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PreJerencing et performance des marchés

concurrence entre teneurs de marché

3.3.2 PreJerencing et performance des marchés

Dans cette section, nous analysons l'impact du preferencing sur les fourchettes de prix moyennes et sur les profits espérés par les teneurs de marché.

Fourchette de prix

Sur un marché centralisé àdeux teneurs de marché, la Proposition 6 montre que la meilleure offre, notée g/, est donnée par l'expression suivante: g/ =max

(ar,l,a~,2).

Etu- dions l'impact du preferencing sur la demi-fourchette de prix ("half spread") qui s'écrit:

{J.c - IL.

Corollaire 3 : En moyenne, le meüleur prix de vente augmente avec la taille du flux

s'établissant sur un marché centralisé autorisant le preferencing est plus élevé que celui espéré sur un marché n'autorisant pas cette pratique: E Üt)

>

E

(QNP),

àflux d'ordres total (Q

+

K,) donné.

Plus le volume des ordres préférentiels d'achat est important, plus le meilleur prix de vente se décaieàla hausse. On en déduit, par symétrie, que le meilleur prix d'achat baisse avec le volume des ordres préférentiels de vente. Les accords de préférence élargissent les fourchettes de prix, ce qui conduit àdétériorer les coûts d'exécutions moyens supportés par les investisseurs extérieurs. Ce résultat offre une preuve formelle de l'intuition donnée par Huang et Stoll (1996), qui soutiennent que les accords de préférence sont, en grande partie, responsables des coüts de transaction plus élevés observés sur le Nasdaq par rapport àceux du NYSE14. Les résultats empiriques de Chung et Zao (2002) sur le lien entre preferencing

et fourchette de prix mentionné en introduction semblent également valider le Corollaire 3.

Profits espérés des teneurs de marché

Afin de gagner quelques intuitions, on décompose l'impact du preferencing sur les profits espérés des teneurs de marché en trois effets distincts: (i) l'effet 'prix', (ii) l'effet 'chance' et (iii) l'effet 'volume'. L'effet prix est directement lié au Corollaire 3: les accords de préférence augmentent le surplus unitaire espéré par les teneurs de marché puisqu'ils élargissent les fourchettes de prix moyennes. Ensuite, le preferencing accroît les chances d'exécution des ordres publics pour le teneur de marché Dl et diminue celles du teneur de marché privilégié D2 (effet chance). Cependant, comme le teneur de marché Dl n'est pas

en mesure de concurrencer le flux d'ordres préférentiels de D2, il subit une perte en volume

potentiel par rapport au cas concurrentiel (effet volume). Par conséquent, le preferencing a un impact a priori ambigu àla fois sur les profits de D2 et de Dl.

Corollaire 4 :(a) Le profit espéré du teneur de marché privilégié est toujours plus élevé

lorsqu'il reçoit des ordres préférentiels à exécuter.

14Les membres de la bourse de New York (NYSE) ne peuvent pas bénéficier directement d'accords de préférence (àla différence des bourses régionales comme celle de Boston ou celle de Cincinnatti).

(b) si (i) Q ~ (lu - Id) /3 ou si (ii) Q < (lu - Id) /3 et K

>

!S. (où!S. est une constante définie en annexes), alors le teneur de marché non privilégié espère des profits plus élevés sur un marché autorisant le preferencing par mpport à ceux espérés sur un marché ne l'autorisant pas : E

(IID

>

E

(I1fP) .

Volume des ordres préférentiels 1(, M/.Q)

Le profit de D, est en Le profit de 01 est, en moyenne, plus moyenne plus élelé si le é1e1oési le preferenclng est autorl8é.

preferenclng n'est pas autorisé.

Vohune de fordre public

FIGURE 3.3 :Profits espérés par le teneur de marché non privilégié sur un marché centralisé : (i) autorisant lepreferencing j (ii) ne l'autorisant pas.

On note que, dans ce cas, l'effet volume et l'effet prix dominent toujours l'effet chance pour D2• Sur un marché transparent à deux teneurs de marché, le teneur de marché D2

ne fait face à aucune perte liée au preferencing puisque, dans le cas où il ne cote pas la meilleure offre, celle-ci est juste inférieure au second plus faible prix de réserve, c'est-à-dire, son prix-seuil.

Le teneur de marché Dl est privé de l'accès potentiel au flux d'ordres préférentiels. Mais, étant donné qu'il bénéficie de l'élargissement des fouchettes de prix (effet prix) et de sa plus grande chance d'exécuter les ordres publics à l'équilibre (effet chance), son profit espéré peut être plus élevé sur un marché autorisant les accords de préférence dont il ne bénéficie pas directement.

