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Première mise à l’épreuve auprès d’une cohorte d’élèves et d’enseignants

Chapitre 5 – Epreuves d’évaluation des compétences des élèves

3. Première mise à l’épreuve auprès d’une cohorte d’élèves et d’enseignants

Notre étude s’inscrit dans le cadre d’une étude écologique. En effet, bien que cherchant à identifier des liens entre les pratiques d’enseignement de l’écriture et les compétences de scripteurs développés par les élèves des groupes observés et suivis, nous n’avons pas proposé d’ingénierie didactique aux enseignants qui ont participé à notre étude. Les démarches didactiques mises en œuvre par les différents enseignants tout au long de l’étude longitudinale sont celles qu’ils déclarent pratiquer ordinairement. La description de ces pratiques d’enseignement de l’écriture, dont certaines s’inscrivent dans le cadre des activités d’écriture approchée, a pour but de rechercher celles qui semblent le plus favorables au développement des compétences de scripteurs et des compétences métalinguistiques des élèves dans les premières années d’apprentissage de l’écrit. Ainsi, nous ne désignerons pas de groupe contrôle vs groupe expérimental mais parlerons du groupe A vs groupe B.

De même, la situation écologique ne nous a pas permis de maitriser les profils des élèves participants. Les évaluations auxquelles ils ont été soumis à partir du milieu de la GS permettent toutefois de mesurer leurs progrès au fil de l’étude, de façon inter- et intra- individuelle et alimenteront l’étude comparative.

L’étude s’est déroulée sur trois années scolaires, du deuxième trimestre de la GS15

au troisième trimestre de CE1, soit de janvier 2012 à juin 2014. Les élèves, de 5 ans en début d’étude à 7/8 ans en fin d’étude, appartiennent à deux groupes scolaires (école maternelle et école élémentaire) du même quartier de la ville de Carcassonne (Aude, France). Ces deux cohortes d’élèves ont été suivies de façon longitudinale.

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La grande section correspond, dans le système scolaire français, à la troisième année de l’école maternelle. Elle accueille des enfants de 5ans et, à ce titre, n’entre pas dans le cadre de la scolarité obligatoire mais on constate que la grande majorité des enfants de cet âge sont régulièrement scolarisés en maternelle.

162 Comme cela se pratique dans les recherches écologiques se déroulant en milieu scolaire, les élèves n’ont pas été sélectionnés par tirage au sort mais appartiennent à des groupes tels qu’existants dans l’école. Notre objectif étant de comparer les effets de deux démarches contrastées d’enseignement/apprentissage de l’écriture, deux classes ont été sélectionnées :

- La classe A, pratique régulièrement des séances d’écriture approchée, du deuxième trimestre de GS à la fin du CE1, selon les modalités que nous décrirons plus bas, - La classe B, bénéficie des apprentissages litéraciques généralement en usage dans

ces trois niveaux de classe, hormis les écritures approchées.

Ces écoles constituent, avec le collège de secteur auquel elles sont rattachées, un Réseau de Réussite Scolaire (désormais RRS) car elles sont situées sur territoire accueillant un public qui rencontre des difficultés économiques et sociales importantes. A ce titre, elles bénéficient des mesures d’éducation prioritaire visant à réduire les inégalités sociales et territoriales, notamment d’un effectif plafonné à 25 élèves par classe et de moyens d’encadrement et de fonctionnement supplémentaires.

Le nombre de parents en recherche d’emploi est élevé parmi les parents d’élèves de ces deux groupes. De plus, les deux écoles accueillent les enfants de familles hébergées temporairement dans le centre d’accueil de demandeurs d’asile de Carcassonne. Ces spécificités territoriales nous semblent importantes à préciser car elles expliquent en partie les mouvements importants d’élèves que nous avons pu constater au fil de ces trois années scolaires. Cela constitue une variable non maitrisée de l’étude longitudinale et permet de comprendre la fluctuation des effectifs dans les deux classes suivies que nous présentons à présent plus en détail.

