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LES PREMIERS ENGAGEMENTS

Si étudier la jeunesse d'un personnage est une des spécificités du genre biographique, elle est souvent difficile à appréhender en raison d'un déficit d'éléments scientifiquement confirmés sur cette période de sa vie, notamment quand ce personnage est antérieur à notre époque1. Il convient alors de rester prudent lorsqu'on s'attache à remonter aux racines et à l'enfance de la personne biographiée. Car cette recherche ne doit pas être entreprise dans la perspective de trouver l'origine de toutes les conditions et de tous les événements qui ont permis au général Lamarque de réussir ou qui l'ont prédestiné à devenir un chef de guerre et un député éloquent. Pour paraphraser Jacques Le Goff et son Saint-Louis, Lamarque ne va pas naturellement vers son destin de général-député mais « il se construit lui-même et construit son époque autant qu'il est construit par elle »2. Il faut donc ne pas écrire la biographie de Lamarque en pensant continuellement pour ses années de jeunesse, ce qui est advenu par la suite. Tout bon Gascon n'est pas né soldat comme le laissent entendre les différents biographes du général, aveuglés par l'épopée des Cadets de Gascogne, de Courtilz de Sandras à Alexandre Dumas3. Non, Lamarque s'est défini petit à petit « à travers une succession de choix inopinés »4. Le Jacobin de 1789 n'est pas le député de 1828. Le vainqueur de Fontarabie de 1794 n'est pas le pacificateur de la Vendée de 1815 car sa personnalité – comme celle de chacun d'entre nous – évolue avec le temps. Il convient alors de faire la

1 S. Englund, Napoléon, op. cit., pp. 25-26. 2 J. Le Goff, Saint-Louis, op. cit., p. 22.

3 G. Courtilz de Sandras, Mémoires de M. d'Artagnan, 1700 ; A. Dumas et sa trilogie : Les Trois Mousquetaires, 1844 ; Vingt ans après, 1845 ; Le vicomte de Bragelonne, 1847.

distinction entre ce qui relève de la conjecture sociale1 – lieu de naissance, cadre familial – et ce qui relève de son apport personnel2.

LES ORIGINES

Si l'historien ne doit pas tomber dans le piège de la démarche téléologique, il lui revient de percevoir comment l'environnement dans lequel s'est construit le jeune Lamarque peut montrer ce qu'il est, ce qu'il est advenu, sans pour autant émettre des conclusions définitives. Éclairer ce qu'ont été son enfance et son éducation permet de concevoir qu'un rejeton de la bourgeoisie landaise de robe ait pu devenir officier dans l'armée, grâce aux circonstances exceptionnelles que lui offre la Révolution. C'est également le moyen d'appréhender la somme de connaissances qu'il a petit à petit intégrée et qui a façonné et normé sa personnalité impétueuse.

Une famille de notables de la Chalosse

Quand Lamarque naît en 1770 à Saint-Sever, sa famille fait déjà partie des notables de la ville et de la sénéchaussée éponyme depuis au moins trois générations. Appartenant à la moyenne bourgeoisie, elle possède une maison à étage dans le bourg et plusieurs métairies dans les environs. Aussi loin que les sources puissent remonter, il semblerait que les Lamarque soient d'une implantation très ancienne dans le Sud des Landes appelé la Chalosse. Patronyme typiquement gascon, « marque » (ou marca,

marcha en langue d'oc, marche en français) désigne à l'origine une «limite », une « borne» avant de qualifier les quartiers excentrés de la commune puis un quartier quelconque et enfin une personne dont l'habitat se trouve à la frontière du village. Beaucoup plus répandue, la forme « Lamarque » se retrouve surtout dans l'Ouest gascon, notamment dans les Landes3, entraînant de nombreuses homonymies.

Le premier ancêtre connu est un certain Antoine de Lamarque, avocat à la cour, réputé avoir acquis une maison et quatre métairies en 1696, 1697 et 1706 à la famille de Batz4. Ses descendants sont devenus soit hommes de loi, soit hommes d'église. Mis à

