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Partie II Théorie spectrale et principe d’amplitude limite pour

8.4 Le principe d’amplitude limite

Le théorème 8.3.1, nous a permis de mettre en évidence un phénomène de résonance aux fréquences plasmons ±λp. Néanmoins, le o(t) obtenu pour des fréquences d’excitations différentes

de ±λp peut être précisé. Nous allons nous restreindre au cas d’une excitation ω ∈ J où J est

l’intervalle défini par (8.25) que nous rappelons ici :

J = R \ {−Ωm, −λp, 0, λp, Ωm} si Ωm = Ωe,

R \ {−Ωm, −λc, −λp, 0, λp, λc, Ωm} si Ωm 6= Ωe.

Nous verrons que sous certaines conditions la solution U (t) va rester localement bornée et se rapprocher en temps longs d’un régime périodique établi u+. Ce dernier est défini par le corollaire suivant qui se déduit immédiatement du théorème d’absorption limite 8.6.2 démontré en annexe. Pour énoncer ce corollaire, rappelons la définition de l’ensemble C+ (définit dans l’annexe en (8.24)) :

C+= {z ∈ C | Im(z) > 0} .

Corollaire 8.4.1 Soient s > 2, ω ∈ J et f ∈ H↓∩ Hac alors la limite suivante5 :

u+= lim

ζ∈C+→ωR(ζ)f existe dans H

et est donnée explicitement par la formule suivante

hu+, V iH= VPω

Z

R

θλ(f , V )

λ − ω dλ + i πθω(f , V ), ∀V ∈ H, (8.9) où VPω la valeur principale de Cauchy en ω6. Quant à θλ(f , V ), il s’agit de la densité spectrale

de la mesure absolument continue associée à l’opérateur A définie par (8.23). De plus, sous ces hypothèses, il existe α > 0 tel que (pour tout V ∈ H) λ 7→ θλ(f , V ) est une fonction localement hölderienne d’exposant α sur J .

Remarque 8.4.2 Décrivons ici la condition f ∈ Hac. Dans le cas où Ωe6= Ωm, elle se résume à supposer que f vérifie (H2) :

f ∈ H0 =nU = (uE, uH, uP, uM) ∈ H | div uH|R2

= 0, div uH|R2+ = 0 et div uM = 0

o

, car H0 = Hac. Par contre si Ωe = Ωm, cette condition est équivalente à supposer que f vérifie

(H2) et que sa projection sur les sous-espaces propres Ker(A ± λp) associés aux fréquences plasmons : ±λp est nulle.

Sous ces conditions, nous pouvons démontrer la proposition suivante connu sous le nom de principe d’amplitude limite. La démonstration proposée ici s’inspire de celle développée dans [47].

Théorème 8.4.3 (Principe d’amplitude limite) Soient ω ∈ J , s > 2 et f ∈ H↓ ∩ Hac , la solution U (t) du problème de Cauchy (C) avec condition initiale nulle vérifie pour tout V ∈ H,

hU (t), V iH = −iDu+, VE

He

−i ω t+ o(1), lorsque t → ∞, (8.10)

où u+ est définie par le corollaire 8.4.1.

5. L’indice s fait ici référence au poids des espaces H↑et H↓ définis respectivement en (7.90) et (7.91).

6. L’existence de la valeur principale de Cauchy dans la formule (8.9) résulte du caractère L1 de la densité

8.4. Le principe d’amplitude limite 175

Preuve. Soit V ∈ H. Le terme hU (t), V iHs’exprime (cf. 8.7) en fonction de la mesure spectrale par :

hU (t), V iH = (U (t), V )H=

Z

λ∈R

φω(λ, t) d (Eλf , V ) .

Comme f ∈ Hac, la mesure spectrale est ici absolument continue, soit d (Eλf , V ) = θλ(f , V ) dλ

où la fonction

θλ(f , V ) ∈ L1(R)

est la densité spectrale (dont une expression explicite est donnée en (8.23)). En utilisant la définition de la fonction φω(λ, t) (cf. 8.1), il vient :

hU (t), V iH= Z λ∈R ie −i λ t− e−i ω t λ − ω θλ(f , V ) dλ. (8.11) Quant au terme hu+, V iH

↓ associé au régime périodique établi, sa forme explicite est donnée

par le corollaire 8.4.1 : D u+, VE H↓ = VPω Z R θλ(f , V ) λ − ω dλ + iπθω(f , V ), (8.12)

où VPω désigne la valeur principale de Cauchy prise en ω. Pour établir (8.10), réécrivons (8.11)

sous la forme : hU (t), V iH = −i e−iωt VPω Z R θλ(f , V ) λ − ω dλ − VPω Z R e−i (λ−ω) t λ − ω θλ(f , V ) dλ ! ,

ce qui conduit avec (8.12) à :

hU (t), V iH = −i e−iωt Du+, VE H− i πθω(U , f ) − VPω Z R e−i (λ−ω) t λ − ω θλ(f , V ) dλ ! .