3.1. Elèves participants 3.1.1 Niveau GS

La classe A est constituée de 22 élèves et la classe B de 23 élèves. Nous disposons des informations personnelles relatives à chaque élève : genre, date de naissance, spécificité médicale nécessitant d’être communiquée à l’école car susceptible d’affectée le déroulement des apprentissages (problèmes de vue, d’audition, de prononciation nécessitant une rééducation orthophonique-RO). Les deux écoles accueillant une population d’origine maghrébine importante, nous avons également souhaité connaitre la

163 langue parlée à la maison et dans les cas de bilinguisme, ceux où le français était la langue première. Le tableau ci-dessous propose une synthèse de ces éléments.

Classe Filles/garçons Age moyen au test 1 Français langue 1ère Français langue 2nde Difficultés connues A 22 élèves 8 filles 14 garçons 5 ans 10 mois 14 8 2 problèmes de vue B 23 élèves 12 filles 11 garçons 5 ans 9 mois 21 2 1 problème de vue 1 problème vue + audition 3 problèmes nécessitant une

rééducation orthophonique

Tableau 6 - 15 – Synthèse des informations personnelles concernant les élèves participant à l’évaluation initiale

45 élèves ont ainsi passé l’évaluation initiale en février/mars 2012.

3.1.2 Niveau CP

L’effectif des deux classes a été affecté lors du passage en CP pour plusieurs raisons : - Certains élèves ont déménagé, d’autres sont arrivés ;

- Certains élèves ont été inscrits dans d’autres écoles que leur école de secteur, les parents souhaitant qu’ils poursuivent leur scolarité dans des écoles hors éducation prioritaire ;

- Le nombre d’élèves inscrits en CP dans l’école A a nécessité la constitution de deux classes accueillant des élèves de ce niveau : un CP à niveau unique et une classe à double niveau de CP/CE1. Malgré nos demandes pressantes et par nécessité de service, certains élèves du groupe expérimental constitué en GS ont ainsi été affectés dans la classe de CP/CE1 qui ne participait pas à l’expérimentation.

La classe A et la classe B du niveau CP sont donc ainsi composées :

Niveau CP Classe A Classe B

Effectif 23 21

Dont élèves issus du groupe initial 12 10

Tableau 6- 16 – Répartition des élèves participant au niveau CP

Les 44 élèves ont été soumis aux évaluations qui se sont déroulées durant l’année de CP et ont, de fait bénéficié, du même enseignement dans chacun des groupes.

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3.1.3 Niveau CE1

L’effectif des deux classes s’est une fois de plus trouvé affecté par les changements déjà évoqués pour la constitution des classes de CP. La structure des classes est cependant restée la même dans chaque école, soit une classe de CE1 à niveau simple et une classe de CP/CE1 dans l’école du groupe A et une classe de CE1 à niveau simple dans l’école du groupe B. A cela s’est ajouté, dans l’école du groupe A l’arrivée d’un enseignant débutant à qui l’on a confié la classe de CE1 à niveau unique. Cet enseignant arrivait en remplacement de l’enseignant de CE1 qui devait initialement participer à l’étude mais qui a demandé son changement d’école pour des raisons extérieures à la recherche en cours. L’enseignement nouvellement nommé n’a pas souhaité participé à la recherche. Malgré notre demande insistante de constituer un groupe de CE1 composé des 12 élèves issus du groupe initial, seul 8 élèves ont été affectés dans cette classe. La répartition des élèves dans chacune des classes se fait donc ainsi :

Niveau CE1 Classe A Classe B

Effectif 10 CP/8 CE1 19

Dont élèves issus du groupe initial 8 CE1 7

Tableau 6 - 17 – Répartition des élèves participant au niveau CE1

Nous avons pu associer les 4 élèves de CE1 de la classe à niveau unique issus du groupe A à la première évaluation de ce niveau. 31 élèves ont ainsi participé à l’évaluation de début de CE1. Seuls les élèves issus des groupes initiaux (n 15) ont participé aux évaluations de milieu et de fin de CE1.

Nous avons là une illustration de la difficulté à mener une étude longitudinale, entre impondérables et manque de bonne volonté de certains partenaires. Si nous constatons la difficulté à maitriser la variable liée à l’effectif du groupe, nous avons toujours veillé à maintenir une grande rigueur dans la collecte des données afin de nous assurer de la fiabilité des résultats. Nous disposons ainsi d’éléments suffisamment conséquents pour mener des analyses à la fois quantitative et qualitative sur les résultats obtenus pas les 15 élèves (8 du groupe A et 7 du groupe B) qui ont participé à la recherche de la GS à la fin du CE1.

