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CHAPITRE VI CONCLUSION L’ELEVEUR FACE A L’INNOVATION = ELEVEUR FACE AU

Carte 8 Pratiques de commercialisation du lait des UP

3.2.2 Description des types de systèmes de production

Les types de systèmes de production identifiés sont diversifiés, de l’élevage traditionnel à l’élevage en voie d’intensification, avec des types intermédiaires. Les caractéristiques des types de systèmes de production sont présentées dans le Tableau 17. Cette description est complétée avec les variables caractéristiques de la commercialisation du lait des UP enquêtées (Tableau 15, Tableau 16).

o Type d’exploitation 1 : Agriculteurs, avec faible présence de l’élevage

Ce type de système de production est à prédominante agricole et représente 20% des UP enquêtées. Elles ont une grande emprise foncière. L’élevage y est peu développé. Le nombre de vaches par UBT est peu élevé, traduisant une faible vocation laitière du troupeau.

Ces UP cultivent de grandes surfaces. Elles pratiquent des cultures à double fonction, alimentation humaine et animale (niébé surtout). Elles n’utilisent qu’une petite fraction de leurs résidus de culture pour alimenter les bovins, et n’ont guère recours aux achats d’aliments concentrés. L’alimentation est donc basée sur des résidus de culture et le pâturage. Le faible niveau des investissements (alimentation, entretien) détermine la faible production laitière du troupeau.

La commercialisation du lait se fait toute l’année à des revendeurs ou directement aux consommateurs urbains. Une seule exploitation de ce type vend du lait uniquement en hivernage aux mêmes débouchés.

o Type d’exploitation 2 : Agriculture dominante et élevage naisseur

Ce type de système de production représente 18% de l’échantillon enquêté. Ce système de production regroupe les UP ayant beaucoup thésaurisé les revenus agricoles dans le bétail. Le rapport de vaches présentes par le nombre d’unité de bétail tropical montre un troupeau de type naisseur. Celui-ci a pour fonctions essentielles l’épargne, la force de travail et la production de fumure organique. L’élevage est donc relativement intégré à l’agriculture. Ce système de production dispose de terres cultivées suffisantes pour entretenir le nombre d’UBT. Cependant, il utilise une faible part des résidus de culture, et achètent peu de concentrés. Ainsi, comme dans le type 1, le pâturage constitue la base de l’alimentation du troupeau.

Le faible volume de lait vendu est à mettre en relation avec le peu d’investissements consentis dans la conduite du troupeau (alimentation, protection sanitaire). Les pratiques de commercialisation du lait varient beaucoup entre les UP. La plupart des UP produisent et vendent du lait toute l’année, mais les débouchés sont divers : revendeurs, consommateurs urbains et ruraux, laiterie. Certains éleveurs ne commercialisent du lait que de façons saisonnières, seulement au retour du troupeau de la transhumance (saison sèche, hivernage).

o Type d’exploitation 3 : Polyculture et élevage laitier

Ce type de système de production regroupe 35% de l’échantillon. Ce sont des systèmes mixtes de polyculture et élevage laitier. Le rapport superficie de terres cultivées par UBT est faible, avec une bonne valorisation des résidus de culture (ramassages, stockage et distribution comme fourrages). Les exploitations achètent peu d’aliments concentrés, mais chacune cultive des légumineuses fourragères dont les fanes sont utilisées pour la supplémentation des animaux.

Le troupeau, à orientation laitière et de taille moyenne, bénéficie d’une faible protection contre les maladies usuelles et les parasitoses internes.

La vente de lait se fait tout au long de l’année par la plupart des UP. Comme dans le type 2, elle est saisonnière chez certains éleveurs, régulée par les transhumances du troupeau. Les revendeurs drainent la plus grande partie des ventes. Le reste est livré à la laiterie ou en direct aux consommateurs urbains et ruraux. Les volumes moyens des ventes de lait sont relativement faibles, mais réguliers.

o Type d’exploitation 4 : Élevage traditionnel

Les UP de ce type représentent 17% de l’échantillon. L’élevage occupe une place importante dans les systèmes de production. Le rapport des vaches présentes par UBT indique un troupeau de type naisseur ayant pour fonction première l’épargne. Au delà de ce rôle fondamental, le troupeau à travers la vente de lait et d’animaux, contribue pour une part importante aux revenus des familles. Il s’agit de systèmes peuls, avec une forme spécifique d’intégration agriculture-élevage. Les effectifs du cheptel sont élevés, et les surfaces cultivées réduites. Ils ont acquis les terres de cultures avec les autochtones des villages proches de la ville. Ils pratiquent la culture céréalière pour l’alimentation de leur famille.