Ainsi, il reste donc à montrer que VPω

Z

R

e−i (λ−ω) t

λ − ω θλ(f , V ) dλ = −i πθω(U , f ) + o(1), lorsque t → ∞.

A cette fin, posons le changement de variable ξ = λ − ω, il s’ensuit que : VPω Z R e−i (λ−ω) t λ − ω θλ(f , V ) dλ = VP0 Z R e−i ξ t ξ θξ+ω(f , V ) dξ. (8.13)

Soit a strictement positif, on peut alors décomposer l’intégrale précédente de la manière suivante VP0 Z R e−i ξ t ξ θξ+ω(f , V ) dλ = I1(t) + I2(t) + I3(t) (8.14) où I1(t) = VP0 Z a −a e−i ξ t ξ (θξ+ω(f , V ) − θω(f , V )) dξ, I2(t) = θω(f , V ) VP0 Z a −a e−i ξ t ξ dξ, I3(t) = Z |ξ|>a e−i ξ t ξ θξ+ω(f , V ) dξ.

La densité spectrale θξ+ω(f , V ) étant une fonction intégrable, par le théorème de Riemann-

Lebesgue :

I3(t) = o(1), lorsque t → ∞.

Concernant l’intégrale I1(t), comme l’espace Ha été choisi avec un poids vérifiant s > 2, nous savons d’après le corollaire 8.4.1 qu’il existe α strictement positif tel que la fonction

θλ(f , V ) soit hölder d’indice α en ω. Sur un voisinage de 0, on obtient alors la majoration

suivante :

|θξ+ω(f , V ) − θω(f , V )|

|ξ|

C

|ξ|1−α qui est intégrable en 0.

Ainsi, par le théorème de Riemann-Lebesgue, on a également I1(t) = o(1), lorsque t → ∞. Pour traiter I2(t), utilisons le lemme 8.4.4 qui est un résultat classique d’analyse complexe :

VP0

Z a

−a

e−i ξ t

ξ dξ = −i π + o(1), lorsque t → ∞,

Il vient alors

I2(t) = −i π θω(f , V ) + o(1), lorsque t → ∞.

Ce qui conduit finalement avec (8.13) et (8.14) à VPω

Z

R

e−i (λ−ω) t

λ − ω θλ(f , V ) dξ = −i π θω(f , V ) + o(1) lorsque t → ∞.

Lemme 8.4.4 Soit a > 0 alors :

I(t) = VP0

Z a

−a

e−i ξ t

ξ dξ = −i π + o(1), lorsque t → ∞.

Preuve. En posant le changement de variable u = −ξ t, I(t) se réécrit de la manière suivante :

I(t) = − VP0

Z a t

−a t

ei u u du.

Le résultat va alors découler de la formule de Cauchy appliquée au contour γt, ε = γ1t∪ γ2t,ε∪ γε

3 (cf. figure 8.5) défini par :

γ1t : u 7−→ a t ei u, u ∈]0, π[, γ2t,ε : u 7−→ u, |u| ∈]ε, a t[,

γ3ε : u 7−→ ε ei (π−u), u ∈]0, π[.

En effet, d’après la formule de Cauchy, on a :

Z

γt, ε ei ζ

ζ dζ = 0.

Or après un petit calcul, on montre que :

Z

γε

3

ei ζ

8.4. Le principe d’amplitude limite 177

−a t

−ε

ε

a t

Re(ζ) Im(ζ) γ1t γ2t,ε γ2t,ε γ3ε Re(ζ) Im(ζ) Figure 8.5 – Contour γt, ε = γ1t∪ γ t,ε 2 ∪ γ3ε

Ainsi en faisant tendre ε vers 0, il vient : −iπ − I(t) + Z γt 1 ei ζ ζ dζ = 0

Il est alors aisé de montrer que

Z γt 1 ei ζ ζ dζ = o(1) lorsque t → ∞. Soit finalement,

I(t) = −iπ + o(1), lorsque t → ∞.