En résumé, le preferencing affecte significativement les fourchettes de prix et les profits des teneurs de marché, y compris ceux des teneurs de marché ne reçevant pas d'ordres préférentiels. Ces résultats théoriques viennent corroborer les découvertes expérimentales de Bloomfield et O'Hara (1998). Sur un marché expérimental à deux teneurs de marché,

ces auteurs trouvent que plus le flux d'ordres préférentiels est large, plus les fourchettes de prix s'élargissent et plus les teneurs de marché s'enrichissent au détriment des investisseurs extérieurs. Mais les auteurs trouvent également que ces effets préjudiciables à la qualité du marché sont évités s'il existe plus d'un teneur de marché non privilégié. Nous allons donc étendre le cadre de notre étude àN

>

3 teneurs de marché.

3.3.3

Extension

Nous supposons désormais que la liquidité est fournie par N teneurs de marché, dont M ont contracté des accords de préférence avec des courtiers, où M

<

N. Plus précisément,

chacun des M teneurs de marché privilégiés reçoit un flux d'ordres captifs de Ki titres à exécuter, où Ki E [0,+oo[ et i E [1,..., M]. Après avoir établi les stratégies d'équilibre suivies par les teneurs de marché, nous analysons la fourchette des meilleurs prix dans le cas d'un. marché à N = 3 teneurs de marché, dont deux ne reçoivent aucun ordre préférentiel. Nous terminons cette section sur une étude des implications empiriques de notre modèle.

D'après le Lemme 5, le teneur de marché ayant des accords de préférence n'affiche aucun prix de vente inférieur àson prix-seuil, a~,i'Les teneurs de marché ne bénéficiant pas de tels accords sont caractérisés par un prix de réserve 'standard' [Ho et Stoil (1983)], i.e. ar,i = p,+p(J'~/2 (Q - 2Ii), qui est simplement égal au prix-seuil d'un teneur de marché privilégié dont le flux d'ordres préférentiels est nul, puisque ar,i = a~,i si Ki =0 pour tout iE{M

+

1, ... , N}. Afin de faciliter l'exposition des résultats, nous supposons que le prix de réserve de tout teneur de marché Di s'écrit a~i, (avecKi > 0 pour i= 1, ..., M et Ki = 0 pour i= M

+

1, ... ,N).

Proposition 7 : Sur un marché centralisé de N teneurs de marché, dont M reçoivent des

ordres préférentiels, le teneur de marché avec le prix de réserve le plus faible

r(.

min a~

i) ),

lE[l;N) ,

noté DT' cote le prix de vente le plus concurrentiel et exécute l'ordre public. Al' équilibre, ce meilleur vendeur cote un prix exactement inférieur au second meilleur vendeur et les

(N - 1) autres concurrents cotent leur prix de réserve :

O/r= min ait. - ê iE[ljN)\{T} r,'

~ = a~,i pour iE

[1; N] \

{T}

ê est une constante strictement positive mais arbitrairement infinitésimale.

On remarque que le résultat du jeu de concurrence dépend du classement des prix de réserve des teneurs de marché

(a~,i)

iEN' et donc, du classement des positions effectives de

chaque opérateur: (Ii - Ki)iEN' En conséquence, comme dans le cas N

=

2, le teneur de marché initialement le plus long n'est pas nécessairement le meilleur vendeur. Le meilleur vendeur est, en fait, celui en position effective la plus longue (IT - KT)= ~8ff(Ii - Ki).

Le meilleur prix de vente sur un marché à trois teneurs de marché

Nous supposons désormais que le nombre de teneurs de marché est de N = 3. Le teneur de marché D2 reçoit des ordres préférentiels (K2

>

0), à la différence de ses deux

concurrents Dl et D3 (K.I

=

K.3

=

0).

Corollaire 5 : Soit un marché à deux teneurs de marché dont un seul des deux est privi- légié. L'entrée d'un troisième teneur de marché non privilégié provoque une réduction des fourchettés de prix, qui demeurent, toutefois plus larges que dans le cas où le preferencing

n'est pas autorisé.

L'entrée d'un troisième teneur de marché non privilégié restaure les incitations du teneur de marché Dl à coter des prix de vente aggressifs pour exécuter le flux des ordres publics, ce qui contribue àbaisser le meilleur prix de vente moyen du marché. Symétri- quement, l'entrée d'un troisième teneur de marché en concurrence sur un ordre public de vente restaurerait également la compétitivité du meilleur prix d'achat. En résumé, accroître la concurrence entre teneurs de marché non privilégiés permet de réduire les fourchettes de prix moyennes. Ce résultat est conforme aux résultats expérimentaux de Bloomfield et O'Hara (1998) décrits ci-dessus. Le Corollaire 5 corrobore également les in- tuitions de Kandel et Marx (1997), qui suggèrent que les accords de préférence n'auraient

aucun impact sur les fourchettes de marché si ces accords demeuraient négligeables. La Figure 3.4 illustre l'effet concurrentiel de l'entrée d'un troisième teneur de marché non privilégié sur le niveau de la meilleure offre espérée.

1-

N-2 dont 1 teneur de marché non privl~ --- N=3 dont 2 teneurs de marché non privl 102 101 100 99

--- ---

--- o 5000 1ססoo 15000 20000 25000 30000 Volume dei ordr88 préférentielsK

FIGURE 3.4: Niveau du meilleur prix de vente sur un marché centraliséà (i)N=2 teneurs

de marché ou (il)N =3 teneurs de marché. Un seul teneur de marché est privilégié dans les deux situations.