Ce type se caractérise par la production de fourrages cultivés, l’utilisation accrue des résidus de culture, l’achat d’aliments concentrés. De plus, le troupeau reçoit des soins sanitaires systématiques (déparasitages internes et externes, vaccinations …).

La vente de lait concerne relativement de gros volumes. Elle est pratiquée tout au long de l’année, sauf pour certains éleveurs qui pratiquent la transhumance de saison sèche. La vente se fait à des revendeurs, ou directement aux consommateurs urbains et par livraison à la laiterie.

o Type d’exploitation 5 : Élevage en voie d’intensification

Ce type représente seulement 10% des UP enquêtées. Ce système est à orientation laitière marquée, et se caractérise par un niveau d’intensification et de technicité élevé. C’est le type des éleveurs dits « technicistes/innovateurs », fortement capitalisés et dotés en foncier.

L’alimentation est caractérisée par l’utilisation des résidus de culture et de fanes de légumineuses produites sur l’exploitation. Les éleveurs achètent aussi de grandes quantités de concentrés.

Ces troupeaux comportent un noyau laitier, faisant l’objet d’une attention toute particulière pour l’alimentation et la prévention sanitaire. L’éleveur peut posséder un autre noyau, de plus grande taille, géré de façon beaucoup plus extensive par le berger. Le noyau laitier fait l’objet de pratiques d’amélioration génétique à travers l’insémination artificielle et/ou l’utilisation de taureaux croisés pour la reproduction (race montbéliard le plus souvent).

Les volumes journaliers de vente de lait sont importants. Toutes les UP commercialisent du lait en toute saison de l’année. Le type d’acheteurs change selon la localisation du troupeau. Le collecteur passe sur l’UP pour ramasser le lait ou le lait transporté par l’éleveur au domicile où le revendeur de la ville vient le prendre.

Tableau 17: Caractéristiques des types de systèmes d’exploitation d’élevage bovins dans la zone péri- urbaine de Sikasso Caractéristiques Type 1 : Agriculteurs, avec faible présence de l’élevage Type 2 : Agriculture dominante mais présence d’un élevage à orientation naisseur Type 3 : polyculture et élevage à orientation laitière Type 4 : élevage traditionnel dominant le système de production Type 5 : élevage en voie d’intensification Fréquence * 20 18 35 17 10 SAU/UBT 1,40 0,40 0,50 0,11 0,65 SPFL (%exploit) 100 48 100 8 83 Vache / UBT 0,33 0,50 0,45 0,54 0,43 DAG (kg/UBT)** 201 (310) 58 (154) 388 (469) 256 (648) 1215 (558) DAC(kg/UBT)** 30 (51) 28 (79) 72 (92) 546 (797) 729 (532) IA (%exploit) 0 0 0 0 83 TA (Nbre) 0 0 0 0 2 FV 2 2 3 3 3

FDI (Nbre de fois) 1 1 1 2 2

LV (l/j) 3 6 5 11 21

Période vente TA/SP TA/SP/SS TA/SP/SS TA/SP TA

* : en pourcentage de l’échantillon enquêté.

3.3 Dynamiques de changements dans les systèmes d’élevage

laitiers péri-urbains de Sikasso

Les résultats présentés ici ont été obtenus par la méthode des analyses rétrospectives (voir chapitre 2). Il est décliné en trois thèmes extraits des résultats de l’histoire des unités de production :

• Des éleveurs dans un environnement changeant

Ici sont traités (i) les changements de l’organisation territoriale, (ii) les changements socio- économiques et (iii) les changements institutionnels.

• Cohérence d’évolution des systèmes d’élevage

Les types de systèmes de production sont décrits en fonction de leur évolution à partir d’une typologie fonctionnelle de «départ » aboutissant à une typologie « actuelle » et en reconstituant leur trajectoire d’évolution.

• Analyse transversale des changements et commercialisation du lait dans le bassin laitier

Les pratiques innovantes techniques, organisationnelles et commerciales sont identifiées à l’échelle du bassin laitier en fonction des facteurs du milieu, des intervenants et des stratégies de commercialisation.