Remarque 8.4.5 Nous nous sommes ici restreints à des fréquences d’excitation ω ∈ J . Parmi

les fréquences qui n’appartiennent pas à J (défini en (8.25)), remarquons tout d’abord que les points −Ωm, 0, Ωm ont été éliminés de la dynamique du système par l’hypothèse (H2). De plus,

nous avons montré que le système résonnait aux fréquences plasmons ±λp lorsque Ωe = Ωm. Ainsi, dans le but d’obtenir le premier terme de l’asymptotique en temps long des solutions de l’équation de Schrödinger soumise à un second membre périodique, il nous resterait seulement à étudier si le théorème d’amplitude limite est vérifié en ±λp et ±λc pour Ωe 6= Ωm . Ceci, nous permettrait de répondre à la question suivante : atteint-on un régime périodique établi lorsqu’on excite le système à ces fréquences ? Nous nous y attèlerons dans un future proche. Pour l’instant, nous savons seulement par le théorème 8.3.1 qu’en excitant à ces fréquences (sous l’hypothèse

(H2)), la solution U (t) de Cauchy (C) avec conditions initiales nulles vérifie

(U (t), V ) = o(t), ∀V ∈ H.

Résumons enfin les résultats obtenus dans ce chapitre par le théorème suivant qui est en fait une synthèse des théorèmes 8.3.1 et 8.4.3.

Théorème 8.4.6 Soient s > 2, f ∈ H0et ω ∈ Ralors les asymptotiques en temps long de la solution U (·) du problème de Cauchy (C) avec condition initiale nulle sont données par les trois assertions suivantes :

– Pour Ωe6= Ωm, ω ∈ J et f ∈ H, hU (t), V iH= −i Du+, VE He −i ω t + o(1), ∀V ∈ H, (8.15) u+= lim ζ∈C+→ωR(ζ)f ∈ H

est définie par le corollaire 8.4.1. Autrement dit, le théorème d’amplitude limite est vérifié. – Pour Ωe= Ωm, ω ∈ J et f ∈ H, en utilisant la décomposition (7.97) de l’espace H0, on

peut écrire f de façon unique sous la forme

f = fac+ E({λp}) f + E({−λp}) f , où fac ∈ Hac. (8.16) On obtient alors que :

hU (t), V iH = −i Du+, VE He −i ω t + hE({λp})f , V iH φω(λp, t) + hE({−λp})f , V iH φω(−λp, t), (8.17) u+ = lim ζ∈C+→ωR(ζ)fac ∈ H↓

est définie par le corollaire 8.4.1 et

φω(±λp, t) = i

e−i ±λpt− e−i ω t

±λp− ω .

Ici, le système oscille aux fréquences ω, λp et −λp, le principe d’amplitude limite n’est donc pas vérifié, mais la solution reste bornée en temps.

– Pour Ωe= Ωm et ω = ±λp,

(U (t), V ) = t e−iωt(E({ω}) f , V )H+ o(t), ∀V ∈ H. (8.18)

Le système entre en résonance.

Preuve. La première et la troisième assertion sont ici simplement la réécriture des résultats

obtenus dans les théorèmes 8.3.1 et 8.4.3. Pour démontrer la deuxième assertion, il suffit d’utiliser la décomposition (8.16) de la source f pour écrite U (t) = φω(A, t) f sous la forme :

U (t) = φω(λp, t) E({λp})f + φω(−λp, t) E({−λp})f + φω(A, t) fac.

et d’appliquer le théorème 8.4.3 à U1(t) = φω(A, t) fac qui est la solution du problème de

8.4. Le principe d’amplitude limite 179

Dans le but d’illustrer ce théorème, nous avons déjà simulé numériquement le cas où l’on excitait le système à la fréquence de résonance λp (correspondant ici à l’asymptotique (8.18))

dans la partie précédente. Nous nous proposons maintenant d’effectuer deux simulations coïn- cidant avec les situations (8.15) et (8.17). Nous reprenons la configuration géométrique et les paramètres physiques de la figure 8.1 à l’exception de Ωe, Ωm et de la fréquence d’excitation ω.

Dans les figures 8.6 et 8.8, on s’intéresse au cas où le principe d’amplitude limite est vérifié (cf. (8.15)). On excite ici le système, pour Ωm = 4, Ωe= 3, à la fréquence ω = 2.7. L’onde générée

atteint bien un régime périodique établi, ceci est visible sur les trois derniers instantanés de la figure 8.6 et confirmé par le graphique 8.8 qui décrit l’évolution temporelle du champ électrique

uE(·) au point (0, 0) situé sur l’interface. De plus, on note avec la figure (8.10), représentant le

spectre fréquentiel de l’onde tracée dans la figure 8.8, qu’il s’agit bien d’un régime périodique établi à la fréquence ω = 2.7 dans la mesure où l’on observe un pic très marqué à cette fréquence. De plus, remarquons également que ω vérifie ici :

λc= Ωem q Ω2 e+ Ω2m ≈ 2.4 < ω < λp = Ωm √ 2 ≈ 2.8.

