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Accord de partage d'informations

performance des marchés financiers

1.2.1 Accord de partage d'informations

On considère le marché d'un actif risqué qui s'échange contre un actif sans risque (aussi appelé numéraire), supposé de rentabilité nulle. La valeur liquidative de cet actif est une variable aléatoire notée

v

qui est normalement distribuée de moyenne J1. et de variance O'~, normalisée à 1. L'échange de l'actif risqué s'effectue après que les participants ont transmis leurs ordres au marché, suivant une séquence similaire àcelle du modèle de Kyle (1985). En d'autres termes, la valeur finale de l'actif risqué est révélée publiquement à la date 2 et l'échange de titres est réalisé à la date 1, date à laquelle les agents adressent également leurs ordres aux teneurs de marché.

Les participants

Sur ce marché, on dissocie les teneurs de marché, qui exécutent le flux d'ordres, et les investisseurs qui transmettent ces ordres. Parmi ces derniers, on distingue trois types d'intervenants: (i) les investisseurs extérieurs non informés; (ii) N spéculateurs dits fon- damentaux et (iii) un spéculateur non fondamental, noté B. Les ordres au mieux sont les

ordres considérés dans ce modèle: ce sont des fonctions du seul ensemble d'informations du donneur d'ordres (i.e. les ordres sont non conditionnels au prix d'équilibre).

(i) Les investisseurs non informés

Ces investisseurs sont dépourvus d'information privée et échangent pour des raisons de liquidité ("liquidity tmders"). Leur stratégie de placement des ordres n'est pas modé- lisée. On suppose que leur demande agrégée est une variable aléatoire exogène notée

x

indépendante de

v (x

..1

v),

de moyenne nulle et de variance O'~, et telle que

x

=Xo

+

XB

(avec Xo ..1

v

et XB ..1

v).

Les deux composantes Xo et XB sont supposées normalement et indépendamment distribuées, de moyenne nulle et· de variances respectives O'~ et O'~. L'explication de la décomposition de la demande de liquidité en deux flux distincts est donnée dans le paragraphe (iii).

(ii) Les spéculateurs fondamentaux

Ces N investisseurs détiennent une information privée concernant la valeur liquidative de l'actif risqué. Pour des raisons de simplicité, comme dans Kyle (1985), on suppose que ces spéculateurs observent parfaitement la réalisation de

v.

(iii) Le spéculateur non fondamental

Le spéculateur non fondamental Best supposé détenir une information sur la demande en liquidité émanant des investisseurs non informés. Plus précisément, il observe la réa- lisation de la composante XB. Le moyen d'acquérir cette information importe peu dans ce modèle. Cependant, on peut supposer que ce spéculateur est un intermédiaire ayant la possibilité d'agir comme agent (en compte client) ou en principal (en compte propre)5. Dans ce cas, la composante XB peut être interprétée comme le flux d'ordres placés par les investisseurs non informés auprès de cet intermédiaire qui doit les transmettre au marché pour leur compte. Notons que O'~ mesure le volume moyen du flux d'ordres non informa- tionnels 'intermédiés'6 par B7. Par la suite, on normalise la variance de la demande totale

5Cet intermédiaire est communément désigné sous le terme anglo-saxon de broker-dealer : un agent

qui a un double rôle de courtier et de négociateur.

6Intermédier est couramment utilisé pour qualifier l'action d'intermédiation jouée par un courtier sur le marché.

7XB est effectivement le flux d'ordres signé. D'où, le volume des ordres est mesuré par IXBI, ou, de

en liquidité

0";

à 1. La variance

0";

s'écrit:

2 2 2 1

O":r;

=

O"B

+

0"0

= .

Ainsi, O"~ peut Siinterpréter comme la fraction du volume total des ordres passés par

les investisseurs non informés qui est effectivement intermédiée par l'agent B. La fraction restante du flux de ces ordres (O"~) est placée par d'autres intermédiaires agissant pour le compte de leurs clients.

n

est intéressant de noter que plus O"~ est large (proche de 1), plus l'information non fondamentale détenue par B est de bonne qualité (moins il lui reste d'incertitude sur la demande totale en liquidité x).