1 J-C. Passeron, « Biographie, flux, itinéraires, trajectoires », Revue française de sociologie, 31-1, 1990, pp. 3-22.

2 S. Loriga, Le petit x. De la biographie à l'histoire, Seuil, Paris, 2010, p. 13.

3 P. Salles, Origines des noms du Sud-Ouest. Les noms propres, Cairn, Pau, 2012, p. 256.

4 A.D. Landes, 87 J. Titre de propriété. Achat de la maison de Captan à Saint-Sever par Antoine de Lamarque à Antoine de Batz, vicomte d'Aurice, expédition actes passés devant Me Destouet, notaire à

part le général Lamarque, aucun n'a eu de vocation militaire si ce n'est un Benoît Lamarque, ancien garde du corps du roi, devenu prêtre1. Ils se sont alliés également avec des familles distinguées des environs. Antoine a épousé une Jeanne de Laborde-Lassale, fille d'un lieutenant au régiment du Piémont appartenant à la petite noblesse d'épée. Son fils Bernard de Lamarque, avocat également, a épousé Marie-Thérèse de Lucat, fille du seigneur d'Artiguenave et dont l'ancêtre fut le premier conseiller du sénéchal de Saint-Sever, nouvellement installé par François Ier. Le père du général, procureur du roi, convole avec la fille d'un procureur de la ville. Sans être de la noblesse de robe2, les Lamarque font partie des familles les plus distinguées de la Chalosse. Ils sont aussi apparentés à toutes les familles importantes comme les Basquiat, les Dupin de Juncarot, les Méricamp, les Brethous-Lasserre ou les Lespès.

Hommes de loi, les Lamarque ont d'abord été des avocats. Pour le devenir, il fallait avoir obtenu une licence en droit civil ou canonique délivré par une faculté du royaume et être âgé d'au moins seize ans. Pour les Lamarque, il est probable qu'il s'agisse de Bordeaux. Après avoir prêté serment et s'être inscrit au barreau, il est nécessaire d'effectuer un stage de deux ans environ, porté à quatre ans en 1751. Cette période révolue, on peut enfin affronter la barre et conseiller ou défendre son client. Au grand criminel, l'avocat ne peut que déposer des mémoires dans l'intérêt des parties auprès du juge. Ce n'est qu'en matière civile que celui-ci peut plaider, c'est même son atout principal. Si l'avocat a gagné une certaine célébrité, il peut se retirer dans son cabinet et limiter son activité à la consultation3.

Avec Jean Lamarque, grand-oncle du général, une étape dans la hiérarchie judiciaire semble être franchie puisque celui-ci devient conseiller du roi et procureur du sénéchal de Saint-Sever, c'est-à-dire magistrat et officier d'une cour de justice. Celle de

Hagetmau, 1696 et 1697 ; Achat des métairies de Labouyrie, du Bousquet, de Trangonet et de Bidalot, A. de Laborde-Lassale, En Chalosse,op. cit., p. 142.

1 A.D. Landes. 1 MIEC 282/5. Acte de naissance de Benoît Lamarque en 1736, filleul du garde du corps du roi ; A.D. Landes. 2 M 121/38. Lamarque 723.

2 A. de Laborde-Lassale, En Chalosse, op. cit., pp. 142-143 et 154-156. En Chalosse, la particule n'était pas forcément synonyme de noblesse. Les gens étaient désignés par le nom de leur demeure tandis que les familles bourgeoises ne portaient pas de particule. Leur patronyme n'étant pas emprunté à une maison ou à une propriété suffisait pour rendre inutile toute addition. D'ailleurs, les signes nobiliaires consistaient dans les qualificatifs de messire, noble, écuyer, chevalier dans les actes publics, p. 131. Les Laborde-Lassale ont accédé à la noblesse après l'achat de la terre noble de Lassale. La famille Lamarque n'est pas recensée dans l'Armorial des Landes de Cauna, imprimerie J. Dupuy, Bordeaux, 1863-1869, 3 vol., relevant toutes les familles nobles des Landes.

3 J-L. Gazzaniga, « avocats », L. Bély, Dictionnaire de l'Ancien Régime, Quadrige / PUF, Paris, 2006, pp. 117-119 ; en 1789, le parlement de Bordeaux en comptait 159, celui de Rouen 178 tandis que celui de Paris en comprenait 607, H. Leuwers, L'invention du barreau français (1660-1830), éditions de l'EHESS, Paris, 2006, pp. 341-342.

Saint-Sever ressort du présidial de Dax au sein de la sénéchaussée des Lannes, créée en 1255. Elle se subdivise en trois sénéchaussées : une principale qui est Dax et deux secondaires dont les sièges sont Bayonne et Saint-Sever1. Mais pour se hisser à ce niveau, Jean Lamarque a dû acheter son office et obtenir du roi des lettres de provision moyennant certaines conditions : être titulaire d'une licence de droit, avoir atteint l'âge de vingt-cinq ans pour être conseiller et exercé pendant dix ans comme avocat pour devenir procureur. De part sa fonction, il représente seul le roi et parle en son nom tout en étant assisté par des avocats du roi. Le procureur est de fait le chef du parquet local et l'origine du ministère public2. Ces nouvelles fonctions confortent ainsi la position de la famille Lamarque parmi les notables et son ancrage dans l'élite de la société urbaine.