L’étude comparative que nous présentons dans la partie 3 s’appuie sur les données collectées. Elle sera menée à deux niveaux :

165 i) d’une part, une analyse comparative des résultats globaux obtenus par les élèves

appartenant aux groupes A (8 élèves) et B (7 élèves) ;

ii) d’autre part, une analyse des résultats individuels des élèves, de la grande section à la fin du CE1, qui pourra prendre la forme d’une étude de cas croisée entre les résultats d’un élève du groupe A apparié à un élève du groupe B de même profil.

3.2. Enseignants participants

Six enseignants et un coordinateur du RRS ont participé à cette étude. Tous sont expérimentés et pratiquent depuis plusieurs années dans le niveau de classe visé.

3.2.1 Niveau GS

L’enseignante de GS de la classe A est en fin de carrière. Elle a enseigné principalement en maternelle, à différents niveaux. Elle est en charge de la classe de GS depuis plusieurs années dans cette école.

L’enseignante de GS de la classe B a une quinzaine d’années d’expérience, principalement en maternelle. Au cours des quatre dernières années scolaires, elle a eu des groupes d’élèves de grande section, en niveau unique ou mélangés à des élèves de petite section (première année de maternelle en France).

Les deux enseignantes sont très investies dans leur travail et portent une attention particulière à la découverte de l’écrit par leurs jeunes élèves. Comme cela est fréquent en maternelle, elles mettent en place un fonctionnement par ateliers dans lesquels les élèves « tournent », chaque élève ayant pratiqué une fois tous les ateliers proposés au cours d’une semaine. C’est dans ce cadre que les deux enseignantes mettent en place un atelier d’écriture hebdomadaire à partir du deuxième trimestre de GS : l’enseignante de la classe A mène une séance d’écriture approchée avec un groupe différent chaque jour ; l’enseignante du groupe B propose un atelier autonome d’écriture au cours duquel les élèves peuvent écrire librement, sans retour de l’enseignant sur les productions autre que la forme normée lorsqu’ils le demandent.

3.2.2 Niveau CP

L’enseignante de CP de la classe A a dix ans d’ancienneté, dont cinq années en CP. Elle a toujours enseigné en cycle 2. Depuis deux ans, elle mène deux fois par semaines des

166 séances d’écriture approchée avec ses élèves de CP. Elle utilise le matériel pédagogique de lecture « Chut… je lis » et le fichier d’entrainement qui l’accompagne16

.

L’enseignante de CP de la classe B a douze ans d’ancienneté, dont quatre années en CP. Elle a également été deux années enseignante auprès des enfants nouvellement arrivés en France (ENAF anciennement CLIN) et a enseigné une année aux Etats Unis. Cette enseignante dispose aussi du matériel pédagogique de lecture « Chut… je lis » mais l’utilise occasionnellement et préfère travailler à partir des textes produits par les élèves, individuellement ou collectivement. Elle propose à ses élèves une à deux séances de production écrite par semaine au premier trimestre, deux séances hebdomadaires à partir du second trimestre.

3.2.3 Niveau CE1

L’enseignant de CP/CE1 de la classe A est en fin de carrière. Il a enseigné à tous les niveaux scolaires, souvent dans des cours à multiples niveaux, dont une quinzaine d’années en CP et en CE1. Arrivé dans l’école du groupe A en septembre de l’année 2013/2014, l’enseignant n’a pas souhaité mettre en place lui-même les séances d’écriture approchée car il ne connaissait pas cette démarche d’enseignement/apprentissage. C’est donc l’enseignant ressource, chargé de la coordination du RRS qui a mené les deux séances hebdomadaires d’écriture approchée avec les 8 élèves de CE1 de la classe. C’est un enseignant expérimenté (16 ans d’ancienneté) qui pratique régulièrement ce type d’activité. Coordinateur du RRS depuis plusieurs années, il a acquis une expérience solide du soutien aux élèves en difficulté.