Cet intermédiaire place aussi des ordres en compte propre simultanément avec ceux passés pour le compte de ces clients. Par conséquent, B a un double rôle d'agent (source de son avantage informationnel) et de spéculateur, dans la mesure où il peut traiter en compte propre. Cette pratique de marché, plus connue sous l'appelation de dual tra-

ding,est permise sur certaines places boursières8. Roell (1990), Sarkar (1995) ou Fishman

et Longstaff (1992) analysent théoriquement les effets d'une telle pratique. Dans ces ar- ticles, les spéculateurs, pratiquant le dual trading, placent simultanément des ordres pour le compte de leurs clients et des ordres pour leur compte propre9• Les ordres placés en

compte propre dépendent du flux d'ordres reçu de leurs clients. Nous obtenons le même résultat. Toutefois, à la différence de ces auteurs, on étudie la possibilité que ces agents partagent leurs informations privées avec d'autres investisseurs différemment informés.

(iv) Les teneurs de marché

Les teneurs de marché sont supposés neutres vis-à-vis du risque. Ils observent le flux d'ordres agrégés, noté

6.

Mais ils ne peuvent pas distinguer les différentes composantes

passés par le spéculateur B pour le compte de ses clients est E(x~)

=

O'~.

8Par exemple, sur Euronext, les agents qualifiés du double rôle de négociateur et courtier peuvent placer des ordres au mieux ouàcours limité pour le compte de tiers ou pour leur propre compte. Ce type de pratique de marché est également autorisée sur le Nasdaq, la Bourse de New York, ou sur les marchés dérivés comme le CBOT ou le CBOE.

9Madrigal (1996), à qui sont empruntés les termes d'information 'fondamentale' versus 'non fonda- mentale', étudie également l'impact de telles pratiques.

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r

Groupe HEC

de ce flux d'ordres. TI ne sont donc pas en mesure d'inférer parfaitement l'information détenue par les N

+

1 investisseurs informés. Ils déterminent le prix d'exécution du flux d'ordres en fonction de leurs anticipations sur la valeur finale de l'actif risqué.

Par souci de simplicité, on suppose qu'un seul participant observe l'information non fondamentale XB, tandis que plusieurs spéculateurs connaissent l'information fondamen- tale ii. Si l'on considérait un modèle avec plusieurs informés non fondamentaux, chacun observant une partie de la demande en liquidité émanant de leurs propres clients, et que les spéculateurs partagent parfaitement leurs informations, alors les conclusions seraient qualitativement similaires àcelles obtenues dans le cas d'un seul spéculateur non fonda- mental, mais analytiquement, la résolution serait plus complexelO•

L'accord de partage informationnel

Le partage d'informations se déroule suivant la séquence suivante:

(i) avant même de recevoir toute information privée (ex ante), le spéculateur non fonda- mental B décide d'entrer ou non dans un accord de partage d'informations avec un des spéculateurs fondamentaux, noté S. Cet accord de partage décidé ex ante est irrévocable;

(ü) Après avoir observé son information, mais juste avant de traiter sur le marché à la date 1, le spéculateur B transmet son information non fondamentale à S en émettant le

signal suivant:

De même, le spéculateur S révèle son information privée fondamentale à B sous la forme du signal suivant:

Les deux variables aléatoires 17et € sont indépendamment et normalement distribuées, de moyennes nulles et de variances respectives O"~ et O"~. L'inverse de O"~ (resp. O"~) est la précision avec laquelle le spéculateur B (resp. S) révèle son information non fondamentale

lOSupposer plusieurs spéculateurs non-fondamentaux rend l'analyse plus complexe, notamment parce que l'on doit déterminer le nombre de ligues qui se forment â l'équilibre (chaque ligue étant formée par deux spéculateurs différemment informés). Or, ce nombre peut être plus faible que le nombre maximum de ligues possibles.

à S (resp. à B). Plus la variance du bruit

il

est élevée, moins le signal donné par le spéculateur B à S est précis, et moins le contenu informationnel de ce signal a de la

valeur pour le spéculateur S (et, symétriquement, pour la précision du signal envoyé par Set contrôlée par CT~). Les caractéristiques de l'accord de partage informationnel (CT~, CT~)

sont fixées définitivement par les termes de l'accord ex ante définis en (i).

Deux situations polaires sont intéressantes àanalyser. La première est celle du partage d'informations parfait (CT~ = CT~ = 0). La seconde situation est celle où il n'y a pas

d'échange d'informations (CT~

=

CT~

=

00). Entre ces deux cas, le partage d'informations

est dit imparfait (puisque au moins un des deux spéculateurs ne révèle qu'imparfaitement son information: il ajoute un bruit). Les ensembles d'informations des spéculateurs B et S à la date 1 sont formés de leur propre information privée, du signal donné et du signal reçu, soient YB =(XB, X,

v)

et Ys = (il,

v, x)

respectivement.