Cette fréquence excite donc particulièrement les modes plasmons wλp(k),k,1(cf. figure 6.3 où l’on note que la fréquence ω intersecte la courbe λp(k)) que l’on observe dans le régime périodique

établi dans les trois derniers instantanés de la figure 8.6 où une onde plasmonique se propage le long de l’interface.

Dans les figures 8.7 et 8.9, on se place dans le cas correspondant à l’asymptotique (8.17), c’est-à-dire que l’on choisit Ωm = Ωe = 3 et que l’on excite à une fréquence ω = λp+ 0.5 ≈ 2.6

différente de la fréquence plasmon λp. Les instantanées de la figure 8.7 suggèrent alors que la

solution reste bornée en temps. Par contre, il ne s’agit pas d’un régime périodique établi. En effet, on observe dans la figure 8.9 qui représente l’évolution temporelle du champ électrique

uE(·) au point (0, 0) un phénomène de battements : l’onde est ici une superposition de deux

sinusoïdes à la fréquence ω et λp. Son spectre fréquentiel (cf. figure 8.10) possède ici deux pics

8.4. Le principe d’amplitude limite 181

Figure 8.8 – Évolution temporelle du champ électrique uE(·) (décrit par la figure 8.6) au point

(0, 0) situé sur l’interface.

Figure 8.9 – Évolution temporelle du champ électrique uE(·) (décrit par la figure 8.7) au point

8.5. Conclusion 183

Figure 8.10 – Spectre fréquentiel du signal représenté par la figure 8.8 (à gauche) et par la figure 8.9 (à droite).

8.5

Conclusion

L’étude spectrale effectuée au septième chapitre, nous a permis d’obtenir l’ asymptotique en temps long des solutions de notre problème d’évolution soumis à un second membre périodique en temps. Nous avons alors dégagé trois types de comportement selon la fréquence d’excitation ω (décrits dans le théorème 8.4.6) : la convergence vers un régime périodique établi, un phénomène de battements où la solution reste bornée en temps mais oscille à plusieurs fréquences et enfin la présence de résonances où la solution explose linéairement en temps.

Ce travail ouvre de nombreuses perspectives. Énumérons tout d’abord les débouchés à court terme de nature plutôt technique.

Dans un premier temps, il nous faut traiter les cas où l’on excite le système pour Ωe 6= Ωmaux

fréquences ±λcet ±λp. En effet, faute de temps, l’asymptotique des solutions correspondant à ces

excitations n’est pas décrite par le théorème 8.4.6 (cf. remarque 8.4.5). Le principe d’amplitude limite est-il vérifié pour ces fréquences ? les simulations numériques effectuées nous font plutôt pencher pour une réponse positive à cette interrogation.

Ensuite, nous projetons d’affiner les majorations utilisées dans la preuve du théorème d’ab- sorption limite 8.6.2 afin d’obtenir des espaces à poids H↓ et H↑ optimaux. Ceci permettrait de considérer un espace de sources H↓ plus grand (pour les théorèmes d’absorption et d’amplitude limite) où les fonctions f seraient supposées moins décroissantes à l’infini (cf. remarque 8.6.6). Enfin, nous envisageons de traiter les équations de Maxwell complètes dans le dioptre. Rap- pelons que nous avons ici considéré de façon arbitraire le mode transverse magnétique (TM) et que l’on transposerait aisément les résultats obtenus dans le cadre du mode transverse ma- gnétique (TE). Or dans le cas d’un milieu stratifié, l’étude spectrale des modes (TE) et (TM) permet d’obtenir celles des équations de Maxwell complètes (cf. [113]).

Énumérons maintenant quelques perspectives à plus long terme. Ce travail effectué dans le cas d’un matériau de Drude pourrait être généralisé à des modèles dispersifs plus compliqués à l’instar de celui de Lorentz évoqué dans le cinquième chapitre. Puis, on pourrait également étendre cette étude à d’autres géométries : le cas d’une lentille où une couche de métamatériau d’épaisseur finie est insérée dans un diélectrique, celui d’un milieu stratifié alternant plusieurs couches de diélectriques et de métamatériaux ou encore le cas d’"un dioptre circulaire" où une boule de métamatériau est incluse dans un diélectrique... Un tel travail permettrait de vérifier si les résonances plasmoniques existent pour d’autres géométries. Enfin, traiter le cas d’une interface non régulière présentant un coin serait particulièrement intéressant car il s’y produit en régime harmonique des phénomènes tout à fait remarquables (cf. [35]).

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