Implications testables

La Proposition 6 et la Proposition 7 prédisent qu'en cas d'existence d'accords de préférence, alors ce n'est plus nécessairement le teneur de marché initialement le plus long qui cote la meilleure offre. Ce résultat invalide partiellement la prédiction empirique du modèle de Ho et Stoll (1983). Le but de cette section est de proposer un lien test able entre cotations, positions des teneurs de marché et flux d'ordres préférentiels.

Lien entre le meilleur prix du marché et la position des teneurs de marché

Ho et Stoll (1983) montrent que le teneur de marché en position initiale la plus large a un avantage concurrentiel de vente puisqu'il cote le plus petit prix de vente du marché. TIexécute ainsi le flux d'ordres publics. Les cotations choisies par les teneurs de marché sont, donc, dans ce cadre, des fonctions monotones décroissantes du niveau initial de leur stock d'actif risqué. Hansh, Naik et Viswanathan (1998) déduisent du résultat de Ho et

Stoll (1983) un lien test able entre le positionnement relatif des cotations des teneurs de marché et leur niveau de stock, qu'ils expriment ainsi :

(El)

où le niveau du prix de vente O-ï choisi par le teneur de marché Di par rapport au prix

de vente le plus faible du marché (gn affiché par le teneur de marché le plus long DT est

une fonction décroissante (F) de la différence existant entre le niveau de stock de Di et celui plus important de DT•

Hansh et al (1998) testent la relation (El) sur la bourse de Londres et trouvent que seuls 59% des ordres publics entrant sont exécutés par les teneurs de marché en position extrême (et non 100% selon la prédiction de Ho et Stoll (1983)). Hansh et al. en concluent que cette invalidation partielle du lien empirique pourrait s'expliquer par l'importance des ordres préférentiels atteignant 71% des transactions totales en 1995, qui ne sont pas pris en compte dans l'équation (El).

Comment les ordres préférentiels modifient-ils le lien entre cotations et po- sitions ?

Comme le montre la Proposition 7, le meilleur vendeur noté DT est celui qui a la po-

sition la plus longue une fois seulement pris en compte le volume des ordres préférentiels :

(fT - KT)fT désigne la position initiale de DT et KT son flux d'ordres préférentiels.

Plus explicitement, en s'appuyant sur l'équation (El) de Hansh et al. (1998), un lien testable entre le positionnement relatif des cotations choisies par les teneurs de marché, leur niveau de stock et le volume du flux d'ordres préférentiels devrait être le suivant:

(E2)

Ki et KT sont les flux d'ordres préférentiels exécutés respectivement par le teneur de

marché Di et par le teneur de marché DT• Notre modèle suggère, en effet, de corriger le

niveau de stock initial des teneurs de marché par le volume net des ordres préférentiels afin de tester une relation sur le positionnement des cotations des teneurs de marché en

fonction de leur position et des ordres préférentiels.

Ordres préférentiels et gestion de la position

On peut, en outre, dégager deux autres implications testables liées au résultat concer- nant les probabilités d'exécution des teneurs de marché. En effet, on a montré que le teneur de marché non privilégié a une probabilité d'exécuter les ordres publics croissante avec le volume des ordres préférentiels reçus par son concurrent, tandis que celui-ci a une probabilité d'exécution décroissante. Le teneur de marché privilégié peut moins utiliser ses cotations pour contrôler sa position et orienter le flux d'ordres publics dans une direction qui lui est favorable puisqu'il doit exécuter les ordres préférentiels quelle que soit sa posi- tion. En revanche, son adversaire a une plus grande chance d'exécuter les ordres publics et devrait donc réviser sa fourchette de prix plus souvent de manière àmieux contrôler sa position (après l'exécution des ordres publics). Par conséquent, on devrait observer une tendance de retour àla moyenne du niveau du stock des teneurs de marché peu ou pas privilégiés plus élevée ainsi qu'un coefficient d'auto-corrélation du flux d'ordres plus élevé (en valeur absolue) que pour les teneurs de marché avec de larges volumes d'ordres pré- férentiels15• Ces derniers devraient, en revanche, enregistrer plus d'échanges entre teneurs

de marché ("interdealer tmding"), afin de gérer leur stock (en effet, on rappelle que, dans le modèle de Ho et Stoll (1983), les teneurs de marché réalisent un arbitrage entre la cer- titude de pouvoir dénouer une position en échangeant directement avec un autre teneur de marché et la probabilité de recevoir des ordres publics leur permettant de contrôler activement leur position16).

I5La tendance au retour à la moyenne du stock et le coefficient d'auto-corrélation d'ordre 1 du flux d'ordres sont des mesures standards dans la littérature empirique concernant la validation du paradigme de la position (inventory model) : voir, par exemple, Madhavan et Smidt (1991), Hasbrouck et Sofianos

(1993), Lyons (1995), Hansh et al. (1998), ou Naik et Yadav (2002).