Dans la réalité, ce type d'accord de partage informationnel survient entre deux parties ayant des intéractions fréquentes et durables. La décision de partager son information privée est donc fondée sur des bénéfices de long terme. C'est la raison pour laquelle nous considérons que la décision du partage des informations intervient ex ante (avant même d'observer toute information privée) et non ex post comme dans Postlewaite, Okuno- Fujiwara et Suzumura (1990). L'approche adoptée est standard (voir, par exemple, Ben- veniste, Marcus et Wilhem (1992)). Un accord de partage d'informations existe si et seulement si il existe un couple (CT~, CT~) tel que les profits espérés des spéculateurs B et

S soient conjointement plus élevés lorsqu'ils partagent leurs informations privées. Dans la

section 3, nous identifions l'ensemble des paramètres pour lequel les spéculateurs décident de partager leurs informations.

On remarque qu'il ne s'agit pas de révélation informationnelle unilatérale de la part des spéculateurs en position oligopolistique comme dans Vivès (1984) ou Gal-Or (1985), mais bien d'un accord bilatéral d'échange de type quid pro quo, comme dans Kirby (1988) : le spéculateur B ne révèle que si S lui révèle son information privée.

Remarques

Cet essai se concentre sur la possibilité d'un partage informationnel et non sur la mise en oeuvre d'un tel accord. En particulier, on ne traite pas des problèmes de contrôle. En ce sens, les hypothèses de cet essai sont conformes aux articles traitant de la vente d'in- formation fondamentale dans lesquels on suppose qu'il est possible de vérifier (au sens où la théorie des contrats utilise ce terme) la qualité et la véracité de l'information venduell .

On suppose aussi que l'existence et les termes de l'accord de partage informationnel (O"~

,O"~) sont connaissance commune (connus de tous les participants, y compris des teneurs

de marché). Cette hypothèse est aussi standard dans les modèles de vente d'information fondamentale.

1.2.2

L'équilibre

Dans cette section, on résout l'équilibre du jeu d'échange à la date 1, étant données les caractéristiques d'un accord de partage d'informations (O"~, O"~) entre les deux spécu- lateurs B et S. Puis, étant donné l'équilibre d'échange, la section 1.3 déterminera s'il est optimal ou non pour les agents d'échanger effectivement leur information privée à la date

o

(résolution du modèle en deux étapes).

A la date 1, les spéculateurs B et S placent, pour leur compte propre, des ordres sur le marché notés, respectivement, QB (YB) et QS (YS). Quant aux spéculateurs exclus de la ligue informationnel1e, ils passent des ordres conditionnellement à leur information privée

(Yi ={ii}), qui sont notés Qi(ii), où i=1,.u,N. Le flux des ordres agrégés parvenant aux

teneurs de marché en concurrence est donc :

i=N

0=

L

Qi(ii)

+

QS(ys)

+

QB(YB)

+x.

i=2

Etant donné que les teneurs de marché sont neutres vis-à-vis du risque et qu'ils observent la même information privée

{O},

la concurrence en prix àlaquelle ils se livrent, les contraint

11Plusieurs articles de recherche analysent comment les contrats de vente peuvent être conçus de ma-

nière à inciter le vendeur/analyste àtransmettre une information vraie [voir Allen (1990), Bhattacharya et Pfleiderer (1985) ou Biais et Germain (2002)]. Les effets de réputation peuvent aussi aider àmaintenir des accords de partage d'informations [Benabou et Laroque (1992)].

finalement à coter des prix tels que leurs profits espérés àl'équilibre soient nuls (résultat standard de la concurrence à la Bertrand). Les teneurs de marché déterminent donc un prix d'équilibre12 égalàl'espérance de la valeur fondamentale du titre, conditionnellement

à

{a}:

p(O) =E(v 1

a

=0). (1.1)

Un équilibre bayésien parfait est défini par les stratégies de placement des ordres des agents QS(.), QB(.), Qt), i = 2, ...,N et une fonction de prix concurrentielle p(.) telles que (i) la stratégie de chaque agent est une meilleure réponse àla stratégie de ses concurrents, et (il) la stratégie en prix des teneurs de marché est donnée par l'équation

(1.1). Etant données les caractéristiques (a~,a~) du contrat de partage d'informations liant les spéculateurs B et S, ce jeu admet un unique équilibre linéaire.