1 Ce sont des circonscriptions judiciaires pratiquement autonomes les unes des autres. Sous l'autorité théorique d'un sénéchal d'épée, les pouvoirs judiciaires sont exercés dans chaque siège par des magistrats professionnels. Ils sont dirigés par un lieutenant-général tandis que le pouvoir politique se trouve dans les mains de l'intendant résidant à Dax.

2 P. Payen, « gens du roi », L. Bély, op. cit, pp. 603-604 ; O. Chaline, « Parlements », ibid., pp. 960-961 ; S. Lerat, Landes et Chalosses, Cairn, Pau, réédition 2010, t. II, pp. 467-468.

Ayant la possibilité de transmettre sa charge de conseiller et de procureur au sein de sa famille, celle-ci échoie dès sa naissance à son neveu1, Pierre-Joseph Lamarque, père du général, traçant par avance sa future carrière. Preuve d'une notabilité accrue, on remarque sur l'acte de naissance de Pierre-Joseph le 4 mai 1733 que son père Bernard a enlevé la particule de son patronyme, « attribué aux fils de la plèbe », et est qualifié de « maître »2. A partir de 1734, Jean n'exerce plus son métier, n'étant plus mentionné qu'en tant qu' « avocat en parlement » ou « en la cour ». Le seul produit de ses terres suffit aux besoins de sa famille. Bourgeois ou hobereaux détenaient presque toutes les terres autour des bourgs, « à raison parfois de vingt métairies et plus entre les mêmes mains »3, mais souvent d'une dizaine d'hectares seulement. Les six métairies de Bernard Lamarque en Eyres et à Montgaillard sont constituées de vignes, de landes, de taillis, de châtaigneraies et produisent du maïs. Cette propriété foncière n'est pas seulement un placement mais un marqueur social dont l'origine n'est pas indifférente à ceux qui l'exercent puisque c'est une condition de prestige dans la société de l'Ancien Régime. En Chalosse au XVIIIe siècle, il n'est d'ailleurs pas nécessaire d'être bien riche « pour mener une existence de nabab ». Avec 5 ou 6 000 livres de rentes, une famille, même nombreuse, peut mener un train de maison honorable. Avec 25 ou 30 000 francs de revenus, le lieutenant-général de la sénéchaussée « M. de Barry, vicomte de Lannux et de Puyol passait à Saint-Sever pour Crésus en personne »4.

De l'union de Bernard Lamarque avec Marie-Thérèse de Lucat, huit enfants voient le jour : quatre garçons et deux filles (dont trois morts en bas âge). Baptiste (1734-1801) a semble-t-il quitté très jeune la France pour aller faire fortune aux Antilles. Il s'installe comme négociant à Sainte-Lucie, île longuement disputée entre la France et l'Angleterre. Il paraît être revenu définitivement en France après la prise de l'île par les Anglais en 1794. En cela, il perpétue une tradition d'émigration de la bourgeoisie et de l'aristocratie gasconne vers les Caraïbes privilégiant plutôt

Saint-1 A.N. V1 433. Provision de l'office de procureur, 4 mai 1733, cité par A. Brette, Recueil des documents relatifs à la convocation des états généraux de 1789, imprimerie nationale, Paris, 1894-1915, t. IV, p. 375.

2 A.D. Landes. 1 MIEC 282/5. Registre paroissial de Saint-Sever (1700-1740). Le changement ne s'est pas opéré rapidement dans les esprits car on retrouve la particule en 1734, 1735 et 1752 mais pas en 1736, 1738 et 1741, A.D. Landes. 1 MIEC 282/5 et 6. Registre paroissial de Saint-Sever (1740-1762). A. de Laborde-Lassale, En Chalosse, op. cit., p. 131.

3 A. Richard, « Le département des Landes au début du XIXe siècle », A.H.R.F., n°18, nov.-déc. 1926, p. 569.

Domingue5, même si certains, originaires de Mugron ou de Saint-Sever, se sont installés à la Martinique au XVIIIe siècle.