3.3.1

Des éleveurs dans un environnement changeant

Les systèmes d’élevage évoluent dans un environnement agro-écologique et socio- économique en pleine mutation. La péjoration climatique, la croissance démographique, le développement agricole et l’urbanisation galopante des principales villes et secondaires, sont autant de facteurs ayant bouleversé les systèmes traditionnels de production agricoles. Sikasso ne fait pas exception à cette évolution. Ces changements de l’environnement contribuent au développement de nouvelles pratiques et stratégies chez les éleveurs, qui s’adaptent.

o Les éleveurs face aux changements de l’organisation territoriale

La saturation du terroir périphérique de Sikasso a essentiellement ses origines dans le développement de la culture de contre-saison. Les populations rurales riveraines, pour fournir le marché urbain en produits agricoles et diversifier leurs revenus, ont développé les cultures (pomme de terre, cultures maraîchères, plantations fruitières,..) en bordure et dans les bas- fonds. La présence permanente des cultures, a eu pour conséquence l’abandon de la divagation des animaux en saison sèche et la réduction de la mobilité.

La mobilité quelque soit l’amplitude est (i) fondée sur la recherche de pâturages et de points d’abreuvement ou (ii) cherche à éviter les dégâts sur les cultures, sources de conflits entre propriétaires de bovins et paysans. Certains propriétaires de troupeaux de grande taille, procèdent à l’allotement. En effet, la division du troupeau facilite l’accès aux enclaves de jachères encastrées entre les cultures en saison des pluies ou aux points d’eaux d’abreuvement des bas-fonds. L’adoption de telles pratiques nécessite l’organisation du travail. Ainsi les éleveurs font appel à (i) l’utilisation de la main d’œuvre de la famille, (ii) l’emploi de la main d’œuvre salariée permanente ou (iii) au recrutement de main d’œuvre occasionnelles pour juguler les pointes de travail.

Le changement le plus important est l’organisation de l’alimentation du troupeau. La constitution des stocks de résidus de cultures et l’achat d’aliments concentrés servent à pallier

le manque de pâturages en saison sèche. Chez les agropasteurs, le stockage de biomasse vise la production de fumure organique dont profite l’alimentation des animaux. Le troupeau par ses capacités de recyclage transforme les biomasses en éléments nutritifs pour la fertilisation des sols. Ce rôle central de l’animal dans le système de production agricole a fortement contribué aux changements des pratiques d’élevage des agropasteurs et l’intégration agriculture et élevage. La principale adaptation des systèmes d’élevage face aux changements du milieu de production est d’ordre organisationnel. Elle cherche à tirer meilleur profit des ressources pastorales par (i) l’adoption des pratiques d’allotement et de mobilité du troupeau et (ii) de valorisation des fourrages produits sur l’exploitation. Les éleveurs font souvent retour sur des techniques de valorisation abandonnées (traitements mécaniques par hachage des résidus de culture et parfois des traitements chimiques à l’urée).

En fait, le changement de l’environnement est un facteur d’innovation. Les difficultés d’accès aux ressources pastorales ont poussé les éleveurs à faire évoluer leurs pratiques empiriques en particulier chez les agropasteurs. Elles ont été favorisées par l’enclenchement de processus d’innovations techniques et organisationnelles pour s’adapter aux nouvelles conditions du milieu.

o Les éleveurs face aux changements socio-économiques

Plus de possibilités d’investissement

La culture du coton constitue la rentrée principale des revenus agricoles des familles paysannes. Elle est à l’origine de l’acquisition de bétail des familles (Bosma et al., 1996). La proximité de la ville avec son marché potentiel a tiré le développement des cultures de contre- saison. Les produits agricoles (pomme de terre, cultures maraîchères, arboricultures fruitières) des opérations de productions animales (embouche, lait et commercialisation du lait) représentent des sources de diversification des rentrées d’argents des ménages. Par ailleurs, la position frontalière fait de la ville de Sikasso une plateforme des échanges commerciaux insistant à l’investissement. Ainsi, les activités non agricoles occupent une place capitale dans le développement économique de la ville. Les sous-produits agro-industriels (graine de coton, tourteau de coton,…) et sous-produits agricoles de récupération (son de céréales….) font l’objet d’un commerce important.