Lemme 1 : Le jeu d'échange admet un équilibre linéaire :

p(O) =JL

+

ÀO,

QS(ys) =al(v - JL)

+

a2(v - JL)

+

a3

x,

. Qi(V) =a'(v - JL), i=2, ... ,N QB(YB) =b1xB

+

b2x

+

b3(v - JL), (1.2) (1.3) (1.4) (1.5)

al

-

3 (u~

+

u~) À(2 (N

+

2) u~

+

3 (N

+

1) u~)' _u2 a2 - 11 À(2 (N

+

2) u~

+

3 (N

+

1) u~)' 2 as

-

-UB 3 (u~

+

U~)' a'

-

2u211

+

3u2e À(2 (N

+

2) u~

+

3 (N

+

1) u~)' bl - -1

2'

u2 b2

-

B 6 (u~

+

u~)' 2u2 bs 11

-

À(2 (N

+

2) u~

+

3 (N

+

1) u~)' et

2 2 6Ju~

(U~+

u~) (4 (N

+

1) ut

+

(12N

+

5) u~u~

+

9NU:)

À(ue, u'7)= ---;: ============

(2 (N

+

2) u~

+

3 (N

+

1) u~) Ju~ (4u~

+

9u~)

+

36u5 (u~

+

u~)

Conformément àl'intuition, les spéculateurs informés achètent (vendent) l'actif risqué lorsque leur anticipation sur la valeur future du titre est supérieure (inférieure) à son espérance non conditionnelle. Les coefficients al, a' et bs sont donc à valeur positive. L'information non fondamentale est une source de profits pour les informés dans ce modèle. En effet, les ordres passés par les demandeurs de liquidité exercent une pression temporaire sur les prix. Les spéculateurs informés B et S anticipent ces déséquilibres temporaires et en tirent avantage en vendant lorsque les demandeurs créent une pression à la hausse sur les prix (et inversement pour une pression à la baisse). Formellement, supposons que les spéculateurs fondamentaux observent l'information fondamentale suivante:

v

= p,. Supposons ensuite que les spéculateurs B et S s'échangent parfaitement leurs informations privées et que les demandeurs de liquidité intermêdiés par l'agent B passent des ordres d'achat. Ces ordres exercent sur les prix une pression à la hausse, puisque les teneurs de marché ne peuvent pas savoir si le flux agrégé positif transmis au marché résulte d'une

bonne information fondamentale sur la valeur du titre échangé ou de chocs de liquidité non informationnels, àla différence des deux spéculateurs parfaitement informés. Anticipant le décalage des prix de transaction, les deux ligueurs passent des ordres de vente pour profiter de cette hausse des prix temporairel3. Symétriquement, ces deux spéculateurs passeront,

en principal, des ordres d'achat lorsqu'ils anticipent un décalage des prix temporaire à la baisse, provoqué par le passage d'ordres de vente des investisseurs non informés. C'est la raison pour laquelle les coefficients bl et a3 sont négatifs. A l'instar de Roell (1990),

on remarque que les deux spéculateurs fournissent, en partie, la liquidité demandée par les clients de B (bl et a3 sont à valeur négative), ce qui réduit la pression sur les prix

qu'exerce le flux d'ordres agrégés moins important àabsorber.

Bénéfices et coftts du partage informationnel

L'exemple précédent montre que les spéculateurs peuvent tirer profit à la fois de l'in- formation fondamentale et de l'information non fondamentale, ce qui les incite àmettre en commun leurs informations. Cependant, partager l'information privée engendre également un coût pour chacun des deux agents. En effet, comme on le montre dans le paragraphe suivant, les deux spéculateurs déprécient la valeur de leur information privée dès lors qu'ils la partagent.

Avant de partager son information, le spéculateur B est monopoleur sur son informa- tion privée : B est le seul agent à connaître (la réalisation de) la demande en liquidité provenant de ses clients, Xb. Si ce spéculateur ne partage pas son information (lT~=+00),

alors B satisfait la moitié de la demande en liquidité de ses clients (puisque bl

=

-1/2).

Supposons maintenant une transmission parfaite de l'information privée à l'autre spécu- lateur S (lT~

=

0). Désormais la demande en liquidité des clients va être partiellement suppléée à la fois par l'agent B et par son concurrent, le spéculateur S. Dans ce cas,

B ne fournit plus que le tiers de la demande de ses clients et S un autre tiers (puisque

bl

+

b2 = -1/3 et a3 = -1/3 lorsque lT~ = 0). L'échange d'informations a donc deux

13Des chocs de liquidité non informés ne décalent les prix que temporairement, à la différence de l'arrivée d'une information fondamentale qui va décaler les prix de transaction de façon permanente (voir, par exemple, Keim et Madhavan (1996) ou Riva (2000».