Jacques (1737-1809) a été promis très tôt au sacerdoce. Il reçoit la tonsure en 1758 et devient le directeur du séminaire du diocèse d'Aire (sur-Adour) de 1766 à 1768 puis du collège d'Aire. Chanoine et vicaire général de l'évêque Cahuzac de Caux, il est nommé supérieur du grand séminaire en 1790 et archidiacre de Chalosse. Il va jouer un rôle actif dans les Landes sous la Révolution contre la constitution civile du clergé1. Pierre (1740-1803) dit « Pétré » devient également ecclésiastique. Il est tonsuré et reçoit les quatre ordres mineurs en 17602. Religieux dans l'ordre des dominicains, on le retrouve à la Révolution comme prieur du couvent des jacobins de Saint-Sever, entrant en conflit avec son frère Jacques. Marguerite (1741-?) a épousé en 1753 Jean-Pierre Bréthous-Lasserre, appartenant à la haute bourgeoisie de la Chalosse. Son fils Bernard Bréthous-Lasserre (1754-1820), avocat puis lieutenant assesseur au sénéchal de Saint-Sever, succède à son oncle Pierre-Joseph comme commissaire du roi en 1791. Maire de la ville (1792-1793), il manque d'être guillotiné en 1794 pour suspicion de fédéralisme. Il sera par la suite président du tribunal de la ville et député des Landes lors des Cent-Jours3.

L'aîné Pierre-Joseph (1733-1802), avocat, succède à son oncle dans sa charge de conseiller du roi et procureur du sénéchal de Saint-Sever, ce qui fait de lui l'un des plus importants officiers de judicature de la sénéchaussée. Du reste à trente-quatre ans, il convient à Pierre-Joseph de trouver une épouse pour perpétuer son nom et sa position puisque deux de ses frères sont ecclésiastiques (Jacques et Pierre) et un autre (Baptiste), avide d'aventures, dont la famille est sans nouvelle. Le revenu de ses métairies ajouté aux vingt-cinq à trente mille livres de rentes que lui rapportent sa charge de procureur4

lui permet d'espérer un bon parti. Son choix s'arrête sur Ursule Dufau, vingt ans, fille cadette de Mathieu Dufau, également procureur au sénéchal de Saint-Sever. Le mariage

5 A.D. Landes. 87 J 4. Lettre de Baptiste Lamarque à son frère P-J. Lamarque, Bordeaux le 2 octobre 1790. « Je ne connaissais presque plus la famille quand j'ai tenté de revenir en France sans avoir des arrangements qui ne me nuisent pas ». Pour l'émigration gasconne aux Antilles, voir J. de Cauna,

L'Eldorado des Aquitains. Gascons, Basques et Béarnais aux îles d'Amérique (XVIIe-XVIIIe siècle), Atlantica, Biarritz, 1998.

1 J-O. Boudon, Les élites religieuses à l'époque de Napoléon. Dictionnaire des évêques et vicaires généraux du Premier Empire, Nouveau Monde Éditions, Paris, 2002, pp. 182-183 ; Abbé Desmazures,

Éloge historique de l'abbé Lamarque, Le Clère, Paris, 1809, pp. 1-3. Cf. Supra.

2 A.N. 566 AP/1. Dossier 3. Tonsure et ordres mineurs de Pierre Lamarque, 20 décembre 1760. 3 A. de Laborde-Lassale, En Chalosse, op. cit., p. 146.

4 A.N. 566 AP/1. Dossier 1. Lettre de P-J. Lamarque à sa femme, Paris le 8 avril 1791. Léon Dufour parle des Lamarque comme d'une « famille fortunée », L. Dufour, Souvenirs d'un savant français, op. cit., p. 279.

est célébré à Montaut le 12 décembre 1767 en la chapelle familiale du lieutenant-général de la sénéchaussée, Pierre de Neurisse. Les signatures des personnes présentes sur le registre des mariages sont sans surprise à forte connotation judiciaire : Mora, lieutenant criminel, Dussaut, avocat en la cour, Larrieu, avocat du roi, le père de la mariée Mathieu Dufau et son épouse. La famille du marié – ses parents étant décédés – est représentée par son frère Jacques et son oncle Benoît, ancien garde du corps du roi1. Cette union renforce un peu plus l'endogamie sociale de la famille Lamarque et son ancrage dans la moyenne bourgeoisie.

