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Chapitre 2 : Comportement thermo-mécanique des thermoplastiques renforcés de fibres

IV.4 Prise en compte de l’anisotropie

La prise en compte de l’anisotropie dans les modèles non linéaires phénoménologiques est souvent une composante nécessaire pour améliorer la description du comportement mécanique des thermoplastiques renforcés. Ainsi, une relation entre la microstructure et les propriétés mécaniques doit être considérée. Dans l’approche phénoménologique, ce lien est essentiellement réalisé avec l’introduction du tenseur d’orientation d’Advani et Tucker.

Dans le modèle de (Launay et al. 2011), l’influence de l’anisotropie est considérée uniquement sur les contributions élastique et viscoplastique. Le tenseur des rigidités est obtenu à partir d’une procédure

d’homogénéisation en deux étapes avec un schéma de Mori-Tanaka, à l’aide du logiciel Digimat. La loi d’évolution viscoplastique dépend également de l’orientation des fibres car elle est exprimée en utilisant une contrainte équivalente viscoplastique anisotrope. Concernant les propriétés viscoélastiques, elles sont supposées isotropes. Launay et al se questionnent quant à la pertinence de conserver des paramètres d’écrouissage scalaires C et γ, ou bien de les remplacer par des grandeurs tensorielles (anisotropes).

(Andriyana, Billon, and Silva 2010) proposent un modèle phénoménologique 3D tenant compte de l’anisotropie et du comportement non linéaire à la décharge. La description du comportement est dissociée entre celui de la matrice, considéré visco-élastique isotrope, et celui des fibres et de l’interface fibre-matrice, supposé élasto-plastique anisotrope. Les différentes variables internes dépendent de la fraction volumique de fibres et d’un tenseur d’orientation de référence moyenné dans l’épaisseur de la plaque considérée.

Une autre approche, micromécanique, consiste à reconstruire numériquement la microstructure. (Miled 2012) a conçu un outil numérique capable de prédire le comportement thermo-mécanique anisotrope d’un polyacrylamide renforcé à 50 % en masse de des fibres de verre. Les tenseurs de raideur et de dilatation thermique sont directement liés aux tenseurs d’orientation du modèle d’Advani et Tucker. L’approche numérique de détermination des propriétés thermo-élastiques anisotropes se fonde sur une description discrète de la microstructure par la génération automatisée d’un VER optimal. La connaissance des lois de comportements des fibres et de la matrice du VER et les sollicitations thermomécaniques numériques du VER permettent de déterminer directement les paramètres thermo-mécaniques anisotropes du matériau. (Gehring 2013) a étudié un polypropylène renforcé par des fibres courtes d’origine végétale. La double homogénéisation numérique proposée permet d'obtenir le comportement effectif d'un milieu isotrope affaibli par une famille de micro-fissures en tenant compte de la microstructure, de la répartition et de l'orientation des fibres, et de leurs interactions. L'évaluation des propriétés effectives de la matrice multi-fissurée est obtenue suivant un schéma de Mori-Tanaka. Les paramètres du modèle ont été identifiés à partir d’essais de traction réalisés sur la matrice. La comparaison entre les courbes expérimentales et les résultats numériques pour deux vitesses de déformation ont montré des corrélations satisfaisantes pour les déformations inférieures à 2 %.

(a) (b)

Une analyse de ce type fondée sur la reconstruction de la microstructure, nécessitant la modélisation des fibres, n’est pas encore envisageable dans le cas d’une pièce industrielle complexe.

IV.5 Conclusions

Les essais thermo-mécaniques ont permis d’identifier les contributions à prendre en compte dans une stratégie de modélisation pour la prédiction du comportement de matériaux composites renforcés afin d’aider au dimensionnement et d’en optimiser les performances de mise en service. Cependant, dans la majorité des cas des thermoplastiques renforcés, et dans un souci de simplification, seul les phénomènes indispensables à la représentation du comportement ont été conservés. Deux grandes familles de modélisation sont présentées : les modèles micromécaniques et les modèles phénoménologiques. Dans le premier cas, la prédiction des propriétés élastiques anisotropes d’un matériau renforcé et du comportement non linéaire est obtenu par homogénéisation. Le comportement mécanique peut aussi être prédit en reproduisant avec exactitude une microstructure, à partir de reconstructions 3D obtenues par exemple par tomographie à rayons X, il s’agit là souvent de géométries simples et de petites dimensions. Dans un contexte industriel fort, cette approche très exigeante dans la connaissance de la microstructure peut s’avérer trop riche. Ainsi, la seconde approche est souvent favorisée dans l’industrie pour des pièces plus complexes. Un premier modèle intégré dans Abaqus a été présenté. La caractérisation nécessaire à la détermination des paramètres matériau est limitée mais ce modèle isotrope ne permet pas de tenir compte d’une éventuelle anisotropie. Les modèles développés par (Andriyana, Billon, and Silva 2010) et (Launay et al. 2011) sont de ce fait prometteurs car ils permettent de prendre en compte l’anisotropie, uniquement pour l’élasticité dans le second cas, en intégrant le tenseur d’orientation d’ordre deux moyenné dans l’épaisseur. En particulier dans le second modèle, le comportement à la décharge mais également le phénomène de fluage, ont largement été étudiés (cf. cahier des charges du renfort - chapitre 1), ainsi que la thermo-dépendance des paramètres.

V Conclusions

La conception des pièces en matériaux composites s’appuie aujourd’hui essentiellement sur une démarche numérique. Les caractéristiques mécaniques et morphologiques des matériaux sont requises pour aider au dimensionnement de ces pièces composites. Ainsi, une analyse de la microstructure et des résultats d’essais thermo-mécaniques sont nécessaires pour orienter le choix d’un modèle. En particulier, les essais servent à mettre en évidence les grandes contributions du comportement thermo-mécanique du matériau et à déterminer les paramètres matériaux associés.

Les composites à matrice thermoplastique sont caractérisés par un comportement macroscopique complexe et les réponses mécaniques variées sont de type viscoélastique et/ou viscoplastique et dépendent essentiellement des vitesses de déformation, de la température et des niveaux de sollicitation appliquées au matériau. D’autre part, l’orientation des fibres induite par l’injection engendre un comportement fortement anisotrope, ce qui est particulièrement le cas pour les thermoplastiques renforcés par des fibres courtes utilisés dans l’industrie. Pour mettre en avant le phénomène d’anisotropie, une attention particulière doit être portée à la position des échantillons dans une pièce injectée. De plus, il est à noter que seules des plaques injectées à épaisseur constante ou avec des variations géométriques très limitées sont considérées dans la littérature.

Pour la prédiction numérique du comportement thermo-mécanique des composites, des approches phénoménologiques et micromécaniques ont été présentées. Deux modèles phénoménologiques sont retenus. Une approche micromécanique intégrée dans Digimat. Cette approche permet de prendre en compte le tenseur d’orientation en chaque point d’intégration, pour une pièce aussi complexe que serait le hayon, en autorisant un couplage entre Moldflow, Digimat et Abaqus. Une alternative consiste à se limiter à l’utilisation d’un tenseur d’orientation moyenné dans l’épaisseur pour la prédiction de certaines propriétés comme proposé dans le modèle de Launay. Dans ce sens, le modèle d’homogénéisation de Mori-Tanaka, intégré dans Digimat, a également été présenté. Ainsi, déterminer les propriétés élastiques anisotropes du matériau du renfort à partir de ce modèle permettrait de conclure quant à la pertinence de l’utilisation d‘un tenseur d’orientation moyenné dans l’épaisseur.