effets: (i) une réduction de la taille des ordres placés par l'agent B; (ü) une diminution du volume des ordres non informationnels qui doivent être exécutés par les teneurs de marché. En conséquence, pour une fonction de prix donnée (àÀ fixée), les besoins agrégés en liquidité étant moindres, les prix réagissent moins14, ce qui réduit d'autant plus les

profits de B. C'est précisément pour contrebalancer l'effet de la diminution de la pression temporaire sur les prix que le spéculateur B réduit la taille des ordres qu'il passe. Un rai- sonnement identique peut être tenu pour comprendre le coüt supporté par le spéculateur

S lorsqu'il partage son information. Effectivement, il déprécie la valeur de son information

fondamentale dès qu'il la révèle au spéculateur B. TI est contraint de réduire la taille de ses ordres afin de tenir compte des ordres désormais placés par B qui traite en fonction de cette nouvelle information, d'où les signes opposés entre a2 (qui prend en compte l'in-

formation révélée à B) et al (la stratégie de placement des ordres du spéculateur S s'il

ne partageait pas son information).

En résumé, le partage d'informations permet àchacun des membres de la ligue infor- mationnelle de traiter sur le marché en fonction d'une nouvelle information et d'en tirer profit. Mais, les spéculateurs n'acquièrent cette nouvelle information que si eux-même transmettent leur propre information en échange (condition de l'accord de partage). Or, dévoiler sa propre information en déprécie sa valeur, ce qui diminue le profit. Toutefois, même si le partage d'informations génère des coûts pour chacun des ligueurs, nous mon- trons dans la section suivante que les bénéfices créés par le partage d'informations peuvent plus que compenser ses coûts.

1.3

Un partage d'informations est-il possible?

Cette section étudie des cas où partager des informations privées peut s'avérer mu- tuellement profitable pour les deux spéculateurs. Cette section débute par l'analyse de la

14Afin de décomposer le plus simplement les effets du partage d'informations, on suppose dans ce

paragraphe que la variable À est fixée. Mais, la pente de la fonction de prix cotée par les teneurs de marché est affectée par le partage d'informations. Comme on le montre dans le Lemme 2, le partage d'information non fondamentale entre les deux spéculateurs augmente l'exposition des teneurs de marché au risque d'anti-sélection, qui réagissent en détériorant leurs conditions de transaction (À augmente). L'augmentation deÀ mitige donc la perte de profit provoquée par la diminution de pression sur les prix.

profondeur de marché (mesurée ici par À-1 )15. L'existence de partages d'informations im-

plique plusieurs effets qu'il est utile de décomposer, l'impact sur la profondeur de marché des caractéristiques de l'accord (lT~, lT~) étant un prérequis à l'analyse finale.

Lemme 2 : La précision des informations échangées, contrôlée par (lT~,lT~), a un impact

sur la profondeur du marché mesurée par À-1 :

1. La profondeur du marché s'améliore avec la précision de l'information transmise par le spéculateur S au spéculateur B : 8À/8lT~ > 0;

2. La profondeur du marché se détériore avec la précision de l'information révélée par le spéculateur B : 8À/8lT~ > O.

On observe que la qualité de l'information transmise par le spéculateur B au spé- culateur S amplifie les réactions des teneurs de marché (la pente de leur fonction de prix À augmente), c'est-à-dire que plus l'information non fondamentale est dévoilée avec

précision, plus elle dégrade la liquidité mesurée ici par la profondeur du marché À-1.

Intuitivement, la révélation de l'information non fondamentale accroit le rôle des deux spéculateurs (B et S) en tant que fournisseurs de la liquidité demandée par les clients de

B. Effectivement, notons QT

=

QB

+

QS la taille du flux total des ordres passés par· B et S, et analysons la taille espérée de ce flux conditionnellement àXB =XB,

La taille du flux d'ordres agrégés passés en compte propre par les spéculateurs B et S

sur leur connaissance de xB est croissante avec la précision de l'information transmise par

B (lb1

+

b2

+

a31 augmente lorsque lT~ tend vers 0). Or, plus la taille de ce flux d'ordres

est large, plus il absorbe les ordres transmis par les clients du spéculateur B (mesurés par x B), ce qui réduit le rôle des teneurs de marché en tant que fournisseurs de liquidité. On peut dire que l'échange d'information non fondamentale 'aspire' une partie des ordres provenant des investisseurs non informés. Cet effet d'aspiration augmente l'exposition

15La profondeur du marché mesure le volume des ordres nécessaire pour faire varier les prix d'une unité.