L’enseignante de CE1 du groupe B exerce depuis douze ans, principalement en CE1 et en CE2. Elle mène une à deux séances d’écriture négociée chaque semaine à partir d’une phrase dictée aux élèves. Partie en congé maternité aux vacances de février 2014, elle a été remplacée par plusieurs enseignants qui n’ont pas poursuivi cette pratique.

Si l’on récapitule les pratiques d’écriture déclarées par ces différents enseignants, on constate qu’ils mènent chacun des séances d’écriture plus ou moins encadrées, une à deux fois par semaine, en proposant des tâches allant de l’écriture totalement autonome à la phrase dictée. L’analyse des pratiques effectives permettra de mieux cerner la démarche d’enseignement de l’écriture mise en œuvre au CP.

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3.3 Données collectées

3.3.1 Données élèves collectées

Etant données les fluctuations de l’effectif, les élèves participant aux différentes étapes de l’évaluation n’ont pas été les mêmes. Le tableau ci-dessous résume les élèves ayant participé aux différentes épreuves d’évaluations en écriture et en lecture et à l’entretien métagraphique. GS 2011/2012 CP 2012/2013 CE1 2013/2014 T1 mars T2 Sept. T3 Janv. T4 Juin T5 Sept. T6 Janv. T7 Juin EVIP 45 Tâche 1 (phonèmes) 45 44 47 21 n31 8 15 Tâche 2 (syllabes) 45 44 47 29 n31 8 15 Tâche 3 (pseudo-mots) 45 44 47 30 n29 8 15 Tâche 4 (phrase) 45 44 22 12 n19 15 15 Tâche 4 (entretien) 15 15 15 15 n15 15 15 Batélèm 22 22 22 n15 15 15 Fluence 15 15

Tableau 6-18 – Synthèses des élèves ayant participé aux épreuves d’évaluation d’écriture/ entretien métagraphique/lecture au fil de l’étude

Le suivi longitudinal portera sur les 15 élèves qui ont participé à toutes les évaluations de la recherche, de la GS à la fin du CE1. Pour faciliter la lecture des analyses de données conduites dans les chapitres 7, 8 et 9 de la partie 3, nous avons anonymé le nom des 15 élèves. Les prénoms des élèves du groupe A commencent toujours par un A et ceux du groupe B toujours par un B. Chaque prénom est suivi de la lettre du groupe auquel il appartient. Le tableau ci-dessous présente la répartition des élèves dans chacun des groupes.

168 Groupe A Groupe B Anaïs-A Alexandre-A Alina-A Abel-A Adrien-A Anatole-A Assia-A Akim-A Brahim-B Betty-B Bryan-B Bianca-B Benjamin-B Brice-B Belinda-B

Tableau 6 – 19 – Répartition des 15 élèves suivis de façon longitudinale dans les groupes A et B

Le tableau 6.20 présente une synthèse des données collectées tout au long de l’étude aux épreuves d’évaluation d’écriture et de lecture pour les 15 élèves de notre échantillon.

Période Ecriture Décodage Vitesse

de lecture Fluence De lecture GS Mars X CP Septembre X X X Janvier X X X Juin X X X CE1 Septembre X X X Janvier X X X X Juin X X X X

Tableau 6-20 – Synthèse des données collectées aux différents temps d’évaluation pour les 15 élèves de notre échantillon

3.3.2 Données enseignants collectées

Le protocole prévoyait l’enregistrement de 3 séances d’écriture dans chaque classe, à trois moments de l’année de CP et de CE1. Etant donnés les changements d’enseignants survenus au niveau de l’année de CE1, troisième année de l’étude, cela n’a pas été possible.

Nous avons donc centré notre observation des pratiques enseignantes sur le niveau CP qui constitue la première année d’apprentissage systématique de la lecture-écriture. Nous disposons de six séances de classe vidéoscopées, d’une durée d’une heure chacune environ, enregistrées à trois moments de l’année scolaire : la classe A a été filmée en octobre, avril et début juillet, et la classe B en novembre, février et fin juin de l’année de CP. Afin de garantir la visée écologique de l’étude, nous avons laissé aux enseignantes le choix des tâches et du déroulement des séances d’écriture filmées. Malgré un décalage de quelques semaines, les séances enregistrées restent représentatives des séances d’enseignement de l’écriture menées habituellement dans chaque classe.

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Partie 3 – Résultats des élèves des deux groupes aux épreuves