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Premiers résultats pour le 16 C

Isotopes de carbone riches en neutrons

6.1.2 Premiers résultats pour le 16 C

6.1.2.1 Méthodes

Plusieurs méthodes existent pour déterminer les probabilités de transition réduite. Comme souvent, chacune possède ses défauts et qualités. Une méthode « classique » consiste à mesurer (in)directement le temps de demi-vie τ de l’état,

via sa décroissance gamma. La relation entre τ et B(E2) ↑ s’exprimant par :

τ=75¯h  ¯hc Eγ 5 1 B(E2) (6.1)

Au-delà des difficultés expérimentales, dont certaines seront décrites plus loin, l’hypothèse principalement faite est que l’observation de la décroissance gamma de l’état d’intérêt peut être directement reliée à sa probabilité d’excita-tion par :

B(E2) ↑= 2Jf +1

2Ji+1B(E2) ↓ (6.2) avec Ji, Jf moment cinétique total de l’état initial et final respectivement.

Une second procédé est l’excitation Coulombienne, où les noyaux sont excités par le champ électromagnétique produit lors de la collision de deux noyaux atomiques. Cette méthode excite prioritairement les états de petit L. Le lien avec le B(E2)se fait par la section efficace d’excitation Coulombienne, en introduisant notamment le paramètre de déformation Coulombien βC :

βC= 4 3 π ZR20 r B(E2) e2 (6.3)

†. β, qu’il soit nucléaire ou Coulombien est la fraction de la moyenne quadratique de la déformation.

où Z est la charge du noyau étudié et R0 son rayon dans l’état fondamental. La section efficace est directement reliée à ce paramètre par :

σ∝ β2

C (6.4)

les coefficients de proportionnalité faisant notamment intervenir le nombre de photons virtuels (cf. section 7.3).

Cette méthode développée dans les années 50 a connu un regain d’intérêt avec l’avènement des faisceaux secondaires. Sa principale difficulté réside dans l’extraction de la section efficace Coulombienne « pure » exempte de contribution nucléaire. C’est notamment pour cette raison que la première expérience présentée ici cherche à mesurer indirectement le temps de demi-vie.

Il est important de noter que la déformation βC à laquelle cette méthode donne accès est Coulombienne et correspond à sonder la distribution en protons du noyaux [30] (cf. équation (6.5)). Ceci suggère qu’une autre déformation « indépendante » existe, qui dépend de la seconde interaction présente dans le noyau et plus sensible à la distribution des neutrons : la déformation nucléaire

βN. La seconde expérience présentée ici permet ainsi d’accéder à cette valeur. La troisième expérience est une excitation Coulombienne qui, si elle est effectuée dans certaines conditions, permet d’accéder à la fois à βC et βN.

Le choix de l’ordre de présentation de ces expériences est à dessein non chronologique mais didactique.

6.1.2.2 Temps de demi-vie avec « recoil shadow method » N. Imai et al PRL 92 (2004) 062501

Le temps de demi-vie des états 2+ des noyaux pairs–pairs est généralement beaucoup trop court pour être mesuré directement. La décroissance de cet état, s’il est situé au dessous du seuil d’émission de particule, s’effectue ici par gamma. L’astuce expérimentale consiste donc le plus souvent à observer non pas à quel moment ce gamma est émis mais où, lorsque le noyau émetteur est en mouvement, celui-ci est émis. Une bonne connaissance de la vitesse de la source émettrice permet de remonter au temps d’émission.

La technique utilisée ici, dénommée « recoil shadow method », consiste à masquer une partie de la distance de vol du noyau (ici le16

C), voir schémas en figure 6.3. Si aucun (ou du moins une quantité négligeable) gamma n’est observé alors le temps de demi-vie est bien plus court que le temps nécessaire au noyau pour atteindre une région en aval de la cible où l’émission gamma pourrait être observée (figure 6.3 à gauche). A contrario, si une grande proportion des gammas est observée le temps de demi-vie est bien supérieur au temps nécessaire (figure 6.3 à droite). Le raisonnement est fait ici pour un détecteur mais cela

Noyau diffusé Cible secondaire e Ecran Détecteur τ  e/v x Noyau diffusé Cible secondaire e Ecran Détecteur τ  e/v x

FIGURE6.3 – Illustration du principe pour la « recoil shadow method ». A gauche, le temps de

demi-vieτde l’état émettant un gamma est très court et la majorité des gamma sont émis dans

ou juste après la cible. Il sont donc masqués par l’écran et invisibles au détecteur. A droite,τest

long et si des gammas sont émis au début (en pointillés rouge) la majorité est émise après l’écran et donc visible par le détecteur.

est également vrai pour un multi-détecteur placé notamment à des distances différentes sur l’axe faisceau. Souvent plusieurs mesures intermédiaires avec des écrantages d’épaisseurs différentes sont nécessaires pour obtenir une mesure quantitative de la durée de vie. Cette méthode nécessite également de simuler le dispositif expérimental et de connaître l’énergie de l’état d’intérêt auparavant.

L’expérience décrite ici a nécessité une faisceau secondaire de16

C, produit avec une énergie cinétique de 34.6 MeV/nucléon, à partir d’un faisceau primaire de 18

O à 100 MeV/nucléon. La cible secondaire utilisée pour exciter l’isotope de carbone était du9

Be, afin de réduire la diffusion du faisceau incident. Les trajec-toires du faisceau entrant et des projectiles sortants de la cible étaient obtenues à l’aide de PPAC et le temps de référence donné par un plastique disposé avant la cible. Le multi-détecteur gamma était composé de deux couronnes R1 et R2, formées par 14 et 18 détecteurs NaI respectivement. L’identification des noyaux d’intérêt en sortie de cible était possible grâce à un hodoscope plastique placé

Chapitre 6. Isotopes de carbone riches en neutrons PPACc PPACa F3PL R1 R2 Lead slab Plastic scintillator hodoscope 10 cm 0.0 5.0 cm Z Lead Lead Target 16 C beam Beam tube NaI(Tl) detectors PPACb 86 cm 181 cm

Figure 3.3: A schematic view of the experimental setup

31

FIGURE6.4 – Schéma de l’expérience d’Imai et al., figure extraite de la thèse de N. Imai [95].

en aval. Un schéma de l’expérience est présenté en figure 6.4. Deux mesures indépendantes avec la cible à z=0 et z=1 cm furent réalisées. La décroissance du 2+1 a été clairement identifiée à partir du gamma de 1766 keV. La compa-raison du rapport des taux de comptage gamma pour les couronnes R1 et R2

avec des simulations GEANT 4 [3] permet de déduire le temps de demi-vie. Le graphique correspondant, extrait de l’article [96], est présenté sur la figure 6.5. Les deux mesures donnent, dans la limite des barres d’erreur, des valeurs similaires. La valeur finale adoptée dans ce travail est alors τ=77±14(stat) ±

19(syst)ps. A partir de l’équation (6.1) τ=77 ps donne un B(E2)de 0.63e2fm4 soit 0.26 unités de Weisskopf (W.u.). Cette dernière valeur est, comme le montre l’article, la valeur de probabilité de transition réduite la plus faible connue au moment de la publication de l’article (2004), autour d’un ordre de grandeur sur les noyaux magiques en proton (exemple pour l’16

O : 3.17 W u . Une manière de voir les choses est notamment de traduire cette valeur en terme de longueur de déformation Coulombienne βC=0.14, ce qui implique que la distribution de charge est très sphérique. Nous reviendrons sur cette remarque dans les articles suivants, lorsque nous comparons les déformations des distributions proton et neutron.