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Principes et intérêt du statoréacteur et du superstatoréacteur

1.1 Le statoréacteur et le superstatoréacteur

1.1.1 Principes et intérêt du statoréacteur et du superstatoréacteur

Les systèmes de propulsion utilisés dans les domaines aéronautiques et spatiaux sont en général de deux types : les moteurs aérobies, qui puisent le comburant qu’ils utilisent de l’air environnant, et les moteurs anaérobies, qui embarquent ce comburant en plus du combustible.

Même s’il existe de nombreux types de moteurs aérobies et anaérobies, chacun avec ses caractéristiques propres, en règle générale, les moteurs aérobies se caractérisent par des poussées plus faibles et par des impulsions spécifiques plus élevées que les moteurs anaérobies (12) (13).

L’impulsion spécifique 𝐼𝑠𝑝 est un paramètre fondamental pour caractériser l’efficacité d’un système propulsif. Elle est définie par le rapport entre la poussée délivrée par le moteur et le débit-poids des ergols consommés pour la produire :

𝐼𝑠𝑝 = 𝑃

𝑔 ∙ 𝑚̇𝑒 1.1

Dans cette équation P représente la poussée, g l’accélération due à la pesanteur et 𝑚̇𝑒 le débit d’ergols consommés. Les moteurs aérobies, qui collectent le comburant de l’air ambiant, ont des impulsions spécifiques qui peuvent être de plusieurs milliers de secondes alors que les moteurs-fusées, qui sont les plus utilisés parmi les technologies anaérobies, ont des impulsions spécifiques de quelques centaines de secondes seulement (13). Ceci est montré en figure 12.

De nombreuses études ont montré l’intérêt de l’utilisation de moteurs aérobies pour des applications où des moteurs anaérobies sont, de nos jours, souvent préférés. En effet, plusieurs travaux de recherche ont montré l’intérêt de l’utilisation de ces moteurs pour la propulsion de missiles, surtout lorsque les portées de vol visées sont assez importantes (au-delà de quelques dizaines de kilomètres) (1) (6) (7). De plus, d’autres études ont évoqué leur emploi pour la propulsion de lanceurs spatiaux (1) (2) (14).

2 Il est possible de mieux comprendre cela avec un exemple. Si le combustible utilisé par un moteur quel qu’il soit était un hydrocarbure, la stœchiométrie de la combustion fixerait le rapport massique entre le comburant et le combustible entre 6 et 7. Par conséquent, dans un moteur anaérobie qui embarque les deux, environ 85 % à 90 % de la masse des ergols consommés provient de l’oxydant. Cela explique les très faibles impulsions spécifiques de ces engins.

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Figure 1. Impulsion spécifique de différents moteurs en fonction du Mach de vol (15)

Vu que les moteurs aérobies ne fonctionnent que dans l’atmosphère et à des altitudes où la pression ambiante est encore suffisamment élevée, ils ne pourraient être utilisés pour propulser ces lanceurs qu’en association à un moteur anaérobie. Néanmoins, leurs impulsions spécifiques très élevées permettraient d’augmenter beaucoup le rapport entre la charge utile et la masse au décollage du vaisseau, ce qui justifie l’intérêt de leur utilisation (16) (17).

Parmi les divers types de propulseurs aérobies, les statoréacteurs sont ceux qui permettent d’atteindre les vitesses de vol le plus élevées.

Un statoréacteur est un moteur aérobie qui trouve son application dans le domaine des vols à très grande vitesse (au-delà de Mach 2 pour les applications opérationnelles actuelles). Le comburant, l’air extérieur, est admis par une entrée placée à l’avant du véhicule. Il est ensuite ralenti et comprimé géométriquement, sans pièces tournantes, ce qui explique le nom utilisé pour indiquer ce type de moteur intégralement basé sur un fonctionnement statique, le stato-réacteur. Le combustible est injecté en entrée de la chambre de combustion, où il se mélange à l’air et brûle. La combustion a lieu en régime subsonique (statoréacteur) ou supersonique (superstatoréacteur) et génère des gaz chauds qui traversent une tuyère qui en accélère l’écoulement en les détendant (figure 2) (1) (7). L’effet propulsif est créé par la différence entre les quantités de mouvement sortante et entrante.

32 Le statoréacteur ne pouvant être utilisé que pour des vitesses de vol supérieures à Mach 2, il doit toujours soit être associé à un autre système propulsif, capable d’accélérer le vaisseau jusqu’à une vitesse assez élevée pour qu’il puisse prendre le relais (6)3.

Figure 2. Schéma d’un statoréacteur et d’un superstatoréacteur (6)

Le statoréacteur à combustion subsonique permet d’atteindre des vitesses de vol de l’ordre de Mach 5 à 6. Lorsque la vitesse de vol s’approche de Mach 6, les pertes de pression d’arrêt qui se produisent lors du ralentissement de l’écoulement à des vitesses subsoniques dans la prise d’air deviennent si fortes que la trainée s’exerçant sur le véhicule ne peut pas être compensée par le moteur. Par conséquent, au-delà de Mach 6 il est nécessaire, afin de remédier à ce problème et pouvoir continuer à profiter des avantages de cette technologie, de se limiter à ralentir l’air entrant jusqu’à une vitesse proche de Mach 2 tout en la maintenant supersonique (2) (14). La combustion a alors lieu en condition supersonique et on parle de statoréacteur à combustion supersonique (ou superstatoréacteur, en anglais SCRamjet, c’est-à-dire Supersonic Combustion Ramjet).

Cela explique pourquoi la plupart des travaux de recherche sur ce moteur visent le développement de statoréacteurs où la combustion se réalise, selon les nécessités de vol, dans

3 Dans ce cas il est possible de parler de propulsion à étages multiples.

33 la même chambre soit en condition subsonique soit supersonique. Un statoréacteur en mesure d’évoluer sur ces deux gammes de vol est dénommé statoréacteur mixte, ou statomixte (6).

La conception et le développement d’un statomixte doivent faire face à de nombreux défis scientifiques et technologiques.

D’abord, pour permettre le passage du statoréacteur d’un mode de fonctionnement à un autre, il doit être équipé d’une chambre de combustion à géométrie variable, car en régime de fonctionnement subsonique la chambre de combustion doit être d’abord convergente, puis divergente, alors qu’en en régime de fonctionnement supersonique elle doit être toujours divergente (6). Puis, pour exploiter ce propulseur en vol hypersonique, il est indispensable de maîtriser la combustion supersonique. En effet, l’allumage du combustible, l’obtention d’un mélange homogène avec le comburant et la stabilisation de la combustion posent, dans un écoulement supersonique, de nombreuses difficultés, surtout au vue du faible temps de séjour du combustible dans la chambre de combustion (environ 0.5 ms à Mach 8) (18) (19). Enfin, à de telles vitesses, il devient très difficile d’assurer la tenue thermique des structures du moteur durant son temps de fonctionnement. A Mach 12, par exemple, la température totale l’air à l’entrée du superstatoréacteur, à cause de l’effet cinétique, peut atteindre 4500 K, ce à quoi s’ajoute l’effet de la combustion, qui apporte encore plus d’énergie (20).

Cela rend nécessaire, même avec des matériaux avancés comme les plus modernes composites thermostructuraux, le recours à une technique de refroidissement moteur dédiée appropriée.

1.1.2 La recherche sur le statoréacteur et le superstatoréacteur : état de