pour origine semblent ressortir d’autant mieux que la pointe est ´
eloign´ee de la surface.
9La pointe entre alors r´eguli`erement en contact avec la surface balay´ee. Les forces dominantes
0 . 6 0 . 7 0 . 8 0 . 9 1 1 . 1 -3 -2 -1 0 1 2 3 Déplacement latéral de la pointe (unité=R ) Consigne Consigne=2 Consigne=12
(a)
Hauteur apparente (unité=R )
Distance
t
t
(b)
Fig. 13 – a) Hauteur apparente calcul´ee `a partir du mod`ele expos´e aux §2.5.1 et 2.5.2 pour 6 distances diff´erentes entre la pointe et la surface. b) Variation de la tension Vz
exerc´ee aux bornes du tube pi´ezo´electrique pour diff´erents points de fonctionnement du MFE (d’apr`es [39])
La modulation de la tension appliqu´ee entre la pointe et la contre-´electrode ne permet pas de s’affranchir de ce type de probl`eme mais m´elange au contraire les effets li´es aux charges images et `a l’asservissement. La signature exp´erimentale d’une variation de la hauteur apparente d´etermin´ee `a partir du signal Aωd(ou signal
topographique) est cependant visible sur le signal ´electrique. En effet l’apparition d’un fantˆome de la charge sur le signal topographique modifie le signal ´electrique puisque la distance pointe-surface varie alors, ce qui a pour effet d’amplifier l’effet de la charge image sur le signal ´electrique.
2.5.3
Probl`emes li´es au transport de la charge ponctuelle
dans la profondeur de l’isolant
L’analyse de la dynamique des charges dans un isolant est rendue difficile par le fait que l’interaction ´electrostatique est `a longue port´ee : le champ produit par une distribution de charges en un point d´epend de sa densit´e volumique et de l’angle solide sous lequel cette charge est vue d’apr`es la loi de Coulomb : ~E ∝ rq2u~r.
Si l’on consid`ere, comme on l’a fait pr´ec´edemment, le cas d’un paquet de charges mobile `a la surface d’une couche isolante, le d´eplacement de celui-ci le long d’une direction parall`ele `a la surface sera facilement d´etect´e, de mˆeme qu’un ´elargissement du paquet, la distance pointe/charge demeurant constante durant ces processus. Cependant on peut montrer que dans le cas d’une interaction coulombienne, le pro- cessus de diffusion du paquet de charges `a travers une couche isolante semi-infinie aurait la mˆeme signature exp´erimentale que son ´etalement `a la surface ([40]). Tou- tefois dans le cas d’une couche d’´epaisseur finie, la force appliqu´ee sur la pointe est domin´ee par les interactions entre q et qi d’une part et entre q et Qt d’autre part
mˆeme mani`ere (cf. ´eq. 2.12), ce qui permet en principe de distinguer un processus d’´etalement d’un processus de diffusion en profondeur.
Lorsque la pointe est tr`es ´eloign´ee de la surface, la charge image qi d´ecroˆıt rapide-
ment et les forces dominantes exerc´ees sur la pointe sont celles exerc´ees par q et son image q0 dans la contre-´electrode. On peut alors consid´erer l’ensemble de ces deux charges comme un dipˆole. L’interaction avec la pointe d´epend du moment di- polaire p = 2q(d − z0) o`u d est l’´epaisseur de la couche isolante et z0 la profondeur de p´en´etration du paquet.
0,28 0,3 0,32 0,34 0,36 0,38 0,4 -3 -2 -1 0 1 2 3 Distance Pointe-Surface z zp=0 zp=.1 zp=.2 zp=.3 zp=.4 zp=.5 zp=.6 x (u.a.) z zp Pointe x q R=0,5 z (u.a.) -1,95 -1,9 -1,85 -1,8 -1,75 -1,7 -1,65 -3 -2 -1 0 1 2 3
Force électrique (u.a.)
F1(zp=0) F1(zp=.1) F1(zp=.2) F1(zp=.3) F1(zp=.4) F1(zp=.5) F1(zp=.6) x (u.a.) F (u.a.)Ω
Fig. 14 – Hauteur apparente et Force ´electrique (FΩ) mod´elis´ees pour une charge
positive s’enfon¸cant dans une couche isolante `a amplitude de vibration constante. L’unit´e de longueur est l’´epaisseur de la couche isolante. La tension de lecture V0
est fix´ee `a 4 V , ainsi que la tension alternative VΩ. La consigne est ´egale `a 6.
Dans le domaine interm´ediaire o`u l’´epaisseur de la couche isolante est du mˆeme ordre de grandeur que la distance pointe-surface et que le rayon de courbure de la pointe `a l’apex10, le ph´enom`ene de diffusion d’une charge ”ponctuelle” en profon- deur dans l’isolant peut induire une modification importante de la forme apparente du signal enregistr´e. Ainsi sur la figure 14 sont repr´esent´ees la hauteur apparente de la pointe ainsi que la force ´electrique mod´elis´ee pour une charge s’enfon¸cant dans une couche isolante. On constate que le ”fantˆome” induit par la charge sur le signal topographique (gauche) diminue, tandis que la structure `a deux pics de la force ´electrique (droite) disparaˆıt elle-aussi. Ce type de signal pourrait ˆetre incor- rectement interpr´et´e comme ´etant dˆu `a une distribution initialement inhomog`ene de charges qui, en diffusant, s’homog´en´eiserait. La variation relative de la hauteur de la pointe peut ne pas ˆetre enregistr´ee convenablement et la mauvaise interpr´etation
10Rappelons que le rayon de courbure de la sph`ere dans le mod`ele pr´esent´e ici n’est pas toujours
strictement ´egal au rayon de l’apex, car la sph`ere rend compte de l’interaction de toute la pointe avec la charge. Une valeur de R de l’ordre de 100 nm a ainsi ´et´e d´etermin´ee par Laure-H´el`ene Bize ([37]).
de signaux ”`a hauteur constante” peut donc conduire `a un mod`ele de diffusion des charges qualitativement faux.