Plus de possibilités de diversification des systèmes de production

Le développement du marché urbain offre de multiples possibilités (maraichage, mais aussi la culture fourragère …), en particulier sur des parcelles individuelles, le plus souvent appartenant aux femmes. Le développement de l’élevage du mouton de « case » par les populations urbaines se trouve à l’origine de l’implantation de parcelles de cultures fourragères (arachides, niébé) en contre-saison par les femmes rurales. Ces activités collectives ou individuelles rentrent en concurrence pour le travail sur les bovins de la famille. Du coup, le lait n’est pas forcément la meilleure opportunité et les soins apportés visent à assurer la survie du troupeau. Malgré tout ce qui précède, la vente du lait reste une entrée régulière d’argent des familles d’éleveurs. La collecte régulière parfois de faibles quantités (1- 2 litres) donne une priorité à la vente sur la consommation des familles. Cette production est autorisée par les parcours naturels sans apports d’aliments complémentaires.

o Changements institutionnels et techniques

L’action des institutions

Les services d’encadrement

Sur le plan institutionnel, la région de Sikasso a été handicapée par le fait que les politiques nationales d’élevage ne considéraient pas les zones soudaniennes comme des zones prioritaires d’élevage, mais seulement d’agriculture. Ces politiques étaient plutôt orientées vers le Sahel, dans la région administrative de Mopti en particulier. Il faut citer le programme de Développement de l’Elevage de Mopti (ODEM). Les actions de développement de l’élevage dans la zone cotonnière étaient inscrites au volet intégration agriculture-élevage de la CMDT. Ce n’est que tout récemment que ce point de vue a commencé à changer.

Toutefois la recherche agronomique a largement contribué à la mise au point des paquets techniques et des outils d’analyse, de suivi et de formation que la CMDT diffusera ensuite (Cf. infra). Les actions des services de productions animales et des services vétérinaires ont été plus sectorielles. Elles ont toujours concerné la maîtrise des épizooties et des trypanosomoses, par des campagnes annuelles de vaccination et de prévention. Elles ont ainsi favorisé l’accroissement des effectifs des bovins et la sédentarisation des troupeaux transhumants provenant de la zone sahélienne.

La CMDT

A l’inverse, l’institution qui a eu beaucoup de poids en ce domaine est la CMDT. Dès le début des années 80, la compagnie cotonnière a considéré l’appui à l’élevage comme prioritaire. Cette activité pouvait contribuer à l’augmentation de la production cotonnière et des rendements. L’élevage était essentiel pour assurer la traction animale. Elle a servi de cheville ouvrière du fonctionnement et de l’expansion des systèmes de culture du cotonnier (labour essentiellement). L’élevage permettait également de recycler la matière organique, et ainsi de mieux entretenir la fertilité des sols. La baisse de la fertilité des sols est l’une des principales contraintes pour la culture du cotonnier. Enfin, l’élevage offrait une possibilité de diversification des revenus pour les cultivateurs de coton (lait, embouche, frais de location de bœufs de labour, fumure….). La CMDT a ainsi crée un « volet élevage », avec comme finalité de sécuriser la culture du coton. Cette politique a placé l’animal au centre du développement durable des systèmes de production en zone cotonnière. Elle a joué un rôle capital dans l’intégration agriculture-élevage. Ainsi, l’élevage est passé d’une fonction d’épargne, pour devenir un outil de production et de diversification des revenus agricoles de familles. Aujourd’hui, l’élevage joue un rôle prépondérant dans la restauration de la fertilité des sols, dans les systèmes de culture continue qui caractérisent la zone.

La CMDT a ainsi vulgarisé les activités d’appui à l’élevage suivantes :

- Mise en place et animation d’un réseau dense de conseillers en élevage, dans toute la zone cotonnière ;

- Formations à l’élevage, dans les domaines suivants : o Traction animale ;

o Production et gestion de fumures organiques ; o Gestion des résidus de culture ;

o Gestion des parcours et des ressources pastorales ; o Aménagements des parcelles et des terroirs ; o Soins sanitaires ;

o Insémination artificielle et conduite de la reproduction. - Programmes d’amélioration génétique par l’insémination artificielle ; - Programmes d’appuis en santé animale ;

- Crédits de campagnes, pour l’achat d’aliments concentrés et de produits vétérinaires pour le bétail ;

- Crédits d’équipements en liens avec la Banque Nationale de Développement Agricole (BNDA).