Mariage d'intérêts, il semble toutefois que le nouveau couple se soit bien entendu. Les nombreuses lettres écrites entre les deux conjoints démontrent une complicité et un attachement certain l'un pour l'autre. Profondément pieuse et attachée aux soins de son ménage, Ursule reçut l'enseignement qu'offrait l’Église aux filles de la bourgeoisie du XVIIIe siècle, formées essentiellement à la piété, à quelques arts d'agréments et aux bonnes mœurs. Le couvent (ou l'école) se limitait en effet à leur donner des notions élémentaires de lecture, d'écriture et de calcul. C'est ainsi qu'Ursule écrit ses lettres dans un français proche du phonétique. D'un caractère ferme et possédant tout le sang-froid que requiert sa charge de procureur, Pierre-Joseph a un «goût pour la solitude » assez prononcé. Il passerait des heures dans son cabinet de travail si sa femme ne l'engageait à en sortir2. Derrière le masque de l'homme rigide et pieux – « sa dévotion n'était que l'évangile mis en action » selon son fils –, se cache un homme de tact, délicat, cultivé, rieur et aimant les plaisirs de la table3.

Physiocrate résolu, il supervise les récoltes de ses métairies et notamment les vendanges, car les reliefs des coteaux calcaires de la Chalosse produisent un vin apprécié au XVIIIe siècle. Les revenus annuels de son patrimoine, estimés à 2 000 francs, lui permettent d'accroître son capital foncier et immobilier pour une valeur totale de 50 000 francs4. Quand il liquidera sa charge de procureur du roi en 1791, il estimera, sans regret, le manque à gagner de l'ordre de 25 à 30 000 livres5. Pierre-Joseph perpétue ainsi son rang et contribue à accentuer l'ascension sociale de sa famille dans l'opulente Chalosse.

1 A.D. Landes. 4E 191/1. Registre paroissial de Montaut (1737-1779), village voisin de Saint-Sever. 2 A.N. 566 AP/1. Dossier 1. Lettre d'Ursule Dufau-Lamarque à son mari, Saint-Sever le 8 juillet 1791. 3 A.N. 566 AP/1. Dossier 1. Lettres de P-J. Lamarque à sa femme, Paris les 4 janvier et 23 septembre

1791 ; M. Lamarque, Mémoires, op. cit. t. II, lettre XI à Mlle Sauvan, Amsterdam le 26 octobre 1816. 4 A.D. Landes. 3Q 1010. Inventaire après décès de P-J. Lamarque du 15 nivôse an XI (5 janvier 1803). 5 A.N. 566 AP/1. Dossier 1. Lettres de P-J. Lamarque à sa femme, Paris le 8 avril 1791.

Éducation et formation : le désir insatiable de s'instruire

Les naissances du futur général le 22 juillet 1770 et de sa sœur Désirée le 15 février 1779 à Saint-Sever viennent agrémenter la vie de couple des époux Lamarque dans leur belle maison de la rue Neuve (aujourd'hui rue du Général-Lamarque), où se trouvent plusieurs hôtels particuliers, non loin de la grande place du Tour du Sol. Quant au prénom du général, il a connu de nombreux avatars dès son vivant, erreurs reprises par de nombreux auteurs et historiens jusqu'à nos jours. Qu'en est-il alors ? Maximilien ou Maximien – voire plus rarement Maximin ? Essayons de trancher de façon définitive cette question. Le registre paroissial de Saint-Sever mentionne que « Jean Maximien est nay (sic) le 22 [juillet] et atté (sic) baptisé le vingt-trois juillet 1770 ». Pierre-Joseph donne à son fils le prénom de son oncle Jean, « conseiller procureur du roi honoraire », à qui il doit sa charge et choisit pour marraine, la sœur de son épouse, Cécile Méricamp Dufau, mariée à une famille d'hommes de loi et de notables de Saint-Sever. Tous signent au bas de l'acte de naissance1. La coutume voulait que le nouveau-né prenne le(s) prénom(s) de son parrain. Or ce grand-oncle et parrain ne mentionne que « Jean »2, prénom très répandu dans la région. Aucun des ascendants et parents ne portent ce prénom singulier de « Maximien », renvoyant à l'Antiquité romaine dont le XVIIIe siècle est friand.

Un Maximien Hercule, co-empereur romain entre 285 et 306, a fait partie de la tétrarchie organisée par Dioclétien. Il inspira en 1662 à Thomas Corneille, auteur comme son frère Pierre, une tragédie en cinq actes et en vers intitulée Maximien3. Le thème est repris en 1738 par Nivelle de La Chaussée, créateur de la comédie larmoyante, dans une tragédie en cinq actes et en vers, nommée également Maximien, mais différente de celle de Thomas Corneille. Elle fut présentée vingt-trois fois au Théâtre de la rue des Fossés Saint-Germain avec un grand succès et rejouée plusieurs années après avec la même fortune4. Peut-être faut-il voir dans ce succès théâtral

1 A.D. Landes. 4E 282/3. Registre paroissial de Saint-Sever (1763-1789).

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