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Chapitre 1 : Etude bibliographique 17

2  Vers l’obtention de fluorographène par exfoliation 43 

2.4  Principales applications possibles du fluorographène 58 

Watanabe et al. ont, pour la première fois, introduits des CFx au sein d’une batterie

primaire au lithium, considérant les propriétés qu’offre ce matériau de cathode : une forte stabilité chimique et thermique, combinée à des tensions et des densités d’énergie applicables importantes [165]. Les études qui ont suivi, basées sur l’utilisation de graphites fluorés en tant que cathodes, ont permis de conforter le choix de ce matériau pour atteindre de fortes densités d’énergie, en essayant de tangenter la stœchiométrie la plus favorable pour cela [166-168]. Il est important de noter que le couple associé Li/CF1 en batterie primaire possède la capacité

théorique la plus élevée des cathodes usuelles : 780 Wh/kg contre 330 Wh/kg pour MnO2 ou

encore 315 Wh/kg pour SO2 (864 mAh/g théorique) [169]. L’utilisation de fluorographène, à

savoir une feuille de graphène dont tous les carbones sont fonctionnalisés avec un atome de fluor, a récemment émergé dans ces systèmes, du fait de la structure 2D développant une surface accessible importante, favorable à la diffusion du lithium Li+ [162, 170]. Après les piles

primaires, la transposition du fluorographène en tant que matière active d’électrode de batteries secondaires reste peu commune, et souvent détournée. En effet, la recherche se porte davantage sur des graphènes faiblement fluorés, avec un caractère conducteur plus marqué [171, 172]. La présence de fluor en faible quantité permet à la fois de combiner une extracapacité induite par la réduction des liaisons C-F, avec la minimisation des produits de réaction fluorés, mais aussi lithiés, pouvant diminuer les performances. De plus, la réaction entre les espèces Li+ et F-, source de formation du composé LiF, vient consolider l’interface

modifiée de l’électrode en contact avec l’électrolyte (communément appelée « SEI », pour Solid Electrolyte Interface).

Récemment, avec le challenge visant à remplacer le lithium dans les batteries, par anticipation de restrictions pour des raisons géopolitiques et surtout environnementales, l’essor de nouvelles technologies de stockage de l’énergie a permis d’intégrer les graphite/graphène fluorés en matière active. Compte tenu de l'abondance des ressources, de la forte densité d’énergie volumique possible, la batterie à base de magnésium (Mg) est considérée comme l'un des systèmes les plus prometteurs au-delà des batteries Li-ion actuelles. Cependant, le développement des batteries Mg est entravé par la fenêtre électrochimique étroite de stabilité des électrolytes, ainsi que par la structure des matériaux cathodiques transposables. Initialement basées sur une utilisation de graphite fluoré, les

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études se sont intensifiées sur l’alternative qu’offraient ces systèmes à base de graphène fluoré, en termes de capacité, de stabilité et de cyclabilité [173, 174]. Par la suite, Xie et al. ont proposé, d'utiliser ce processus redox à surface rapide pour améliorer la cinétique des batteries Mg, en intégrant des nanofeuillets de graphène fluoré comme matériau actif pour batteries secondaires [175].

Toujours dans le domaine du stockage de l’énergie, le graphène fluoré a fait son apparition dans un dispositif capable de délivrer une énergie en une durée très courte : les supercondensateurs. Basé sur l’échange de charges électrostatiques entre deux électrodes polarisées, générant ainsi une différence de potentiel, cette technologie développe de hautes densités de puissance, mais aussi une cyclabilité remarquable (Figure 12). Le graphène est considéré comme le matériau idéal pour cette application, alliant une incroyable conductivité électronique, une surface spécifique importante afin d’adsorber les ions en surface, mais aussi une bonne stabilité chimique. Une fonctionnalisation très partielle avec le fluor, couplée à l’élaboration de structures 3D de graphène fluoré, induit une augmentation des performances électrochimiques par un transport des ions facilité, et une stabilité chimique augmentée, ainsi que des possibilités de réactions faradiques [150, 157, 176].

2.4.2 Lubrification / Hydrophobicité

Depuis la mise en évidence de la structure superficielle de la feuille de lotus, véritable icône du phénomène physique de superhydrophobicité, i.e. un angle de contact avec l’eau supérieur à 150° et un angle de glissement inférieur à 10°, les surfaces (super)hydrophobes ont connu un regrain d’intérêt, à la fois fondamental mais aussi applicatif. L’interaction avec l’eau environnant, dans de nombreuses domaines, restent d’une importance majeure pour certains mécanismes : anticorrosion, auto-nettoyage, conversion de l’énergie … Classiquement, la capacité que présente une surface à créer une affinité avec l’eau, i.e. la mouillabilité, dépend de sa morphologie, au travers de la rugosité, mais aussi de sa composition chimique intrinsèque de surface.

Initialement, les études se sont orientées sur la construction de surfaces superhydrophobes sur des substrats métalliques. Par exemple, Liu et al. ont construit une surface superhydrophobe en électrodéposant une plaque de magnésium Mg-Mn-Ce dans une solution d'éthanol, et les résultats ont montré que la surface ainsi préparée améliorait grandement la résistance à la corrosion de l'alliage de Mg [177]. Actuellement, il est largement connu que le revêtement organique est l'une des technologies les plus efficaces utilisées dans la protection des matériaux. Par conséquent, certaines recherches ont été consacrées à la fabrication d'un revêtement organique avec une surface superhydrophobe du fait que le

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couplage des propriétés hydrophobes et barrières tend à améliorer de manière synergique les performances de protection du système de revêtement. Chang et al. ont développé des composites hydrophobes à base époxy/graphène, permettant d’atteindre un angle de contact à l’eau d’environ 127° [178]. Pour cela, ils ont mis en place une technique de moule/empreinte. Similaire au Téflon® hydrophobe (PTFE), composé de macromolécules, le

fluorographène possède également des propriétés de résistance à l'eau, de résistance à l'huile mais aussi d'auto-nettoyage, ce qui le place comme un substituant bidimensionnel possible du PTFE [122, 153]. Shen et al ont synthétisé avec succès des graphènes fluorés multicouches, dont l'angle de contact était de 158° [179]. La tendance s’est ensuite orientée logiquement vers l’élaboration de composites à base de fluorographène. Le caractère hydrophobe apporté par la présence de fluor en surface est combiné à la microstructuration de surface induite par la mise en forme du composite [180]. Avec un angle de contact tutoyant les 173,7°, Bharathidasan et al. ont développé un composite à base de polydiméthylsiloxane PDMS/graphène fluoré, ouvrant ainsi de nouvelles idées pour la fabrication de surfaces à faible énergie de surface par des matériaux à couches [181].

L’hydrophobie va de paire avec une énergie de surface faible. Une autre application requiert un tel caractère : la lubrification. Partant du constat que l’incorporation d’atomes de fluor dans des (nano)carbones abaisse toujours le coefficient de frottement par diminution de l’énergie de surface [182], tout en facilitant la formation d’un tribofilm stable, la tentation d’employer un graphène fluoré est alors forte. Peu viable du point de vue économique du fait du coup du lubrifiant en graphène, l’intérêt est purement fondamental. En effet, la formation du tribofilm nécessite une exfoliation, et probablement une défluoration [183]. Un des objectifs secondaires de ce travail de thèse a été de comparer un graphène fluoré avec un graphite fluoré : en d’autres termes, de s’affranchir de l’énergie d’exfoliation lors du frottement.