La laiterie

Le réseau Danaya Nono, mis en place par l’ONG-CIDR, a développé au cours des années 90 un réseau de minilaiteries sur plusieurs sites du Mali. Toutes sont fondées sur le même modèle de fonctionnement :

- Fournir aux éleveurs un appui et un suivi technique ;

- Instaurer un système de crédit sur le lait pour faciliter l’accès aux intrants, équipements aux éleveurs et les investissements sur leur atelier laitier ;

- Mettre en place une unité de transformation simple, de petite taille, privilégiant l’efficacité technique et économique pour mettre en vente une gamme réduite de produits frais et très demandés sur le marché local ;

- La finalité est de maintenir un prix élevé au producteur : la laiterie est conçue et gérée comme un outil de développement local. Les éleveurs sont les principaux acteurs. Danaya Nono a obtenu de francs succès à Koutiala surtout, mais aussi à Niono, et dans une moindre mesure à San. En 1998 elle tente d’implanter une laiterie à Sikasso, toujours sur le même modèle. Trois ans plus tard, elle fermait ses portes. Le gérant a ensuite tenté de reprendre à son propre compte, sans succès. Actuellement, il a rouvert son établissement, mais ne fonctionne qu’avec peu de lait local. L’approvisionnement est completé avec de la poudre importée.

Les raisons de cet échec font toujours l’objet de discussions. Les éleveurs argumentent que le prix proposé était trop bas, ou trop changeant. Les appuis techniques n’étaient pas suffisamment convaincants à leurs yeux, notamment pour l’accès aux tourteaux. La laiterie de son côté rapporte des coûts de transport élevés, autant pour la collecte de lait cru que pour la vente de produits finis dans la ville. Elle pointe aussi un manque de motivation des éleveurs, et des difficultés d’écoulement (conservation des produits, impayés). L’analyse que j’ai conduite m’a montré que l’ensemble de ces arguments est justes. Elle dénote un manque de partenariat véritable et de confiance entre les acteurs. La laiterie Danaya Nono a succédé à la laiterie « Kénélait », initiative privée avec l’appui du FED (1991). Elle a fermé les portes après un an d’exercice. Les arguments avancés en son temps sont identiques à ceux tenus aujourd’hui par la laiterie Danaya Nono et ses partenaires.

Mais j’ai également observé que la filière sikassoise est caractérisée par l’existence d’un réseau d’intermédiaires très efficacement organisés. Ils sont bien adaptés aux caractéristiques spécifiques de l’offre et de la demande sikassoise (Figure 9). Il s’agit essentiellement de collecteurs à vélo qui parcourent toute la zone péri-urbaine, drainant à moindres coûts la

production de lait cru. Ces acteurs collectent même les petites quantités (0,5-1 litre), touchant ainsi tous les éleveurs. Pratiques contraires d’une laiterie qui se concentre sur les plus gros producteurs de lait et les groupements d’éleveurs. Les collecteurs pratiquent ensuite la vente directe, ou bien revendent à d’autres cyclistes spécialisés sur la vente au détail en ville. Le consommateur y trouve son compte car il est servi devant sa porte. Et surtout il achète un produit peu cher, car peu ou pas transformé (lait cru ou lait caillé) et dont le coût de transport est minimum. Dans ce système, le prix au producteur peut être plus élevé que celui d’une laiterie, de même le prix au consommateur peut être plus bas. La laiterie doit supporter des charges qui n’existent pas dans cette filière de collecte locale concurrente.

Face à la compétitivité, et l’adaptation que je qualifie de « souplesse » de cette filière artisanale aux réalités sikassoises, Kénélait et Danaya Nono n’ont pu suivre la même trajectoire de croissance des minilaiteries sur d’autres sites.

Néanmoins jusqu’à aujourd’hui les éleveurs d’un village continuent à vendre du lait à la laiterie, bien qu’elle ait depuis changé plusieurs fois de statut et de mode de fonctionnement (village de Zangaradougou). Mais dans ce cas il s’agit autant d’une action collective d’éleveurs, que d’une action de la laiterie.

L’action collective

En effet dans le cas de Zangaradougou, les éleveurs laitiers ont pu s’unir pour toujours réunir un volume suffisant de lait, de façon à intéresser la laiterie. Celle-ci a donc pu sécuriser son